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Le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS) vient de publier les résultats de l’enquête, réalisée à la fin du premier trimestre de l’année scolaire 2021-2022 en partenariat avec l’Unicef, sur la violence en milieu scolaire. Il s’agit pour l’instance outre d’établir un diagnostic de la situation de la violence en milieu scolaire, qui se limite aux actes violents survenant dans l’enceinte de l’établissement, de mesurer sa prévalence, d’identifier ses différentes formes et de déterminer les acteurs impliqués.
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L’enquête, menée dans 260 établissements scolaires, avec la participation de 13.884 élèves, représentant les trois cycles de l’enseignement, et complétée par une enquête qualitative menée dans 27 établissements, a abouti à l’identification et à la caractérisation de différentes formes de victimation signalées par les élèves. Quatre aspects ont été retenus par le Conseil, à savoir la violence verbale, la violence physique, la violence par appropriation et la cyberviolence.
Moqués, bousculés et volés
Il ressort du rapport thématique que les violences verbales apparaissent en tête de liste. Les moqueries, les sobriquets et les insultes sont en effet des pratiques courantes et banalisées dans les établissements scolaires. «Près d’un tiers des élèves du primaire déclarent avoir été affublés d’un sobriquet méchant ou méprisant, tandis que 55,9% des élèves du secondaire, principalement des garçons, affirment subir des moqueries à différents degrés», indique le rapport.
Les principaux auteurs des violences verbales et symboliques, insultes et moqueries notamment, sont les élèves, individuellement ou en groupe; viennent ensuite les enseignants. En effet, 33,5% des élèves indiquent que l’auteur des moqueries n’était autre que l’enseignant lui-même.
Les données de l’enquête qualitative collectées lors des focus groupes, précise le rapport, «attestent que la grande majorité des insultes, moqueries ou humiliations sont en lien avec des traits personnels de la victime : aspect physique, capacités physiques et intellectuelles, etc. Figurent également, des motifs en lien avec les parents, les origines sociales ou régionales, les capacités financières, etc.».
Les résultats de l’enquête révèlent par ailleurs, que «25,2% des élèves déclarent avoir été frappés et 28,5% bousculés dans les écoles primaires, tandis qu’au secondaire, 25,3% des élèves affirment avoir été frappés et 37,4% bousculés dans l’intention de leur faire du mal». Constat plus alarmant : 47,8% des élèves du primaire affirment avoir été frappés au sein des établissements par une maîtresse et/ou un maître.
Le rapport indique de plus que les proportions d’élèves ayant vécu ces deux types des violences varient globalement peu selon le genre. Il est néanmoins à noter que les garçons sont davantage confrontés que les filles à la violence physique de manière répétée.
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Dans un autre registre, les élèves font également l’expérience de violences d’appropriation telles que les vols simples, les vols avec extorsion et les détériorations d’objets personnels. Selon l’enquête, «ces types de violence sont assez répandus, touchant respectivement 27,1 et 38,6% des élèves du primaire et du secondaire. Les vols avec extorsion et les détériorations d’objets personnels touchent les élèves, filles et garçons, dans des proportions similaires».
Autre fait marquant que le rapport met en évidence : «61,7% des collégiens et 70,3% des lycéens affirment avoir constaté, plus ou moins fréquemment, des actes de vandalisme perpétrés par les élèves eux-mêmes sur le matériel de l’école».
Humiliés, voire même victimes d’harcèlement sexuel
Par ailleurs, la cyberviolence affecte certains élèves et est susceptible de se développer davantage vu l’accès de plus en plus généralisé aux outils numériques, alerte le Conseil. «Dans les écoles primaires, un nombre significatif d’élèves déclarent avoir été victimes de publications non désirées les concernant sur les réseaux sociaux (8,3 %). Quant aux élèves du secondaire, l’enquête révèle que 8,6 % d’entre eux déclarent être victimes de diffusion de leurs photos ou vidéos intimes sur internet ou par message texte».
Les garçons semblent plus touchés que les filles, et les élèves des établissements privés urbains globalement plus exposés à ce type de violence. À titre illustratif, l’exclusion d’un réseau social en ligne concerne 10% des garçons contre 5,7% des filles, précise le rapport.
Quels que soient le milieu ou le type d’enseignement secondaire, plus d’un élève sur quatre a déclaré avoir été victime d’un harcèlement à caractère sexuel (25,4%). Ils sont également 24,4%, soit quasiment un quart, qui affirment être au courant d’un cas d’élève, fille ou garçon, victime d’un harcèlement à caractère sexuel et 8,9% qui indiquent être au courant de plus de trois cas.
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Le document thématique révèle que 14,4% des élèves du primaire ont déclaré connaître un élève qui a subi du harcèlement sexuel, 3,7% ont affirmé qu’ils en connaissent deux, 3% en connaissent plus que trois et 78,8% ne connaissent personne. Selon ces élèves témoins, 57,2% d’entre eux ont déclaré que les principaux auteurs sont généralement des garçons de leurs écoles, 23,3% de ces élèves ont dit que les auteurs sont des filles de leurs écoles, 18,8% confirment que ce sont des intrus, 9,9% disent qu’ils sont des adultes travaillant dans l’établissement. Enfin, les maîtres et maîtresses ont été désignés comme auteurs respectivement par 5,1% et 1,8% des élèves témoins.
Autre constat alarmant : 20,4% des élèves du secondaire se disent avoir été harcelés par des enseignants. «Il est également constaté que 18,7% et 5,5% des élèves témoins du harcèlement sexuel ont confirmé respectivement que les enseignants et les enseignantes sont les auteurs de ce harcèlement sexuel», indique le CSEFRS précisant que 22,2% des victimes désginent un employé de l’établissement scolaire.
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Le châtiment corporel, une triste réalité
La question de la punition est une dimension importante du débat autour de la violence en milieu scolaire. L’enquête révèle que malgré l’interdiction formelle de la punition basée sur la violence, cette pratique est toujours présente dans les établissements scolaires au Maroc. 28% des élèves punis au primaire ont été victimes de coups infligés avec un objet ou un instrument. Au secondaire, 30,6% des élèves déclarent avoir été frappés avec un objet et 17,3% ayant déclaré avoir reçu des gifles et/ou des coups.
Ces résultats «réitèrent un constat déjà établi par les différentes études consacrées à la violence en milieu scolaire au Maroc ces vingt dernières années. Ces résultats renseignent également sur des faits globaux, qui se dégagent au-delà des variations induites par des facteurs multiples et caractérisent la pratique du châtiment à l’école», s’alarme le Conseil.
Un des constats, a priori inattendu, concerne le recours plus fréquent à plusieurs types de châtiment dans les établissements de l’enseignement privé par rapport à ceux du secteur public. 40,2% des élèves du privé affirment que leurs parents sont d’accord avec les punitions physiques
«Au cas où mon fils se comporte d’une manière inappropriée, l’enseignant peut le punir, il peut le taper doucement, il peut le gronder ou bien le menacer d’une punition physique s’il ne fait pas ses devoirs scolaires», a déclaré un parent d’élève du primaire.
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Les avis des parents d’élèves, tels que perçus par leurs enfants, concernant la punition et le châtiment corporel en particulier, semblent clairement tranchés entre une minorité qui s’oppose à de telles pratiques et une majorité qui continue à les légitimer. L’affirmation «mes parents sont d’accord pour que les enseignants puissent me frapper si je ne suis pas sage» a été proposée aux élèves du primaire. Sur la base de leurs réponses, presque un parent sur deux (49,7%) semble accepter que leurs enfants soient punis physiquement par les enseignants.
Plus ambigu : les données de l’enquête qualitative confirment que les punitions sont perçues comme étant justes par une majorité d’élèves du secondaire. À titre d’exemple, un lycéen a déclaré : «Je pense que le non-recours au châtiment a entraîné beaucoup de comportements déviants soit au sein de l’école ou au sein de la société». Le Conseil note néanmoins, qu’il est difficile de distinguer, dans les propos naturellement contrastés des élèves, l’acceptation de la punition et la peur de la dévoiler.
Une violence qui demeure dans l’ombre
Si le rapport thématique du CSEFRS met en avant les efforts législatifs en matière contre toute forme violence à l’école ainsi que la mise en place d’un protocole d’enquête du département de Chakib Benmoussa, il déplore cependant un laisser aller général. «Il y a des violences mises sur le compte de la normalité puisque considérées “banales”, telles que les insultes. Or, les insultes laissent des traces sur la psychologie de l’enfant qui en est victime», peut-on lire sur le document.
Pour le Conseil, le problème majeur dans les écoles marocaines réside dans les agressions mineures à grande fréquence. «Ces faits mineurs peuvent paraître en grande partie sans gravité, et qu’il ne faudrait pas dramatiser tout conflit dans un groupe d’élèves ou de jeunes. Ces violences mineures doivent pourtant être prises au sérieux, notamment en présence de récidive», indique l’institution.
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Le Conseil s’insurge par ailleurs du fait que peu de responsables signalent les actes de violence de peur que cela ne vienne entacher ou encore discriminer leur établissement. La plateforme «Marsad», lancée par le ministère de l’Éducation nationale pour enregistrer les cas de violence dans les écoles, est d’ailleurs méconnue par 75,9% du personnel, note le rapport.
«Ainsi, certains actes de violence pourraient passer sous silence: parfois graves, et infligés aux élèves, tels que le châtiment corporel avec un tuyau ou plus grave encore, le harcèlement sexuel», déplore le rapport.
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