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HCP : situation socioéconomique des réfugiés au Maroc

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Haut-Commissariat au plan (HCP) © DR

Dans une étude collaborative, le Haut Commissariat au Plan et le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés se sont concentrés sur la vie des réfugiés au Maroc en 2022. Cette analyse en profondeur révèle les défis socio-économiques, les dynamiques démographiques et les efforts d’intégration de cette population variée, fournissant une vision complète de leur quotidien, des données démographiques aux conditions de logement.

En 2022, le Haut Commissariat au Plan (HCP), en collaboration avec le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), a mené une enquête approfondie sur la situation socioéconomique des réfugiés au Maroc. Cette étude a visé à collecter des données précises sur les caractéristiques sociodémographiques, la situation juridique, et le niveau d’intégration socioéconomique de ces individus. En ciblant 600 ménages à travers divers critères tels que l’origine, le sexe, l’âge, et la localisation, l’enquête a également exploré l’accès aux services essentiels, les conditions de vie, et les défis spécifiques tels que la violence basée sur le genre et les obstacles au logement, offrant ainsi un aperçu détaillé des expériences et des besoins des réfugiés résidant au Maroc.

Profil démographique et conditions matrimoniales des chefs de ménage réfugiés

L’enquête sur les réfugiés au Maroc a mis en lumière des informations essentielles sur la démographie et les conditions de vie des chefs de ménage réfugiés. Principalement composés d’hommes (82%), la majorité des chefs de ménage ont entre 18 et 44 ans, représentant 82,6% de cette population. Les tranches d’âge de 45 à 59 et plus de 60 ans sont moins représentées, et seulement 1,2% des chefs de ménage sont mineurs. La taille moyenne de ces ménages est de 2,8 personnes.

Les nationalités les plus représentées parmi ces chefs de ménage incluent les Syriens (31,9%), suivis par les Centrafricains, Yéménites, Sud-Soudanais, et Ivoiriens, avec une présence moindre d’autres nationalités africaines et arabes. Un problème notable est l’absence de documents d’identité, affectant particulièrement les Ivoiriens.

Sur le plan matrimonial, plus de la moitié des chefs de ménage est célibataire, avec une tendance plus marquée parmi les réfugiés africains, tandis que les réfugiés arabes, spécialement les Syriens et les Yéménites, montrent un taux de mariage plus élevé. De plus, un nombre considérable de ces mariages implique des conjoints marocains, principalement chez les hommes réfugiés.

Concernant la nationalité, beaucoup d’hommes mariés à des Marocaines cherchent à obtenir la nationalité marocaine, en particulier ceux âgés de 60 ans et plus. Le soutien pour acquérir la nationalité marocaine est également une préoccupation majeure, surtout parmi ceux originaires de pays spécifiques.

L’étude révèle aussi que les enfants issus de mariages mixtes entre réfugiés et Marocains obtiennent généralement la nationalité de la mère, bien que cela varie en fonction du statut de séjour du parent réfugié.

Dynamiques récentes de l’immigration et intégration des réfugiés

La majorité des chefs de ménage réfugiés sont des arrivants récents, avec plus de la moitié (53,5%) ayant franchi les frontières entre 2017 et 2022, souvent avant la pandémie de COVID-19. Un tiers est arrivé entre 2011 et 2016, et 13,9% étaient présents avant 2011. Les Ivoiriens et les Syriens figurent parmi les communautés les plus anciennes, tandis que les Sud-Soudanais et les Centrafricains comptent parmi les plus récents.

L’insécurité liée à la guerre et aux conflits est la principale raison d’immigration pour 58,9% des chefs de ménage, avec une incidence plus forte chez les femmes. Les études et la recherche d’emploi sont également des facteurs d’émigration notables, avec des variations notables selon le sexe et le pays d’origine, notamment une prévalence de l’insécurité poussant les Ivoiriens à l’exode.

L’aéroport est le principal point d’entrée pour la majorité, en particulier pour les Sud-Soudanais, Yéménites et Centrafricains. Les frontières avec l’Algérie servent aussi de passage, surtout pour les Syriens et autres réfugiés africains. Oujda est la principale ville d’entrée pour les arrivées irrégulières, majoritairement des hommes.

Concernant la résidence, près de la moitié des chefs de ménage réfugiés vivent dans l’axe urbain de Casablanca à Kénitra, avec des concentrations élevées à Rabat, Casablanca, Salé, et Kénitra. Ce phénomène est plus prononcé chez les femmes. D’autres importantes communautés de réfugiés se trouvent à Marrakech, Tanger, Oujda, Fès, et Meknès. Une fois établis, la plupart des réfugiés ne changent pas de ville, sauf pour des raisons d’emploi, d’études ou à cause de la cherté de la vie.

Diversité et défis des niveaux éducatifs

L’analyse des niveaux éducatifs des réfugiés au Maroc révèle que près de la moitié (45,8%) possède une formation supérieure, avec une prédominance masculine légère. Les niveaux d’éducation secondaire et collégial concernent respectivement 15,9% et 14,9% des réfugiés, tandis que 8,1% n’ont reçu aucune éducation formelle, un chiffre qui s’élève à 21,7% parmi les femmes. Les réfugiés originaires du Soudan du Sud, du Yémen et de la République Centrafricaine affichent des taux élevés d’éducation supérieure, alors que les Ivoiriens et les Syriens présentent les taux les plus élevés de non-scolarisation.

L’âge a un impact notable sur l’éducation, les jeunes réfugiés de 18 à 29 ans ayant le plus haut niveau d’éducation supérieure (62,6%), tandis que ceux de plus de 60 ans ont le taux le plus bas (14,4%). Les réfugiés sans éducation sont majoritairement plus âgés, et ceux possédant un titre de séjour valide ont tendance à avoir un niveau d’éducation plus élevé.

Les domaines de spécialisation pour ceux ayant une éducation supérieure incluent principalement le commerce et la gestion, le droit, la santé, et les technologies de l’information, avec des différences marquées selon le sexe et l’origine. Les Ivoiriens et les Centrafricains privilégient le commerce et la gestion, tandis que les Syriens s’orientent vers la santé.

Environ un quart des réfugiés a bénéficié d’une formation professionnelle. La majorité utilise le dialecte marocain pour communiquer, bien que le français soit courant parmi les réfugiés des pays francophones. L’anglais est moins utilisé, sauf par les Sud-Soudanais.

Cependant, peu de réfugiés reçoivent une formation formelle en dialecte marocain, à l’exception de certains Ivoiriens et d’autres nationalités arabes, avec les jeunes étant les plus enclins à suivre de telles formations. Malgré cela, plus de la moitié des réfugiés n’éprouvent pas de difficultés pour communiquer, bien que certains défis demeurent, surtout parmi les femmes et les réfugiés de certains pays africains.

Précarité et sécurité du logement

Environ 53,4% des réfugiés n’ont aucun document confirmant leur droit d’occupation de logement, avec une situation plus précaire pour les femmes (64,4%) que pour les hommes (51%). Toutefois, 41,6% détiennent un contrat de location, souvent avec une légère prédominance masculine. Les Yéménites, Syriens et Centrafricains sont les plus enclins à avoir un tel contrat. Seuls 2,5% possèdent un certificat de propriété, un chiffre qui monte légèrement parmi les plus de 60 ans et les Syriens.

Malgré l’incertitude de leur situation de logement, deux tiers des réfugiés jugent peu probable de perdre leur logement de manière involontaire dans les cinq prochaines années, bien que 13% considèrent cette éventualité comme très probable, surtout parmi les femmes. Concernant la sécurité, environ 70% des réfugiés se sentent en sécurité dans leur quartier la nuit, avec une sensation de sécurité plus forte chez les hommes. Les Syriens et Yéménites se sentent particulièrement en sécurité, contrairement aux Ivoiriens, Centrafricains et Sud-Soudanais qui ressentent une insécurité accrue.

La majorité des réfugiés possède des documents tels que des passeports ou titres de séjour valides, mais peu détiennent une carte de sécurité sociale. Les actes de naissance et certificats de mariage sont aussi présents mais moins fréquemment chez les femmes. Les titres de séjour ont généralement une validité de trois ans, bien que beaucoup soient renouvelés annuellement, surtout parmi les Ivoiriens et Centrafricains, en raison de la complexité des démarches administratives et des difficultés à obtenir des contrats de travail ou de bail.

Aide et revenus des réfugiés au Maroc

Environ 41% des réfugiés ont reçu une aide au cours de l’année dernière, principalement des hommes. Les Yéménites bénéficient le plus de cette assistance, suivis par les Centrafricains, Syriens, Sud-Soudanais et Ivoiriens. Les jeunes adultes de 18 à 29 ans sont les plus assistés, tandis que les plus de 60 ans reçoivent moins d’aide. La majeure partie de cette aide provient de l’UNHCR, représentant 57,6% du total, et varie en fonction du sexe et de la nationalité. Les contributions des particuliers marocains et des ONG locales sont également importantes.

La nature de l’aide reçue varie : près de la moitié est financière, principalement pour les femmes, tandis que les soins de santé et l’éducation ou la formation sont également prioritaires. Les soutiens moins courants incluent la nourriture, l’hébergement et l’aide à l’emploi.

Du côté des revenus, les emplois occasionnels constituent la source principale pour beaucoup, surtout pour les hommes et ceux avec des titres de séjour expirés ou absents. L’aide de l’UNHCR est la deuxième source de revenus, particulièrement pour les femmes et les Ivoiriens. Les transferts familiaux ou d’amis sont aussi importants, en particulier pour les Centrafricains, Yéménites et Sud-Soudanais.

Les réfugiés au Maroc gagnent en moyenne 3.155 DH par mois, avec des hommes percevant généralement plus que les femmes. Les dépenses mensuelles des ménages excèdent souvent les revenus, créant des déficits importants, particulièrement chez les hommes. Depuis la pandémie de COVID-19, de nombreux réfugiés, notamment les femmes et ceux sans titre de séjour, rapportent une baisse de leurs revenus, alors qu’une minorité voit une amélioration de leur situation économique.

Conditions socio-économiques

La majorité des réfugiés, environ 67,9%, perçoivent leur ménage comme étant pauvre, une perception particulièrement prédominante chez les femmes et les individus sans titre de séjour. Les réfugiés ivoiriens, suivis des Centrafricains et des Sud-Soudanais, sont ceux qui s’identifient le plus à cette catégorie de pauvreté. Cependant, environ un quart des réfugiés considèrent appartenir à un ménage de niveau moyen, une opinion plus fréquente chez les hommes et les réfugiés syriens.

Sur le plan financier, 44,8% des réfugiés ont un compte bancaire, avec une légère majorité masculine. Les Yéménites présentent le taux d’accès le plus élevé à ces services, surtout parmi ceux possédant un titre de séjour valide. Toutefois, seulement 14,1% des réfugiés sont en mesure d’épargner une partie de leurs revenus, avec les hommes et les Syriens montrant une plus grande capacité à épargner.

Concernant l’emploi, 43% des réfugiés travaillent, bien qu’environ un sur cinq soit au chômage, les femmes étant disproportionnellement touchées. Les réfugiés du Soudan du Sud et de la Syrie ont les taux de chômage les plus faibles. Beaucoup restent inactifs, surtout les femmes. Les emplois occupés sont principalement dans les secteurs des services, de l’agriculture, et du commerce, avec une majorité de salariés ou d’indépendants. Peu bénéficient de contrats de travail formels ou d’avantages sociaux, comme l’assurance maladie ou les allocations familiales.

Accès limité au soutien gouvernemental et réactions aux incidents

Très peu de réfugiés au Maroc bénéficient du soutien gouvernemental, avec seulement 1,2% recevant des prestations de protection sociale en espèces, et des taux encore plus bas pour d’autres types d’allocations, comme les allocations familiales et les pensions de retraite. L’absence de titre de séjour est la principale barrière empêchant l’accès à ce soutien, surtout pour les hommes et les réfugiés ivoiriens. D’autres obstacles incluent l’irrégularité et la nature informelle du travail, ainsi que la non-déclaration par les employeurs.

Un grand nombre de réfugiés ne sont pas conscients des registres sociaux marocains, tels que le registre national de la population et le registre social unifié, avec près de 60% ignorant l’existence de ces programmes. L’affiliation à ces registres est extrêmement rare, même parmi les réfugiés qui en sont conscients.

En cas de vol, d’agression, ou de conflits, la majorité des réfugiés s’adressent en premier à la police ou à la Gendarmerie Royale. Cependant, un petit pourcentage se tourne vers des voisins, des membres de famille, ou des compatriotes, particulièrement parmi les femmes. Les Yéménites sont les plus enclins à utiliser les services de la police, suivis par les Syriens, les Ivoiriens, et les Centrafricains.

Cependant, une portion importante des réfugiés, notamment les femmes, ne prend aucune action en cas d’incident. La peur des autorités, le statut de sans-papiers, le manque de moyens financiers, et le manque de confiance dans la justice sont parmi les raisons citées pour cette inaction.

État de santé des réfugiés

La majorité des réfugiés au Maroc se perçoit en bonne santé, bien que les femmes tendent à rapporter un état de santé plus précaire que les hommes. Notamment, les Ivoiriens et les Syriens indiquent un taux élevé de problèmes de santé. Près d’un tiers des réfugiés souffrent de maladies chroniques, avec une prévalence plus élevée chez les femmes et les personnes âgées. Les troubles mentaux ou psychologiques, bien que moins fréquents, affectent une minorité de réfugiés, particulièrement les femmes.

Les défis physiques, tels que les problèmes de vision, d’audition et de mobilité, sont présents mais varient en intensité. La majorité des réfugiés ne rencontrent pas de difficultés de mobilité, bien que des troubles légers à sévères soient notés, surtout chez les plus âgés. Les troubles visuels sont plus communs parmi les réfugiés centrafricains, et les problèmes auditifs sont plus fréquents chez ceux venant d’autres pays africains.

Défis de couverture médicale et accès aux soins de santé

La couverture médicale des réfugiés est limitée, avec seulement 5,5% bénéficiant d’une assurance maladie obligatoire, légèrement plus chez les hommes que chez les femmes. Les Yéménites et les Sud-Soudanais accèdent mieux à l’assurance que d’autres nationalités, bien que les taux restent faibles, surtout pour les groupes vulnérables comme les jeunes, les âgés, et ceux sans titre de séjour ou avec un titre expiré. Seulement environ 9,1% des détenteurs de titre de séjour valide sont assurés, une proportion qui diminue drastiquement chez ceux sans titre ou avec un titre expiré.

Par ailleurs, 23,1% des réfugiés ont rapporté un besoin non satisfait de services de santé, particulièrement parmi les femmes et les Centrafricains, accentuant les barrières à l’accès aux soins médicaux nécessaires. Cependant, plus de 40% ont reçu des soins de santé récemment, principalement via des hôpitaux publics ou des services de l’UNHCR/OIM, souvent pour des maladies passagères.

Diversité et défis des conditions de logement

Les conditions de logement des réfugiés au Maroc varient considérablement, avec une majorité vivant dans des appartements ou des maisons, tandis que près d’un quart habitent dans des chambres collectives. Cette distribution du type de logement diffère entre les sexes, les hommes ayant plus tendance à vivre dans des appartements et les femmes dans des chambres collectives ou individuelles.

Les Yéménites, les Syriens et les Ivoiriens sont plus susceptibles d’occuper des appartements, tandis que les réfugiés centrafricains et sud-soudanais tendent à vivre dans des chambres collectives. Presque tous les réfugiés sont locataires de leur logement.

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