La décision de Ouagadougou de dénoncer l’accord de défense avec la France est tout, sauf une surprise. Tout le monde la voyait venir. La junte a donné 30 jours à Paris pour rapatrier les 400 soldats français basés au Burkina Faso, des forces spéciales qui y stationnaient en appui de l’ex-Barkane.
Depuis plusieurs semaines, les militaires au pouvoir à Ouagadougou téléguidaient des manifestations réclamant le départ des Français et la «diversification des partenariats dans la lutte contre le terrorisme». En réalité, il s’agit de faire venir, sans témoins gênant, des mercenaires de Wagner pour les épauler à combattre les terroristes qui occupent 40% du pays. La wagnerisation est en marche.
Le problème n’est pas de dire si c’est bien ou pas, le gouvernement burkinabé est libre de choisir ses alliances, y compris le diable s’il est persuadé que cela l’aidera à lutter contre le terrorisme islamiste. Mais comme en Centrafrique, au Mozambique ou au Mali pour ne citer que ces exemples connus, il faut craindre qu’il se soit trompé de diagnostic. Ce n’est pas en s’adjoignant des mercenaires que l’armée va retrouver, comme par magie, sa combativité. Comme partout en Afrique, ce sont les fondations de l’armée burkinabè qu’il faut rebâtir en s’attaquant au tabou des fractures ethniques et à la corruption des officiers.
Sous Blaise Compaoré et ses 27 ans au pouvoir, les soldats les mieux entraînés (et les mieux payés) appartenaient à la garde prétorienne du régime. La plupart des éléments de cette division d'élite venaient de la même ethnie que le président Compaoré. Le reste de l'armée était marginalisé. Même si cette garde présidentielle a été dissoute, cela laisse des traces au sein de la troupe. Les ressentiments accumulés pendant des années seraient d’ailleurs, une des explications du dernier coup d’État.
|