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Quand un remède devient poison : Le «Lyrica» sur les traces de «L’Poufa»

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Image d’illustration. © DR

Dans les ruelles et les recoins des quartiers populaires, un nouveau spectre hante le monde souterrain de la drogue. Là où jadis régnait «Lpoufa», stupéfiant mortel aux échos de désespoir, émerge désormais Lyrica, surnommé «le missile». Cette métamorphose du marché noir dessine un tableau sombre, où la quête d’évasion entraîne les âmes vers des hauteurs vertigineuses, sans promesse de retour. Entre les mains des trafiquants, dans l’ombre des villes, ce médicament, détourné de son noble dessein de soulager la douleur et l’épilepsie, devient un vecteur de dépendance et de déchéance.

Le stupéfiant mortel «L’poufa» cède sa place dans plusieurs quartiers populaires au profit des comprimés de «Lyrica», désormais surnommé «le missile» pour son effet rapide et intense. Les pharmaciens imposent un strict contrôle sur la vente de ce médicament, mais cela n’empêche pas certaines boîtes de se retrouver secrètement chez les trafiquants de drogue dans les grandes villes. Un comprimé se vend entre 50 et 60 DH. 

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Le phénomène Lyrica 

Selon une notice médicale spécifique, Lyrica initialement prescrit pour atténuer les douleurs et soigner l’épilepsie peut entraîner une dépendance lorsqu’il est consommé de manière abusive et répétée sans suivi médical. Cette tendance à la dépendance à la Prégabaline ou Lyrica, est particulièrement marquée chez les individus ayant déjà des antécédents de consommation de diverses substances, incluant les benzodiazépines, l’alcool et le cannabis. Les comprimés de Lyrica deviennent progressivement un stupéfiant «populaire» dans certains milieux, rivalisant avec «L’Poufa» dérivé des résidus de cocaïne et de diverses substances chimiques. 

Quels sont les effets de la Prégabaline ?

La Prégabaline ou Lyrica, semblable aux morphiniques, au tramadol et à la codéine, est recherchée pour son effet calmant, agissant comme un antidépresseur du système nerveux. Elle offre une action anxiolytique, apaisante, et sédative, et peut même induire un état d’euphorie paradoxal. Ce médicament provoque également une désinhibition et un regain d’énergie. Les patients traités pour des troubles anxieux ou des douleurs neuropathiques peuvent découvrir que la Prégabaline leur procure un sentiment de bien-être, au-delà de son effet analgésique. 

Lire aussi : Qu’est-ce que « la drogue du zombie » ?

Quels sont les risques associés à la Prégabaline ?

La prise de prégabaline à forte dose peut entraîner des effets secondaires graves tels que désorientation, confusion, troubles du comportement et de la mémoire, ainsi qu’une intoxication aiguë pouvant conduire à la perte de conscience, au coma et, dans les cas extrêmes, au décès par dépression respiratoire. Ces risques sont accrus lorsque la prégabaline est associée à d’autres substances, comme les opioïdes, qui réduisent également l’excitabilité cérébrale. 

Lyrica est chimiquement proche de l’acide gamma-amino-butyrique (GABA), une substance présente dans le cerveau. Son utilisation en tant que drogue est un phénomène relativement récent, mais ses effets dévastateurs surpassent ceux du «L’Poufa», faisant craindre une crise sanitaire et sociale plus large. 

Distribution et contrôle 

Ce médicament parvient généralement aux toxicomanes et aux trafiquants de drogue soit par la vente aléatoire (dans des cas limités), soit par les patients eux-mêmes qui l’obtiennent des pharmacies sur ordonnance médicale récente, valide pour un mois au maximum. 

Abderrazak Manfalouti, président du syndicat national des pharmaciens, affirme que le Lyrica fait partie des médicaments qui ne peuvent être délivrés légalement que sur ordonnance médicale et en présence du patient, qui doit présenter une carte d’identité. Toutes les données concernant le patient, le médecin traitant, la date de la consultation et les informations sur l’ordonnance, l’adresse et les numéros de téléphone des personnes concernées sont enregistrées. 

Abderrazak Manfalouti confirme que des mesures strictes sont en place par l’Ordre national des pharmaciens, les autorités administratives et le ministère de l’Intérieur, pour éviter que de tels médicaments destinés à traiter des maladies psychiques et neurologiques ne soient détournés en stupéfiants. 

Les pharmaciens sont tenus de respecter ces mesures, et toute infraction expose le contrevenant à des sanctions, tant auprès de l’Ordre que des autorités judiciaires compétentes. 

Malgré ces précautions, le médicament se fraie un chemin sur le marché des stupéfiants. Une pharmacie à Casablanca a récemment signalé la disparition de 35 boîtes de Lyrica, obligeant à signaler un de ses employés, toujours en fuite à ce jour. Cet employé ne se contentait pas de vendre le médicament, mais effaçait également toute trace de la transaction en gardant l’argent et en ne l’enregistrant pas dans les comptes ou sur la liste des ventes, pour ne pas attirer l’attention du propriétaire de la pharmacie. 

Statistiques inquiétantes 

Selon les données de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, a noté qu’en 2021, environ 300 millions d’individus dans le monde consommaient des drogues, y compris synthétiques, marquant une augmentation de 23% sur dix ans. Il a également été souligné que près de 40 millions de personnes souffrent désormais de troubles liés à l’abus de drogues, ce qui constitue une hausse de 45% par rapport à la décennie précédente. 

La lutte contre le trafic 

Au Maroc, la consommation de drogues est reconnue comme un problème majeur de santé publique, et la lutte contre le trafic de drogues est une priorité nationale. Le ministre a relevé que le pays est affecté par la contrebande de drogues synthétiques. Au cours des trois dernières années, le Royaume a intercepté plus de 5 millions de comprimés psychotropes, majoritairement introduits clandestinement depuis des pays voisins. 

Pour contrer ce fléau, le pays a adopté une stratégie globale et intégrée, en phase avec les résolutions de l’ONU, axée sur la réduction de l’offre, la prévention de l’abus et de la consommation de drogues, la lutte contre le trafic illicite, et le renforcement de la coopération internationale. 

Lire aussi : «L’Poufa», cette drogue low-cost qui ravage le Maroc

La coalition mondiale 

La Coalition mondiale contre les menaces liées aux drogues synthétiques, initiée par les États-Unis, vise à unir les efforts des acteurs internationaux, gouvernements, organisations intergouvernementales, agences spécialisées, société civile et secteur privé pour relever les défis posés par les drogues synthétiques à l’échelle mondiale. 

Ce récit, tissé dans les rues marocaines, est une métaphore de l’évasion éphémère et du prix ultime payé pour un moment de soulagement. C’est un avertissement, un appel à l’action pour protéger les plus vulnérables de cette menace croissante. Dans ce combat, le Maroc se dresse, alignant sa stratégie avec les résolutions mondiales, dans un effort pour reprendre le contrôle d’un navire ballotté par les vagues de l’addiction et de la souffrance.

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