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Nous l’avions oubliée le temps d’un Mondial. Mais très rapidement, elle nous aura ramenés à notre quotidien : l’inflation a, dès le début de l’année 2023, mis à mal les ménages. En toile de fond, la crise économique mondiale engendrée par le conflit russo-ukrainien, les effets liés à la Covid-19 (trois ans après encore) et le réchauffement climatique, les prix des produits de première nécessité étaient devenus trop élevés, détériorant le pouvoir d’achat de tous.
L’indice de confiance des ménages (ICM) a atteint son niveau le plus bas depuis le début de l’enquête en 2008, s’établissant à 46,3 points, comparé à 46,6 points au trimestre précédent et à 53,7 points il y a un an. Si quelques mois plus tard, cet indice s’est légèrement amélioré, les perspectives des 12 prochains mois ne laissent pas augurer un meilleur moral.
52,5% des ménages anticipent une détérioration du niveau de vie, contre 36,7% qui prévoient une stabilité et 10,8% qui espèrent une amélioration. Mais ce n’est là qu’une composante, l’indice évalue, par ailleurs, la perception des ménages concernant le chômage – qui inquiète 86,7% – ou encore la possibilité d’acheter des biens durables – qui pour 79,5%, ce n’est pas le bon moment de le faire.
Une population qui vieillit
Une situation qui fait d’autant plus redouter une «déprime», étant donné que les années à venir verront la société changer de composition démographique. Le vieillissement de la population se confirme davantage avec, en parallèle, une baisse continue du taux d’accroissement global et naturel de la population. La proportion de personnes âgées de 60 ans et plus a augmenté de 9,4% en 2014 à 12,7% en 2023, avec une projection à 23,2% en 2050.
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La jeunesse – estimée jusqu’à 11,8 millions selon que l’on se réfère à une classification ou une autre – est, elle, prise en étau. Cette génération qui incarne le dynamisme et le potentiel d’un pays en évolution, doit monter en puissance. Le Maroc pourra compter sur elle dans le cadre de la Coupe du monde qu’il compte organiser avec l’Espagne et le Portugal 2030. Reste à savoir si le département de la Jeunesse dirigé par un millennal, en la personne de Mohamed Mehdi Bensaïd, réussira à les impliquer davantage dans les affaires publiques.
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Car si peu d’initiatives nous sont parvenues, le ministre semble pourtant tenter. Une des actions qu’il a entreprise est le lancement officiel, l’été dernier, du Programme national de volontariat «Moutatawi3» : une initiative donne aux jeunes la possibilité d’avoir un impact positif dans différents domaines, afin de concrétiser le «rêve marocain». Croyant fermement que «la réussite du Maroc dépend de votre réussite», la tutelle compte accompagner les jeunes pour développer leurs compétences et les sensibiliser à leurs droits et devoirs. Actuellement, près de 3.300 jeunes se sont inscrits. L’objectif est d’atteindre 5.000 inscriptions l’année prochaine.
Le 7ᵉ recensement général de la population et de l’habitat, prévu en septembre 2024, nous éclairera mieux sur la nature de la société, dix ans après.
La Moudawana, l’espoir d’une réforme judiciaire
La femme marocaine, elle, qui représente plus la moitié de la population, de plus en plus éduquée et occupant de plus en plus de postes de responsabilités, est au centre de tous les efforts. Pour cause, l’élan royal insufflé à la révision du Code de la famille. Et il ne reste plus que trois mois avant que le gouvernement ne faille présenter la réforme au Souverain.
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Si le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, chargé de piloter la réforme, semble convaincu de la nécessité de garantir l’égalité des droits, les défis sont de taille. Car les amendements attendus doivent prendre en considération le référentiel islamique, les dispositions de la Constitution encadrant la famille (en tant qu’institution fondée sur le mariage et noyau de la société), les orientations royales et les «convictions de la société».
Mais si la Moudawana reste, en effet, l’un des chantiers majeurs nécessitant être réformé, une refonte du système judiciaire s’impose. 61% des Marocains expriment une inquiétude quant à l’insuffisance de la protection offerte par les lois actuelles en matière de libertés individuelles.
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«Décriminalisation» des relations sexuelles hors mariage, polygamie, ou encore rupture du jeûne dans l’espace public, le ministre a promis que le projet de Code pénal, qui devrait bientôt être présenté, marquerait une victoire pour les libertés individuelles. Le texte, très attendu, est, toutefois, susceptible de susciter des divergences parmi les composantes de la majorité elle-même.
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Protéger les mineurs
Pour bien des affaires, la justice marocaine a fait preuve de justesse. Et bien malheureusement, pour beaucoup d’autres elle a failli. Ça a été le cas lors du scandale qui a ébranlé le Royaume : le viol de la fillette de Tiflet. Après un verdict trop clément, la Cour d’appel de Rabat a néanmoins prononcé une sentence de 10 à 20 ans de prison pour les trois hommes qui ont violé à plusieurs reprises la fillette devenue maman à 12 ans.
Et cette affaire n’a pas été la seule à avoir choqué le Maroc. Le viol de l’adolescente de Tata par quatre hommes n’a pas aussi manqué de faire réagir ONG et société civile.
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En 2023, l’on ne peut énumérer les histoires de pédophilie et de viols, sinon celles qui sont portées à notre connaissance. Souvenons-nous également du pédophile d’El Jadida, qui s’est adonné publiquement à des attouchements sur mineurs, alors même qu’il était considéré comme un acteur associatif de confiance par les habitants d’un quartier Casablanca. Ou encore, l’homme de religion qui a contraint un jeune de moins de 20 ans à subir ses agressions sexuelles.
Le ministre de la Justice a promis en avril dernier que «le droit pénal a été revu pour protéger le principe juridique international» qui énonce l’importance de préserver et de protéger les droits des enfants, «y compris leur intégrité physique et le respect de leur entité et de leur existence».
La violence, ce fléau qui fait encore rage
Les terribles histoires de viol à l’encontre de mineurs n’ont pas été les seules à avoir marqué l’année 2023. Dans un nouveau rebondissement, l’affaire «Jacques Bouthier» a refait parler d’elle cet été. Si le principal accusé – libéré en mars dernier par la justice française, une décision qui remet en question l’impartialité de celle-ci – n’est pas poursuivi à ce stade au Maroc, – huit de ses collaborateurs (six Marocains, dont deux femmes, et deux Français) sont sous le coup de poursuites pour notamment «traite humaine».
Mais pas que ! Le procès du docteur Hassan Tazi, inculpé entre autres pour traite d’êtres humains, donne matière à s’inquiéter sur l’ampleur du phénomène. Le Maroc a, en ce sens, adopté le plan national de lutte et de prévention contre la traite des êtres humains 2023-2030, une stratégie qui a été saluée en juin dernier par les États-Unis.
Il est de noter que le surpeuplement des prisons est d’ailleurs un sujet de grande importance, celui-ci devant s’accentuer dans les années à venir. On s’attend à ce que le nombre de prisonniers atteigne 104.000 en 2026.
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Dans une teneur plus tragique, le meurtre du policier, dont le corps a été retrouvé calciné en mars à Had Soualem, près de Casablanca, a été un fait marquant. D’autant plus, que le motif terroriste a été avéré, les trois principaux suspects appartenaient à une «cellule» inspirée par l’idéologie de Daech et «étaient déterminés à s’engager dans un projet terroriste». Lesquels accusés ont été condamnés à la peine capitale pour l’un d’entre eux et à la réclusion à perpétuité pour les deux autres.
Quelques mois plus tard, ce sera un jeune étudiant qui sera assassiné, percuté délibérément par une voiture dans un parking d’un fast-food à Aïn Diab à Casablanca. Les premiers éléments de l’enquête avaient suggéré que l’incident pourrait être le résultat d’un différend qui aurait pris une tournure tragique.
Une violence qui dénote, bien souvent et malheureusement, dans nos rues lors de périodes censées apporter de la joie. En témoigne le décès, en juillet dernier, de deux enfants et d’un jeune de 17 ans lors des célébrations Achoura, une fête devenue terrifiante, aussi bien en milieu rural que dans les cités. Car «entre l’utilisation d’objets dangereux et des pratiques irresponsables, le cocktail est explosif». Parfois même, c’est la consommation de psychotropes et autres drogues qui aggrave les choses. À l’image de «L’poufa», cette drogue low-cost qui a fait des ravages au Maroc cette année.
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Si cette tendance mène parfois à des fins tragiques, elle inquiète tout particulièrement durant le mois de Ramadan qui voit d’année en année la «tramdina» prendre une ampleur démesure. Colère, nervosité, voire agressivité verbale ou physique, le Marocain a été, en 2023 dans un contexte de crise socio-économique caractérisé par une hausse générale des prix, «mramden» à tel point que les faubourgs de la région de Fqih Ben Saleh ont été le théâtre d’un meurtre.
Ce phénomène ramadanien qui fait des ravages dans les quatre coins du Royaume est surtout révélateur d’un profond mal-être d’une partie de la population marocaine 365 jours par an. À tel point, que la violence s’invite même dans les salles de classe. L’enquête menée en partenariat avec l’Unicef, dont les résultats ont été publiés en juillet dernier, tire la sonnette d’alarme et vient bousculer les perceptions positives du climat scolaire. Violence physique, verbale, harcèlement sexuel, vandalisme … Si la majorité des actes sont perpétrés par leurs camarades, les élèves sont encore victimes de leurs enseignants.
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L’année 2023, l’enseignement en grève
L’école est l’autre grande perdante de cette année. Et avec elle, les étudiants et leurs parents. La grève qui persiste depuis trois mois sans que gouvernement et syndicats ne puissent trouver un terrain d’entente a pénalisé les élèves en 2023. Ils sont nombreux à exprimer, à juste titre leur mécontentement, craignant l’année blanche. Car «chaque jour d’école perdu représente une opportunité d’apprentissage manquée».
Et sur ce plan, l’élève marocain accuse de beaucoup de lacunes. D’après l’étude internationale PIRLS sur les performances des élèves en lecture, dévoilée mardi 16 mai 2023, près de 60 % des enfants âgés de 10 ans ne savent pas lire l’arabe correctement ! Le Maroc reste à la traîne avec un score de 372 points, en deçà de la moyenne mondiale établie à 500 points. Si le département de Chakib Benmoussa a mis en place, lors de la rentrée 2023-2024, le projet «Écoles pionnières», la réalité des grèves et le niveau des élèves empêche l’école publique de remplir pleinement son rôle et entrave les progrès du pays en matière de formation du capital humain.
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Dans un registre plus positif, 421.000 bourses d’études universitaires ont été octroyées cette année par le département d’Abdellatif Miroui, en hausse de 20.000 bourses en comparaison avec l’année précédente. Le gouvernement ambitionne d’octroyer pas moins de 600.000 bourses à l’horizon 2030. Les critères d’éligibilité, eux, ont subi cette rentrée quelques changements. Principale nouveauté : la fixation du seuil d’éligibilité aux bourses d’études sera basée sur la liste des étudiants remplissant les conditions requises et qui seront tirées de la base de données du Registre social unifié.
Le séisme d’Al Haouz, un exercice et une leçon
Le 8 septembre, le Maroc tremble. Un violent séisme frappe la région d’Al Haouz, faisant près de 3.000 morts. Les populations les plus vulnérables en sont, malheureusement, les principales victimes. Le gouvernement s’active derrière la conduite du Souverain. Le pays, lui, se mobilise dans un extraordinaire élan de solidarité.
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C’était la seconde fois en moins d’un an que le Royaume faisait la une des médias du monde entier. Certains ont loué la réponse marocaine face à une catastrophe de grande ampleur, d’autres ont affiché un ton paternaliste. L’approche sensationnaliste de certains laissait entrevoir une empathie à demi teinte. Et pire, la prolifération des pseudo-journalistes locaux, poussée par les impératifs de la presse digitale, a fait place à une montagne de mésinformation, de désinformation et de malinformation où le citoyen, en première ligne, se retrouvait perdu.
Le tremblement de Terre d’Al Haouz a d’ailleurs été l’actualité qui a éclipsé une tragédie d’un autre genre, le drame de Saïdia survenu le 29 août 2023. Deux vacanciers marocains égarés en mer, à la frontière algérienne, ont été tués. Une troisième dépouille a, elle, à peine été restituée à sa famille.
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Cette année 2023, nous aurons pleuré le tragique décès de près de 3.000 de nos compatriotes dans la catastrophe naturelle du 8 septembre, les trois Marocains assassinés par la Marine algérienne et un autre concitoyen mort dans une déflagration à Es-Smara. Mais pas que !
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Cette année 2023, nous avons également perdu nos confrères, Omar Salim, Malika Meliani, Mhammed Azzaoui, figure emblématique du journalisme sportif, Abdelkader Retnani, figure marquante de l’édition marocaine et du monde littéraire, l’écrivain, conteur et avocat marocain, Bahaâ-Eddine Taud, Ahmed Herzenni, ambassadeur itinérant et ancien président du Conseil consultatif des droits de l’Homme (CCDH), Ahmed Chaouki Benyoub, délégué interministériel aux droits de l’Homme, Soumia Benkhaldoune, ancienne ministre déléguée PJD, Mohammed Moatassim, conseiller du roi Mohammed VI et Aïcha El Khattabi, fille du regretté Mohamed Ben Abdelkrim El Khattabi,
Nous avons également déploré la perte de l’artiste Imane Tsunami et le comédien Ahmed Jaouad, qui s’est immolé par le feu devant le siège du ministère de la Culture à Rabat. Puissent-ils reposer en paix.
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