Covid-19 : les quatre grands alliés des variants

Avec l’émergence successive de nouveaux variants, sommes-nous en train de perdre une guerre ? Les mesures barrières individuelles et collectives, adaptées selon les dernières découvertes scientifiques rapides et la vaccination développée en moins d’une année, ont pourtant pu sauver des vies et relancer l’économie et la vie sociale là où elles ont été appliquées. Elles nous avaient ouvert la voie de la victoire.

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Publié le 06/12/2021 à 9:41

Tribune

Tayeb Hamdi

Médecin chercheur en politiques et systèmes de santé

Brevets, inégalité, hésitation et relâchements



Avec l’émergence successive de nouveaux variants, sommes-nous en train de perdre une guerre ? Les mesures barrières individuelles et collectives, adaptées selon les dernières découvertes scientifiques rapides et la vaccination développée en moins d’une année, ont pourtant pu sauver des vies et relancer l’économie et la vie sociale là où elles ont été appliquées. Elles nous avaient ouvert la voie de la victoire.



La vaccination devrait être complète, large et rapide, pour qu’elle puisse être efficace, protéger les vies, réduire le risque d’émergence de variants, et vaincre la pandémie. Ce n’est malheureusement pas le cas aujourd’hui avec la succession des lettres de l’alphabet grec qui repousse les dates de la fin de la pandémie et le retour à notre vie avant la Covid.



La production des vaccins a été insuffisante à cause du refus des laboratoires, et de certains pays, de la levée des brevets qui aurait accéléré la production et l’accessibilité à ces vaccins, et qui aurait aussi contribué à la préparation de la planète à faire face aux nouveaux variants et aux épidémies à venir. Pfizer, Bion Tech et Moderna ont bénéficié de huit milliards de dollars de l’argent public pour mettre au point leurs vaccins. Ils réalisent un bénéfice avant impôt de plus d’un million de dollars par jour.



Le transfert de la technologie aurait permis de démarrer la production à grande échelle en huit à dix mois, et si couplé au transfert du savoir, cette durée aurait été écourtée de moitié. Ce transfert aurait permis d’accélérer la cadence, de prévoir une production rapide et massive de nouvelles versions de vaccins si nécessaire et élargir l’industrie vaccinale pour préparer la planète aux futures épidémies.



Les inégalités vaccinales ont empiré le paysage épidémique. Vacciner dans des pays riches toute la population y compris les jeunes et les enfants à moindre risque, en laissant les populations à risque dans d’autres pays est un échec plus que moral. Laisser le virus circuler librement dans plusieurs régions du monde, revient à créer les conditions idéales de l’émergence de nouveaux variants, une sorte de «mutagenèse organisée».



L’Afrique avec 17% de la population mondiale n’a administré à ce jour que 3,01% des doses déployées dans le monde. Moins d’un africain sur 14 est complètement vacciné, alors que dans l’Union Européenne plus de deux sur trois européens le sont déjà. 



Dans une tribune publiée début février 2021, intitulée «Avec le nationalisme vaccinal, la fin de la pandémie n’est pas pour demain !», j’avais dénoncé cette injustice vaccinale et mis en garde contre ses conséquences.



Le virus profite également des inégalités d’accès aux tests et autres moyens de diagnostic. L’initiative COVAX n’a pu atteindre ses objectifs par faute de moyens et d’engagement des pays riches. L’hésitation vaccinale s’est dramatiquement alliée au virus. Avec les réseaux sociaux, une fake news se propage six fois plus vite qu’une vraie et touche un public plus large.      



L’infodémie tue, éternise la pandémie, et prend les personnes hésitantes en otage. Les fake news sur les vaccins entretiennent la peur et la méfiance et orchestrent un effet Nocebo contre les vaccins.



Le quatrième grand allié du SARSCOV2 est le relâchement précipité des populations et des gouvernements. Après chaque pic épidémique, s’installe un faux sentiment de sécurité suivi d’un relâchement et une précipitation des gouvernements vers la levée prématurée des restrictions pour des raisons économiques. Plus de circulation du virus, moins de vaccinations, plus de risque de mutations et d’émergence de nouveaux variants. Le cercle se referme.


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