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Trêve de bavardages et de suspens, venons-en aux faits. Les fouilles, réalisées sur le site de Oued Beht, près de Khémisset, ont révélé des objets historiques en ivoire et des fragments d’œufs d’autruche, sur ce qui serait le plus ancien et plus grand complexe agricole en Afrique, mis à part la Vallée du Nil.
Ces découvertes suggèrent des liens étroits avec des régions africaines lointaines, particulièrement au sud du Sahara. Ces objets, vestiges d’un passé encore mal connu, ouvrent de nouvelles perspectives sur les dynamiques d’échanges à travers la Méditerranée il y a plusieurs millénaires.
Une véritable mine d’informations ce site archéologique. Il renseignera les chercheurs sur la période entre le IVe et le IIIe millénaire avant notre ère. Cela nous renvoie directement à une époque de transformations dans les sociétés humaines de cette région du globe. Cette période, longtemps négligée par les chercheurs internationaux, a su trouver écho dans ces nouvelles investigations qui permettront de revenir sur les idées reçues du peuplement maghrébin.
Les résultats de cette étude, publiés sur la revue Antiquity, révèlent la découverte d’un vaste établissement de près de dix hectares, comparable en taille à la célèbre cité grecque de Troie datant de l’âge du Bronze ancien. Le site archéologique de Oued Beht remonte à l’époque néolithique.
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Parmi les découvertes, les chercheurs ont mis au jour des restes de plantes et d’animaux domestiqués, ainsi qu’un ensemble impressionnant d’artefacts, dont des récipients en céramique aux motifs polychromes, des haches polies, des meules, et divers outils en pierre taillée. Les fouilles ont aussi révélé la présence de nombreuses fosses et silos, vraisemblablement destinés au stockage.
Les artefacts retrouvés sur place, ont permis de mettre la lumière sur un savoir-faire ancestral grâce, notamment, au travail des pierres taillées, qui semblent indiquer la présence d’une organisation sociale très structurée, selon les premières impressions. Ces objets reflètent également l’existence de réseaux d’échanges développés reliant la région du Maghreb à d’autres contrées africaines, mais aussi à l’Europe. Preuve que le point de passage le plus court de la Méditerranée, entre les deux continents, était déjà utilisé en cette période.
Le site de Oued Beht
Les chercheurs à l’origine de cette étude soulignent l’importance de cette découverte dans le cadre plus large de l’évolution des sociétés complexes en Méditerranée et en Afrique du Nord. Selon eux, ces trouvailles mettent en lumière le rôle du Maghreb comme un carrefour essentiel dans l’Histoire des civilisations. En effet, la position géographique de cette région, coincée entre le Sahara au sud et la Méditerranée au nord, en fait un pont naturel entre deux mondes, favorisant les interactions et les échanges de biens, de techniques et d’idées.
Le site de Oued Beht, situé dans la province de Khémisset, est perché sur une crête calcaire à une altitude de 170 à 210 mètres. Dominant la rivière Oued Beht, il se trouve dans une région semi-aride de climat méditerranéen, actuellement utilisée pour la culture extensive de céréales. Bien que le site soit aujourd’hui à environ 100 km de la côte, il est probable, selon l’étude publiée sur le magazine spécialisé, qu’il ait été autrefois plus proche de la mer, peut-être en bordure d’une zone humide estuarienne.
Découvert dans les années 1930 lors de travaux de construction sous l’administration coloniale française, le site a révélé une abondance d’outils en pierre polie, notamment des haches et des herminettes, ainsi que de grandes structures linéaires, probablement les murs d’une enceinte préhistorique. Au total, 1.388 artefacts de ce type sont aujourd’hui conservés au Musée de Rabat et à l’Institut national des sciences de l’archéologie et du patrimoine (INSAP), bien que certains aient quitté le pays illégalement à l’époque coloniale.
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Des fouilles archéologiques ont débuté en 2005 sous la direction de Youssef Bokbot, et ont mis au jour des vestiges datant de différentes périodes, notamment l’Épipaléolithique et le Néolithique ancien et moyen. Depuis 2021, un projet archéologique international a relancé les recherches sur ce site, visant à mieux comprendre la chronologie des activités humaines, la subsistance et les artefacts matériels. Ces travaux combinent des techniques modernes telles que la datation au radiocarbone, la photogrammétrie par drone, et des fouilles approfondies. Le projet espère ainsi éclairer le mode de vie des sociétés préhistoriques du Maghreb, en les comparant avec d’autres civilisations de la Méditerranée et de l’Afrique du Nord.
Le projet archéologique Oued Beht (OBAP), lancé en 2021, est le fruit d’une collaboration internationale entre plusieurs institutions scientifiques, parmi lesquelles l’Institut National des Sciences de l’Archéologie et du Patrimoine (INSAP) au Maroc, le Centre National de la Recherche Scientifique (CNR-ISPC) en Italie, ainsi que le McDonald Institute for Archaeological Research de l’Université de Cambridge. Cette coopération multidisciplinaire vise à combler les lacunes dans nos connaissances sur cette période cruciale de la préhistoire du Maghreb.
Les résultats préliminaires de l’équipe de chercheurs montrent que le site de Oued Beht n’était pas un simple point d’habitation, mais bien un lieu d’échanges où des objets exotiques et des matériaux venus de régions éloignées transitaient. Les fragments d’œufs d’autruche, utilisés probablement comme récipients ou objets décoratifs, et les objets en ivoire, confirment que les habitants de cette région étaient en contact avec des communautés situées bien au-delà de leurs frontières immédiates. Ces objets, ainsi que d’autres trouvailles, laissent supposer l’existence d’un réseau commercial florissant reliant le Maghreb au reste du continent africain et à l’Europe.
Outre la portée scientifique de ces découvertes, les fouilles de Oued Beht viennent également renforcer l’idée selon laquelle le Maghreb a longtemps servi de passerelle entre l’Afrique subsaharienne et l’Europe méditerranéenne. Ces interactions, qui remontent à plusieurs milliers d’années, témoignent de la richesse culturelle et de la complexité des sociétés qui habitaient cette région.
Le Projet archéologique Oued Beht est encore en cours et de nouvelles campagnes de fouilles sont prévues dans les années à venir. Les chercheurs espèrent que ces travaux permettront de découvrir d’autres sites similaires, susceptibles de fournir des indices supplémentaires sur les réseaux d’échanges anciens et sur le rôle du Maghreb dans l’histoire des civilisations méditerranéennes et africaines. Grâce à des études comme celle-ci, la préhistoire de l’Afrique du Nord-Ouest se dévoile peu à peu, révélant un passé fascinant et encore largement inexploré.
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