Secteurs porteurs et opportunités d’investissement au Maroc
Tribune
Pr Mohamed KarimChef du Département d’économie et de gestion à la Faculté de droit de Salé et Expert auprès des institutions internationales
Depuis une vingtaine d’années, le Maroc, sous la conduite éclairée du Roi Mohammed VI, a lancé d’importantes stratégies et plans sectoriels. Il s’agit par exemple du plan Azur, de la Vision 2020 pour le tourisme, du Plan Maroc Vert pour l’agriculture, du Plan Halieutis 2020 pour l’industrie de la pêche, de Maroc Export Plus pour le commerce, du Pacte national pour l’Émergence industrielle (2009-2015) et du Nouveau Plan d’Accélération industrielle, 2014-2020.
Ces stratégies comprenaient des exonérations fiscales et d’autres incitations financières, la facilitation de l’accès à la terre, la simplification des procédures administratives et le lancement de grands projets d’infrastructures publiques. Aussi est-il vrai que dans le cadre du Plan Accélération industrielle, le gouvernement a prévu un soutien sous forme de subventions équivalant à environ 2% du PIB sur six ans.
Cependant, on ne sait pas quels secteurs sont réellement porteur parmi la trentaine de secteurs suivants : agriculture, chasse et services annexes, aquaculture, industrie d’extraction, industrie alimentaire et tabacs, industrie textile et cuir, industrie chimique et para-chimique, industrie mécanique, métallurgique et électrique, autres industries manufacturières, raffinage de pétrole et autres, électricité et eaux, bâtiment et travaux publics, commerce et réparation, hôtels et restauration, transports, postes et télécommunication, activités financières et assurances, immobilier, location et services rendus aux entreprises, administration publique générale et sécurité, éducation, santé et action sociale et autres services non financiers.
Pour sélectionner les secteurs présentant les meilleures opportunités d’investissement et de croissance accélérées, nous avons appliqué une méthodologie basée sur les multiplicateurs de production et d’emploi (modèle Input-Output). Une série de tableaux entrées-sorties du Maroc à prix constants, pour les années 2007, 2012 et 2019, a été utilisée pour estimer l’impact des changements dans l’une ou l’autre composante de la demande finale. Nous retenons les cinq secteurs suivants :
- l’industrie alimentaire ;
- le commerce et la distribution ;
- les énergies renouvelables ;
- les banques ;
- le digital.
Les secteurs de l’automobile et l’aéronautique sont des secteurs nouveaux qui exigent des années pour se prononcer sur leurs effets.
En outre, les secteurs qui ne sont pas exposés à la concurrence internationale en raison de la politique actuelle du gouvernement (immobilier et services…) pourraient élargir les marges bénéficiaires en ajustant les prix à la hausse en réponse à la croissance de la demande intérieure et à l’expansion du crédit. Certains programmes publics ont amplifié cette opportunité en accordant des avantages et des subventions à ces secteurs. Dans l’immobilier, les incitations fiscales accordées aux promoteurs de logements sociaux ont atteint 1% du PIB, ce qui a attiré un grand nombre d’investisseurs dans le secteur (ministère de l’Économie et des Finances, 2015).
Cette différence de marges bénéficiaires entre les secteurs protégés et exposés a laissé les investisseurs se retirer rationnellement des secteurs exposés de l’économie vers les secteurs protégés où les bénéfices étaient assurés à court terme.
Il faut souligner que les trois secteurs verticaux proposés aux investisseurs (agroalimentaire, commerce et énergies renouvelables) sont caractérisés par des multiplicateurs de production élevés et un fort potentiel d’emploi. Les trois secteurs sont de grands créateurs de valeur ajoutée et d’emplois au Maroc, c’est-à-dire qu’ils exercent d’importants effets d’entraînement sur l’économie. En outre, les secteurs de l’industrie alimentaire et du commerce affichent une productivité du travail élevée. Par ailleurs, un effort de diversification et de sophistication a été observé depuis 2007 dans ces trois secteurs, se traduisant en partie par des taux d’exportation soutenus.
Par ailleurs, les progrès technologiques enregistrés dans ces trois secteurs productifs peuvent servir de catalyseur à la transformation structurelle. La création, l’adoption et l’amélioration des technologies contribuent à la croissance de la productivité et à la création de valeur ajoutée dans les secteurs de l’industrie alimentaire et des énergies renouvelables en particulier.
En outre, ces secteurs sont fortement intégrés les uns aux autres. En effet, la croissance attendue de l’industrie alimentaire au Maroc dépend de l’accès à une énergie de qualité et à un prix compétitif. Au Maroc, l’énergie constitue souvent la première ou la deuxième dépense la plus importante dans l’industrie alimentaire, qui peut représenter jusqu’à 20% du chiffre d’affaires financier. Pour augmenter leur rentabilité, les industries alimentaires devront créer plus de valeur ajoutée avec moins de matières premières. À cette fin, elles doivent se concentrer sur des technologies de transformation plus sophistiquées, mais aussi sur des équipements plus économes en énergie. Par exemple, la modernisation des unités de séchage de mangues avec des séchoirs modernes à ventilation mixte, alimentés par l’énergie solaire et le gaz, permet aux unités de production de proposer des produits de très haute qualité, de fonctionner toute l’année et de diversifier la gamme de produits séchés (noix de coco, tomate, papaye, herbes aromatiques, etc.).
Le secteur du commerce et de la distribution est l’un des piliers de l’économie marocaine. C’est aussi le deuxième plus grand pourvoyeur d’emplois au niveau national après l’agriculture. Il représente 13% de la population active du Royaume, soit 1,56 million de personnes. En termes de création de richesse, le secteur du commerce et de la distribution est classé troisième en termes de PIB, avec une valeur ajoutée établie pour 2017 à près de 84,2 milliards de DH. Les opportunités d’investissement dans ce secteur sont nombreuses, avec par exemple la modernisation du commerce local avec une labellisation de classe mondiale, des centrales d’achat et des réseaux de commerce et de marketing.
Il existe une importante demande d’investissement dans les grandes et moyennes surfaces (hypermarchés) et la construction de centres commerciaux modernes ; ainsi que des magasins d’usine et de vente pour la classe moyenne en pleine expansion.
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