Vacances à la marocaine : entre canapé et Côte d’Azur
Assis sur son canapé, qui aura, à terme, pris ses formes, télévision allumée, un petit ventilateur à ses pieds, Khalid n’aura pas eu les vacances de rêve qu’il voit passer sur les réseaux sociaux. L’herbe n’est pas plus verte ailleurs, et une plage est une plage tout de même, qu’elle soit à Aïn Diab ou aux Iles Canaries (laissez-nous lui remonter le moral !).
Cette année, ni lui, ni ses enfants n’auront eu droit à un quelconque déplacement. En cause ? L’inflation ! Ah, celle-ci, elle a vraiment la dent dure. Lorsque nous parlons de déplacement, il s’agit d’une cinquantaine de kilomètres seulement. Le Marocain de classe moyenne ne rêve même plus d’ajouter des 0 à son kilométrage. Le Maroc, avec ses paysages diversifiés et sa riche culture, est une destination touristique de choix. Pourtant, pour beaucoup de Marocains, le tourisme interne demeure un songe inaccessible. Alors que le pays s’efforce de stimuler le tourisme local, les coûts élevés liés aux voyages internes freinent les aspirations de nombreux citoyens.
Un luxe réservé à une minorité
Le tourisme interne au Maroc souffre d’un problème majeur : son coût. Les prix des hôtels, des transports et des activités touristiques sont souvent comparables à ceux des destinations internationales, ce qui rend les vacances dans des régions comme Marrakech, Agadir, Tanger ou encore Chefchaouen hors de portée pour la majorité des familles marocaines.
Fatima, une employée de banque résidant à Casablanca
Fatima, une employée de banque résidant à Casablanca, témoigne : « Avec deux enfants, il est pratiquement impossible de partir en vacances dans les grandes villes touristiques du pays. Les prix des hôtels sont exorbitants, sans parler des activités ou des repas. Pour le prix d’un week-end à Marrakech, je pourrais presque partir en Espagne avec ma famille».
Les derniers chiffres de l’enquête de Sunergia, Market Insights – L’Economiste, démontrent clairement que cette année, une majorité de Marocains n’envisage pas une seconde de voyager. Plus précisément, 64% des Marocains ne prévoient pas de partir en vacances durant l’été 2024. Cette proportion est encore plus élevée parmi les personnes âgées : 73% chez les 35-44 ans, 78% chez les 55-64 ans, et à nouveau 73% chez les 65 ans et plus. Les classes socio-professionnelles D et E sont particulièrement touchées, avec 84% de ces individus ne prévoyant aucun déplacement pendant cette saison estivale.
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En revanche, une petite partie de la population se montre plus active en matière de voyages. Ainsi, 8% des Marocains déclarent avoir déjà voyagé, tandis que 21% envisagent de le faire avant la fin de la saison estivale. Les jeunes de 18 à 24 ans sont les plus enclins à voyager, avec un taux de 30%, et la classe socio-professionnelle C se distingue également, avec 28% de ses membres ayant prévu de voyager cet été.
Pour ceux qui choisissent de voyager, la majorité reste fidèle au Maroc comme destination de vacances. En effet, 88% des Marocains qui ont ou qui vont voyager cet été préfèrent séjourner dans le pays. Cette tendance est particulièrement forte parmi les seniors de plus de 65 ans, bien que 39% d’entre eux prévoient tout de même de voyager à l’étranger. Les 35-44 ans (23%) et les 55-64 ans (19%) montrent également un intérêt pour les destinations internationales. Cependant, les classes socio-professionnelles D et E restent pratiquement toutes au Maroc, tandis que 24% des classes A et B optent pour des vacances à l’étranger.
Les préférences en matière de séjour et d’hébergement
Pour les Marocains qui voyagent à l’intérieur du pays, la durée moyenne de séjour est de 12 jours. Les voyages se font principalement en groupe, avec une moyenne de trois personnes par groupe. Seuls 7% des Marocains envisagent de voyager seuls cet été, avec une tendance plus marquée chez les hommes (15%), les jeunes de 25 à 34 ans (14%) et les personnes âgées de 45 à 54 ans (11%).
L’enquête révèle aussi des préférences distinctes en matière d’hébergement. Pour ceux qui voyagent au Maroc, la location d’une maison est le choix le plus populaire, attirant 78% des répondants. Cela marque une nette préférence par rapport aux autres options, telles que les hôtels, choisis par seulement 14% des personnes interrogées cette année, contre 29% l’année précédente. Les auberges (5%) et le camping (3%) occupent respectivement la troisième et la quatrième place.
Quant à ceux qui voyagent à l’étranger, l’hôtel est le choix prédominant, utilisé par 73% des Marocains, suivi par la location de maison à 25%. Les auberges (4%) et les maisons d’hôtes (1%) restent des options minoritaires pour l’hébergement à l’étranger.
Les causes du phénomène
Plusieurs facteurs expliquent le coût élevé du tourisme interne. Tout d’abord, les infrastructures touristiques sont souvent orientées vers une clientèle étrangère, disposée à dépenser davantage, même si cela relève d’une fausse idée, lorsqu’on voit l’explosion des offres All-inclusive. De plus, les frais de gestion élevés des établissements hôteliers, liés notamment à la dépendance envers les importations, se répercutent sur les tarifs proposés aux clients.
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Les agences de voyages et les hôtels se justifient par les coûts fixes élevés et les taxes. Mais pour Hicham Azeroual, directeur d’agence de voyage, l’inflation galopante que nous connaissons actuellement a eu un impact direct sur presque tous les aspects de la vie quotidienne, y compris les secteurs du tourisme et de l’hôtellerie. « Les prix de la nourriture, du transport, et en particulier des vols ont augmenté. Cette hausse des coûts s’est naturellement répercutée sur les tarifs hôteliers, rendant les séjours plus onéreux pour les voyageurs, qu’ils soient nationaux ou internationaux », explique le spécialiste à Le Brief.
Si les Marocains ne voyagent pas dans leur propre pays, ce sont des emplois locaux qui disparaissent, des artisans qui perdent leur clientèle, et des régions entières qui restent sous-développéesHicham Azeroual, directeur d’agence de voyage
Le coût prohibitif du tourisme interne a des répercussions importantes sur l’économie nationale. La sous-représentation des touristes nationaux prive le secteur d’un marché important, surtout en période de basse saison, où les flux de touristes étrangers sont moins importants.
Cela affecte aussi les régions plus reculées, qui pourraient bénéficier du tourisme interne, mais souffrent du manque de visiteurs. «Si les Marocains ne voyagent pas dans leur propre pays, ce sont des emplois locaux qui disparaissent, des artisans qui perdent leur clientèle, et des régions entières qui restent sous-développées», alerte Hicham Azeroual.
Nos prix ne sont pas ceux des étrangers
Tout le monde a Internet, et d’une simple recherche Google, les Marocains constatent que les prix d’un séjour au Maroc pour un Français ou un Espagnol, ne sont pas ceux proposés à un Marocain. Ils devraient être plus élevés… ce n’est pourtant pas le cas. Un Marocain paiera plus cher un séjour dans son propre pays, et ça, c’est une absurdité que les citoyens ne digèrent pas. « Les grands opérateurs internationaux du secteur touristique ont l’avantage de pouvoir négocier des offres à l’avance, souvent bien avant le début de la saison estivale. Ils misent sur le volume de réservations pour obtenir des tarifs préférentiels, ce qui leur permet d’assurer une grande partie de leur chiffre d’affaires avant même que les premiers vacanciers n’arrivent. Cela crée une sécurité financière pour les hôteliers, qui sont ainsi garantis d’un nombre minimum de clients, assurant la rentabilité de leur saison touristique dès le départ », détaille le directeur d’agence de voyage.
Du côté marocain, ce n’est pas le même son de cloche. Le spécialiste nous explique que les agences de voyage au Maroc, en revanche, sont confrontées à des défis importants. Contrairement aux grands groupes internationaux, elles ne disposent pas des mêmes moyens pour négocier des offres à long terme ou en volume. « Elles n’ont pas la certitude de pouvoir commercialiser leurs offres au même niveau, ce qui les place dans une position plus précaire. Sans ces garanties, il leur est difficile d’offrir des tarifs compétitifs, ce qui complique encore leur tâche dans un contexte où les clients sont de plus en plus sensibles aux prix », conclut-il.
Par ailleurs, le gouvernement a annoncé plusieurs initiatives pour encourager le tourisme interne, notamment des subventions et des campagnes de sensibilisation. Toutefois, tant que les prix resteront hors de portée pour une grande partie de la population, ces mesures risquent de ne pas suffire.
En attendant, nombreux sont les Marocains qui, faute de moyens, se contentent de rêver des merveilles de leur propre pays, accessibles seulement à travers les vitrines des agences de voyages et les récits de ceux qui ont les moyens de les découvrir.
Viandes et volaille : pourquoi nous saignent-elles à blanc ?
Faut il blâmer ceux qui préfèrent partir à l’étranger pour les vacances de toute façon ce genre catégorie le font et le referons quel que soit le coût des vacances au Maroc l’autre catégorie trouvent leurs bonheur dans les prix pratiqués en Espagne où en Turquie c’est vrai maintenant la politique des tarifs dans les hôtels est une question complexe les hôteliers ont le droit de négocier des tarifs préférentiels avec les tours-opérateurs qui leurs garantissent des chambres pleines toute l’année et c’est donnant donnant et l’état trouve aussi son compte avec des rentrées de devises pérennes et en constante augmentation pour les agences de voyage qui n’ont pas les reins solides pour négocier la cause est que le marocain ne passe jamais par une agence de voyage pour réserver dans son pays alors qu’il a tout intérêt à le faire car il pourrait avoir presque les mêmes prix que les touristes qui passent par les agences internationales