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Cela fait plus de quatre ans que le projet est en gestation. La loi 72-18 relative au système de ciblage des bénéficiaires des programmes d’appui social et portant création de l’Agence nationale des registres (ANP), a été élaborée en 2018. Elle a été promulguée en 2021 ainsi que trois décrets d’application relatifs à la création de l’ANR, du Registre national de la population (RNP) et du Registre social unifié (RSU).
Le législateur a placé l’ANR sous la tutelle du ministère de l’Intérieur et non sous l’escarcelle du ministère de la Solidarité, de l’Insertion sociale et de la Famille. Il l’a définie comme un établissement public à caractère stratégique. Cette agence est gouvernée par un Conseil d’administration et une commission technique Ad hoc. Pour ce qui est du RNP et du RSU, la loi vise la mise en place d’un système national d’enregistrement des ménages et des individus désirant bénéficier de programmes d’appui social. Ce système sera géré par l’ANR. Pour ce faire, elle veillera à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel, notamment biométriques, à travers l’échange de données cryptées et une infrastructure technique hébergée au ministère de l’Intérieur.
Généralisation du déploiement
Depuis le début de l’année, le ministère de l’Intérieur a généralisé le déploiement du processus d’inscription au RNP et au RSU. Des instructions ont été données aux représentants de l’administration territoriale et aux agents d’autorité pour accélérer le processus. Objectif : terminer la phase d’inscription avant la fin de l’année 2023.
Au niveau des zones rurales, cela semble compliqué surtout que l’outil technologique fait défaut. L’inscription se fait sur les sites www.rnp.ma et www.rsu.ma de manière individuelle. La majorité des citoyens ont recourt aux services d’un cybercafé mais plusieurs demandes sont incomplètes, d’où la nécessité d’un déplacement au caïdat ou pachalik pour finaliser leur inscription. «Nous recevons de la part des services centraux un listing avec les noms et prénoms des citoyens, leurs numéros de cartes nationales et trois cases à remplir : RNP, RSU et AMO (Assurance maladie obligatoire). Nous avons l’obligation de prendre contact avec les citoyens et de leur demander de venir à nos bureaux pour s’inscrire ou finaliser leur inscription», raconte un moqaddem travaillant dans une zone campagnarde. Cet auxiliaire d’autorité avoue ne pas comprendre grand-chose à ce système et ne se pose pas trop de questions. Il sait que la première case c’est celle du registre national, la secondaire celle du social et la troisième celle de l’assurance maladie. Pour lui, il faut remplir la mission et terminer son listing de 548 citoyens à raison de quatre personnes par jour ouvrable. Il espère avoir bouclé le travail avant l’Aïd El-Kébir. Il confie néanmoins qu’il a de la difficulté pour lire certains noms puisque les listings sont édités en langue française.
Le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, suit ce projet de très près. Le 28 novembre 2022, il a signé une circulaire à l’adresse des walis et des gouverneurs, les appelant «à veiller à communiquer avec les citoyens, à les bien accueillir et à leur fournir les informations nécessaires afin de garantir la souplesse et la fluidité de cette campagne d’inscription». Il n’est pas question pour Laftit de ternir l’image de ce chantier voulu par le chef de l’État.
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RNP : mode d’emploi
Registre numérique auquel peut s’inscrire tout citoyen marocain ou étranger résidant au Maroc, le RNP vise à simplifier l’accès aux programmes d’appui social et à la vérification instantanée de l’authenticité des données de la personne inscrite. Lors de l’inscription, un numéro unique, appelé Identifiant digital civil et social (IDCS), est attribué. Composé de 10 chiffres, l’IDCS permet de d’inscrire son ménage au RSU. Déjà pour s’inscrire au RNP, le citoyen a la possibilité de faire les démarches de pré-inscription en ligne (www.rnp.ma) ou se diriger vers l’annexe administrative relevant de son lieu de résidence. Une image faciale et de l’iris des yeux est prime pour garantir l’identité unique de chaque personne.
Ainsi, les données biométriques du demandeur sont comparées avec l’ensemble des données enregistrées dans la base de données du RNP. L’identifiant n’est octroyé qu’au cas où il n’existe aucune autre inscription au sein de la même base de données biométriques. Pas de fraude possible à ce niveau. De plus, l’IDCS est utilisé pour vérifier et simplifier l’interopérabilité entre les différents systèmes de données relatives aux programmes d’appui social, une fois que la personne membre d’un ménage s’inscrit au RSU.
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RSU : comment ça marche ?
L’IDCS est un préalable à l’inscription au RSU qui sera le seul mécanisme utilisé par les programmes d’appui social pour déterminer l’éligibilité des familles bénéficiaires. C’est dire que l’inscription au RNP et l’obtention de l’IDCS est un passage obligé si l’on veut s’inscrire au RSU. Ce dernier n’est pas un programme d’aide mais c’est lui qui détermine le programme social adéquat à chaque bénéficiaire. Si l’inscription au RNP est individuelle, celle au RSU se fait par ménage comme défini par le Haut-Commissariat au plan (HCP).
Un ménage est un groupe de personnes parentes ou non, vivant habituellement dans un même logement dont les dépenses sont généralement communes. Une personne vivant seule est considérée comme constituant un ménage d’une personne. Chaque ménage inscrit au RSU reçoit un indice socio-économique utilisé par les programmes d’appui social pour déterminer l’éligibilité.
À noter que l’inscription au RSU (www.rsu.ma) est une étape obligatoire pour pouvoir prétendre aux programmes d’aide sociale. Pour cela, il faut penser à remplir un formulaire en partageant des données personnelles et socio-économiques du ménage (type de logement, nombre de chambres, zone géographique, métier du déclarant, frais de consommation d’eau, d’électricité, de téléphone ou de gaz). Une fois les données fournies vérifiées, un indice socio-économique du ménage est établi. La méthodologie de calcul de cet indice se base sur des indicateurs socio-économiques et démographiques selon une formule de scoring élaborée par le HCP sur la base des enquêtes nationales de la consommation et les dépenses des ménages. Par contre, le seuil d’éligibilité pour chaque programme est défini selon les objectifs du programme et des moyens disponibles, mais aussi en tenant compte de la scolarité des enfants du ménage, du veuvage ou encore du handicap.
Place au ciblage
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’inscription au RNP et au RSU ne donne pas automatiquement le droit de bénéficier aux programmes d’aide. L’idée n’est pas d’en finir avec un système d’aide généralisé pour en créer un autre. À titre d’exemple, l’État veut faire payer le gaz butane au juste prix et arrêter sa compensation. Aujourd’hui, tous les ménages, qu’ils soient nantis ou démunis, achètent la bonbonne de gaz de 12 kg à 40 DH alors qu’elle coûte 130 DH.
C’est-à-dire que l’État subventionne pour 90 DH la bouteille de gaz alors que des ménages ont les moyens de la payer au prix réel. Le RSU permettra de cibler les ménages qui ont droit à l’aide étatique pour leur approvisionnement en gaz butane. Idem pour les autres subventions et bien plus encore. Des programmes d’aide spécifiques pourront voir le jour en ciblant parfaitement les bénéficiaires sur la base de critères objectifs, mesurables et équitables. Selon les experts, ce système de ciblage rationnel basé sur des critères objectifs permettra d’adopter des politiques d’appui social plus ciblées et permettre une meilleure rentabilisation de l’action de l’État qui profitera aux vrais bénéficiaires.
L’État social prendra alors tout son sens en travaillant sur une réduction des disparités sociales et spatiales. En définitive, le RSU permettra de simplifier les procédures d’accès aux programmes et donc de renforcer l’inclusion. Il facilitera l’abandon de certains programmes de soutien étatique qui se chevauchent.
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Qu’adviendra-t-il des programmes d’aide existants ?
Certains programmes d’aide sociale ont vu le jour ces dernières années. Le programme Tayssir soutient financièrement les familles des nouveaux élèves de l’enseignement primaire, poursuivant leur scolarité en milieu rural, ainsi que des collégiens du milieu rural et urbain. Il est piloté par le ministère de l’Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports.
Daâm est quant à lui supervisé par le ministère de la Solidarité, de l’Inclusion sociale et de la Famille. Depuis 2015, ce programme financé par le Fonds d’appui à la protection sociale et à la cohésion sociale, vise à aider les veuves à supporter les charges de la vie, notamment en ce qui concerne la scolarisation de leurs enfants ou la prise en charge de leurs enfants en situation du handicap. Tayssir, Daâm et les autres programmes existants ne seront pas abandonnés après la mise en place du RSU. Toutefois, le ciblage pourrait exclure certains bénéficiaires qui ne répondent pas aux critères retenus ou qui peuvent prétendre à un programme d’aide plus intéressant pour leur ménage.
Quand l’État veut, il peut. Pendant la période de confinement en 2020, le ministère de l’Intérieur a pu en un temps record identifier les bénéficiaires des aides étatiques. Malgré quelques ratés, l’opération fut un succès. Aujourd’hui, les agents de l’Intérieur ont des instructions claires pour inscrire massivement les citoyens au RNP et au RSU. En parallèle, ils ont pour mission d’identifier les personnes qui ne sont pas encore bénéficiaires de l’AMO et de faire en sorte qu’ils soient enregistrés pour être couverts. Il faudra maintenant fixer les prochaines étapes de déploiement du ciblage des citoyens qui auront droit aux aides directs de l’État.
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