Accueil / Économie

Hausse du taux directeur : quel impact sur les taux de crédit ?

Temps de lecture

Le siège de Bank Al-Maghrib à Rabat © DR

Pour la troisième fois, Bank Al-Maghrib a recouru au relèvement du taux directeur, qui a grimpé de 50 points de base pour atteindre les 3%. Certains analystes critiquent cette décision en raison de ses répercussions, notamment la hausse du coût des crédits bancaires et le frein à l’investissement.

En raison de la conjoncture économique, le Conseil de Bank Al-Maghrib (BAM) a pris la décision d’augmenter le taux directeur à 3% lors de sa première réunion trimestrielle de l’année 2023. Les experts indépendants membres du Conseil de BAM ont estimé que cette décision est motivée par l’accélération de l’inflation, qui continue d’être alimentée par les pressions externes exercées sur les biens et services non échangeables.

En décembre 2022, le taux directeur avait déjà été augmenté de 1,5% à 2,5% dans le but de « prévenir tout désancrage des anticipations d’inflation et favoriser le retour de l’inflation à des taux en ligne avec l’objectif de stabilité des prix« , selon BAM.

Lire aussi : BAM : quelles projections macroéconomiques pour les mois à venir ?

Quid des crédits bancaires ?

L’impact de l’augmentation des taux directeurs de la banque centrale est considérable et direct. En effet, la banque centrale est la première source de liquidités pour les banques, et si elle durcit ses politiques, cela affecte inévitablement les établissements bancaires qui répercuteront cette hausse du coût de l’argent sur leurs clients en augmentant les taux de crédit. Cette situation ne sera pas sans conséquence pour les ménages qui verront leur capacité d’emprunt diminuer, car le crédit deviendra plus cher.

Ainsi, les crédits à la consommation seront particulièrement touchés, obligeant les ménages à revoir à la baisse leur niveau de consommation et à limiter leurs achats d’équipements ou de véhicules, par exemple.

Ceci étant, un banquier de la place nous a assuré que l’augmentation du taux de crédit n’est pas à l’ordre du jour, du moins pas avant une nouvelle augmentation du taux directeur. Notre interlocuteur précise que le taux directeur à 3% demeure correct. Selon sa lecture, la banque centrale a priorisé la maîtrise de l’inflation aux dépens de la croissance. BAM a fait le choix de réduire la consommation et l’investissement, ce qui engendre une réduction de la demande globale et par ricochet une baisse des prix, conclut-il.

Après les deux précédentes hausses du taux directeur, la transmission de cette hausse aux taux débiteurs et créditeurs est restée incomplète. Bien plus encore, le rythme annuel de croissance des crédits bancaires au secteur non financier a fortement augmenté pour atteindre +8% à la fin de 2022, comparé à seulement 2,9% l’année précédente. Cette augmentation importante est due à la hausse des crédits accordés au secteur privé, en particulier aux entreprises, sous forme de crédits d’équipement et de facilités de trésorerie, ainsi qu’à la forte augmentation des crédits accordés aux entreprises publiques au cours des deux derniers mois de l’année précédente.

Lire aussi : Bank Al-Maghrib relève le taux directeur à 3%

Le marché immobilier dans l’œil du cyclone

La production de crédits immobiliers ne sera pas épargnée par la dernière hausse du taux directeur. L’emprunt deviendra inaccessible à un plus grand nombre de personnes, et aggravera ainsi la situation déjà difficile due à la rigidité des taux. De ce fait, la demande de biens immobiliers se contractera.

D’après un promoteur immobilier opérant dans la région de Rabat, c’est le crédit immobilier qui souffrira le plus de la hausse du taux directeur. À ses yeux, les banques augmenteront les taux d’intérêt des prêts immobiliers avant tout pour compenser. Cela signifie que les gens qui prévoient d’acheter une propriété devront agir rapidement avant que les taux d’intérêt ne montent. Les banques seront également plus regardantes et serreront la vis quand elles examineront les nouveaux dossiers de prêts. La hausse des taux d’intérêt touchera surtout les nouveaux acquéreurs, y compris les primo-accédants. Les personnes ayant un crédit immobilier à taux variable verront de plus une augmentation progressive de leurs mensualités à venir. La hausse du coût de l’argent pourra, à terme, entrainer une répercussion sur le marché de l’immobilier qui verra moins de demande, plus d’offre et donc une baisse des prix.

Lire aussi : Immobilier : lutte contre le blanchiment d’argent

La hausse des taux directeurs aura aussi des conséquences néfastes sur les entreprises qui auront de plus en plus de difficultés à emprunter, entraînant une augmentation de leurs charges financières. Cette situation pourrait nuire à leur investissement et, in fine, à l’emploi. Les entreprises les plus endettées risquent quant à elles de faire faillite. En somme, l’augmentation du taux directeur aura des conséquences sur l’ensemble de l’économie.

Ayant profité d’une longue conjoncture où l’argent ne coutait pas cher pour engranger de confortables résultats, les banques, à qui l’on donne les clés de la gestion monétaire du pays, devront à leur tour faire les efforts nécessaires pour limiter l’impact de cette hausse des taux sur les ménages et les entreprises.

Lire aussi : Crédit bancaire : hausse des taux au quatrième trimestre 2022

Dernier articles
Les articles les plus lu

Blé tendre : le Maroc renforce son alliance avec la Russie

Économie - Le Maroc a décidé de maintenir le soutien gouvernemental pour l’importation de blé tendre jusqu’à fin avril 2025.

Ilyasse Rhamir - 20 décembre 2024

La loi de Finances 2025 publiée au Bulletin officiel

Économie - La loi de Finances 2025, promulguée par le Dahir n° 1-24-65 du 13 décembre 2024 a été publiée dans le Bulletin officiel.

Mbaye Gueye - 19 décembre 2024

Le commerce extérieur au vert, malgré un déficit croissant

Économie - Bank Al-Maghrib (BAM), a révélé que les exportations de biens marocaines ont connu une hausse de 6,2% à fin octobre 2024 par rapport à la même période de l’année précédente.

Mbaye Gueye - 19 décembre 2024

Les OPCVM atteignent 663,3 MMDH d’actifs nets à fin novembre 2024

Économie - Une hausse de 18,5% depuis le début de l’année, selon le rapport de la politique monétaire publié par Bank Al Maghrib.

Rédaction LeBrief - 19 décembre 2024

L’inflation attendue à 0,8% au T4-2024 (BAM)

Économie - BAM a indiqué l’inflation au Maroc devrait revenir à 0,8% au quatrième trimestre (T4) 2024, après 1,3% le trimestre précédent.

Mbaye Gueye - 19 décembre 2024

L’ACAPS renforce la protection des assurés, affiliés et adhérents

Économie - L'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) a publié son rapport annuel 2023.

Mbaye Gueye - 18 décembre 2024

Injaz Al-Maghrib : une assemblée générale sous le signe des réalisations et de l’avenir

Économie - L’assemblée générale ordinaire d’Injaz Al-Maghrib s’est tenue le 17 décembre 2024 au siège de Wafa Assurance, à Casablanca.

Mbaye Gueye - 18 décembre 2024

Banques : le besoin en liquidité atteint 131,6 MMDH au T3 2024

Économie - Le besoin en liquidité des banques marocaines a atteint 131,6 MMDH en moyenne hebdomadaire au troisième trimestre 2024

Rédaction LeBrief - 18 décembre 2024
Voir plus

Banque mondiale : le spectre d’une imminente crise de la dette

Économie - Dans son nouveau rapport sur la dette internationale, la Banque mondiale alerte sur le risque de surendettement des pays pauvres.

Manal Ben El Hantati - 12 décembre 2022

Driss Guerraoui primé à Barcelone

Économie - Le professeur Driss Guerraoui, président de l’Université Ouverte de Dakhla, a reçu le Prix international du leadership en intelligence économique pour l’année 2024.

Ilyasse Rhamir - 6 décembre 2024

CNT : Hamid Bentahar réélu

Économie - Hamid Bentahar se voit réélu pour un mandat de 3 ans à la tête de la CNT et Othman Ibn Ghazala élu vice-président générale.

Ilyasse Rhamir - 30 septembre 2024

HCP : la croissance de l’économie nationale devrait augmenter au T1-2023

Économie - Selon les projections du HCP, la croissance de l’économie nationale s’est située à 1,4% au dernier trimestre de 2022.

Rédaction LeBrief - 3 janvier 2023

Budget 2025, réforme sociale : les annonces de Younes Sekkouri

Économie - Avec une enveloppe budgétaire globale de 14 milliards de dirhams, le ministère ambitionne de relever plusieurs défis, notamment dans les domaines de l’emploi et du soutien économique.

Rédaction LeBrief - 30 novembre 2024

Bank Al-Maghrib prépare le lancement du marché secondaire des créances en souffrance

Économie - Bank Al-Maghrib (BAM) s'apprête à révolutionner le secteur bancaire marocain en mettant en place un marché secondaire des créances en souffrance.

Farah Nadifi - 29 novembre 2024

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire