Accueil / Économie

Les prix de la volaille en hausse, le secteur avicole en crise

Temps de lecture

Produits avicoles © DR

La récente flambée des prix de la volaille au Maroc, avec le poulet vivant atteignant jusqu’à 27 dirhams le kilogramme, a mis en lumière la vulnérabilité de la chaîne d’approvisionnement face aux crises successives. Cette situation alarmante résulte d’une combinaison de facteurs, allant des effets de la vague de froid à la hausse des coûts des intrants, en passant par des dysfonctionnements structurels profondément ancrés dans le secteur. Détails.

Les vagues de froid successives qui ont frappé le Maroc ces derniers temps ont eu un impact significatif sur la production avicole. Les basses températures ont directement affecté la santé et la croissance des volailles, entraînant une baisse de la production et une augmentation des coûts pour les éleveurs. Cette situation, couplée à la hausse des prix des intrants essentiels tels que les aliments pour volailles et les médicaments vétérinaires, a créé un environnement économique particulièrement difficile pour les producteurs.

Une crise multifactorielle

La crise actuelle du secteur avicole marocain ne se limite pas aux seuls facteurs climatiques et économiques. Elle met également en lumière des dysfonctionnements structurels profonds qui affectent l’ensemble de la chaîne de valeur. Ces problèmes incluent notamment une chaîne d’approvisionnement fragmentée avec de nombreux intermédiaires, un manque de modernisation dans certaines exploitations, une absence de mécanismes efficaces de régulation des prix, Ainsi qu’e dépendance aux importations pour certains intrants clés.

Pour les consommateurs marocains, cette hausse des prix de la volaille représente un véritable défi. Avec le prix du poulet avoisinant les 30 dirhams par kilo, de nombreux ménages se trouvent contraints de revoir leurs habitudes alimentaires. Cette situation est d’autant plus préoccupante alors que la viande de volaille est traditionnellement considérée comme une alternative abordable à la viande rouge, dont les prix restent élevés malgré les efforts d’importation.

Dans ce contexte, Youssef Alaoui, président de la Fédération interprofessionnelle du secteur avicole au Maroc (FISA), souligne les difficultés auxquelles font face les producteurs. Il rappelle que pendant la pandémie de Covid-19 et les deux années qui ont suivi, de nombreux petits et moyens éleveurs ont été forcés à cesser leurs activités. Cette situation a fragilisé l’ensemble du secteur, réduisant sa capacité à répondre efficacement aux fluctuations de la demande.

Youssef Alaoui met également en avant le fait que le secteur avicole ne bénéficie pas de subventions étatiques, contrairement à d’autres filières agricoles. Cette absence de soutien rend les producteurs particulièrement vulnérables aux aléas du marché et aux crises successives.

Lire aussi: Covid-19, inflation, sècheresse : quel impact sur les ménages marocains ?

Des efforts de production insuffisants

Malgré les difficultés, le secteur avicole marocain a fait des efforts considérables pour augmenter sa production. Selon le président de la FISA, la production de poulet a augmenté de 14% à 26% selon les espèces. Cependant, cette augmentation s’avère insuffisante pour compenser totalement la demande croissante, notamment face à la hausse des prix de la viande rouge qui pousse les consommateurs à se tourner davantage vers la volaille.

Un des enjeux majeurs identifiés par les professionnels du secteur est la multiplication des intermédiaires dans la chaîne de distribution. Youssef Alaoui illustre ce problème en prenant l’exemple de la tomate, dont le prix peut être multiplié par 3 ou 4 entre le producteur et le consommateur final. Cette situation contribue à la hausse des prix pour le consommateur sans pour autant profiter aux producteurs.

Par ailleurs, Le débat sur les importations comme solution potentielle à la crise divise les acteurs du secteur. D’un côté, certains intrants essentiels comme les poussins et les matières premières (maïs, soja) sont déjà libres à l’importation et exonérés de droits de douane. Cette politique vise à réduire les coûts de production pour les éleveurs marocains.

D’un autre côté, Youssef Alaoui exprime des réserves quant à l’importation de poules pondeuses réformées. Il met en garde contre les risques pour le marché local, citant l’exemple de plusieurs pays d’Afrique subsaharienne où de telles importations ont eu des effets néfastes sur la production locale.

Lire aussi: L’inflation attendue à 0,8% au T4-2024 (BAM)

La position des associations de consommateurs

Face à cette situation, la Fédération marocaine des droits des consommateurs (FMDC) a exprimé son incompréhension. L’association souligne que la hausse des prix de la volaille semble en contradiction avec la baisse observée des prix de certains intrants nécessaires à l’élevage. Cette discordance soulève des questions sur les mécanismes de fixation des prix dans le secteur.

La FMDC va plus loin en appelant les autorités compétentes à mener une enquête sur une éventuelle entente entre les producteurs. L’association pointe particulièrement du doigt le marché des poussins, suggérant la possibilité d’une entente entre les propriétaires de couvoirs pour fixer les prix.

Face à ces multiples défis, les professionnels du secteur avicole marocain appellent à une restructuration en profondeur. Cette réforme devrait viser plusieurs objectifs, tels que la modernisation des exploitations pour améliorer la productivité, réduire le nombre d’intermédiaires dans la chaîne de distribution, mettre en place des mécanismes de régulation des prix plus efficaces, développer des filières locales pour réduire la dépendance aux importations, sans oublier de renforcer la collaboration entre les différents acteurs du secteur.

En somme, la crise actuelle du secteur avicole marocain met en lumière la nécessité d’une approche globale et concertée pour assurer la durabilité et la résilience de cette filière essentielle. Les défis sont nombreux, mais les opportunités d’amélioration existent. Il appartient maintenant aux autorités, aux professionnels du secteur et aux consommateurs de travailler ensemble pour trouver des solutions durables qui garantiront à la fois la viabilité économique du secteur et l’accès à une alimentation abordable pour tous les Marocains.

Dernier articles
Les articles les plus lu

Stellantis délocalise la production de la prochaine C4 de Madrid à Kénitra

Économie - Stellantis a décidé de transférer la fabrication de la future ë-C4 de son usine de Madrid vers celle de Kénitra, dès 2028

Farah Nadifi - 25 novembre 2024

Internet : un taux de pénétration record de 112,7% à fin septembre (DEPF)

Économie - La DTFE a indiqué que le marché internet a enregistré un net rebond de son activité avec une hausse de 6,5% à fin septembre 2024

Mbaye Gueye - 25 novembre 2024

Assurances : hausse des primes de 4,8% à fin septembre

Économie - Les primes émises par les entreprises d’assurances et de réassurance ont franchi le cap des 45 MMDH à fin septembre 2024.

Mbaye Gueye - 25 novembre 2024

Le ministère du Commerce enquête sur le dumping du PVC égyptien

Économie - Les importations de PVC en provenance d’Égypte font l’objet d’un examen minutieux par le ministère de l’Industrie et du Commerce.

Ilyasse Rhamir - 25 novembre 2024

SIB 2024 : plus de 200.000 visiteurs et 300 exposants à El Jadida

Économie - La 19e édition du Salon international du bâtiment (SIB) a attiré plus de 200.000 visiteurs et plus de 300 exposants.

Mbaye Gueye - 25 novembre 2024

RAM accueille son dixième Boeing Dreamliner

Économie - Royal Air Maroc (RAM) a annoncé la réception de son dixième Boeing 787-9 Dreamliner

Farah Nadifi - 25 novembre 2024

Saham prend les rênes de Société Générale Maroc

Économie - Le groupe Saham est désormais à la tête de Société Générale Maroc, suite à une transaction validée par Bank Al-Maghrib.

Ilyasse Rhamir - 25 novembre 2024

IPC d’octobre 2024 : lecture des tendances

Économie - Le Haut-Commissariat au Plan (HCP) a publié son rapport mensuel sur l'IPC pour le mois d’octobre 2024.

Farah Nadifi - 22 novembre 2024
Voir plus

Industrie marocaine : production en recul, ventes en hausse

Économie - L’activité industrielle marocaine aurait connu, en novembre 2024, une diminution de la production et une progression des ventes comparativement au mois précédent.

Ilyasse Rhamir - 3 janvier 2025

«Nous avons une stratégie africaine solide» : Hervé Hélias, PDG du groupe Mazars

Avis d'expert - Avec une armada de 44.000 praticiens, Mazars, le réseau d’audit et de conseil d’origine française, est l’un des rares à tenir tête aux « Big-Four » (Deloitte, PwC, EY et KPMG).

Abashi Shamamba - 2 octobre 2022

Augmentation des salaires dans le public à partir de juillet

Économie - Une augmentation de 1.000 DH est allouée aux fonctionnaires du secteur public qui n’avaient pas bénéficié de la revalorisation.

Mbaye Gueye - 17 juillet 2024

Forum MEDays 2024 : Tanger au cœur des discussions mondiales sur la souveraineté et la résilience

Économie - Le Forum MEDays 2024 à Tanger réunit des leaders pour débattre de la souveraineté, la résilience et les défis mondiaux face aux crises.

Chaima Aberni - 24 septembre 2024

Un commentaire

  1. Ne tournez plus en rond, le problème de fond est qu’il y a une mafia dans ce secteur, comme dans beaucoup d’autres, et que les prix font l’objet d’ententes, tous les autres motifs sont ceux que cette mafia veut bien nous faire croire. Il n’y a aucun contrôle sur les filières alimentaires et tout ce monde s’en donne à cœur joie au détriment des consommateurs. Les autorités ne font quasiment rien pour contrôler et le conseil de la concurrence est absent. Jusqu’à quand ? Il y en a marre !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire