Le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch. © DR
La récente initiative du chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, visant à réformer le droit de grève et les régimes de retraite a suscité un vif débat national. Annoncée dans un contexte de revendications accrues pour plus de justice sociale, cette démarche promet de redéfinir les normes du travail et de la retraite. Ces réformes, portées par un élan de modernisation, visent à adapter le cadre législatif aux réalités contemporaines du marché du travail et aux défis démographiques. Toutefois, Saïd Lamani soulève des préoccupations quant à la méthodologie adoptée, appelant à une implication plus large des acteurs concernés pour garantir l’équilibre et l’efficacité des mesures proposées.
Nouvelle loi sur le droit de grève pour 2024
Dans un récent discours lors d’une session plénière axée sur les politiques nationales, Aziz Akhannouch a abordé la question du droit de grève, affirmant qu’il n’était plus tolérable que le Maroc, fort de son histoire démocratique, demeure sans cadre légal spécifique pour réguler cette liberté fondamentale.
Akhannouch a souligné que, malgré plus de six décennies de reconnaissance constitutionnelle du droit de grève, le débat sur son organisation pratique stagnait. Pour briser cette impasse, il a annoncé une initiative : la rédaction d’une nouvelle loi organique sur le droit de grève, prévue pour être débattue lors de la prochaine session de dialogue social et soumise au Parlement cette année.
Le calendrier de cette législation a été revu, comme l’a révélé le chef du gouvernement, suite à l’accord du dialogue social d’avril 2024. La réforme, prévue pour discussion au Parlement en juillet 2024, a été ajustée en réponse aux réticences syndicales face aux premières propositions. Cette évolution témoigne de la complexité des enjeux et des nécessités de consensus.
Akhannouch reste fermement convaincu que la législation du droit de grève doit, non seulement protéger les libertés syndicales et répondre aux exigences des travailleurs, mais également sauvegarder les intérêts de toutes les parties. Il envisage une loi qui encadrera ce droit, et le fera de manière à encourager la liberté d’opinion et d’expression, tout en assurant la continuité économique des institutions et entreprises du pays.
Akhannouch prône un débat responsable pour la réforme des retraites
Aziz Akhannouch a également appelé à un débat «sérieux et responsable» sur la refonte des régimes de retraite. Insistant sur la collaboration avec les acteurs sociaux et économiques, il vise des solutions équilibrées qui respectent les intérêts de la classe ouvrière tout en garantissant la pérennité financière des fonds de retraite.
Dans sa déclaration, Akhannouch a souligné que la coopération entre les pouvoirs publics et les partenaires sociaux et économiques a permis de développer un modèle de dialogue social efficace, qui a produit des avancées pour toutes les couches de la société marocaine. «Nous nous engageons maintenant à explorer des méthodes novatrices pour le dialogue afin de rapprocher les différentes visions et aborder avec efficacité les questions sociales pressantes», a-t-il déclaré.
Le chef du gouvernement a également mis en exergue les résultats des dialogues sociaux des deux dernières années, qui ont joué un rôle important dans l’amélioration des indicateurs de développement humain du pays. Il a affirmé que la réforme des systèmes de retraite, actuellement en discussion avec les syndicats et les corps professionnels pour une présentation prochaine au Parlement, est essentielle pour consolider les fondations de l’État providence marocain.
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Une concertation inclusive dans les réformes
Dans une analyse pour Le Brief, suite à l’allocution d’Aziz Akhannouch, Saïd Lamani, expert en droit du travail et relations professionnelles, souligne l’importance de la concertation dans l’élaboration de ces textes législatifs. Ancien inspecteur du travail, Lamani insiste sur la nécessité de solliciter l’opinion de toutes les parties prenantes avant de formaliser toute loi régulant le droit de grève.
«Pour qu’une loi sur l’exercice du droit de grève soit réellement représentative et équitable, il est essentiel d’inclure les syndicats de travailleurs, les différentes organisations patronales — pas seulement la CGEM — ainsi que les représentants des employeurs au sens large», précise-t-il. Lamani ajoute que les inspecteurs du travail, les juges des tribunaux sociaux et les directeurs des ressources humaines, en tant qu’acteurs de terrain, doivent également participer à cette consultation pour enrichir le débat et garantir une application juste de la loi.
Concernant la réforme des retraites, l’expert recommande une approche inclusive, impliquant à la fois les employeurs et les retraités eux-mêmes. «Il est primordial de laisser le choix aux futurs retraités sur l’âge de leur départ à la retraite. Une phase transitoire flexible, permettant à chacun de choisir selon ses capacités et ses besoins, est essentielle», explique Lamani. Il propose également que cette transition soit accompagnée d’une vaste campagne d’information, diffusée via les médias nationaux pour éduquer et préparer la population.
Selon Lamani, l’approche doit être globale : «Au lieu de présenter des projets de loi isolés, il serait plus judicieux de développer une charte nationale, à l’instar de ce qui a été fait pour le code de la circulation et les réglementations affectant les journalistes et les artistes. Une telle charte permettrait une intégration harmonieuse des nouvelles lois dans le quotidien des citoyens, avec une légitimité et une acceptation accrues».
En bref, l’expert appelle à une réforme législative qui respecte la voix et les droits de toutes les composantes de la société, en assurant une transition douce et bien informée vers les nouvelles régulations.
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