Accueil / Société

Vacanciers tués à Saïdia : entre faits contestés, actions judiciaires et dénonciations

Temps de lecture

Un jet-ski © DR

L’affaire des deux vacanciers, tués en mer par des garde-côtes algériens le 29 août dernier dans une zone frontalière entre le Maroc et l’Algérie, demeure au cœur de l’actualité. Une semaine après cet assassinat, qui s’est produit dans un contexte de rupture de dialogue entre Rabat et Alger, l’affaire continue d’alimenter les réactions politiques et enregistre de nouveaux développements judiciaires. Les détails.

Des vacanciers franco-marocains en jet-skis, naviguant près de Saïdia, ont été pris pour cible par des garde-côtes algériens. Bien qu’Alger reconnaisse « l’incident », elle avance que les actions dangereuses des jet-skis ont motivé l’intervention. De leur côté, les proches des victimes envisagent de porter plainte en France, invoquant des accusations sévères. Le CNDH, quant à lui, s’élève contre cet acte, y voyant une transgression manifeste du droit international.

Au total, ils étaient quatre. Bilal Qissi, Franco-marocain, fait partie des deux victimes. Son corps a été découvert par un pêcheur et a été inhumé la semaine dernière. Quant à Abdelali Mchiouer, Marocain résidant en France, son sort est encore indéterminé et sa famille attend toujours la dépouille afin de l’inhumer. Pour sa part, le Franco-marocain Ismaïl Snabi a été condamné en Algérie à 18 mois de prison pour des raisons encore non élucidées, alors que Mohamed Qissi, également citoyen français d’origine marocaine, reste le seul rescapé de cette tragédie.

La version d’Alger

Alger a attendu cinq jours pour sortir de son silence. Dans une déclaration officielle, le ministère de la Défense a admis, dimanche, la responsabilité du meurtre des deux individus, identifiés comme un Franco-Marocain et un Marocain vivant en France, tués dans les eaux territoriales algériennes le 29 août. Un fait confirmé par le ministère lui-même.

Toutefois, la version des faits présentée par le ministère algérien de la Défense diffère sensiblement des autres récits. Selon le compte rendu détaillé du ministère, une unité des garde-côtes effectuait une patrouille de sécurité dans leurs eaux territoriales lorsqu’elle a repéré trois jet-skis. Ces derniers auraient pénétré illégalement et sans autorisation dans la zone maritime sous juridiction algérienne.

Conformément aux procédures habituelles, les garde-côtes ont émis des avertissements sonores en direction des jet-skis et leur ont demandé à plusieurs reprises de s’arrêter. Au lieu de se conformer aux directives, les individus sur les jet-skis auraient opté pour l’évasion, employant des manœuvres que les autorités ont qualifiées de dangereuses. Cette version des faits, présentée par le ministère, cherche à fournir un contexte à l’assassinat des vacanciers, bien qu’elle diffère des autres témoignages et rapports relatifs à l’événement.

Une plainte à Paris

Les représentants des familles des victimes ont dévoilé, dimanche, leur intention de déposer une plainte officielle en France. Selon l’avocat Hakim Chergui, qui s’est entretenu avec l’AFP, cette plainte, prévue pour être déposée aujourd’hui ou demain, englobera les chefs d’accusation «d’assassinat aggravé», «tentative d’assassinat aggravé», «détournement de navire» et «non-assistance à personne en danger».

Dans un communiqué émanant de l’équipe juridique, ils ont clairement exprimé leur position sur la situation diplomatique tendue entre le Maroc et l’Algérie, affirmant que la récente rupture des relations diplomatiques, décidée par l’Algérie le 24 août 2021, ne peut en aucun cas servir de justification pour de tels actes criminels ni garantir l’impunité à leurs auteurs. Les avocats soulignent aussi que face à l’absence de réponse des autorités algériennes concernant ce drame survenu sur leur territoire, ils se voient dans l’obligation de se tourner vers le système judiciaire français. Leur objectif est de faire toute la lumière sur ce qui s’est passé, désignant les faits de « cruauté inqualifiable ».

Le CNDH dénonce une violation du droit à la vie

Autre réaction, celle du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a exprimé sa profonde préoccupation et sa condamnation. Selon le Conseil que préside Amina Bouayach, cet acte représente, non seulement une «violation manifeste du droit fondamental à la vie», mais aussi une «atteinte sérieuse à l’intégrité physique» d’une autre victime qui, suite à cela, reste actuellement hospitalisée à Oujda.

Après avoir minutieusement examiné les informations préliminaires disponibles et croisé diverses sources, le CNDH a fermement condamné l’emploi par les garde-côtes algériens de balles réelles contre des citoyens non armés dans la partie orientale des eaux territoriales de la mer Méditerranée, estimant que les garde-côtes algériens auraient dû adopter une approche basée sur des protocoles internationalement reconnus, qui privilégient le sauvetage et l’assistance des personnes en détresse en mer.

Le CNDH, tout en soulignant l’importance primordiale de sauver des vies humaines en mer, se demande pourquoi des forces armées ont ressenti le besoin d’utiliser des balles réelles contre des individus non armés qui ne représentaient pas de menace immédiate, rappelant dans ce sens que le respect de la vie humaine en mer est un pilier du droit international, un principe qui ne peut être compromis ni négligé.

Enfin, le Conseil condamne cet acte comme une transgression flagrante des normes internationales qui garantissent la protection de la vie et la sécurité des individus en mer.

Rappelons que le parquet d’Oujda a ordonné, vendredi dernier, une enquête toujours en cours afin d’élucider les circonstances de cet assassinat. De nombreuses personnes, principalement membres des familles et proches des victimes, ont d’ores et déjà été entendues.

Dernier articles
Les articles les plus lu

Travaux imprévus à Maarif, circulation paralysée, la goutte de trop

Société - Les Casablancais qui empruntent le quartier Maarif sont confrontés à un véritable casse-tête. Des travaux… Encore !

Rédaction LeBrief - 16 décembre 2024

Peines alternatives : vers une justice plus humaine

Société - La justice marocaine franchit un cap avec l’entrée en vigueur de la loi sur les peines alternatives, un texte ambitieux visant à moderniser le système judiciaire.

Ilyasse Rhamir - 16 décembre 2024

Arts et métiers : une ambition maroco-française au service de l’innovation industrielle

Société - Le 5ᵉ CA de l’école Arts et Métiers, campus de Rabat, s’est tenu le 16 décembre 2024 sous la présidence de Ryad Mezzour.

Rédaction LeBrief - 16 décembre 2024

Enseignement : des réformes urgentes face à un système en crise

Société - Le dernier rapport de la Cour des comptes dresse un état des lieux préoccupant du secteur de l’enseignement au Maroc.

Ilyasse Rhamir - 16 décembre 2024

Spoliation immobilière : un homme d’affaire écope de six ans de prison ferme

Société - La Chambre criminelle de première instance a condamné Abdallah Boudrika à six ans de prison ferme pour spoliation immobilière.

Mbaye Gueye - 16 décembre 2024

Alerte Météo : vents violents au nord du Maroc

Société - La DGM a émis un bulletin d’alerte de niveau orange concernant des rafales de vent localement fortes prévues lundi dans certaines provinces du nord du Maroc.

Ilyasse Rhamir - 14 décembre 2024

Saigner pour guérir

Dossier - Rien qu’un rasoir, une pipette et un seau ne peuvent guérir. Car la saignée est réputée pour être «miraculeuse».

Atika Ratim - 14 décembre 2024

Deux soldats des FAR périssent dans l’explosion d’une mine

Société - Une mine antichar a explosé, causant la mort de deux soldats des Forces armées royales (FAR) et blessant grièvement un troisième.

Ilyasse Rhamir - 13 décembre 2024
Voir plus

Cherté de vie : le citoyen se révolte

Société - Mis à rude épreuve par l’inflation et la hausse vertigineuse des prix à la consommation, les ménages se révoltent.

Khadija Shaqi - 5 décembre 2022

Mères célibataires et mères divorcées : un vrai calvaire !

Dossier - Le statut des mères célibataires et divorcées au Maroc n’est pas de tout repos, entre traditions ancrées et exigences de modernité.

Sabrina El Faiz - 19 octobre 2024

Prix des médicaments : lancement des consultations avec les industriels pharmaceutiques

Société - Des rencontres seront organisées pour étudier les propositions des acteurs du secteur pharmaceutique concernant les prix de vente des médicaments. Le ministère de la Santé et de la Protection sociale les organise, du 28 juin au 1er juillet à Rabat.

Khadija Shaqi - 29 juin 2022

CNSS : augmentation des pensions de 5%

Société - La ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Alaoui, a présidé, ce vendredi, la réunion du Conseil d’administration de la CNSS.

Khadija Shaqi - 9 septembre 2022

Un commentaire

  1. Bonjour
    Ce n est pas un incident. Ce n est pas un accident..

    C est un assassinat.

    Priere de corriger le terme dans votre article.

    merci

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire