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Les maisons de retraite ne désemplissent pas à l’étranger. Et à nouveau, c’est vers l’Afrique, ce continent plein de jeunes, que l’Europe et l’Amérique du Nord se tournent pour combler leur déficit démographique. Pour preuve, en tapant emploi Canada, vous constaterez une forte demande d’infirmières à domicile pour personnes âgées, d’enseignants, de médecins…
Les visas sont délivrés plus facilement, même plus besoin de prouver sa viabilité financière, ou d’avoir les conditions requises, pourvu qu’il y ait des candidats… à n’importe quel prix ! Nos jeunes marocains, en recherche de nouvelles expériences, de meilleures conditions de travail, s’en vont sans rechigner, et emplissent même les réseaux sociaux de leur exploit d’immigration.
S’ils sont là-bas, c’est parce que ces pays ont un énorme déficit démographique à combler. Pour vulgariser la chose, ils ont besoin de jeunes pour s’occuper des vieux.
Au Maroc, le même phénomène est en cours de route. Le taux de fécondité baisse. Et ce sont déjà cette génération de trentenaires qui paye pour les caisses des plus âgés. Mais quand, eux, seront retraités, qui les prendra en charge, au vu des chiffres en berne ?
«Le phénomène, autrefois perçu comme une préoccupation lointaine, réservée aux économies avancées d’Europe et d’Asie, doit commencer désormais à émerger dans le discours public et politique du Maroc, un pays traditionnellement caractérisé par une dynamique démographique vigoureuse », nous explique Professeur Nabil Adel, enseignant chercheur.
Les conséquences économiques, sociales et géopolitiques de cette évolution pourraient être dévastatrices pour le Maroc. Les réformes annoncées de la Moudawana pourraient aussi influencer l’équilibre démographique du pays à long terme.
L’Histoire a prouvé que…
Si l’Histoire a un rôle, c’est celui d’octroyer des leçons. Malgré les chiffres du déclin démographique dans le monde et leur impact sur les structures sociales dans de nombreux pays, les réformes du Code de la famille empruntent la même voie
A titre d’exemple, la Bulgarie a perdu 18% de sa population entre 2001 et 2021. Aujourd’hui, il y a autant de Bulgares qu’en 1934. Et le quart des habitants de ce pays a 60 ans. Rien qu’en 2019, la Roumanie a perdu 5% de sa population, la Grèce 1,4%, l’Italie 1,9%, la Croatie 4,4%, la Lettonie 6,4%…
«Beaucoup de pays peinent aujourd’hui à trouver des enseignants pour remplir les salles de cours, des médecins et des infirmiers pour soigner dans les hôpitaux, des ouvriers pour faire tourner les usines, des agriculteurs dans les champs et même des soldats pour défendre le territoire », déclare Professeur Nabil Adel.
- En Allemagne, en 2022, on manque de 750.000 ouvriers dans l’industrie. Face à cette situation, le pays se tourne vers l’Afrique pour compenser son effondrement. Mais c’est une solution qui présente plusieurs limites, car la capacité des pays à intégrer de nouvelles populations différentes culturellement, est limitée.
- En Italie, des zones entières, en particulier dans les régions rurales, se vident de leurs habitants. Ce qui entraîne la fermeture d’écoles, de commerces et la détérioration des infrastructures. Pour soutenir une population âgée croissante, les travailleurs actifs doivent supporter une charge fiscale plus lourde, ce qui fait craquer la machine économique et augmente structurellement l’endettement du pays.
- Dans un pays comme la Corée du Sud, en voie de disparition rapide, les gens doivent choisir entre avoir des enfants ou travailler et avoir une carrière. La plupart choisissent la seconde option !
- En Russie et en Ukraine, le déclin démographique a des implications pour la taille et la capacité des forces armées des deux pays, incapables de sceller cette guerre. L’Ukraine, ayant déjà des taux de fécondité faibles avant la guerre et ayant subi de lourdes pertes humaines, risque de ne pas s’en relever.
- Après des décennies de politique de l’enfant unique, la Chine fait également face à un vieillissement rapide de sa population et à un déclin démographique imminent. La population en âge de travailler commence à diminuer, mettant en danger la position de Pékin en tant qu’« usine du monde ».
Le retour de la guerre en Europe va accentuer davantage le problème. Si les deux dernières guerres mondiales ont dégarni le monde démographiquement, la vitalité des naissances de l’époque (babyboom) avait permis de le reconstituer rapidement.
Les sociétés maisons de retraite
Au Maroc, si la tendance actuelle se poursuit, nous aurons des «sociétés-maison de retraite» dans une génération ou deux. Nous aurons plus de seniors que de personnes capables de s’en occuper. «Il y a à peine deux générations, une personne ne devait, au meilleur des cas, s’occuper que de ses parents. Aujourd’hui, elle doit s’occuper d’au moins deux, voire de trois générations. Cela fait qu’à partir de 2050 (dans 26 ans à peine), un jeune devra travailler deux à trois plus qu’aujourd’hui juste pour maintenir une économie en fonctionnement, ce qui la ferait s’effondrer», explique l’enseignant chercheur.
Selon la même source, les conséquences de ce déclin démographique se manifesteront à plusieurs niveaux :
- Problèmes structurels de la dette dont le niveau qui va en augmentant, en raison de l’insuffisante production et investissement (le fait des jeunes) par rapport à la consommation et la répartition (le fait des seniors). Une baisse des taux de fécondité entraîne un vieillissement de la population. Cela augmente la proportion de personnes âgées dépendantes de la sécurité sociale, des pensions et des soins de santé financés par l’État, ce qui accroît les dépenses publiques. Simultanément, la population en âge de travailler diminue, réduisant la base des contribuables qui financent ces systèmes de sécurité sociale à travers leurs impôts et cotisations. Cela crée un déséquilibre entre les revenus et les dépenses publiques.
- Problèmes de l’inflation, celle-ci deviendra chronique, à mesure que la main d’œuvre deviendra de plus en plus rare, ce qui créerait une pénurie de l’offre et une augmentation du cout de celle-ci.
- Problème des caisses de retraite, surtout celles fondées sur la solidarité intergénérationnelle (CNSS, CMR…).
Si la tendance au déséquilibre démographique se poursuit, nous ne maintiendrons les régimes actuels qu’en prolongeons de plus en plus la durée du travail, en réduisant considérablement les pensions de retraite ou en augmentant substantiellement les taux de cotisation.
De même, la pérennité de l’ambitieux chantier de l’État social, suppose un facteur travail abondant pour financer les couches sociales ne pouvant pas payer elles-mêmes leurs frais de soins.
- Problèmes de croissance économique à long terme. Comme vous savez la croissance économique dépend du nombre de travailleurs multiplié par la productivité du travail (production totale de biens ou services divisée par le nombre total d’heures travaillées pour la produire). Quelle que soit la productivité, une baisse du nombre de travailleurs finira immanquablement par affecter celle-ci. Or, dans notre modèle de croissance au Maroc, la productivité du facteur est tellement faible que nous ne compensons, jusqu’à présent que par la hausse du nombre de travailleurs. Un déclin démographique mettrait un terme à ce modèle déjà fragile.
Aux origines du phénomène
La transition démographique marocaine a connu une baisse fulgurante et rapide. Le taux de fécondité est passé de 7,9 enfants par femme en milieu urbain et 6,9 en milieu rural en 1960 à respectivement 2,2 et 2,7 en 2019. En 2023, l’indice synthétique de fécondité est de 2,38 au niveau national. En milieu rural, il s’est établi à 2,8 contre 2,12 en milieu urbain.
L’âge du premier mariage des femmes est passé de 17,5 ans en moyenne en 1960 à 25,5 ans en 2023 (31,3 ans pour les hommes).
«Les réformes de la Moudawana depuis les années 90 n’ont fait qu’accentuer le déclin démographique du Maroc, à travers les restrictions sur l’âge du mariage, le durcissement des conditions de polygamie et la facilitation des procédures de divorce», détaille Professeur Nabil Adel. Selon ce dernier, l’évolution socio-culturelle a connu trois changements majeurs ayant eu pour effet de retarder l’âge du mariage et de réduire le taux de fécondité :
- Le premier est la généralisation de l’éducation. Aujourd’hui, au niveau du supérieur, il y a plus de jeunes filles que de jeunes garçons. En matière d’accès à l’enseignement, les garçons ont plus d’accès à l’enseignement, mais en matière de longévité des études, les filles font de plus longues d’études.
- Deuxièmement, l’accès tardif au marché du travail. On a en général le baccalauréat entre 18 et 20 ans, la licence à 22-23 ans et le master à 24-25 ans. Ce n’est qu’après une première expérience de un ou deux ans qu’on envisage de se marier, soit à 26-27 ans. A cet âge, il est extrêmement difficile d’avoir plus de 2 enfants (soit un peu moins que le seuil de renouvellement des générations).
- Et la troisième évolution est socioculturelle. L’entrée tardive sur le marché du travail, et la durée moyenne des études retardent l’âge moyen du mariage, l’augmentation du taux d’activité des femmes réduit la possibilité d’avoir des enfants et de s’en occuper quantitativement (nombre d’heures à diviser entre le travail et les enfants). Jusqu’aux années 80, des familles avec 4-6 enfants, étaient la norme. Aujourd’hui, à 3 enfants, on considère que c’est une famille nombreuse. Tout cela permettait d’avoir cette dynamique démographique. Sachant que l’âge du pic de fécondité se situe biologiquement à la vingtaine.
Conséquences démographiques à long terme des réformes de la Moudawana
«Actuellement les réformes proposées dans le cadre du projet de Moudwana vont toutes vers l’accélération de cette chute de la fécondité et donc du déclin démographique de notre pays», développe Nabil Adel. «L’interdiction du mariage avant 18 ans retardera davantage celui-ci et donc l’âge de procréation. En milieu rural, le mariage précoce est souvent vu, non seulement comme une tradition, mais aussi comme un moyen d’intégration sociale et de stabilisation économique. Dans ces milieux, le mariage est souvent associé à la constitution de nouvelles unités familiales capables de contribuer à l’économie locale, notamment à travers l’agriculture et les petites entreprises. Autoriser le mariage dès 16 ans (après tout la loi marocaine autorise à conclure un contrat de travail à 15 ans révolus) pourrait ainsi renforcer la cohésion sociale et favoriser le développement économique local, en créant de nouvelles opportunités de collaboration et d’entraide communautaire».
En théorie, un mariage à l’âge de 16 ans, augmenterait le nombre d’années durant lesquelles un couple peut avoir des enfants, ce qui pourrait contribuer à augmenter le taux de fécondité dans les zones où il tend à être plus bas.
Le professeur met aussi le doigt sur l’interdiction absolue de la polygamie (même en cas de consentement et d’acceptation de toutes les parties). Sur des termes démographiques, cela réduira davantage le nombre de naissances, même si le phénomène reste extrêmement marginal. «On en pense ce qu’on veut, là nous avons une situation d’urgence démographique qu’il faut régler. Nous parlons de constats, de chiffres et de faits. Aujourd’hui nous sommes face à une réalité démographique alarmante et non à des polarisations idéologiques stériles», déclare-t-il.
Emploi : femme au foyer
Aujourd’hui, une femme au foyer n’est pas considérée comme active, ce qui fausse la perception des taux d’activité et de chômage, alors que cette activité est un travail à plein temps qui a bel et bien une valeur marchande que l’on peut quantifier.
Il s’agit de la rémunération à verser à une personne pour assurer les travaux ménagers et la garde des enfants. Idéalement, celle-ci se situerait aux alentours de 3.000 à 4.000 dirhams par mois. «Nous considérons que la seule activité qu’on va compter dans les statistiques est soit une activité salariée soit une activité entrepreneuriale. De ce fait pour subvenir à ses besoins, la femme doit impérativement travailler, ce qui fait qu’elle ne peut pas avoir autant d’enfants qu’elle en voudrait», explique Nabil Adel.
En reconnaissant la contribution des femmes au foyer à l’économie domestique et nationale, on leur attribue une valeur monétaire qui reflète leur travail dans la gestion du foyer et l’éducation des enfants. Cela pourrait contribuer à rehausser le statut de ce rôle, souvent sous-estimé et non rémunéré, tout en fournissant une incitation financière directe à la famille.
L’octroi d’une couverture sociale aux femmes au foyer garantirait leur protection contre les aléas de la vie (maladie, vieillesse, divorce…) et reconnaîtrait leur contribution à la société de manière plus tangible. Cela pourrait encourager davantage de familles à envisager l’option d’avoir plus d’enfants, sachant que les soins et l’éducation seront assurés.
Par ailleurs, augmenter les pensions pour chaque enfant à charge offrirait un soutien financier supplémentaire aux familles, réduisant ainsi certaines des barrières économiques à la parentalité. «En fournissant une aide économique directe aux familles pour chaque enfant, l’État envoie un signal fort de soutien à la natalité, encourageant ainsi les couples à envisager d’agrandir leur famille. Ce soutien pourrait être particulièrement significatif dans les contextes où les coûts liés à l’éducation et au soin des enfants sont perçus comme prohibitifs Si on reconnaît la femme au foyer comme un statut, là on peut réenclencher une dynamique démographique. Je suis même pour qu’une femme au foyer qui travaille à distance, garde deux rémunérations», confie l’enseignant chercheur.
La réforme du Code de la famille au Maroc, tout en visant l’adaptation aux évolutions sociétales et la promotion des droits, peut également avoir des répercussions profondes et durables sur la démographie du pays. Une telle réforme, si elle entraîne une transformation des normes familiales, pourrait accélérer le déclin démographique déjà observé au Maroc.
Cette évolution démographique pose un défi majeur, dont l’impact potentiel sur les structures économiques et sociales à long terme pourrait surpasser les effets de toutes les politiques économiques actuellement envisagées.
Il est donc crucial que toute réforme du Code de la famille soit conçue avec prudence. En intégrant les mesures citées, le Maroc peut avancer vers un avenir où les réformes du Code de la famille soutiennent à la fois le développement individuel et le bien-être collectif, garantissant ainsi que la modernisation des lois familiales contribue positivement à la société dans son ensemble.
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La polygamie pour les riches et l amour dan cette union on fait quoi. Le côté social je peux être d accord pour quelques points.
Avec tout le respect que je dois au rédacteur de l’article, je trouve qu’il manque de cohérence, apporte des imprécisions, et surtout établit une confusion entre la future reforme et la baisse de la natalité, quelques contradictions :
1- alerter sur le caractère structurel de la dette (elle été deja au plus fort de la transition démographique) tout en proposant une aide directe aux femmes au foyer. Il aura été mieux de proposer un système incitant à une augmentation de l’emploi féminin tout en adaptant des structures d’accueil pour enfants (crèches, maternelles, assistante maternelle …) pour les mamans en emploi occupé. D’une part cela permettra de perenniser le maintien des équilibres des régimes de retraite, de ne pas faire le choix entre vie familiale et carrière pro.
2- l’article évoque un problème d’inflation, on observe plutôt le contraire. Le Japon a vécu pendant des années la déflation, l’inflation dans les pays européens n’est pas directement imputée au vieillissement de la population,
3- dire que : _Les réformes de la Moudawana depuis les années 90 n’ont fait qu’accentuer le déclin démographique du Maroc, à travers les restrictions sur l’âge du mariage, le durcissement des conditions de polygamie et la facilitation des procédures de divorce_» n’est pas basé sur des études chiffrées consolidées et évaluées par des pairs. Si des docs existent je veux bien les lire,
4 – l’article parle de l’accès tardif au marché du travail qui a un impact sur le retard de l’âge au mariage, ce qu’on observe c’est plutôt une baisse du taux d’emploi des femmes sur les dix dernières années,
5- l’article propose comme solution de raccourcir l’âge au mariage à 16 ans !!! acceptera t-il de faire autant pour ses éventuels enfants ? De même pour la polygamie, est ce que cette solution permettra de redynamiser la fécondité ? Gros doute la dessus sachant que le taux des hommes polygames n’excédait pas 3% parmi les hommes mariés me semble t il.
Il me semble que la solution a l effondrement démographique passe par un appui de l’Etat axé sur une politique familiale visant à encourager les jeunes au mariage à travers des aides (primes de naissance, concilier vie familiale et pro, scolarisation plus précoce…). Mais au delà de ça, un marché travail dynamique capable d’éponger les primos accédants au marché du travail est la mère de toutes les batailles.
Quand on naît femme, on remercie ciel et terre d’être née à la fin du 20 siècle. Les conditions internationales et nationales entre autres la Moudawana valorisent plus la femme et lui offrent l’accès à l’éducation et l’émancipation. Le « professeur » prend en règle le Baby-boom qui est un trend non viable pour la population mondiale. Il n’a qu’à se référer à la courbe de population de la terre par région durant 19 siecles ! Si nos vieux avec taux de longévité assez haut et nos jeunes avec un taux de fécondité de « 5 » venaient à coexister, je me demande s’il y’aura assez de ressources pour tout le monde…Aussi, avec tout mon respect à ce « professeur » ses propos sont profondément misogynes, critiquer l’âge minimum de mariage, l’accès à la scolarisation, la souplesse des procédures du divorces …
La publication de cet article sur le brief.ma me déçoit enorment
Cet article est déplorable, de plus écrit par une femme. Elle reprend les propos mysogines d’une personne qui ne voit dans la société que des « constats, des chiffres et des faits » et dans la femme, un simple objet, avec un raisonnement des plus stériles qui soit.