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De loin, Ghachimat est presque une image d’Epinal avec couchers de soleil sur les montagnes. De près, Ghachimat est un village comme les autres : on s’y côtoie depuis l’enfance, on se jalouse. On s’affronte en secret pour obtenir la main d’une fille. On déteste ceux qui ont réussi, on méprise ceux qui sont restés dans la misère. On étouffe sous le joug d’une tradition obsolète. On ne s’émeut guère des événements qui embrasent la capitale. Qui n’a rien à se reprocher peut dormir sur ses deux oreilles, se dit-on. Ceux qui ont été abattus n’étaient pas tous des anges. Mais il suffit du retour au pays d’un enfant fanatisé pour que les habitants de Ghachimat basculent dans le crime collectif, portés par le ressentiment et la rancœur, pour que des garçons bien tranquilles deviennent des tueurs en série. Le printemps n’émerveillera ni les bêtes ni les hommes. Les coquelicots évoqueront des boursouflures écorchées. L’aile gauche du cimetière atteindra bientôt les murailles d’en face. Tous les jours, un conroi ira confier son cher disparu à une terre devenue charnier.
Avec Les Agneaux du Seigneur, on entre insensiblement dans la réalité du drame algérien qui semble pourtant défier l’analyse et la raison.
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