Temps de lecture : 7 minutes
Temps de lecture : 7 minutes
Temps de lecture : 7 minutes
La réouverture de Bab Sebta et de Bab Melilia avait marqué la résolution d’une longue crise diplomatique entre le Maroc et l’Espagne. Cet événement avait été célébré par les résidents, car, en plus de leur permettre de rendre visite à leurs familles, il allait stimuler une reprise économique. Les opérateurs touristiques et les commerçants locaux partageaient alors le même optimisme. Toutefois, la reprise n’a pas été à l’identique puisque la réouverture des deux points de passage a été assortie de mesures drastiques visant à lutter contre la contrebande. Depuis, les habitants de Fnideq et de Tétouan, près de Sebta, et ceux de Béni-Ansar et de Nador, près de Melilia, ont appris à vivre autrement.
Lire aussi : Les douanes commerciales de Sebta et Melilia tardent à rouvrir
Patriotisme économique
La cessation de la contrebande avec Sebta et Melilia a entraîné des conséquences significatives pour la vie des habitants. Les produits espagnols restent présents, mais leur prix a augmenté en raison de l’introduction de taxes douanières. Auparavant, ces produits, très appréciés par de nombreux consommateurs marocains, parvenaient facilement aux différents marchés grâce aux «femmes-mulets». Aujourd’hui, ils passent principalement par le port de Tanger Med ou encore celui de Casablanca, ce qui alourdit la facture pour les revendeurs.
Mais malgré tout, les commerçants continuent d’importer légalement ces produits puisque même après dédouanement, leur marge bénéficiaire demeure élevée. Quant aux citoyens qui avaient l’habitude de faire leur shopping à Sebta ou à Melilia, ils sont surpris à leur retour d’une saisie automatique sur les marchandises achetées dans les présides occupés.
Ce n’est pourtant pas sur la base d’une circulaire signée par le directeur général de l’Administration des douanes et impôts indirects (ADII), Abdellatif Amrani, que les douaniers procèdent à la saisie. Une instruction verbale des autorités locales a sonné la mobilisation des agents de l’ADII pour freiner net tout passage de marchandises venant de Sebta ou de Melilia.
De ce fait, il n’y a pas de franchise pour des effets personnels achetés dans les présides occupés et il n’est pas possible de payer les frais de douane sur ces produits. Les officiers de la douane sont obligés de confisquer toute marchandise et de rédiger un procès-verbal sans poursuite judiciaire à l’encontre de tout citoyen transportant une quelconque marchandise, qu’il s’agisse d’une paire de chaussures ou d’un paquet de chips. Toutes les marchandises saisies sont détruites.
Gênés du fait qu’il n’y ait aucune communication officielle à ce sujet, les douaniers donnent la possibilité aux «contrevenants» de faire demi-tour pour rendre les produits achetés et se faire rembourser. L’absence de communication officielle sur ce sujet paraît évidente : le Maroc veut asphyxier économiquement les présides occupés, mais ne veut pas s’avancer de manière directe dans cette voie après la fin de la brouille diplomatique avec l’Espagne et le soutien du voisin du Nord au plan marocain d’autonomie pour le règlement de l’affaire du Sahara.
Lire aussi : [EXCLU] Ryad Mezzour : la souveraineté industrielle est une priorité nationale
Pression espagnole
Selon les estimations, l’État marocain perdait près de 10 milliards de DH (MMDH) par an en raison de la contrebande et l’industrie marocaine était mise à mal par ce fléau. Avant même la réouverture des points de passage en 2022, les autorités marocaines avaient mis en place un plan visant à proposer des alternatives aux contrebandiers avec un vaste programme d’emploi et des incitations fiscales aux importateurs. Quant aux pourparlers visant à rouvrir les douanes commerciales à Bab Sebta et Bab Melilla, elles connaissent des retards importants. Trois tests pilotes ont été effectués, mais de nombreuses contraintes doivent encore être surmontées avant que ces douanes ne puissent être effectivement rouvertes. Des correspondances entre les douanes marocaine et espagnole au cours des derniers mois, auxquelles le quotidien ibérique El País a eu accès, indiquent que le calendrier convenu n’a pas été respecté, en grande partie à cause du Maroc, qui semble jouer sur les délais. Alors que l’Espagne insiste pour réaliser davantage de tests pilotes avant de passer à la phase définitive, le Maroc considère que les tests réalisés jusqu’à présent ne sont pas «concluants» et insiste pour en effectuer davantage «avant de considérer toute autre étape». En outre, le Maroc appelle l’Espagne à intensifier ses efforts dans la lutte contre la contrebande.
Lire aussi : Fnideq : démarrage de la Zone d’activités économiques
Le chef de la diplomatie espagnole, José Manuel Albares, était revenu sur le sujet fin février, devant la commission des Affaires étrangères au Sénat espagnol. Albares avait souligné que le projet de réouverture de la douane de Melilia, fermée par le Maroc en 2018, et l’ouverture d’une nouvelle à Sebta, «permettra la création d’une zone de prospérité partagée grâce à un flux légal et contrôlé de marchandises de part et d’autre de la frontière». Il faut dire que la situation économique dans les présides occupés est intenable depuis l’arrêt de la contrebande. Les commerçants de Sebta et de Melilia ont organisé plusieurs sit-in demandant l’ouverture rapide des douanes commerciales pour relancer les échanges de marchandises.
Au final, il convient de noter que la mise en place de douanes à Sebta et Melilia, qui pourrait conduire à la normalisation du trafic de marchandises, impliquerait une reconnaissance tacite de la souveraineté espagnole sur ces deux présides occupés. Aujourd’hui, le citoyen marocain paie les pots cassés en se rendant à Sebta et à Melilia pour faire de bonnes affaires, surtout pendant les soldes, n’imaginant guère que tout ce qu’il achètera sera saisi et détruit à son retour. Un patriotisme économique qui ne dit pas son nom et des aberrations impardonnables, à l’image d’un panneau publicitaire 4×3 sur une grande artère de Nador affichant la promotion d’un magasin de prêt-à-porter basé à Melilia…
L’abnégation et le professionnalisme des agents de l’ADII ne suffisent pas. Une campagne de sensibilisation des citoyens s’avère nécessaire. Elle doit expliquer que les produits achetés dans les différents marchés supposés «de contrebande», comme Al Massira à Fnideq, Oulad Mimoun à Nador, Casabarata à Tanger ou encore Derb Ghallef à Casablanca, sont en fait importés d’Espagne ou de Chine avec une moindre qualité. Les consommateurs peuvent avoir des produits alimentaires, d’habillement ou high-tech de meilleure qualité et au meilleur prix dans les différents espaces commerciaux et avec la garantie en plus.
Temps de lecture : 7 minutes
PLF 2025 : résilience consolidée de l’économie marocaineLe rapport économique et financier, récemment publié, démontre que l'économie marocaine a fait preuve d'une résilience remarquable malgré un… |
PLF 2025 : nouveau souffle pour la fonction publiqueLe projet de loi de Finances (PLF) 2025 met en lumière plusieurs réformes et ajustements visant à améliorer la gestion des ressources humain… |
PLF 2025 : où en est la dette publique ?Les données du rapport sur la dette publique indiquent une croissance continue. Cette augmentation est due à plusieurs facteurs, dont des dé… |
PLF 2025 : impôt sur le revenu, à quels changements s’attendre ?Cette réforme s’inscrit dans une démarche visant à optimiser le système fiscal du pays, tout en favorisant l’augmentation du pouvoir d’achat… |
Grands axes du PLF 2025 : santé, éducation et emploi au premier planConçu dans un contexte de pressions climatiques, économiques et sociales accrues, le projet de loi de Finances (PLF) 2025 s'inscrit dans une… |
Emploi, pouvoir d’achat, IR… que nous réserve le PLF 2025 ?Le 19 octobre, Nadia Fettah, ministre de l’Économie et des Finances, a présenté le PLF 2025. Entrons directement dans le vif du sujet avec c… |
Marché : la viande toujours en hausseEn observant les prix des légumes cette semaine, on remarque une relative stabilité dans certaines catégories. Mais attention, on dit bien r… |
La vente de Sanofi en France: quel impact sur la fabrication du Doliprane au Maroc?Le Doliprane, dont le principal composé chimique est le paracétamol, est un médicament largement utilisé au Maroc pour traiter des affection… |