Wafa Assurance : les opportunités manquées par Ramsès Arroub (4/6)
Tribune
Nabil AdelAncien cadre de Wafa Assurance
[email protected]
À partir d’une certaine taille, l’atteinte d’un certain niveau d’expertise, et avant même la saturation de leurs marchés intérieurs, beaucoup d’entreprises cherchent à s’internationaliser. Cette décision stratégique est souvent la validation ultime de la réussite de leur modèle économique. Elle est d’autant plus facilitée quand l’entreprise appartient à un grand groupe à l’expérience internationale déjà établie. Dans les précédentes tribunes de cette série consacrée au bilan de M. Arroub à la tête de Wafa Assurance, nous avons passé successivement en revue l’évolution des résultats de la compagnie sous ses deux mandats. Dans cette quatrième tribune, nous exposerons la politique d’internationalisation de la compagnie sous son leadership et analyserons les performances de ses filiales à l’international.
Un démarrage tardif et timoré
L’idée de chercher des relais de croissance pour Wafa Assurance à l’international commença à murir à partir de la fin de l’année 2006 et l’intégration totale de la compagnie au groupe Attijariwafa bank. Une direction fut dédiée à cette mission et une équipe de prospection fut mise en place. L’expansion devait se faire soit en parallèle à l’implantation du groupe Attijari, soit à travers des opérations ciblées dans des pays où le marché des assurances était prometteur, même en l’absence de la banque.
Plusieurs pistes furent explorées et aboutirent en 2007 à une première liste de trois pays, pour lesquels les études furent réalisées et des contacts prometteurs furent établis. À ces trois pays, s’ajouta un quatrième en 2008. Pour rappel, M. Arroub prit la présidence de Wafa Assurance en décembre 2007. Il fut recruté principalement pour donner un coup d’accélérateur à cette volonté d’internationalisation, dans le sillage de la réussite de la maison mère en la matière.
Cette ambition fut toutefois retardée par l’incapacité du nouveau management à lui donner vie, en dépit du fabuleux levier que lui offrait l’adossement à un groupe de la taille d’Attijari déjà présent dans plusieurs pays. Alors que le dirigeant de Wafa Assurance annonçait devant un parterre d’analystes boursiers qu’il n’y avait rien d’intéressant à l’international, le concurrent qui lui dama le pion en assurances automobiles (Saham, Sanlam actuellement), enchaîna les acquisitions, accéléra son implantation internationale et créa un véritable groupe d’assurances panafricain. Pourtant, la filiale d’Attijari avait tous les atouts pour le devancer.
À son départ en 2014, Wafa Assurance ne s’était implantée que dans deux pays, à savoir la Tunisie et le Sénégal. La même année, Attijariwafa Bank était installée dans 23 pays et Saham dans 24 pays à travers 49 filiales. Pour mémoire, en 2014, les capitaux propres de Wafa Assurance s’approchaient des 5 milliards de DH quand ceux de Saham tournaient autour de 3,3 milliards de DH. Comme quoi, ce n’est jamais une question de moyens. Il a fallu attendre l’arrivée d’une nouvelle équipe pour étendre la présence de la compagnie au Cameron et en Côte d’Ivoire.
Dans le secteur des assurances, la performance en automobile est intimement liée à la taille du réseau de distribution. En bancassurance, elle est le fruit de la richesse du catalogue produit et de l’organisation interne. En risques de l’entreprise, elle tient à la qualité des souscripteurs et l’étendue de la couverture en réassurance. Pour le développement à l’international, qu’il s’agisse d’une compagnie d’assurance ou de toute autre entreprise, ce ne sont que les qualités de «deal-making» du dirigeant et sa capacité à dénicher la bonne affaire, qui expliquent le succès.
Or, au vu des maigres résultats de la compagnie en la matière et son retard, tant sur sa maison mère que sur son principal concurrent, l’observateur peut aisément constater que ces qualités manquent cruellement au dirigeant de la filiale assurance de l’un des premiers groupes financiers panafricains.
Maintenant que c’est fait !
Une fois l’acquisition réalisée ou le lancement d’une compagnie ex-nihilo effectué, ce sont d’autres aptitudes qui permettent au leadership de la compagnie de rentabiliser son coût d’acquisition, et ce, soit à travers une croissance agressive du CA, soit en dégageant des profits et en remontant des dividendes à la maison mère.
Quand on analyse les réalisations de Wafa Assurance en la matière sous la présidence de M. Arroub, on est confronté à plusieurs constats aussi déconcertants les uns que les autres.
- Tout d’abord, la compagnie n’a jamais réussi à exploiter le fabuleux gisement que lui procure l’appartenance à un groupe bancaire et financier implanté dans 25 pays ou à marcher sur les pas de son concurrent Sanlam présent dans 48 pays. Le leader marocain d’assurances, filiale du 6e plus grand groupe bancaire africain, n’a réussi à s’implanter aujourd’hui que dans cinq pays !
- L’autre constat est que Wafa Assurance n’a pu s’implanter que dans les pays où sa maison mère était déjà présente. Aucune initiative d’aller chercher au-delà de cette zone de confort n’a été concrétisée. Même si les deux métiers se croisent à travers la bancassurance, il n’est nullement écrit que banque et assurances étaient pieds et poings liés. L’Afrique, le monde arabe et le sud de l’Europe regorgent de potentiel d’affaires qu’une compagnie d’assurances marocaine peut saisir sans forcément marcher dans les pas d’une banque.
- Le troisième constat est une conséquence directe du deuxième. En effet, Wafa Assurance ne fait de la performance à l’international qu’en Vie adossée à la présence d’Attijariwafa Bank. Qu’il s’agisse de parts de marchés ou de profitabilité, les filiales internationales de la compagnie ne prospèrent qu’en présence du réseau bancaire qui leur sert croissance et marges sur un plateau en argent (Tunisie, Sénégal, Côte d’Ivoire et Cameroun). En revanche, dès qu’il s’agit d’assurances non-vie, où la compagnie doit voler de ses propres ailes et faire jouer son expertise technique et commerciale indépendamment de sa maison mère, elle est déficitaire dans toutes ses participations africaines avec des classements et des parts de marché indignes de la filiale du groupe Attijariwafa Bank (Sénégal, Côte d’Ivoire et Cameroun).
Récapitulons. Wafa Assurance était sur le point de s’implanter dans trois pays en 2007, elle a dû attendre 2012 pour sa première sortie à l’international. Aujourd’hui, elle est présente dans 5 pays, quand sa maison mère l’est dans 25 pays et son concurrent immédiat dans 48 pays. Dans les marchés où elle est implantée, elle ne prospère qu’en Vie adossée à la présence d’Attijariwafa Bank et affiche des performances médiocres dans les branches où elle ne doit compter que sur son savoir-faire technique et commercial.
L’évaluation du bilan de n’importe quel dirigeant se fait à l’aune des résultats qu’il produit par rapport aux moyens qu’il mobilise, et de ces résultats par rapport à ceux de la concurrence. Tout le reste n’est que slogans.
Dans la même série :
Wafa Assurance : le sombre tableau de Ramsès Arroub (1/6)
Wafa Assurance : le virage raté par Ramsès Arroub (2/6)
Wafa Assurance : le grand gâchis de Ramsès Arroub (3/6)
Wafa Assurance : les opportunités manquées par Ramsès Arroub (4/6)
Wafa Assurance : le dommage irréparable de Ramsès Arroub (5/6)
Wafa Assurance : la destruction méthodique de Ramsès Arroub (6/6)
Changement climatique : la progression préoccupante du « Jour du dépassement »
L’humanité a vécu un mois de juillet marqué par des phénomènes climatiques extrêmes : canicules, sécheresses, et feux de forêt meurtriers. Selon Global Foot Print (GFP), le 28 juillet 2022 correspondait au « Jour du dépassement de la Terre ». En d’autres termes, à cette date, l’humanité a consommé (empreinte écologique) l’ensemble des ressources que la planète peut reconstituer en une année (biocapacité). Nous continuerons à vivre les cinq mois à venir dans le rouge, en entamant la consommation du capital naturel…
Par, Mustapha Merouane , Médecin-chirurgien et journalisteRefonder la politique gouvernementale en direction des Marocains résidant à l’étranger
Au Maroc, les migrants et les réfugiés sont célébrés à divers moments de l’année. Il y a d’abord la Journée internationale des migrants célébrée dans le monde entier comme l’a décidé l’ONU chaque année le 18 décembre. Il y a ensuite la Journée internationale des réfugiés chaque 20 juin. À cela, il faut ajouter au Maroc la Journée nationale des Marocains résidant à l’étranger, décidée par le Souverain en 2003 et qui a lieu chaque 10 août de l’année. Ce…
Par, Professeur Abdelkrim Belguendouz , Universitaire à Rabat et chercheur en migrationLes fameux couscoussiers des vilains
Ils errent dans nos villes, cherchant l’introuvable. Ils sont tous jeunes et les saletés de la folie cachent la beauté de leurs visages. Leur histoire est la même, mais pour la comprendre, il faut connaître l’histoire du « dernier joint ». Les statistiques montrent qu’au moins 800.000 Marocains ont consommé de la drogue en 2014, soit 4 à 5% de la population adulte du Royaume. Ce ne sont que des statistiques approximatives puisqu’une grande partie des consommateurs de cannabis choisissent de cacher…
Par, Akram Louiz , Lieutenant mécanicien de première classe de la marine marchande, chercheur et auteur du roman "L’affranchissement" et du recueil poétique "Trente fleurs"Le don d’organe : entre contraintes techniques et attentes sociales
Une table ronde a été organisée par le Syndicat des médecins du secteur libéral de la région Beni Mellal-Khénifra, en collaboration avec des juristes, des sociologues, des théologiens, des chirurgiens de la transplantation d’organes. Cette rencontre, tenue le 29 juin 2022, a connu la participation du wali de la région, Khatib El Hebil, sur le thème « Don et Transplantation d’Organes : Approche médicale, juridique, théologique et sociologique ». La finalité du don, c’est de protéger l’humain en nous, comme le soulignait…
Par, Dr Mustapha Merouane , Médecin-chirurgien et JournalisteTourisme : la crise sanitaire n’a pas fait que du mal…
Alaoui Yasmine, professeure-chercheure et consultante spécialiste en attractivité et marketing des territoires, a mené une étude scientifique entre septembre 2021 et janvier 2022 sur plus de 37 structures touristiques. En parallèle, et durant cette même période, elle a effectué une autre étude auprès de 675 touristes nationaux ayant séjourné dans une petite structure touristique. L’objectif étant de faire état de la situation des petites structures touristiques marocaines, d’avoir une idée sur les principaux besoins de la cible et, in fine,…
Par, Alaoui Yasmine , Professeure-chercheure et consultante spécialiste en attractivité et marketing des territoiresD’une crise sanitaire à une autre !
«L’âme est la même chez toutes les créatures vivantes, même si leurs corps sont différents» Hippocrate. Le monde connaît actuellement une multiplication de crises qui risquent d’anticiper la 6ᵉ extinction, comme l’avait prédit Elizabeth Kolbert dans son livre paru en 2014, et dont l’homme serait la principale cause. Dans tous ces dangers qui nous guettent, l’homme joue un rôle central, soit par son ignorance, soit par son obstination et son entêtement. Nous continuons à ignorer que nous vivons dans un…
Par, Dr Mustapha Merouane , Médecin-chirurgien et journalisteLa mobilité du futur sera électrique
Il devient de plus en plus indéniable que l’avenir de la mobilité sera électrique. Aujourd’hui, la technologie ne cesse de progresser et de repousser sans cesse les possibilités, avec notamment l’éclosion de voitures encore plus autonomes, mieux connectées, mais surtout électriques. Parallèlement, les villes intelligentes continuent à lutter contre la pollution et la congestion, en élargissant les options de mobilité multimodale et en utilisant l’urbanisme tactique. Ces villes n’offrent plus seulement des dégrèvements fiscaux ou des primes aux propriétaires de…
Par, Takakiyo Fujita , Directeur général de Sony Moyen-Orient et AfriqueVis ma vie de business developper !
Aujourd’hui, j’ai envie de vous parler du quotidien d’un Business developper dans une startup.Je souhaite simplement partager avec vous mon expérience, dans la mesure où le volet Business fait partie intégrante de mon activité en tant qu’entrepreneur. Tout d’abord, je me suis surpris il y a quelques années à découvrir ce métier et à y prendre goût quand j’étais consultant au sein d’un grand cabinet à Paris. Après plusieurs années sur le terrain, mon N+1 me dit : Amine, je…
Par, Amine Khayatei Houssaini , CEO chez Kwiks et expert en recrutementPLF 2021 : un premier pas timide vers le pari de la justice fiscale
S’il est vrai que l’épidémie progresse, que la vigilance devient de plus en plus notre pare-crise collective et que le masque est notre ultime outil social de confinement, cela nous amène à dire que face à la convergence des risques sociaux, psychologiques et sanitaires le confinement n’est pas l’arbitrage du juste meilleur. Mais, l’arbitrage le plus juste serait de concilier entre combat pour la vie et combat pour l’économie, c’est tout le débat. Dans ce sens, l’action du gouvernement et de…
Par, Abdelghani Youmni , économiste et consultantVitamine C, vitamine D, zinc & co : entre présence et absence en pharmacie
La pandémie de la Covid-19 a bousculé totalement la structure de consommation des produits pharmaceutiques. La vitamine C est devenue la superstar si précieuse, mais apparemment de plus en plus rare ou plus exactement difficile à trouver, talonnée par le Zinc et à un degré moindre la vitamine D. L’envolée des ventes a démarré dès le mois de mars 2020 défiant toutes les prévisions y compris celles des fabricants et entrainant un peu partout des ruptures épisodiques ou de plus ou moins…
Par, Abdel majid Belaïche , Analyste des marchés pharmaceutiques et chercheur en économie des produits de santéÉtablir une marque forte : 9 clés pour réussir dans le monde numérique
Dans le paysage numérique en rapide évolution d’aujourd’hui, les PME font face à des challenges et opportunités uniques. La progression rapide de la technologie, notamment dans des marchés vivaces tels que l’Afrique, met en évidence la nécessité d’implémenter des tactiques de marketing digital de pointe. Observant une croissance de 267% dans le domaine des services financiers et d’assurances (BFSI) de 2012 à 2022, et avec une population dont l’âge médian est de 19,7 ans, les possibilités d’interaction sont considérables. Le…
Par, Imane Rifki , Chef d’équipe du marché PME Afrique chez InfobipLe pouvoir transformateur du leadership inclusif : la clé pour des organisations innovantes et performantes
Le leadership inclusif se caractérise par la capacité d’un leader à reconnaître et à valoriser la diversité des perspectives et des talents au sein de son équipe. Cela implique de promouvoir un environnement de travail où chaque membre se sent respecté et encouragé à partager ses idées. Les leaders inclusifs sont attentifs aux besoins de leurs équipes et s’efforcent de créer une culture d’ouverture et de collaboration. Cette approche n’est pas seulement éthique, elle est également bénéfique pour l’organisation dans…
Par, Rais Fatimazahra , Professeur chercheur en Marketing à l’Institut supérieur d’Ingénieries et des Affaires de Fès- EDVANTIS Higher Eductaion GroupL’épidémie de Covid-19 et la maladie rénale
Le nombre de malades en Insuffisance rénale chronique (IRC) terminale ne cesse d’augmenter et la maladie rénale chronique pose de nombreux problèmes de prises en charge pour les gouvernements en particulier dans les pays à revenus faibles ou moyens. Au Maroc, nous pensons atteindre 50.000 patients qui vont nécessiter une dialyse en 2030, c’est une charge énorme pour les couvertures sociales. Désormais, l’IRC au Maroc est devenu un véritable fléau qui ronge la santé des Marocains avec une avancée galopante.…
Par, Amal Bourquia , Professeur de néphrologie et néphrologie pédiatrique, experte en éthique, en droit à la santé et en communication médicale, écrivaine et présidente de l’association "REINS"La transformation digitale et ses bénéfices
Nous vivons à une époque marquée par des avancées technologiques sans précédent, et la transformation numérique des entreprises est devenue non seulement un mot à la mode, mais une nécessité fondamentale pour la survie et la croissance à long terme. Ce phénomène s’est propagé à travers le monde et a maintenant trouvé son chemin vers les marchés émergents comme le Maroc. Je travaille dans le secteur de la technologie depuis quelques années maintenant et je suis étonné par les progrès…
Par, Karim Mabrour , Directeur général de VANEIGENS au MarocLes dérives du féminisme moderne : quand la lutte pour l’égalité s’éloigne de ses fondements
Le féminisme trouve ses origines dans la lutte noble pour les droits des femmes, notamment pour le droit de vote, l’accès à l’éducation et l’autonomie financière. Son émergence coïncide avec la révolution industrielle et l’abolition de l’esclavage dans de nombreux pays. Ces deux évolutions ont transformé profondément les structures sociales et économiques, engendrant un besoin croissant de main-d’œuvre, ce qui a progressivement remis en question les rôles traditionnels assignés aux femmes au sein de la famille et de la société.…
Par, Pr. Nabil Adel , Enseignant chercheurTourisme : la crise sanitaire n’a pas fait que du mal…
Alaoui Yasmine, professeure-chercheure et consultante spécialiste en attractivité et marketing des territoires, a mené une étude scientifique entre septembre 2021 et janvier 2022 sur plus de 37 structures touristiques. En parallèle, et durant cette même période, elle a effectué une autre étude auprès de 675 touristes nationaux ayant séjourné dans une petite structure touristique. L’objectif étant de faire état de la situation des petites structures touristiques marocaines, d’avoir une idée sur les principaux besoins de la cible et, in fine,…
Par, Alaoui Yasmine , Professeure-chercheure et consultante spécialiste en attractivité et marketing des territoires