Accueil / Économie

Industries : une de perdue, dix de retrouvées

Temps de lecture

Image d'illustration © DR

Certaines industries trouvent l’herbe plus verte ailleurs, quand d’autres décident de doubler leur production locale. Avons-nous du souci à nous faire ? Khalid Benali, expert international en économie, nous éclaire sur ce sujet.

La cessation de la production de marques emblématiques telles que Knorr, Omo, Omo Matic, Surf et Zed au Maroc a suscité des réactions à travers le pays. Unilever, géant mondial de l’agro-industrie, fermera ses deux usines marocaines en juin prochain. La fabrication sera déplacée vers d’autres régions. Les paris vont vers l’Égypte. Cette décision, bien que surprenante, ne marque pas forcément un tournant majeur dans la stratégie de production et de distribution de l’entreprise dans la région, puisqu’elle continuera à exporter ses produits chez nous.

L’évolution des politiques tarifaires, notamment la réduction voire la suppression des droits de douane grâce à plusieurs accords de libre-échange conclus par le Maroc, a contribué à rendre l’importation plus compétitive que la production locale. Cette réalité économique, combinée à une certaine inertie dans l’adaptation aux dynamiques du marché local, a conduit Unilever à réévaluer sa présence industrielle au Maroc. Le choix de se concentrer sur la distribution, plutôt que sur la production locale, est une stratégie adoptée par d’autres multinationales du secteur de la grande consommation, telles que Procter & Gamble.

Un simple «business plan d’opportunité»

Cette tendance de recentrage sur la distribution n’est pas nouvelle et est le résultat de la globalisation économique. Les industries multinationales doivent constamment réévaluer leurs opérations pour rester concurrentielles. «Dans de nombreux pays, des industries ferment et se tournent vers des structures parfois plus réduites», explique Khalid Benali, expert international en économie, à Lebrief. «C’est un business plan d’opportunité, et s’implémenter dans un pays donné, c’est une affaire de coûts. Ce n’est absolument pas l’image du pays qui est ternie, mais beaucoup plus un raisonnement de business, rechercher l’opportunité là où elle est».

Lire aussi : DEPF : la résilience de l’économie marocaine en 2024

Dans le cas spécifique du Maroc, la compétitivité des coûts de production est évaluée par rapport à d’autres pays. Ce qui incite les entreprises à revoir leur modèle opérationnel.

La concurrence locale

De plus, les entreprises locales gagnent du terrain sur le marché national, défiant la domination traditionnelle des multinationales. Cette concurrence accrue a incité les multinationales à revoir leurs stratégies. Elle se traduit souvent en réduisant leur présence industrielle et en se concentrant sur des activités de distribution et de marketing.

Malgré ces défis, certains industriels marocains ont réussi à s’imposer sur le marché national, offrant des produits de qualité à des prix compétitifs. «Cependant, Casablanca, qui était autrefois un centre majeur pour les sièges régionaux des multinationales, voit son attractivité diminuer au profit de villes comme Dubaï et Le Caire», détaille le magazine Challenge. Ces centres régionaux offrent des avantages fiscaux et logistiques qui attirent de plus en plus d’entreprises internationales.

Pour contrer cette tendance, certains experts appellent à la mise en place de mesures fiscales incitatives pour attirer et retenir les entreprises dans le pays. L’établissement de zones économiques spéciales ou d’autres incitations fiscales pourrait contribuer à renforcer la compétitivité du Maroc en tant que destination d’investissement pour les entreprises de grande consommation. Toutefois, notre expert estime que cette logique de déménagement finit toujours par se poser. «Aujourd’hui, à ma connaissance, il y a beaucoup de grandes entreprises qui refusent de participer aux foires internationales, par exemple, mais qui sont toujours intéressés par un partenariat sur place».

«C’est un raisonnement de coûts, tout simplement»

Il n’y a donc pas forcément de quoi se faire du mouron. L’investissement au Maroc attire toujours énormément, et certaines entreprises, comme Mitsubishi, quittent d’autres pays arabes pour le Maroc, ou encore des géants comme Stellantis qui comptent doubler leur production locale, au dépens d’usines implantées dans d’autres pays. Pour ne citer qu’un exemple, l’embouteilleur de Pepsi au Maroc, Varun Beverages Morocco, a annoncé en février 2024 qu’il produira la marque de chips Cheetos localement, et ce, dès mai 2025.

«Il y a des investisseurs qui arrivent au Maroc, car le pays est doté d’une stabilité politique, sociale et économique. Il y’a de grandes réformes qui s’opèrent, des infrastructures mises en place (autoroutes, tramways…). Puis il y a Maroc 2030. La distance entre les villes aussi est importantes, en quelques heures pour les distributions», détaille Khalid Benali. «Nous, en tant que pays, ça nous apporte des investissements, ce que ça ajoute au budget de l’État, en termes de taxes et d’impôts, et sur le marché de l’emploi pour résorber le chômage, ainsi que le transfert de compétences pour les jeunes Marocains».

«C’est un raisonnement de coûts, tout simplement», conclut l’expert.

Dernier articles
Les articles les plus lu

LF 2025 : le gain aux jeux de hasard désormais imposé

Économie - À partir du mois de juillet 2025, tout gain réalisé grâce aux jeux de hasard deviendra imposable dans le champ de l'impôt sur le revenu (IR).

Mouna Aghlal - 24 décembre 2024

Digital Now 2024 : une édition marquante pour un avenir numérique inclusif et transformateur

Économie - Le Congrès international "Digital Now" 2024, tenu à Casablanca sous l’initiative du Club des Dirigeants (CDD), a rassemblé plus de 5.000 participants

Rédaction LeBrief - 24 décembre 2024

Réforme des litiges commerciaux : le ministère de la Justice renforce l’arbitrage

Économie - Le ministère de la Justice a annoncé plusieurs mesures juridiques pour moderniser la gestion des litiges commerciaux.

Rédaction LeBrief - 24 décembre 2024

Tourisme : une année record et des ambitions pour 2025

Économie - Le Maroc a enregistré en 2024 une progression exceptionnelle en matière de tourisme, consolidant sa position parmi les destinations les plus attractives.

Ilyasse Rhamir - 24 décembre 2024

Sportech : les startups STADIUM by MDJS brillent à Munich

Économie - Cinq startups marocaines, issues du programme STADIUM by MDJS d’Accelab, ont marqué l’édition 2024 du sommet international Sports Tech Nation.

Ilyasse Rhamir - 23 décembre 2024

Ports situés sur la Méditerranée : baisse de 17% des débarquements de pêche à fin novembre (ONP)

Économie - À fin novembre 2024, les débarquements de la pêche côtière et artisanale en Méditerranée ont atteint 13.461 tonnes, en baisse de 17% par rapport à 2023.

Rédaction LeBrief - 23 décembre 2024

L’Office national des Pêches tient son Conseil d’administration

Économie - Le Conseil d’administration de l’Office national des Pêches (ONP) s’est réuni vendredi à Rabat, sous la présidence de Zakia Driouich, secrétaire d’État auprès du ministre de la Pêche maritime

Rédaction LeBrief - 23 décembre 2024

Soumission aux marchés de BAM : le format électronique obligatoire en 2025

Économie - À partir du 1er janvier 2025, Bank Al Maghrib (BAM) impose la soumission électronique obligatoire pour tous les marchés publics.

Rédaction LeBrief - 23 décembre 2024
Voir plus

Banque mondiale : le spectre d’une imminente crise de la dette

Économie - Dans son nouveau rapport sur la dette internationale, la Banque mondiale alerte sur le risque de surendettement des pays pauvres.

Manal Ben El Hantati - 12 décembre 2022

Driss Guerraoui primé à Barcelone

Économie - Le professeur Driss Guerraoui, président de l’Université Ouverte de Dakhla, a reçu le Prix international du leadership en intelligence économique pour l’année 2024.

Ilyasse Rhamir - 6 décembre 2024

CNT : Hamid Bentahar réélu

Économie - Hamid Bentahar se voit réélu pour un mandat de 3 ans à la tête de la CNT et Othman Ibn Ghazala élu vice-président générale.

Ilyasse Rhamir - 30 septembre 2024

HCP : la croissance de l’économie nationale devrait augmenter au T1-2023

Économie - Selon les projections du HCP, la croissance de l’économie nationale s’est située à 1,4% au dernier trimestre de 2022.

Rédaction LeBrief - 3 janvier 2023

Budget 2025, réforme sociale : les annonces de Younes Sekkouri

Économie - Avec une enveloppe budgétaire globale de 14 milliards de dirhams, le ministère ambitionne de relever plusieurs défis, notamment dans les domaines de l’emploi et du soutien économique.

Rédaction LeBrief - 30 novembre 2024

Bank Al-Maghrib prépare le lancement du marché secondaire des créances en souffrance

Économie - Bank Al-Maghrib (BAM) s'apprête à révolutionner le secteur bancaire marocain en mettant en place un marché secondaire des créances en souffrance.

Farah Nadifi - 29 novembre 2024

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire