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Sous l’impulsion des associations écologistes, les autorités de Casablanca annoncent la fin de la plantation anarchique de palmiers sur les grands axes de la ville. Le wali de la région, Mohamed Mhidia, a déclaré cette nouvelle mesure le 11 octobre 2024, une initiative qui pourrait bien s’étendre au reste du pays. Cette décision, attendue depuis près de trois ans par l’association Maroc Environnement 2050 et sa présidente, Salima Belemkaddem, soulève des questions impératives quant aux coûts, à la qualité de l’air et à l’avenir de la végétalisation urbaine au Maroc.
Pour répondre à nos nombreuses interrogations à ce sujet, nous avons fait appel à Mohamed Hakim Belkadi, consultant architecte des écosystèmes urbains prédictifs et des milieux interconnectés.
LeBrief : Pourquoi le palmier est-il nocif à l’environnement casablancais ?
Mohamed Hakim Belkadi : Le palmier, bien qu’emblématique, est inadapté à l’environnement urbain de Casablanca pour plusieurs raisons :
– La biodiversité limitée : Les palmiers washingtonias n’offrent pas un habitat favorable pour de nombreuses espèces d’oiseaux ou d’insectes, contrairement aux arbres à feuillage dense. Leur faible couverture végétale ne permet pas de diversifier la faune urbaine, ce qui limite les interactions naturelles bénéfiques et la création de biotopes.
– L’éevapotranspiration est faible et limitée : Les palmiers ont une faible capacité d’évapotranspiration comparée à d’autres arbres. Cela signifie qu’ils contribuent moins à rafraîchir l’air ambiant, un point critique pour Casablanca, une ville qui connaît des îlots de chaleur urbains.
– La consommation en eau : les palmiers nécessitent une quantité importante d’eau, ce qui pose problème dans un contexte de stress hydrique croissant au Maroc.
Pourquoi le ville de Los Angeles, par exemple, à laquelle Casablanca est souvent comparée, s’en sort-elle bien ?
Los Angeles, souvent associée à ses palmiers, a dû s’adapter face aux défis environnementaux et à la sécheresse. La ville a trouvé de nombreuses solutions.
– Diversification des essences d’arbres : Les autorités ont progressivement remplacé les palmiers vieillissants par des arbres indigènes plus adaptés, comme les chênes ou les érables sycomores, qui fournissent une meilleure couverture ombragée et nécessitent moins d’utilisation d’eau.
– Programmes de reforestation urbaine ou agroforesterie : Des initiatives qui visent à augmenter la canopée urbaine et à planter des arbres qui favorisent une meilleure rétention d’eau, renforcent la biodiversité et améliorent la qualité de l’air.
À Los Angeles, les incitations fiscales ont joué un rôle majeur dans la transition écologique et l’équilibre urbain. Los Angeles (son administration) a mis en place des programmes de réduction d’impôts pour les propriétaires qui plantent des arbres indigènes sur leurs terrains ou participent à des initiatives communautaires de verdissement. Ces incitations encouragent les résidents et les entreprises à s’engager activement dans la reforestation urbaine et la création d’îlots de fraîcheur.
La ville a également introduit des crédits d’impôt pour l’installation de systèmes de rétention d’eau, de toitures végétalisées et de dispositifs économes en eau.
Ces mesures soutiennent financièrement les résidents dans l’adoption de pratiques respectueuses de l’environnement, essentielles pour contrecarrer les sécheresses récurrentes.
De plus, des subventions ont été accordées aux propriétaires pour remplacer les gazons gourmands en eau par des jardins xérophytes (plantes résistantes à la sécheresse). Los Angeles a ainsi promu l’aménagement paysager avec des espèces indigènes et économes en ressources.
Les nouvelles constructions répondant aux normes LEED (Leadership in Energy and Environmental Design) ou incluant des infrastructures vertes bénéficient aussi d’exonérations fiscales partielles. Cela incite les promoteurs à adopter des pratiques de construction durable et à privilégier des essences d’arbres adaptées au climat local. Toutes ces mesures et
Ces incitations fiscales ont contribué à aligner les intérêts économiques avec les objectifs environnementaux, encourageant ainsi une transformation durable de la ville. Ces modèles pourraient être adaptés à des villes marocaines comme Casablanca, Rabat, ou Marrakech pour promouvoir des pratiques plus durables et résilientes.
Lire aussi : Crise du plastique : le Maroc pointé du doigt dans une étude mondiale
Pourquoi une réaction en 2024 seulement ?
La prise de conscience tardive peut être attribuée à plusieurs facteurs : le changement, le bouleversement climatique et le stress hydrique. La montée des températures et les périodes de sécheresse prolongées ont mis en évidence l’inefficacité des palmiers pour atténuer les effets de l’îlot de chaleur urbain et pour gérer les ressources en eau.
Il y a aussi l’évolution des pratiques urbaines : Les villes prennent de plus en plus en compte la résilience climatique et la durabilité dans leurs politiques d’aménagement urbain, poussant Casablanca à réagir face à ces enjeux.
La pression internationale des experts et de la société civile marocaine : des experts, ONG, et citoyens alertent depuis un moment sur les conséquences environnementales, ce qui pousse à réévaluer certaines décisions.
Quels arbres seraient mieux adaptés et pourquoi ?
Ils sont nombreux et ont tous de nombreux avantages pour la ville :
– Le Ficus benjamina communément connu sous le nom de figuier pleureur. C’est un arbre robuste qui offre un ombrage important et contribue à améliorer la qualité de l’air.
– Le chêne vert : il est indigène, résistant à la sécheresse et favorise la biodiversité avec une large couronne feuillue.
– L’arganier (Argania spinosa) : emblématique du Maroc, l’arganier est résistant et favorise un écosystème diversifié.
– L’albizia julibrissin ou boubri: Cet arbre ornemental, souvent appelé acacia de Constantinople, est résistant et offre une belle couverture florale. Son principal atout étant la résistance à la sécheresse.
Ces arbres sont mieux adaptés car ils fournissent un ombrage plus important, sont résistants à la sécheresse, et favorisent un écosystème urbain plus équilibré atténuant les îlots de chaleur tout en apportant une belle esthétique à la ville.
On voit également naitre beaucoup de coins de jardins fleuris, sur les ronds-points, les centres de routes etc., est ce nécessaire ? Cela peut-il être fait de façon plus efficace pour l’environnement avec d’autres choix de fleurs ?
Ces jardins ajoutent certes une esthétique agréable, mais leur efficacité et impact environnemental peuvent être questionnés. La plantation de fleurs exotiques ou de saison demande souvent des quantités d’eau importantes et un entretien régulier.
Des alternatives plus efficaces seraient des fleurs indigènes résistantes. Il faut favoriser des espèces locales qui consomment moins d’eau, telles que les lavandes ou les romarins, et qui, – de plus -, attirent des pollinisateurs.
Lire aussi : Maroc Environnement 2050 lance une offensive contre l’urbanisation des palmiers
Quelles autres villes devraient suivre cet exemple et pourquoi ?
Marrakech, connue pour son climat semi-aride et ses températures élevées. Marrakech pourrait bénéficier d’une diversification de ses espaces verts. Remplacer les palmiers par des arbres offrant plus d’ombrage et résistants à la sécheresse, comme les caroubiers ou les chênes verts, cela aiderait à réduire les îlots de chaleur urbains.
Agadir également. Cette ville côtière souffre de périodes de sécheresse prolongée et de l’érosion côtière. Planter des arbres résistants et adaptés, comme les arganiers ou les acacias, pourrait améliorer la résilience écologique tout en fournissant un ombrage efficace.
Fès, qui est marquée par une architecture ancienne et une densité urbaine élevée, gagnerait à intégrer des espèces plus adaptées aux conditions locales, comme le figuier ou l’arganier, afin d’améliorer l’ombrage et surtout la qualité de l’air.
Il serait également essentiel de multiplier les systèmes de récupération d’eau, soit en utilisant des citernes pour l’irrigation durant les périodes sèches, soit en aménageant directement des zones végétalisées capables de recueillir l’eau provenant des surfaces imperméables ou opter pour des matériaux drainants pour remplir et régénérer les nappes phréatiques.
Le constat est sans appel, il faut à disputer une approche systémique de l’aménagement urbain. Cette stratégie repose sur une conception holistique de l’espace urbain, où les infrastructures, les zones végétalisées et les surfaces de rétention sont interconnectées pour créer un écosystème autorégulé. Chaque composant joue un rôle pour stabiliser le climat urbain, améliorer la qualité de l’air, et offrir un cadre de vie plus résilient.
C’est un sujet dont tous peuvent être la solution : une terrasse aménagée avec un système de récupération d’eau, une conscience de la consommation de cette dernière, la participation aux discussions de la société civile.
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