Image d'illustration. © DR
Quelques jours seulement après la rentrée scolaire 2023-2024, les enseignants ne décolèrent pas. En effet, ils ont organisé, jeudi 5 octobre, un sit-in devant le siège du ministre de l’Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports. Ensuite ils ont mené une marche pacifique en direction du siège du Parlement à Rabat. À travers ces protestations, les enseignants ont dénoncé la sourde oreille du département de Chakib Benmoussa. Ils exigent aussi une réponse quant à leurs nombreuses revendications et attentes.
Une réponse «inappropriée»
La Fédération nationale de l’enseignement (FNE), qui a appelé à la tenue de sit-in dans les établissements d’enseignement scolaire durant trois jours (3, 4 et 5 octobre), estime que le nouveau statut n’a fait que renforcer les écarts et les injustices entre les enseignants. Selon elle, il n’a accordé aucun avantage supplémentaire à la famille de l’enseignement. Par ailleurs, l’organisation syndicale ajoute que ce statut n’a fait qu’accentuer le fardeau qui pesait déjà sur les épaules des enseignants. Ils notent que cette mesure confère un caractère officiel à des tâches accomplies précédemment à titre volontaire.
«Les enseignants sont aujourd’hui tenus par la loi de participer au contrôle des examens, la correction des feuilles des examens normalisés et la participation aux réunions de parents. Autrement, si ces derniers ne remplissent pas cette tâche, ils pourront être exposés à des mesures disciplinaires», s’insurge Abdellah Ghmimat, président de la Fédération, sur les colonnes du Matin.
La Fédération dénonce par ailleurs l’inaboutissement des revendications d’une large frange des fonctionnaires de l’éducation nationale. Ils citent notamment les assistants pédagogiques et administratifs, les cadres d’orientation et de planification. «Nous avons constaté avec une grande surprise l’exclusion des éducateurs et éducatrices du préscolaire de ce statut, et le maintien du plafonnement de l’âge limite d’accès au métier d’enseignant à 30 ans, tandis que l’âge légal d’accès à la fonction publique est de 45 ans. Par ailleurs, le ministère est resté sur la même position, refusant d’accorder des indemnités aux enseignants travaillant dans les zones enclavées», déplore le président du syndicat.
De son côté, la Fédération nationale des fonctionnaires de l’enseignement, affiliée à l’Union nationale du travail au Maroc (UNTM), multiplie les critiques contre le nouveau statut des enseignants. Lors de la conférence de presse organisée mercredi, Abdelilah Dahmane, secrétaire général de ce syndicat, a indiqué que loin de satisfaire les doléances des différentes composantes de la profession, le nouveau statut est une réponse «inappropriée» à la crise des ressources humaines dans le système de l’éducation et de la formation.
Ce nouveau statut, souligne-t-il, consacre la discrimination entre les différentes composantes de la profession. Et il n’a pas introduit de nouveautés en ce qui concerne l’unification des parcours professionnels. De même, le nouveau statut, le syndicaliste, est en contradiction avec le statut général de la fonction publique.
«Notre revendication était de dissocier le statut des enseignants de celui de la fonction publique, compte tenu de la spécificité du premier, et dans le but de renforcer l’arsenal des acquis et des droits, notamment en ce qui concerne la structure des salaires, le système d’avancement et ses quotas, et les montants des indemnités. Or le ministère et ses interlocuteurs (en l’occurrence les syndicats participant aux sessions du dialogue sectoriel) n’ont dissocié ce statut que sur le volet du durcissement des sanctions et de l’élargissement de leur dispositif», s’indigne Abdelilah Dahmane.
D’après lui, le nouveau statut est encore incomplet. Il nécessite encore trois à quatre décrets d’application, ainsi qu’une vingtaine de textes réglementaires, ce qui sert «la mainmise de l’administration». Et pour couronner le tout, poursuit Dahmane, ce nouveau statut fera peser sur les enseignants de nouvelles missions floues, non prévues par la loi, aux responsabilités multiples. Pire encore, ces dernières seront prises en compte dans l’évaluation et conditionneront l’avancement des professionnels du secteur.
Rendre justice ?
Pour rappel, le Conseil du gouvernement, réuni mercredi 27 septembre 2023 à Rabat, a approuvé le projet de décret portant statut des fonctionnaires du département de l’Éducation nationale. Ce texte vise à concrétiser les engagements contenus dans la feuille de route de la réforme du système éducatif (2022-2026). Il porte sur la mise en place d’un système de gestion du parcours professionnel de façon à améliorer le rendement, pour l’intérêt des apprenants. Ce décret, qui prend effet à compter du 1er septembre 2023, tend vers le renforcement de l’attractivité de la profession et la consécration du mérite et la promotion de la formation. Il compte aussi la consolidation de la formation continue, en s’appuyant sur les principes de l’unification, la responsabilité, la motivation et la performance.
De son côté, le ministère de l’Éducation nationale avance que le statut des fonctionnaires du secteur cherche à «renforcer l’attractivité de l’enseignement et de rendre ses lettres de noblesse à l’école publique». Il «intervient dans le cadre de la réforme du système éducatif visant à redorer le blason de l’école publique, regagner la confiance des citoyens, renforcer l’attractivité de l’enseignement et corriger les situations de certaines instances professionnelles», avait déclaré Chakib Benmoussa à l’issue du Conseil de gouvernement.
Pour le responsable gouvernemental, ce statut vient rendre justice aux femmes et hommes de l’enseignement. Il «ne touche pas aux acquis des fonctionnaires et garantit la sécurisation du temps scolaire ainsi que l’amélioration de la qualité des enseignements, pour le bien des élèves». Le nouveau statut prévoit ainsi, selon le ministre, une mesure incitative relative à la création d’un grade exceptionnel (hors échelle). Celle-ci bénéficiera aux deux tiers des cadres du ministère, en plus de l’octroi d’une rémunération annuelle de 10.000 DH aux cadres pédagogiques des «Écoles pionnières».
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