Système éducatif : des réformes très timides selon le Conseil supérieur de l’éducation
Les membres du Conseil Supérieur de l’Éducation, de la Formation et de la Recherche Scientifique (CSEFRS). © DR
«Le Conseil Supérieur de l’Éducation, de la Formation et de la Recherche Scientifique (CSEFRS) recommande de revoir la quintessence de ce texte pour parachever la fondation du précepte de la nouvelle école selon une approche intégrale», a lancé mardi lors d’une rencontre de communication à Rabat, le président du Conseil, Habib El Malki, à propos du projet de loi relatif à l’enseignement scolaire. L’Institution prône un nouveau modèle pédagogique qui permet de passer de la logique de «bourrage» à celle de l’apprentissage et de l’autonomie intellectuelle.
Lors de cette même rencontre, le CSEFRS a rendu publics trois autres avis suite à leur approbation par l’assemblée générale en réponse aux demandes du gouvernement concernant des textes législatifs relatifs au système d’éducation, de formation et de recherche scientifique. Il s’agit, outre le projet de loi 59.21 portant sur l’enseignement scolaire, du projet de décret relatif à l’orientation scolaire, professionnelle et universitaire, du projet de décret concernant l’ingénierie linguistique et du projet de décret complétant le décret 2.04.89 fixant les compétences des universités et portant sur les équivalences.
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Le président du CSEFRS a souligné que les demandes d’avis qui ont été soumises au Conseil ces derniers mois, ont été au cœur de sa compétence, en tant qu’organe constitutionnel consultatif chargé d’émettre des avis au profit du gouvernement et du Parlement, conformément aux dispositions juridiques et aux Hautes directives royales.
«Notre objectif est de contribuer à une réflexion participative et constructive, en faveur du système national d’éducation et de formation, dans sa dimension globale et intégrée, basée sur la qualité, l’équité et le mérite, et de créer les conditions favorables pour asseoir les bases d’une nouvelle école, en harmonie avec la vision stratégique 2015-2030», a-t-il conclu.
L’ensemble des avis s’accordent à ce que les textes soient revus, prenant en considération les observations et propositions présentées par les membres du Conseil, avant de transférer les moutures finales au Secrétariat général du gouvernement.
Revoir la quintessence du projet de loi relatif à l’enseignement scolaire
Dans son avis relatif au projet de loi 59.21 portant sur l’enseignement scolaire rendu public le 03 juillet 2023, le CSEFRS précise que, du point de vue méthodologique, ce projet de loi est censé évoquer les principes et dimensions liés à l’ensemble des composantes de l’enseignement scolaire, ainsi que les dispositions législatives qui l’encadrent, notamment la loi portant création des Académies régionales d’éducation et de formation. Or, le texte ne porte pas sur toutes les questions liées aux fonctions, missions, composantes, gouvernance, financement et évaluation du système de l’enseignement, estime le Conseil.
Présenté par Mohamed Bouchikhi, membre du Comité permanent en charge de la gouvernance du système national de l’éducation, l’avis du Conseil formule «une trentaine d’observations». Un avis dans lequel le Conseil insiste sur la nécessité de considérer l’intérêt supérieur de l’enfant, ainsi que la centralité de l’apprenant comme pilier essentiel de l’édification d’une école nouvelle.
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L’institution plaide, par ailleurs, pour l’activation du rôle social de l’école et l’équité territoriale pour assurer un accès effectif à une éducation de qualité. Le CSEFRS souligne, en effet, l’importance de respecter les principes de la justice spatiale et sociale entre toutes les régions et tous les milieux pour assurer l’égalité et réduire le décrochage scolaire. L’objectif est de mettre l’accent sur l’égalité entre les deux genres.
S’agissant du fond, le CSEFRS souligne la nécessité de garantir une transition vers un modèle pédagogique établi sur les acquis de l’apprentissage. Le Conseil appelle à intégrer l’éducation culturelle, valorisante, artistique et sportive dans les programmes et à les inclure dans les emplois du temps des enseignants et des apprenants.
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Il appelle également à mobiliser les ressources nécessaires à cet effet, tout en veillant à l’application effective de l’indépendance de l’institution scolaire, dans le cadre de l’application effective de la décentralisation et de la déconcentration. Le Conseil souligne la nécessité de qualifier les métiers de l’éducation et de la formation, d’améliorer les conditions de travail des cadres pédagogiques et d’œuvrer au développement de l’enseignement à distance.
De plus, l’Institution plaide pour l’implication des familles dans le fonctionnement de la nouvelle école, à travers le renforcement des liens directs, une communication régulière avec elles et leur implication dans l’action culturelle et gestionnaire
Le Conseil exhorte, par ailleurs, les collectivités territoriales à participer activement au développement de l’enseignement scolaire, évoquant, dans ce sens, les mesures législatives, organisationnelles et financières qu’exige cette participation.
Du point de vue de la forme, le Conseil a constaté que ce projet de loi nécessite un préambule présentant notamment une explication du concept d’«école nouvelle», clarifiant les objectifs du projet et évoquant son cadre de référence.
Élaborer un système d’orientation plus cohérent avec l’ensemble des composantes de la réforme
Pour ce qui est de l’avis portant sur le projet de décret relatif à l’orientation scolaire et professionnelle et au conseil universitaire, le texte «n’englobe pas de vision claire sur l’essence de l’orientation», déplore Amina Lemrini El Ouahabi, membre du Bureau du CSEFRS et présidente de la Commission permanente des curricula, programmes, formations et outils didactiques. Présentant l’avis du conseil sur l’orientation, qui, pour rappel, a déjà fait l’objet d’un autre avis en 2021, la responsable relève l’absence de lois sur la formation professionnelle et l’enseignement supérieur dans la loi-cadre.
«Cette nouvelle version a démontré que ce projet repose sur une approche circonstancielle, sélective et fragmentée, qui conduit principalement à améliorer les composantes et les mécanismes du système actuel, sans parvenir à la réforme globale souhaitée», déplore le CSEFRS dans son avis.
Pour le Conseil, il est nécessaire de mettre en cohérence l’ensemble des composantes de la réforme pédagogique dans la perspective de construire la «nouvelle école». À l’occasion, la responsable a rappelé la durée de six ans fixée par la loi-cadre pour revoir intégralement ce système tandis que la réforme 2015-2030 bat son plein. Entre-temps, elle recommande, tout comme le Conseil, «l’émission de textes régissant le système d’éducation, de formation et de recherche scientifique».
«Dans le but d’asseoir un nouveau modèle de l’orientation, le Conseil recommande l’adaptation du contenu du décret avec les exigences de la loi-cadre, et des textes législatifs et réglementaires qui s’y rattachent, pour permettre la mise en place d’une nouvelle vision structurée de l’orientation. Dans ce sens, le Conseil souligne la nécessité de lancer une dynamique globale de la réforme globale du système d’orientation scolaire, professionnel et universitaire sur la base de la coordination entre toutes les composantes du système et du respect des délais spécifiés dans la loi-cadre», précise le CSEFRS dans son avis.
Le Conseil appelle à se concentrer sur un ensemble d’exigences préliminaires, à la tête desquelles vient la promulgation des textes législatifs relatifs à la création du comité permanent chargé du renouvellement continu et de l’adaptation des curricula, des programmes et des formations. Le comité aura pour mission d’élaborer les guides et cadres référentiels et un nouveau modèle pour faire évoluer les métiers de l’orientation scolaire et professionnelle et de l’orientation universitaire. Il sera également chargé de l’élaboration d’un référentiel national de certification.
Le Conseil appelle également dans le cadre de cet avis à la mise en place d’un observatoire national pour l’adéquation entre les nouveaux métiers et formations et les besoins du marché du travail.
Mettre en œuvre de l’ingénierie linguistique de manière cohérente
S’agissant de son avis relatif au projet de décret fixant les applications de l’ingénierie linguistique dans l’enseignement scolaire, la formation professionnelle et l’enseignement supérieur, le Conseil appelle à asseoir les bases de la «nouvelle école» à travers une vision systémique requise par la réforme globale et profonde du système éducatif. Pour Mohamed Bouchikhi, «le projet de loi doit refléter les attentes de la société à l’égard de la nouvelle école à travers les programmes scolaires, les pratiques pédagogiques et les contrôles entre autres». Une école qui met «l’apprenant au centre de ses activités et préoccupations».
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Le Conseil recommande ainsi un nouveau modèle pédagogique permettant de passer de la logique de «bourrage» à celle de l’apprentissage et de l’autonomie intellectuelle. Un modèle où les compétences linguistiques complètent les autres compétences pour contribuer à la formation intellectuelle et culturelle des citoyens.
Dans les détails, le CSEFRS estime que l’intégralité des articles de ce projet de loi se limite à rappeler les objectifs et principes fondamentaux liés à l’application de l’ingénierie linguistique au lieu de les détailler et de les traduire en procédures pratiques.
Dans ce sens, l’Institution recommande le lancement des travaux du comité permanent des curricula, des programmes et des formations qui devra se charger de la mise en place du cadre relatif aux applications d’ingénierie linguistique. Le Conseil met en avant l’importance d’anticiper la mise en œuvre à travers la réhabilitation des ressources humaines en fixant les conditions légales d’accès à la profession d’enseignant de langues, et les conditions pédagogiques de la formation des enseignants et l’évaluation professionnelle.
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Le CSEFRS souligne enfin la nécessité de fixer des délais maximums pour la mise en œuvre des mesures procédurales d’ingénierie linguistique au niveau de chaque cycle. De même qu’il rappelle l’importance d’adapter le contenu du texte relatif aux définitions et éléments destinés aux applications d’ingénierie linguistique ciblées. Le Conseil cite, en ce sens, la dimension conceptuelle employée pour mettre en œuvre le principe d’alternance linguistique comme option didactique, tout en vérifiant l’approche approuvée à cet égard et les niveaux de son inclusion. À cet égard, le Conseil recommande «l’accompagnement de l’instauration de l’alternance linguistique», permettant aux apprenants de «jouir du droit de la maîtrise linguistique en s’adaptant au milieu rural et à des situations de vulnérabilité».
Adopter des alternatives appropriées au projet de fin d’études
Concernant son avis sur le projet de décret modifiant et complétant le décret fixant la vocation des établissements universitaires, les cycles des études supérieures et les diplômes nationaux correspondants, ainsi que l’avis sur le projet d’arrêté approuvant le cahier des normes pédagogiques nationales du cycle de la licence, le Conseil souligne l’importance de compléter les dispositions du projet de décret pour les rendre conformes à ce qui se pratique au niveau international. Il propose un ensemble de recommandations dont la mise en place des conditions idoines pour le système de crédits et pour le diplôme universitaire (post-doctorat).
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Le Conseil préconise la mise en place d’un «cadre national de référence pour l’équivalence des diplômes». Le Conseil recommande également de revoir le système d’orientation, de conseil universitaire et de réorientation, notamment pour les établissements en libre accès.
Par ailleurs, l’instance consultative propose l’adoption d’alternatives appropriées au projet de fin d’études. Et, parmi les recommandations les plus importantes de ce projet figurent l’annulation des stages professionnels ainsi que la possibilité de réorientation avec la préservation des crédits acquis.
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