Des pompiers marocains luttent contre les flammes près de Ksar el-Kebir, le 15 juillet 2022. © FADEL SENNA/AFP
Pour l’Agence nationale des eaux et forêts (ANEF), les risques de feux de forêt sont un sujet de préoccupation majeure.
Alors que la saison estivale se profile et à l’approche de la journée nationale de sensibilisation contre les incendies de forêts, célébrée le 21 mai, le Comité directeur national chargé de la prévention et de la lutte contre les incendies de forêt s’est réuni mardi 9 mai au Centre National de Gestion des Risques Climatiques et Environnementaux de Rabat sous la présidence du directeur général de l’ANEF, Abderrahim Houmy, afin de présenter le bilan et les enseignements dégagés des incendies de forêts au cours de l’année 2022, ainsi que l’examen des moyens et mesures à mettre en place pour la saison estivale 2023.
«C’est une réunion annuelle qui nous permet de faire le point sur la situation des incendies de forêts à l’échelle de notre pays. Cette année, on a fait le point sur les incendies de 2022 qui était une année exceptionnelle, pas seulement à l’échelle nationale, mais aussi à l’échelle du bassin méditerranéen», explique le directeur de l’ANEF à Hespress FR.
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Pour le responsable, «c’était une occasion pour faire sortir un peu les renseignements utiles pour une bonne gestion des incendies de forêts et pour faire le point sur les préparatifs pour cette année, une année qui s’annonce à ce jour un peu difficile, mais on espère, avec la mobilisation de tous les partenaires, de bien gérer ces incendies».
Incendies de forêts en 2022 : un bilan lourd et des enseignements à tirer
À l’instar de nombreux pays dans le monde, le Maroc a connu, en 2022, un été caniculaire et des épisodes de chaleur extrême, surtout au mois de juillet où des «records absolus» de températures ont été enregistrés.
En dépit des chiffres alarmants de 2022 en comparaison avec les années précédentes, l’ANEF fait remarquer que les politiques de prévention et de lutte contre les feux, adoptées par l’ensemble des intervenants (ministère de l’Intérieur, ANEF, les autorités locales, la Protection civile, la Gendarmerie Royale, les Forces Royales Air, les Forces Armées Royales…) ont permis de réduire de manière significative les dommages socio-écologiques potentiels en 2022.
La situation des incendies de forêts pour l’année 2022 à l’échelle nationale fait état d’environ 500 incendies, touchant 22.762 ha de superficie forestière parcourue par le feu, dont 37% est constituée d’arbustes, de formations herbacées et d’Alfa, alors que 133.000 ha ont été épargnés. Elle constitue par ailleurs la superficie incendiée la plus importante enregistrée depuis 1960.
À l’échelle du bassin méditerranéen, l’aggravation des conditions météorologiques a favorisé le déclenchement et la propagation d’incendies de forêts d’une grande ampleur. Ainsi, selon les données disponibles du Système européen d’informations sur les feux de forêts (EFFIS), les superficies forestières endommagées par les incendies ont été en Espagne de 288.086 ha, au Portugal de 90.158 ha, en France de 62.154 ha, en Italie de 47.228 ha et en Algérie de 47.170 ha.
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À diverses proportions, presque toutes les régions du Royaume sont affectées par les incendies de forêts. Mais, selon l’ANEF, la plus grande pression est souvent enregistrée au niveau de la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima avec 188 départs de feu et une superficie de 18.704 ha, suivie par la région de Fès-Meknès avec 99 départs de feu et une superficie touchée de 1.775 ha.
En revanche, la sécheresse et les longues vagues de chaleurs à prévoir lors de la saison estivale 2023 sont des facteurs à prendre en compte et les partenaires sont bien conscients de la situation et de la nécessité de fournir davantage d’efforts afin de renforcer les politiques de prévention, de prévision et de sensibilisation du public aux risques et dangers des incendies.
À rappeler que le domaine forestier national est soumis à diverses pressions de plus en plus préjudiciables aux rôles majeurs qu’il assure sur les plans social, économique et environnemental. Il résulte de ces pressions un risque accru de départs d’incendies, d’autant plus que les forêts marocaines sont, à l’instar des forêts méditerranéennes, extrêmement inflammables durant la saison estivale.
Plusieurs facteurs sont à l’origine de cette vulnérabilité, notamment l’augmentation des températures, la diminution de l’hygrométrie de l’air et l’avènement fréquent des vents secs et chauds de type «Chergui».
200 millions DH pour la lutte contre les incendies de forêts en 2023
Ainsi, en vue d’améliorer la prévention et lutter contre les incendies de forêts, l’ANEF a, en effet, élaboré, avec ses partenaires, un nouveau plan d’action pour la période 2023-2033, le Plan Directeur Intersectoriel de Gestion Intégrée des Incendies de Forêts, doté d’une enveloppe budgétaire de 200 millions de dirhams rien que pour l’année 2023.
Le plan s’appuie sur six axes prioritaires et fixe les actions à mettre en œuvre au cours de la prochaine décennie pour la prévention et la lutte contre les incendies de forêts tout en tenant compte des impacts prévisionnels du changement climatique.
L’entretien des tranchées pare-feux, l’aménagement de points d’eau, l’ouverture et la réhabilitation des pistes forestières, la construction et l’entretien des postes vigies, la mobilisation des guetteurs d’incendies et aussi l’achat de véhicules de première intervention, sont autant d’actions préventives et opérationnelles incluses dans le plan.
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Dans sa déclaration à Hespress, Abderrahim Houmy a révélé que le nouveau Plan Directeur «nous permet tout d’abord de consolider tous les acquis que nous avons pu avoir. Le Maroc a acquis une longue expérience dans ce domaine. C’était aussi une occasion pour affiner un certain nombre d’actions de coordination avec tous les partenaires, mais aussi une mise au point sur les besoins de financements, les besoins sur le plan législatif et sur le plan organisationnel qui vont agir dans le sens de l’amélioration de l’efficacité de la lutte contre les incendies de forêts».
Un nouveau système de gestion des risques liés aux feux de forêts utilisant l’intelligence artificielle
Dans ce cadre, le directeur général de l’ANEF a annoncé la mise en place, cet été, d’un nouveau système de gestion des risques, utilisant l’intelligence artificielle et les big data pour cartographier le risque d’incendies de forêts et enclencher en conséquence les alertes d’interventions nécessaires.
L’agence précise que ce système offre une plateforme de prédiction quotidienne des feux de forêts pour la région pilote de Tanger-Tétouan-Al Hoceima, la première en son genre dans tout le bassin méditerranéen.
«Ce nouveau système offre une plateforme innovante pour la prévision des feux de forêt dans la région pilote de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma. Il est le premier du genre dans tout le bassin méditerranéen. Il génère quotidiennement une carte de scores de risque d’incendie avec une résolution très fine, accompagnée d’une explication du risque. Cette carte fournit des informations précieuses aux équipes de lutte sur le terrain, en prenant en compte des facteurs tels que les conditions météorologiques, les images satellites récentes, les données socio-économiques, ainsi que la nature et l’état du couvert forestier», a expliqué Fouad Assali, directeur du Centre national de gestion des risques climatiques forestiers.
L’ensemble des calculs intensifs nécessaires a été possible grâce à l’appui du supercalculateur relevant de l’Université Mohammed VI Polytechnique de Benguerir et également des données pertinentes de la Direction générale de la météorologie nationale.
Enfin, cette réunion était notamment, selon le DG de l’ANEF, une opportunité pour sensibiliser le grand public à l’approche de la journée nationale de sensibilisation contre les incendies de forêts, le 21 mai, avec tous les partenaires, ce qui va «nous permettre, bien sûr, d’aller encore de l’avant dans une bonne gestion des incendies de forêts».
L’Agence lance un appel à la vigilance aux citoyens et à tous les utilisateurs des espaces forestiers (campeurs, apiculteurs, éleveurs, ouvriers…) pour limiter au maximum l’utilisation du feu durant la période estivale et alerter les autorités compétentes de toute fumée ou départ de feu et tout autre indice pouvant occasionner un incendie.
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