Secteurs porteurs et opportunités d’investissement au Maroc

Parmi une trentaine de secteurs d’activités bénéficiant de stratégies gouvernementales, quels sont ceux qui sont les plus porteurs ? Pour sélectionner les secteurs présentant les meilleures opportunités d’investissement et de croissance, Mohamed Karim propose une méthodologie basée sur les multiplicateurs de production et d’emploi (modèle Input-Output).

Temps de lecture
Publié le 30/04/2021 à 14:30

Tribune

Pr Mohamed Karim

Chef du Département d’économie et de gestion à la Faculté de droit de Salé et Expert auprès des institutions internationales

Depuis une vingtaine d’années, le Maroc, sous la conduite éclairée du Roi Mohammed VI, a lancé d’importantes stratégies et plans sectoriels. Il s’agit par exemple du plan Azur, de la Vision 2020 pour le tourisme, du Plan Maroc Vert pour l’agriculture, du Plan Halieutis 2020 pour l’industrie de la pêche, de Maroc Export Plus pour le commerce, du Pacte national pour l’Émergence industrielle (2009-2015) et du Nouveau Plan d’Accélération industrielle, 2014-2020.



Ces stratégies comprenaient des exonérations fiscales et d’autres incitations financières, la facilitation de l’accès à la terre, la simplification des procédures administratives et le lancement de grands projets d’infrastructures publiques. Aussi est-il vrai que dans le cadre du Plan Accélération industrielle, le gouvernement a prévu un soutien sous forme de subventions équivalant à environ 2% du PIB sur six ans.



Cependant, on ne sait pas quels secteurs sont réellement porteur parmi la trentaine de secteurs suivants : agriculture, chasse et services annexes, aquaculture, industrie d’extraction, industrie alimentaire et tabacs, industrie textile et cuir, industrie chimique et para-chimique, industrie mécanique, métallurgique et électrique, autres industries manufacturières, raffinage de pétrole et autres, électricité et eaux, bâtiment et travaux publics, commerce et réparation, hôtels et restauration, transports, postes et télécommunication, activités financières et assurances, immobilier, location et services rendus aux entreprises, administration publique générale et sécurité, éducation, santé et action sociale et autres services non financiers.



Pour sélectionner les secteurs présentant les meilleures opportunités d’investissement et de croissance accélérées, nous avons appliqué une méthodologie basée sur les multiplicateurs de production et d’emploi (modèle Input-Output). Une série de tableaux entrées-sorties du Maroc à prix constants, pour les années 2007, 2012 et 2019, a été utilisée pour estimer l’impact des changements dans l’une ou l’autre composante de la demande finale. Nous retenons les cinq secteurs suivants :               




  1. l’industrie alimentaire ;

  2. le commerce et la distribution ;

  3. les énergies renouvelables ;

  4. les banques ;

  5. le digital.





Les secteurs de l’automobile et l’aéronautique sont des secteurs nouveaux qui exigent des années pour se prononcer sur leurs effets.



En outre, les secteurs qui ne sont pas exposés à la concurrence internationale en raison de la politique actuelle du gouvernement (immobilier et services…) pourraient élargir les marges bénéficiaires en ajustant les prix à la hausse en réponse à la croissance de la demande intérieure et à l’expansion du crédit. Certains programmes publics ont amplifié cette opportunité en accordant des avantages et des subventions à ces secteurs. Dans l’immobilier, les incitations fiscales accordées aux promoteurs de logements sociaux ont atteint 1% du PIB, ce qui a attiré un grand nombre d’investisseurs dans le secteur (ministère de l’Économie et des Finances, 2015).



Cette différence de marges bénéficiaires entre les secteurs protégés et exposés a laissé les investisseurs se retirer rationnellement des secteurs exposés de l’économie vers les secteurs protégés où les bénéfices étaient assurés à court terme.



Il faut souligner que les trois secteurs verticaux proposés aux investisseurs (agroalimentaire, commerce et énergies renouvelables) sont caractérisés par des multiplicateurs de production élevés et un fort potentiel d’emploi. Les trois secteurs sont de grands créateurs de valeur ajoutée et d’emplois au Maroc, c’est-à-dire qu’ils exercent d’importants effets d’entraînement sur l’économie. En outre, les secteurs de l’industrie alimentaire et du commerce affichent une productivité du travail élevée. Par ailleurs, un effort de diversification et de sophistication a été observé depuis 2007 dans ces trois secteurs, se traduisant en partie par des taux d’exportation soutenus.



Par ailleurs, les progrès technologiques enregistrés dans ces trois secteurs productifs peuvent servir de catalyseur à la transformation structurelle. La création, l’adoption et l’amélioration des technologies contribuent à la croissance de la productivité et à la création de valeur ajoutée dans les secteurs de l’industrie alimentaire et des énergies renouvelables en particulier.



En outre, ces secteurs sont fortement intégrés les uns aux autres. En effet, la croissance attendue de l’industrie alimentaire au Maroc dépend de l’accès à une énergie de qualité et à un prix compétitif. Au Maroc, l’énergie constitue souvent la première ou la deuxième dépense la plus importante dans l’industrie alimentaire, qui peut représenter jusqu’à 20% du chiffre d’affaires financier. Pour augmenter leur rentabilité, les industries alimentaires devront créer plus de valeur ajoutée avec moins de matières premières. À cette fin, elles doivent se concentrer sur des technologies de transformation plus sophistiquées, mais aussi sur des équipements plus économes en énergie. Par exemple, la modernisation des unités de séchage de mangues avec des séchoirs modernes à ventilation mixte, alimentés par l’énergie solaire et le gaz, permet aux unités de production de proposer des produits de très haute qualité, de fonctionner toute l’année et de diversifier la gamme de produits séchés (noix de coco, tomate, papaye, herbes aromatiques, etc.).



Le secteur du commerce et de la distribution est l’un des piliers de l’économie marocaine. C’est aussi le deuxième plus grand pourvoyeur d’emplois au niveau national après l’agriculture. Il représente 13% de la population active du Royaume, soit 1,56 million de personnes. En termes de création de richesse, le secteur du commerce et de la distribution est classé troisième en termes de PIB, avec une valeur ajoutée établie pour 2017 à près de 84,2 milliards de DH. Les opportunités d’investissement dans ce secteur sont nombreuses, avec par exemple la modernisation du commerce local avec une labellisation de classe mondiale, des centrales d’achat et des réseaux de commerce et de marketing.



Il existe une importante demande d’investissement dans les grandes et moyennes surfaces (hypermarchés) et la construction de centres commerciaux modernes ; ainsi que des magasins d’usine et de vente pour la classe moyenne en pleine expansion.


Dernier articles
Les articles les plus lu
Publié le 26/05

D’une crise sanitaire à une autre !

«L’âme est la même chez toutes les créatures vivantes, même si leurs corps sont différents» Hippocrate. Le monde connaît actuellement une multiplication de crises qui risquent d’anticiper la 6ᵉ extinction, comme l’avait prédit Elizabeth Kolbert dans son livre paru en 2014, et dont l’homme serait la principale cause. Dans tous ces dangers qui nous guettent, l’homme joue un rôle central, soit par son ignorance, soit par son obstination et son entêtement. Nous continuons à ignorer que nous vivons dans un…

Par, Dr Mustapha Merouane , Médecin-chirurgien et journaliste
Publié le 09/03

La mobilité du futur sera électrique

Il devient de plus en plus indéniable que l’avenir de la mobilité sera électrique. Aujourd’hui, la technologie ne cesse de progresser et de repousser sans cesse les possibilités, avec notamment l’éclosion de voitures encore plus autonomes, mieux connectées, mais surtout électriques. Parallèlement, les villes intelligentes continuent à lutter contre la pollution et la congestion, en élargissant les options de mobilité multimodale et en utilisant l’urbanisme tactique. Ces villes n’offrent plus seulement des dégrèvements fiscaux ou des primes aux propriétaires de…

Par, Takakiyo Fujita , Directeur général de Sony Moyen-Orient et Afrique
Publié le 07/12

Vis ma vie de business developper !

Aujourd’hui, j’ai envie de vous parler du quotidien d’un Business developper dans une startup.Je souhaite simplement partager avec vous mon expérience, dans la mesure où le volet Business fait partie intégrante de mon activité en tant qu’entrepreneur. Tout d’abord, je me suis surpris il y a quelques années à découvrir ce métier et à y prendre goût quand j’étais consultant au sein d’un grand cabinet à Paris. Après plusieurs années sur le terrain, mon N+1 me dit : Amine, je…

Par, Amine Khayatei Houssaini , CEO chez Kwiks et expert en recrutement
Publié le 06/12

Tourisme en état d’urgence

Si je devais faire le point sur la situation que nous traversons depuis près de 21 mois, je dirais qu’il y a des hauts et des bas, mais que les bas l’emportent largement sur les hauts au vu de l’évolution de mes états d’âme et des nouvelles qui nous parviennent chaque jour. Nous sommes dans une sorte de partie d’échecs avec un virus qui a plusieurs coups d’avance, qui est imprévisible et qui finit par faire tourner en bourrique les experts en…

Par, Fouzi Zemrani , Tour-opérateur à Marrakech et ex-vice-président de la Confédération nationale du tourisme (CNT)
Publié le 06/12

Covid-19 : les quatre grands alliés des variants

Brevets, inégalité, hésitation et relâchements Avec l’émergence successive de nouveaux variants, sommes-nous en train de perdre une guerre ? Les mesures barrières individuelles et collectives, adaptées selon les dernières découvertes scientifiques rapides et la vaccination développée en moins d’une année, ont pourtant pu sauver des vies et relancer l’économie et la vie sociale là où elles ont été appliquées. Elles nous avaient ouvert la voie de la victoire. La vaccination devrait être complète, large et rapide, pour qu’elle puisse être efficace, protéger les…

Par, Tayeb Hamdi , Médecin chercheur en politiques et systèmes de santé
Publié le 12/11

«Ce que nous espérions voir dans la déclaration finale de la COP26»

Les COP existent depuis 1995 après que le sommet de la Terre qui a eu lieu à Rio en 1992. Les États parties ont galéré pour se mettre d’accord par consensus sur un outil diplomatique juridiquement contraignant pour couper les émissions mondiales, car les scientifiques à travers leurs divers rapports ont bien montré que c’est la seule solution pour stopper les effets néfastes des changements climatiques. Parmi les différents rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), deux…

Par, Khalid R. Temsamani , Professeur à l'Université Abdelmalek Essaâdi, expert international en changements climatiques et secrétaire général de la Fondation Maison Méditerranéenne du Climat
Publié le 08/11

Pourquoi la résolution 2602 du Conseil de sécurité de l’ONU est favorable au Maroc ?

Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté le vendredi 29 octobre 2021 la résolution 2602 qui renouvelle le mandat de la Minurso pour une année jusqu’au 31 octobre 2022. Comme les années précédentes, ce sont les Etats-Unis qui ont rédigé la résolution 2602 qui a été adoptée sans changement. Rappelons que le Conseil de sécurité est composé de 15 membres : 5 permanents ayant le droit de veto (Chine, Etats-Unis, France, Russie, Royaume-Uni) et 10 non permanents élus pour…

Par, Jawad Kerdoudi , Président de l’Institut marocain des relations internationales (IMRI)
Publié le 25/10

Le pass vaccinal et la cohabitation ardue entre l’ordre public et le vaccino-scepticisme

Si les Marocains s’habituent progressivement aux différentes restrictions édictées par le gouvernement, celle de l’obligation du port du pass vaccinal attise, particulièrement, une colère acerbe dans la mesure où une multitude d’activistes associatifs et politiques s’y opposent d’une façon qualifiable de frontale. Avant d’étayer les antagonismes irriguant la controverse sécrétée par le pass vaccinal, il est, de prime abord, loisible de rappeler que conformément à ce qui est désormais devenu une tendance planétaire, le Maroc s’est doté d’une légalité d’exception en vue de…

Par, Hicham Berjaoui , Enseignant-chercheur à l'Université Cadi Ayyad de Marrakech
Voir plus
Publié le 23/06

Tourisme : la crise sanitaire n’a pas fait que du mal…

Alaoui Yasmine, professeure-chercheure et consultante spécialiste en attractivité et marketing des territoires, a mené une étude scientifique entre septembre 2021 et janvier 2022 sur plus de 37 structures touristiques. En parallèle, et durant cette même période, elle a effectué une autre étude auprès de 675 touristes nationaux ayant séjourné dans une petite structure touristique. L’objectif étant de faire état de la situation des petites structures touristiques marocaines, d’avoir une idée sur les principaux besoins de la cible et, in fine,…

Par, Alaoui Yasmine , Professeure-chercheure et consultante spécialiste en attractivité et marketing des territoires
Publié le 07/12

Vis ma vie de business developper !

Aujourd’hui, j’ai envie de vous parler du quotidien d’un Business developper dans une startup.Je souhaite simplement partager avec vous mon expérience, dans la mesure où le volet Business fait partie intégrante de mon activité en tant qu’entrepreneur. Tout d’abord, je me suis surpris il y a quelques années à découvrir ce métier et à y prendre goût quand j’étais consultant au sein d’un grand cabinet à Paris. Après plusieurs années sur le terrain, mon N+1 me dit : Amine, je…

Par, Amine Khayatei Houssaini , CEO chez Kwiks et expert en recrutement
Publié le 04/03

Pour une procédure de médiation familiale dans le nouveau Code de la famille

Le Maroc, à l’instar de nombreux pays, observe une croissance exponentielle des cas de divorce, fragilisant la cellule familiale et engendrant de lourdes conséquences sur les enfants et la société entière. Dans ce contexte, les modes alternatifs de résolution des conflits, et plus particulièrement la médiation familiale, apparaissent comme une nécessité urgente. Or, La médiation familiale se présente comme un processus collaboratif et confidentiel, où un tiers neutre, le médiateur, aide les membres d’une famille en conflit à trouver un…

Par, Zakaria Berala , Chercheur en juridiction des affaires de la famille à l'U.M ,Rabat
Publié le 10/12

L’épidémie de Covid-19 et la maladie rénale

Le nombre de malades en Insuffisance rénale chronique (IRC) terminale ne cesse d’augmenter et la maladie rénale chronique pose de nombreux problèmes de prises en charge pour les gouvernements en particulier dans les pays à revenus faibles ou moyens. Au Maroc, nous pensons atteindre 50.000 patients qui vont nécessiter une dialyse en 2030, c’est une charge énorme pour les couvertures sociales. Désormais, l’IRC au Maroc est devenu un véritable fléau qui ronge la santé des Marocains avec une avancée galopante.…

Par, Amal Bourquia , Professeur de néphrologie et néphrologie pédiatrique, experte en éthique, en droit à la santé et en communication médicale, écrivaine et présidente de l’association "REINS"
Publié le 03/09

L’impact des mesures législatives sur l’efficacité du recensement au Maroc : analyse minutieuse

Objectifs principaux et procédures de mise en œuvre L’objectif principal de la loi n° 001.71 est d’organiser le recensement de la population et du logement au Royaume du Maroc, en mettant l’accent sur la confidentialité et le bon déroulement de l’opération. Cette opération est exécutée par l’autorité gouvernementale chargée de la planification, en coordination avec le Ministère de l’Intérieur. Les conditions et les dates de réalisation du recensement sont fixées par le chef du gouvernement, sur proposition de ces instances.…

Par, Yassine Kahli , Conseiller juridique et chercheur en sciences juridiques
Publié le 13/09

Les médinas : la révolution piétonne que les villes modernes ont oubliée

À une époque où les grandes villes modernes comme New York et Tokyo se métamorphosent en labyrinthes de gratte-ciel et en réseaux sophistiqués de transports motorisés, les médinas du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord se dressent comme des témoins d’une approche urbaine profondément différente. Ces anciens quartiers, avec leurs dédales de ruelles étroites, nous offrent un modèle saisissant de bipédisation urbaine où la marche n’est pas simplement une nécessité, mais une philosophie de vie. Contrairement aux métropoles contemporaines, où l’urbanisme…

Par, Mohammed Hakim Belkadi , Consultant architecte des écosystèmes urbains prédictifs et des milieux interconnectés expert judiciaire
Publié le 04/12

Le confinement m’a tue(r)… enfin presque

Nul besoin de dire que nous traversons, pour tous et de tous âges, l’une des périodes les plus difficiles de notre vie. Que ce soient les enfants en bas âge qui ont beaucoup de mal à comprendre pourquoi ils ne peuvent faire des activités normalement, jouer avec leurs amis, que ce soient des lycéens qui ne peuvent pas partager des moments conviviaux avec leurs familles sans qu’ils ne soient un danger pour eux, que ce soient des nouveaux diplômés qui ont beaucoup de…

Par, Amine Khayatei Houssaini , CEO chez Kwiks, expert en fastsourcing
Publié le 29/07

Les comptes en banque

L’activité bancaire ne peut être exercée en dehors et sans respect des textes législatifs et règlementaires régissant l’activité des établissements de crédit et organismes assimilés. Ces textes législatifs et règlementaires ont fait l’objet d’un recueil établi par Bank Al-Maghrib, se composant par les lois, décrets et arrêtés ministériels, ainsi que les circulaires, décisions règlementaires, directives, et les recommandations. A cet effet, la relation entre les établissements de crédit et leur clientèle, est régie par la nouvelle loi bancaire n°103.12 relative…

Par, Rifai Mostafa , Spécialiste en droit bancaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire