Accueil / Économie

Sardines à prix d’or : la faute à qui ?

Temps de lecture

Sardines. © DR

L’augmentation fulgurante des prix des produits de la mer, en particulier des sardines, suscite un débat intense sur les causes de cette flambée qui atteint des niveaux sans précédent durant l’été 2024. Face à cette crise, de nombreuses familles, notamment les plus vulnérables et les ménages de la classe moyenne, se voient contraintes de renoncer à un aliment de base de leur quotidien. Les professionnels du secteur dénoncent l’influence de pratiques douteuses et appellent à une régulation rigoureuse pour rétablir l’équilibre du marché.

Confrontés à cette crise, les acteurs de la pêche ont sollicité une intervention du Conseil de la concurrence pour réguler les circuits de commercialisation du poisson et stabiliser les prix, tout en combattant des pratiques commerciales douteuses. Par ailleurs, la Confédération nationale des commerçants de poisson en gros a avancé plusieurs propositions pour réformer les pratiques et techniques de pêche actuelles.

Lire aussi : Conseil de la concurrence : soupçons d’entente sur les prix dans le secteur de la sardine

Appel à régulation et réforme des pratiques de pêche

Dans un communiqué, la Confédération a affirmé que les grossistes en poisson, opérant sous le cadre légal de la loi 08-14, respectent rigoureusement les réglementations en vigueur, depuis la réception au port jusqu’aux transactions dans les marchés de gros, sous la supervision de l’Office national des pêches ou des agents désignés. Elle a précisé que leur responsabilité se limite aux marchés de gros.

Selon cette organisation professionnelle, trois principaux facteurs influencent les prix du poisson. Le premier est l’absence de régulation efficace de l’offre et de la demande, ainsi que le manque de solutions pour contrôler l’accès aux marchés, une problématique récurrente qui reste sans réponse. Cette situation entrave la gestion durable des ressources maritimes et l’équilibre du marché.

Le deuxième facteur est lié aux conditions climatiques, qui affectent directement l’environnement marin. Le non-respect des normes établies par l’Institut national de recherche halieutique et la surpêche ont conduit à une exploitation excessive des ressources, au mépris des périodes de repos biologique indispensables pour préserver les stocks de poissons.

Enfin, la Confédération souligne l’absence d’une vision stratégique pour valoriser les produits de la mer dans les marchés portuaires et les centres de tri. Elle plaide pour l’instauration d’un véritable système d’enchères, notamment pour les sardines, afin de se conformer à la stratégie Halieutis, qui vise à augmenter la valeur ajoutée, améliorer les revenus des pêcheurs, et garantir la durabilité des ressources halieutiques.

Vers une convention collective

Pour encadrer efficacement les prix du poisson, la Confédération appelle à la mise en place d’une convention collective réunissant le Conseil de la concurrence, l’Office national des pêches (ONP), l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA), et le ministère de la Pêche. Cette synergie est jugée indispensable pour établir un prix d’achat juste, tout en assurant la qualité des produits de la mer jusqu’au consommateur final.

En outre, la Confédération milite pour l’adoption d’une «loi sur la deuxième vente», destinée à être intégrée dans le cadre législatif actuel régissant la pêche et la commercialisation des produits halieutiques.

Elle rappelle que le commerce de gros du poisson est régulé par la loi 08-14, composée de 35 articles visant à garantir la durabilité des ressources maritimes. La Confédération mentionne également la loi 12-15, qui supervise le suivi des espèces pêchées jusqu’à leur vente au détail, ainsi que les législations en vigueur concernant la sécurité des produits alimentaires. Selon elle, les grossistes ont un rôle important au sein de cet écosystème, interagissant étroitement avec tous les acteurs professionnels du secteur.

Lire aussi : Pêche et aquaculture en UE : le Maroc sur le podium des fournisseurs

Flambée des prix et déséquilibre de l’offre

Alors que les prix du poisson continuent de grimper, pesant lourdement sur le budget des citoyens, les professionnels estiment que la crise trouve principalement son origine dans un déséquilibre persistant entre l’offre et la demande. Ce phénomène s’accentue durant l’été et le mois de Ramadan, périodes où les prix s’envolent bien au-delà des tarifs pratiqués sur les marchés de gros.

Les marchés de gros dans des métropoles telles que Marrakech, Casablanca, Meknès, Fès, et Tanger subissent également les effets de cette baisse de production, amplifiée par la raréfaction des sardines en provenance de ports comme Sidi Ifni, Essaouira, Safi, et El Jadida, qui sont les principaux fournisseurs de ces régions. La production réduite, difficile à écouler, a provoqué une flambée des prix, atteignant parfois jusqu’à 1.000 DH par caisse dans certains ports du nord et du centre. Abdellatif Saadouni, président de la Confédération, dénonce cette hausse vertigineuse des prix, qu’il attribue davantage à une «surenchère obstinée» qu’à une réelle problématique de concurrence.

Face à cette situation, la Confédération nationale des commerçants de poisson en gros appelle le ministère de la Pêche et l’Office national des pêches à réévaluer certaines mesures et directives précédentes, tout en œuvrant à une restructuration des pêcheries en collaboration avec les autorités concernées. Elle met en garde contre la prolifération des points de vente informels, l’anarchie qui règne sur certains marchés, la médiation illégale et le manque de contrôle rigoureux sur les méthodes de pêche. Autant de facteurs qui contribuent à l’escalade des prix des produits de la mer.

La pénurie de sardines ne se limite pas à la consommation directe ; elle perturbe également l’ensemble de la chaîne de valeur, affectant tant la pêche côtière que les navires réfrigérés (RSW). Ce déséquilibre, souligne la Fédération des pêches maritimes (FPM), impacte gravement les usines de transformation, créant une situation préoccupante pour tout le secteur.

Pour remédier à cette crise, la FPM propose la mise en place d’un système de zonage, à déterminer par les autorités compétentes. Ces recommandations ont déjà été transmises aux pouvoirs publics, dans l’espoir d’une action rapide pour stabiliser le marché et préserver la filière.

Dernier articles
Les articles les plus lu

L’inflation attendue à 0,8% au T4-2024 (BAM)

Économie - BAM a indiqué l’inflation au Maroc devrait revenir à 0,8% au quatrième trimestre (T4) 2024, après 1,3% le trimestre précédent.

Mbaye Gueye - 19 décembre 2024

L’ACAPS renforce la protection des assurés, affiliés et adhérents

Économie - L'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) a publié son rapport annuel 2023.

Mbaye Gueye - 18 décembre 2024

Injaz Al-Maghrib : une assemblée générale sous le signe des réalisations et de l’avenir

Économie - L’assemblée générale ordinaire d’Injaz Al-Maghrib s’est tenue le 17 décembre 2024 au siège de Wafa Assurance, à Casablanca.

Mbaye Gueye - 18 décembre 2024

Banques : le besoin en liquidité atteint 131,6 MMDH au T3 2024

Économie - Le besoin en liquidité des banques marocaines a atteint 131,6 MMDH en moyenne hebdomadaire au troisième trimestre 2024

Rédaction LeBrief - 18 décembre 2024

Le dirham s’apprécie de 2,3% face au dollar américain au T3-2024 (BAM)

Économie - Bank Al-Maghrib (BAM) a annoncé que le dirham s’est apprécié de 2,3% face au dollar et de 0,31% vis-à-vis de l’euro au troisième trimestre 2024.

Mbaye Gueye - 18 décembre 2024

5G au Maroc : un défi technologique avant le Mondial 2030

Économie - À l’approche du Mondial 2030, le Maroc aspire à intégrer pleinement la 5G dans son paysage technologique.

Ilyasse Rhamir - 18 décembre 2024

L’avenir énergétique du Maroc : un nouveau chapitre d’investissements et d’innovations

Économie - Le Maroc, dans un contexte mondial de transition énergétique, se positionne en acteur majeur grâce à des investissements colossaux dans les énergies renouvelables.

Farah Nadifi - 18 décembre 2024

Hausse de 1,8 million m3 de la capacité de stockage des produits pétroliers à horizon 2030

Économie - Leila Benali a annoncé une augmentation de 1,8 million de m³ des capacités de stockage des produits pétroliers d'ici 2030.

Rédaction LeBrief - 18 décembre 2024
Voir plus

PLF 2025 : impôt sur le revenu, à quels changements s’attendre ?

Économie - Au cœur de cette réforme, l’impôt sur le revenu (IR) fait l’objet d’une révision significative. Selon Mohamed Rahj, professeur à l’Université et consultant expert des questions en fiscalité, l’objectif principal de ce projet est de « rehausser le salaire net des employés sans accroître la charge des employeurs ».

Farah Nadifi - 21 octobre 2024

Coupe du Monde 2030 : la feuille de route

Économie, Sport - Le Maroc, l’Espagne et le Portugal préparent une Coupe du Monde qui marquera l’histoire. Ce projet tripartite dépasse le cadre sportif pour devenir un levier stratégique.

Farah Nadifi - 5 décembre 2024

PLF : voici les principales actions programmées en 2024

Économie - Le projet de loi de Finances (PLF) pour l’année 2024 a été adopté, jeudi 19 octobre, par le Conseil de gouvernement

Manal Ben El Hantati - 23 octobre 2023

Importations de céréales : les chiffres de 2024

Économie - Entre janvier et novembre 2023 et la même période en 2024, les importations totales de produits ont augmenté de 9 %.

Mbaye Gueye - 2 décembre 2024

Port de Tarfaya : une extension de la halle aux poissons pour 5 millions de dirhams

Économie - Le port de Tarfaya a renforcé son infrastructure avec l’extension de la halle aux poissons comprenant un espace de vente.

Rédaction LeBrief - 19 novembre 2024

Dessalement : le Maroc et les USA unissent leurs forces pour l’avenir de l’eau

Économie - Un atelier organisé par l’ONEE en partenariat avec l’Ambassade des États-Unis met en lumière les dernières avancées technologiques dans le domaine du dessalement.

Ilyasse Rhamir - 3 décembre 2024

Un commentaire

  1. On raillait les voisins de l »Est pour  » rareté  » des sardines et leur cherté eh bien nous venons de les rejoindre malgré les 3000km +- de côtes maritimes.
    Et n’invoquez surtout pas les conditions climatiques, les raisons étant ailleurs

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire