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Guerre au Proche-Orient : le «jour d’après» se dessine-t-il déjà ?

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Image d’illustration. © DR

Près de quatre mois après le début de la guerre à Gaza, personne ne voyant réellement sa fin, les plans d’Israël pour les territoires palestiniens semblent prendre forme. Si aucune décision officielle n’a été rendue et que très peu de responsables israéliens ont fait des déclarations dans ce sens, un plan en trois phases est pensé avec, à terme, l’établissement d’un État palestinien que les États-Unis pourraient reconnaître. Entre-temps, un accord de trêve de six jours est en cours de négociations pour permettre la libération des captifs israéliens et prisonniers palestiniens détenus par Israël. Mais surtout pour donner le temps à la population bloquée dans la bande de Gaza le temps de respirer.

Au 118ᵉ jour de guerre qui a fait près de 26.751 morts et 64.636 blessés du côté palestinien, l’après-guerre se discute en coulisses. Dans ce bout de territoire qui abritait 2,3 millions d’habitants avant le 7 octobre, les infrastructures et moyens de subsistance ont grandement été décimés, laissant la population gazaouie dans l’incertitude quant à leur avenir.

Dans un rapport publié plus tôt cette semaine, l’organisme commercial onusien, la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a fait part d’un constat alarmant : «si l’opération militaire prenait fin et que la reconstruction commençait immédiatement – et si la tendance de croissance observée entre 2007 et 2022 persistait, à un taux annuel moyen de 0,4% – Gaza pourrait retrouver ses niveaux de PIB d’avant le conflit en 2092». Et l’année 2022 «n’était pas du tout adéquate pour les habitants de Gaza», a déploré Rami Allazeh, un économiste qui travaille sur les territoires palestiniens occupés à la CNUCED.

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Et de témoigner : «Je pense que le principal point à retenir de ce rapport est que le niveau de destruction auquel nous assistons à Gaza est sans précédent. Il faudra beaucoup d’efforts de la part de la communauté internationale pour la reconstruction et le redressement de Gaza». Pour se remettre de la précédente intervention militaire israélienne à Gaza en 2014, les besoins de l’enclave s’élevaient à environ 3,9 milliards de dollars. Ces besoins seraient considérablement plus élevés après le conflit actuel. L’offensive israélienne a déplacé 85% de la population de Gaza à l’intérieur du pays, en raison de graves pénuries de nourriture, d’eau potable et de médicaments, tandis que 60% des infrastructures de l’enclave ont été endommagées ou détruites, selon les Nations unies.

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Le «jour d’après»

À près de quatre mois de guerre, d’aucuns voient le bout du tunnel. Mais les plans d’après-guerre pour la bande côtière se discutent. L’administration Biden avait, elle, commencé au premier mois déjà. En décembre, lors de sa rencontre avec le président palestinien, Mahmoud Abbas, le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, avait indiqué que l’Autorité palestinienne, dans sa structure actuelle, n’a pas la capacité et le leadership nécessaires pour gouverner la bande de Gaza et doit être «réorganisée et revitalisée» pour ce faire.

La position de Sullivan impliquait que l’Autorité palestinienne servirait d’organe administratif régissant Gaza «au lendemain» de la guerre. Une suggestion catégoriquement réfutée par le gouvernement Netanyahu. Le premier ministre israélien a exprimé à plusieurs reprises l’intention d’Israël de détruire le Hamas et de maintenir un contrôle sécuritaire total sur Gaza, rejetant toute souveraineté palestinienne ou toute solution à deux États. Mardi, l’agence de presse Anadolu a rapporté, citant le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, qu’Israël maintiendra son contrôle militaire sur la bande de Gaza après la guerre. «Après la guerre, quand elle sera terminée, je pense qu’il sera tout à fait clair que le Hamas ne contrôlera pas Gaza. Israël le contrôlera militairement, mais ne le contrôlera pas au sens civil», a déclaré Gallant à la commission des affaires étrangères et de la défense de la Knesset, cité dans un communiqué publié par le parlement israélien, Knesset.

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Toutefois, un article du Jerusalem Post suggère que le plan israélien – avec les dissensions internes qui jaillissent dans la coalition gouvernementale de Netanyahu, celui-ci aurait été conçu par un «groupe d’hommes d’affaires» dont fait partie l’homme de confiance du chef de l’État israélien, Ron Dermer – envisagerait un futur État palestinien que les États-Unis pourraient reconnaître. Bien que Netanyahu se soit montré, jusque-là, circonspect dans l’élaboration d’un plan d’après-guerre pour Gaza, transmettant et délibérant cependant activement sur ces idées, le média hébreu rapporte que l’avenir des territoires palestiniens suivrait trois phases.

«Si l’étape de stabilisation se déroule sans heurts dans un délai prédéfini de deux à quatre ans, Israël reconnaîtra un État palestinien»

La première étape impliquerait la création d’un gouvernement militaire israélien global à Gaza pour superviser l’aide humanitaire et assumer la responsabilité de la population civile pendant une «période de transition».

Parallèlement, la deuxième étape verrait la formation d’une coalition arabe internationale, comprenant l’Arabie saoudite, l’Égypte, le Maroc, les Émirats arabes unis, Bahreïn et d’autres. Cette coalition, selon certains médias, les États-Unis ont d’ores et déjà donné leur accord au diplomate américain, Jake Sullivan, pour faire partie d’un accord de normalisation régional plus large, soutenant la création de «la nouvelle Autorité palestinienne». En d’autres termes, Israël chercherait à raviver les accords d’Abraham qui, au moment où le Hamas a attaqué le sol israélien, cherchaient à rallier l’Arabie saoudite.

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Les responsables palestiniens, ni affiliés au Hamas ni directement associés à la garde du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas (Abou Mazen), devraient alors hériter de la gouvernance de Gaza, poursuit le média hébreu. Israël conserverait toutefois le droit de mener des opérations de sécurité à Gaza, à l’image de ses opérations en Cisjordanie occupée, «chaque fois que des besoins opérationnels pour contrer le terrorisme ou des infrastructures terroristes apparaîtront».

La phase suivante, conditionnée à la stabilisation de Gaza et au succès de la nouvelle entité («la nouvelle Autorité palestinienne»), implique de vastes réformes en Judée-Samarie concernant le fonctionnement, le contenu éducatif et la gestion du terrorisme de l’Autorité palestinienne. Si cette étape se déroule sans heurts dans un délai prédéfini de deux à quatre ans, Israël reconnaîtra un État palestinien délimité au sein des territoires de l’Autorité palestinienne et envisagera de transférer des terres supplémentaires, ne nécessitant pas de colonisation, à cet État.

Netanyahu peut-il s’orienter vers une action historique qui mettrait fin au conflit de Gaza ? […] Les chances semblent faibles, étant donné l’habitude de Netanyahu d’abandonner des initiatives similaires avant qu’elles ne portent leurs fruits.

 »L’avenir de Gaza : le pari stratégique de Netanyahu dévoilé », Ben Capsit, Jerusalem Post, 31 janvier 2024

Toutefois, les partenaires de la coalition d’extrême droite de Netanyahu, emmenés par les ministres Miri Regev, Itamar Ben-Gvir et Bezalel Smotrich, ne sont pas entièrement alignés sur l’idée. Ils considèrent le désengagement d’Israël à Gaza comme le péché originel qui a permis au Hamas de se développer et de devenir la force, capable de lancer des attaques aussi dévastatrices que celles du 7 octobre. Ils veulent de plus que le retrait de 2005 soit annulé et qu’Israël annexe une partie, voire la totalité, de la bande de Gaza, discutant même de la possibilité que les Gazaouis soient «volontairement» réinstallés ailleurs – y compris en RD Congo.

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Jerusalem Post conclut en se demandant : Netanyahu peut-il s’orienter vers une action historique qui mettrait fin au conflit de Gaza et ouvrirait la voie à un futur État palestinien parallèlement à un accord de paix historique avec l’Arabie saoudite ? «Les chances semblent faibles, étant donné l’habitude de Netanyahu d’abandonner des initiatives similaires avant qu’elles ne portent leurs fruits». Néanmoins, poursuit le média, «il est essentiel de rappeler que Netanyahu est conscient que son temps est limité. Son héritage actuel est entaché par le massacre du 7 octobre, une calamité sans précédent depuis la création de l’État. Une évolution vers un accord avec l’Arabie saoudite et des progrès sur le front palestinien pourraient modifier le récit qu’il laisse derrière lui, même dans des temps difficiles. La décision lui appartient».

Mais qu’en est-il des Palestiniens eux-mêmes ?

La plupart des partis politiques palestiniens envisagent l’avenir de la bande de Gaza après la guerre sous deux aspects principaux. Premièrement, ils considèrent Gaza comme une question palestinienne interne qui nécessite une résolution entre les différentes puissances politiques palestiniennes et doit être approuvée par le peuple palestinien. Deuxièmement, ils soulignent que Gaza est indissociable des objectifs plus larges de la cause politique palestinienne, qui incluent une lutte soutenue pour le droit au retour et l’autodétermination nationale.

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Dans un discours télévisé début janvier marquant le 88e jour de la guerre en Israël, Ismail Haniyeh, chef du bureau politique du Hamas, a déclaré que «l’avenir de la bande de Gaza est intrinsèquement lié à l’avenir de la Cisjordanie occupée, y compris Al-Qods». Le groupe, selon Haniyeh, est prêt à participer à un gouvernement national pour superviser le territoire palestinien occupé à la fois à Gaza et en Cisjordanie occupée, mais jusqu’à ce qu’un gouvernement d’unité soit formé, «l’appareil gouvernemental existant» continuera d’administrer Gaza.

Le leader du Hamas a également appelé à la reconstruction de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) sur la base de «principes démocratiques qui reflètent véritablement les voix de tous les Palestiniens» et a souligné qu’une direction nationale unifiée au sein de l’OLP serait ancrée dans les objectifs d’autodétermination et de création d’un État, et le droit au retour des réfugiés palestiniens.

En attendant, un accord de trêve en négociation

Le chef du Hamas, Ismail Haniyeh, est attendu aujourd’hui au Caire, en Égypte, au moment où le groupe palestinien examine une proposition de trêve. La semaine dernière à Paris, des efforts de médiation menés par le Qatar et l’Égypte aux côtés du chef de la CIA, William Burns, ont abouti à un plan en trois étapes qui commencerait par un arrêt initial des combats de six semaines et davantage de livraisons d’aide à la bande côtière enclavée.

Ces dernières semaines, plusieurs manifestants israéliens ont empêché les camions d’aide d’entrer à Gaza. Les réserves de nourriture et d’eau dans la bande assiégée ont rapidement diminué lorsqu’Israël a imposé, le 9 octobre, un blocus total à Gaza, interdisant l’entrée de nourriture et de carburant dans la bande.

À cette étape, seuls «les femmes, les enfants et les hommes malades de plus de 60 ans», détenus par le Hamas, seraient libérés en échange de prisonniers palestiniens en Israël, a indiqué l’agence de presse AFP citant une source. Cette dernière a également indiqué qu’il y aurait également «des négociations autour du retrait des forces israéliennes» avec plus de phases d’échanges captifs-prisonniers.

L’accord sur la libération des captifs israéliens détenus à Gaza a été confirmé par le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, «mais pas à n’importe quel prix». Le chef de l’État hébreu a affirmé qu’Israël a des «lignes rouges» dans ses négociations en cours. «Nous ne mettrons pas fin à la guerre, nous ne retirerons pas l’armée israélienne de la bande de Gaza, nous ne libérerons pas des milliers de terroristes», a déclaré Netanyahu.

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L’UNRWA, la bouée de sauvetage paralysée

Avant le conflit, les deux tiers de la population vivaient déjà dans la pauvreté et 45% de la population active était au chômage. «Je ne pense pas que la communauté internationale ou la population de Gaza puissent se permettre des décennies de catastrophe humanitaire», a déclaré l’économiste Rami Allazeh, au moment où plusieurs pays occidentaux ont décidé de suspendre leur financement dédié à l’agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) après que plusieurs de ses employés ont été accusés par Israël d’être impliqués dans l’attaque du Hamas du 7 octobre.

Guerre au Proche-Orient : le «jour d’après» se dessine-t-il déjà ?

L’Agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) en bref. © Al Jazeera

L’UNRWA est le plus grand acteur humanitaire à Gaza et quelque 3.000 membres de son personnel de base sur 13.000 à Gaza continuent de travailler malgré la guerre. Deux millions de personnes sur environ 2,3 millions d’habitants à Gaza dépendent des opérations humanitaires de l’agence.

«Je suis choqué que de telles décisions soient prises sur la base du comportement présumé de quelques individus et que, alors que la guerre continue, les besoins s’aggravent et la famine menace», a déclaré le chef de l’UNRWA, Philippe Lazzarini, sur X. «Les Palestiniens de Gaza n’avaient pas besoin de cette punition collective supplémentaire. Cela nous tache tous».

Lire aussi : L’ONU condamne une attaque destructrice sur un refuge à Gaza

L’agence en difficulté a déclaré que ses installations ont été attaquées au moins 270 fois, entraînant la mort de 372 personnes. «Parce qu’il n’y a nulle part où aller, les gens continuent de s’abriter dans ces mêmes installations de l’ONU, même après les attaques», a déclaré l’UNRWA dans un message publié sur les réseaux sociaux.

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