Accueil / Société

Les universités marocaines vont-elles rompre leurs partenariats avec Israël ?

Temps de lecture

Les Palestiniens se sont rassemblés mercredi autour d'une statue de Nelson Mandela en Cisjordanie occupée par Israël. © Marc Longari / AFP

Partout à travers le monde, les mouvements de contestations prennent de l’ampleur, surtout dans les milieux universitaires. Dans certains pays, les manifestations estudiantines ont poussé les directions à rompre ou suspendre leurs relations avec Israël. Mais au Maroc, les universités sont aphones. Les universitaires sont rares à prendre une position en public, et ceux qui y arrivent le font à titre personnel, à l’image du professeur Khalil Mgharfaoui. Pour ce qui est des syndicats, le bureau régional du Syndicat marocain de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique de Tétouan est le seul à exiger la fin de l’accord signé avec l’Université de Haïfa.

Les protestations contre les bombardements israéliens à Gaza se multiplient à travers le monde. Chacun à son niveau essaie de manifester son désaccord avec ce qui s’apparente à un génocide. Depuis l’attaque orchestrée par le Hamas contre l’État hébreu le 7 octobre dernier, le monde assiste à un massacre. Les offensives terrestres et aériennes ont fait plus de 34.000 morts, dont la majorité sont des femmes et des enfants.

Dans certains pays, cela a poussé certaines universités à rompre leur coopération avec leurs homologues israéliennes, parfois sous la pression des étudiants. On peut citer l’université libre de Bruxelles (ULB) qui a annoncé, à travers un communiqué, rompre sa coopération avec deux instituts israéliens dans le cadre d’un projet de recherche scientifique sur l’intelligence artificielle. Dans le texte, elle a indiqué ne plus avoir de «coopération bilatérale avec Israël», tout en affirmant être «déterminée à poursuivre ses partenariats avec les institutions palestiniennes».

Lire aussi : Le Maroc réitère son soutien à la cause palestinienne

Le Trinity University College en Irlande, a aussi décidé de mettre fin à ses investissements dans des entreprises israéliennes, en réponse aux appels de ses étudiants en faveur de la Palestine. L’université américaine Johns Hopkins, dans le Maryland, par l’entremise de sa direction, est également parvenu à trouver un accord avec ses étudiants pour mettre fin aux liens avec des institutions israéliennes. Auparavant, les étudiants avaient bloqué le campus Homewood pendant 14 jours en montant un camp en guise de soutien à la cause palestinienne.

En Espagne, la campagne palestinienne pour le boycott académique et culturel d’Israël (PACBI) salue la décision inédite de la conférence des recteurs d’université en Espagne (CRUE) de «suspendre les accords de collaboration avec les universités et les centres de recherche israéliens qui n’ont pas exprimé un engagement ferme en faveur de la paix et du respect du droit humanitaire international».

Lire aussi : ONU et Palestine : un soutien certes, mais symbolique

La décision de la CRUE qui regroupe les directeurs et directrices de 50 universités publiques et de 26 universités privés espagnoles, témoigne d’un engagement en faveur du droit international. Elle a condamné les actes de violence et a annoncé son appui aux manifestations de soutien aux Palestiniens.

Dégel des relations diplomatiques entre le Maroc et Israël

Depuis la reprise des relations diplomatiques entre le Maroc et Israël, le 22 décembre 2020, plusieurs coopérations ont été nouées, notamment dans le domaine de l’enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’Innovation.

D’ailleurs, le ministre de la tutelle, Abdellatif Miraoui, avait reçu le ministre de la Coopération régionale, Issawi Frej, en juillet 2022. C’est ce qui a permis aux établissements supérieurs marocains de bénéficier de ces coopérations. En août 2021, l’Université Mohammed VI polytechnique (UM6P) a scellé un accord de coopération avec celle de Ben Gourion. Elle porte notamment sur l’échange des expériences et des projets de recherche entre les deux parties.

Lire aussi : Conflit à Gaza : Israël réouvre le point de passage de Kerem Shalom pour l’aide humanitaire

L’Université Abdelmalek Essaadi de Tétouan a signé un protocole d’accord avec celle de Haïfa en septembre 2022. Cet accord prévoit une coopération scientifique dans les domaines maritime et de l’aquaculture durable, des technologies et de l’écologie. Un accord similaire a été ratifié entre l’Université internationale de Rabat (UIR) et l’Université de Ben Gourion, située à Bersabée, au mois de novembre de la même année. Le but est de développer la coopération scientifique et académique de part et d’autre, à travers diverses activités. En mars 2023, les universités Euromed de Fès et hébraïque de Jérusalem ont scellé leur coopération dans le domaine de la formation et de l’innovation en recherche.

Les universités marocaines sont aphones

Depuis le début du massacre, les universités ou universitaires marocains qui osent prendre une position officielle sont rares, et ceux qui prennent la parole le font à titre personnel, à l’image du professeur Khalil Mgharfaoui.

Au vu contexte actuel, il est très difficile de cautionner au niveau universitaire et au niveau de la recherche les actions que mène Israël dans la bande de Gaza.

Cette protestation est un mouvement international. On voit des jeunes étudiants s’opposer à cette réponse démesurée que «le tribunal international a qualifié de début de génocide. C’est vraiment énorme ce qui se passe. Cela ne peut pas être accepté d’un point de vue non pas scientifique, mais en tant qu’humains, les universitaires ne marquent pas leur solidarité», dénonce-t-il.

Lire aussi : Rabat : protestation citoyenne contre les bombardements israéliens à Rafah

«Il y a des mouvements au sein d’Israël et en dehors qui ne sont pas d’accord avec ce qui se passe. Et je pense que ce n’est pas le moment de cautionner une politique d’une branche d’extrême droite sous la direction de Netanyahou et de son gouvernement en normalisant, si on veut, les relations universitaires», ajoute -t-il.

Même si ce dernier estime ne pas connaître le contenu des partenariats, il soutient que la suspension des relations avec les universités israéliennes est un minimum. «J’ai vu des gens dont les parents ont été déportés et qui parlent. Ils disent ce que nous voyons, c’est ce que nos parents ont vécu. Ce n’est pas possible. Il faut appeler les choses par leur nom», déplore-t-il.

Khalil Mgharfaoui poursuit : «On ne peut pas comprendre une punition si générale pour déloger certains combattants. On appelle cela comme on veut, mais tuer autant de personnes, 34.000 à 35.000 personnes de cette façon, de manière vraiment anarchique, n’est pas acceptable».

Lire aussi : Accès humanitaire coupé à Gaza et chars israéliens déployés à Rafah

Pour l’heure, le bureau régional du Syndicat marocain de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique de Tétouan est le seul à exiger la fin de l’accord signé avec l’Université de Haïfa. Le syndicat a lancé un appel à «tous les professeurs, les administrateurs et leurs représentants dans les conseils des établissements et tous les acteurs syndicaux à travailler ensemble pour l’annulation immédiate de ce partenariat, compte tenu des conséquences négatives qu’il peut avoir sur tous et sur l’image historique de l’université ».

Pendant ce temps, les manifestations estudiantines pour la cause palestinienne continuent dans le Royaume. Les directions universitaires restent, elles, aphones.

Dernier articles
Les articles les plus lu

Travaux imprévus à Maarif, circulation paralysée, la goutte de trop

Société - Les Casablancais qui empruntent le quartier Maarif sont confrontés à un véritable casse-tête. Des travaux… Encore !

Rédaction LeBrief - 16 décembre 2024

Peines alternatives : vers une justice plus humaine

Société - La justice marocaine franchit un cap avec l’entrée en vigueur de la loi sur les peines alternatives, un texte ambitieux visant à moderniser le système judiciaire.

Ilyasse Rhamir - 16 décembre 2024

Arts et métiers : une ambition maroco-française au service de l’innovation industrielle

Société - Le 5ᵉ CA de l’école Arts et Métiers, campus de Rabat, s’est tenu le 16 décembre 2024 sous la présidence de Ryad Mezzour.

Rédaction LeBrief - 16 décembre 2024

Enseignement : des réformes urgentes face à un système en crise

Société - Le dernier rapport de la Cour des comptes dresse un état des lieux préoccupant du secteur de l’enseignement au Maroc.

Ilyasse Rhamir - 16 décembre 2024

Spoliation immobilière : un homme d’affaire écope de six ans de prison ferme

Société - La Chambre criminelle de première instance a condamné Abdallah Boudrika à six ans de prison ferme pour spoliation immobilière.

Mbaye Gueye - 16 décembre 2024

Alerte Météo : vents violents au nord du Maroc

Société - La DGM a émis un bulletin d’alerte de niveau orange concernant des rafales de vent localement fortes prévues lundi dans certaines provinces du nord du Maroc.

Ilyasse Rhamir - 14 décembre 2024

Saigner pour guérir

Dossier - Rien qu’un rasoir, une pipette et un seau ne peuvent guérir. Car la saignée est réputée pour être «miraculeuse».

Atika Ratim - 14 décembre 2024

Deux soldats des FAR périssent dans l’explosion d’une mine

Société - Une mine antichar a explosé, causant la mort de deux soldats des Forces armées royales (FAR) et blessant grièvement un troisième.

Ilyasse Rhamir - 13 décembre 2024
Voir plus

Cherté de vie : le citoyen se révolte

Société - Mis à rude épreuve par l’inflation et la hausse vertigineuse des prix à la consommation, les ménages se révoltent.

Khadija Shaqi - 5 décembre 2022

Mères célibataires et mères divorcées : un vrai calvaire !

Dossier - Le statut des mères célibataires et divorcées au Maroc n’est pas de tout repos, entre traditions ancrées et exigences de modernité.

Sabrina El Faiz - 19 octobre 2024

Prix des médicaments : lancement des consultations avec les industriels pharmaceutiques

Société - Des rencontres seront organisées pour étudier les propositions des acteurs du secteur pharmaceutique concernant les prix de vente des médicaments. Le ministère de la Santé et de la Protection sociale les organise, du 28 juin au 1er juillet à Rabat.

Khadija Shaqi - 29 juin 2022

CNSS : augmentation des pensions de 5%

Société - La ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Alaoui, a présidé, ce vendredi, la réunion du Conseil d’administration de la CNSS.

Khadija Shaqi - 9 septembre 2022

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire