Un monument avec une carte de la Palestine mandataire dans la ville de Jénine en Cisjordanie occupée. © Jaafar Ashtiyeh / AFP
Au 101ᵉ jour, la guerre sévit encore dans la bande de Gaza. Les attaques israéliennes se sont poursuivies pendant la nuit, tuant 132 civils et blessant au moins 252 autres dans le nord, le centre et le sud de Gaza. Cela comprend tous les camps de réfugiés – Maghazi, Bureij et Nuseirat – ainsi que la région d’az-Zawayda et la ville de Deir el-Balah. Avec 70% des maisons de Gaza détruites, les Palestiniens déplacés craignent de n’avoir plus rien où retourner dans leur ville natale une fois la guerre terminée.
Le nombre de morts parmi les Palestiniens vivant à Gaza s’élève désormais à 24.100 depuis le 7 octobre, tandis qu’Israël a lâché plus de 65.000 tonnes de bombes sur l’enclave assiégée et sa population de 2,3 millions d’habitants. Ce nombre comprend plus de 10.400 enfants, soit plus de 1% de la population infantile.
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Le ministère gazaoui de la Santé fait de plus état de 60.834 blessés supplémentaires, dont au moins 8.663 enfants et 6.327 femmes. Plus de 1.000 enfants ont perdu l’une ou les deux de leurs jambes depuis le début de la guerre. Plus de 8.000 personnes sont toujours portées disparues, présumées ensevelies sous les débris de béton. «Un certain nombre de victimes se trouvent toujours sous les décombres, sur les routes et dans les ambulances, et les équipes de la protection civile ne peuvent pas les atteindre», a indiqué le ministère dans un message sur Facebook.
«Il s’agit d’une catastrophe systématique provoquée par l’homme. Ceci est planifié et exécuté par le gouvernement israélien avec le plein soutien des États-Unis. C’est la pire catastrophe médicale provoquée par l’homme dans l’histoire moderne», a déclaré à Al Jazeera le Dr Mads Gilbert, médecin qui a travaillé à Gaza pendant plus de 20 ans.
Aller jusqu’au bout ?
Pour le secrétaire américain Anthony Blinken, «100 jours de captivité à Gaza, c’est beaucoup trop long», en référence aux otages israéliens détenus depuis le 7 octobre, promettant de les ramener. Sur environ 240 personnes capturées par le Hamas, environ la moitié ont été libérées lors de la trêve du mois de novembre. Israël affirme qu’il en reste 132 à Gaza et que 25 sont morts en captivité.
Pour la mission palestinienne, il est «honteux» que le secrétaire d’État américain de n’avoir fait aucune mention des 24.000 Palestiniens tués dans la bande de Gaza – dont près de la moitié étaient des enfants – dans son poste marquant les 100 jours de guerre. «Honte à ceux qui restent complices et n’appellent pas à un cessez-le-feu immédiat à Gaza. Honte à eux», a-t-il déclaré dans un article sur X.
100 days and not a single mention of the nearly 24,000 killed – 1/2 of which are children. Shame on those who remain complicit and not call for an immediate ceasefire in Gaza. Shame on them @POTUS @SecBlinken @USUN https://t.co/kfsA1DrzZe
— State of Palestine (@Palestine_UN) January 15, 2024
Tentant de trouver un nouvel accord sur les prisonniers, le Hamas a diffusé une vidéo montrant trois prisonniers israéliens à Gaza et a exhorté le gouvernement israélien à cesser ses attaques. La vidéo de 37 secondes de Noa Argamani, 26 ans, Yossi Sharabi, 53 ans, et Itai Svirsky, 38 ans, se terminait par la légende : «Demain [lundi], nous vous informerons de leur sort».
Selon un éditorial publié dans le journal Haaretz par l’analyste militaire israélien Amos Harel, le mouvement de résistance chercherait à obtenir un cessez-le-feu prolongé et un engagement à ne pas nuire à ses dirigeants. «Cela signifie la fin des combats sans atteindre l’objectif déclaré : le démantèlement de l’organisation et de ses capacités. En attendant, [le premier ministre israélien Benjamin] Netanyahu attend son heure, mais il n’est pas sûr que ses partenaires du camp [américain] puissent se le permettre», a-t-il déclaré.
Ou réduire l’intensité de la guerre ?
La Maison-Blanche affirme que «c’est le bon moment» pour Israël de réduire l’intensité de son offensive militaire à Gaza, révélant ainsi les différences croissantes entre les alliés proches.
S’exprimant sur CBS, le porte-parole du Conseil américain de sécurité nationale, John Kirby, a déclaré que les États-Unis discutaient avec Israël «d’une transition vers des opérations de faible intensité» dans la bande côtière. «Nous pensons que c’est le bon moment pour cette transition, et nous leur en parlons», a-t-il déclaré sur Face the Nation.
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Cependant, le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, s’est engagé à aller de l’avant avec toute sa force jusqu’à ce que le Hamas soit détruit et que tous les captifs soient libérés, rejetant tous les appels à un cessez-le-feu et assurant qu’Israël continuerait jusqu’à ce qu’il obtienne une «victoire complète» sur le Hamas et récupère les prisonniers restants.
L’obstination israélienne à «poursuivre leur campagne de haute intensité», malgré les pressions américaines, a été confirmée de sources concordantes, du moins pour ce qui concerne tout le mois de janvier. Le Washington Post cite six responsables américains anonymes affirmant qu’Israël ignore toutes les demandes américaines visant à réduire l’intensité de ses attaques alors que le nombre de morts parmi les civils s’alourdit.
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Mais réduire l’aide militaire annuelle de 3,8 milliards de dollars est un moyen d’impliquer Israël, a déclaré Matt Duss, vice-président exécutif du Center for International Policy. «Si le président [Biden] est vraiment frustré, il dispose de nombreux outils à sa disposition. Promettre un soutien inconditionnel quoiqu’il arrive n’est pas un bon moyen d’amener quelqu’un à faire quelque chose de différent», aurait déclaré Duss.
L’État hébreu a déjà dépensé 6,6 milliards de dollars (24,7 milliards de shekels israéliens) pour la guerre. La Banque d’Israël avait estimé qu’environ 56 milliards de dollars (210 milliards de shekels israéliens) seraient dépensés pour la guerre à Gaza entre 2023 et 2025. Une réunion du cabinet israélien se réunira ce matin pour discuter des changements apportés au budget 2024 du pays, rapporte le journal en hébreu Maariv.
La mer Rouge s’enflamme
Les tensions et l’incertitude dans la région de la mer Rouge, mais aussi dans celle de la Corne de l’Afrique, s’accroissent rapidement. Une combinaison de mouvements militaires, de menaces contre le commerce maritime mondial, de différends territoriaux, de manœuvres diplomatiques et de crises humanitaires rapproche toujours plus ce petit espace stratégique du gouffre.
Le risque d’escalade s’est considérablement accru après que les États-Unis et le Royaume-Uni ont attaqué des cibles rebelles houthis au Yémen tôt vendredi matin, par voie maritime et aérienne, dans le but de réduire leurs capacités militaires. Cette réponse militaire a touché 60 cibles yéménites, dont le port stratégique de Hodeida. Cela survient après que le mouvement yéménite a lancé mardi sa plus grande attaque contre des navires dans la mer Rouge.
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Depuis novembre, la milice fondamentaliste yéménite menace, en effet, les navires transitant par ces eaux où environ 12% du commerce mondial transite par le canal de Suez. Ces activités ont poussé les plus grandes compagnies maritimes mondiales à éviter ces eaux, quitte à faire le tour de l’Afrique, ce qui rend les tarifs de fret 170% plus chers.
Outre ces attaques, la piraterie constitue également une menace dans les eaux voisines. Le 4 janvier, une organisation associée à la Royal Navy britannique a déclaré avoir reçu un rapport faisant état d’une attaque de pirates contre un navire marchand qui naviguait au large des côtes somaliennes, ce qui a conduit un contingent de la marine indienne à intervenir.
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La mer Rouge est stratégique pour Israël. Un quart du commerce maritime d’Israël s’effectue dans son port d’Eilat, sur le golfe d’Aqaba, une crique de la mer Rouge. «Eilat est la porte dérobée d’Israël, vitale au cas où la côte méditerranéenne serait menacée», indique Alex de Waal, directeur exécutif de la World Peace Foundation, professeur de recherche à la Fletcher School of Global Affairs de l’Université Tufts et professeur à la London School of Economics.
Israël considère depuis longtemps les pays riverains de la mer Rouge – la Jordanie, l’Égypte, l’Arabie saoudite, le Yémen, le Soudan, l’Érythrée, Djibouti et la Somalie – comme des pièces du puzzle de sa frontière de sécurité élargie.
L’Éthiopie met le feu aux poudres
Dans la Corne de l’Afrique, sur la rive sud de la mer Rouge, les tensions internes se sont également accrues suite à la signature, début janvier, d’un accord préliminaire entre l’Éthiopie, le pays enclavé le plus peuplé du monde, et le Somaliland, une république autoproclamée au nord-ouest de la Somalie, dont le premier a obtenu de facto son indépendance en 1991. Le protocole d’accord autorise la construction d’un port côtier dans le territoire séparatiste.
La Somalie revendique le Somaliland comme faisant partie de son territoire et a déclaré l’accord nul. Dimanche dernier, son président, Hassan Sheikh Mohamud, a appelé les Somaliens à «se préparer à la défense de notre patrie», alors que des rassemblements ont eu lieu à Mogadiscio, la capitale somalienne, contre l’accord. «Nous poursuivons toutes les options diplomatiques et je pense que l’Éthiopie reviendra à la raison, mais nous sommes prêts à une guerre si Abiy veut la guerre», a déclaré le conseiller, faisant référence au premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed.
Le conseiller a déclaré que l’accord portuaire «a pris la Somalie par surprise». Il a affirmé qu’Abiy avait nié avoir l’intention de chercher un accès maritime à travers le Somaliland lorsqu’il a été interrogé par Mohamud lors d’un sommet en Arabie Saoudite en novembre.
La Ligue des États arabes a fait savoir ce dimanche qu’elle tiendra, mercredi prochain, une réunion d’urgence des ministres des Affaires étrangères, présidée par le Maroc, pour examiner les répercussions du mémorandum d’entente conclu «de manière illégale» entre l’Éthiopie et la région du Somaliland.
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