Accueil / Économie

Délais de paiement : mauvais payeurs, les sanctions vont bientôt tomber !

Temps de lecture

Image d’illustration. © DR

Alors que la tendance était à la baisse ces derniers mois, la moyenne des délais de paiement déclarés par les établissements et entreprises publics (EEP) est repartie à la hausse lors du second trimestre 2023. Celle-ci a atteint 38,4 jours à fin juin, en détérioration de 1,5 jour par rapport à fin mars. Récemment, la ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah Alaoui, a émis une circulaire rappelant aux directeurs généraux et aux gestionnaires d’administrations publiques l’importance de se conformer à la loi, en vigueur depuis le 1ᵉʳ juillet, et de prendre les mesures nécessaires pour éviter les sanctions.

Le ministère de l’Économie et des Finances (MEF) a publié, le 28 juillet 2023, les délais de paiement déclarés par les Établissements et Entreprises Publics concernant le mois de juin 2023.

Lire aussi : Fin de partie pour les mauvais payeurs ?

Il en ressort que la moyenne a atteint 38,4 jours à fin juin 2023. Alors qu’ils s’inscrivaient dans une tendance baissière depuis plusieurs mois, les délais de paiement des EEP ont augmenté de 1,5 jour au deuxième trimestre de l’année par rapport à fin mars, indique la Direction des entreprises publiques et de la privatisation (DEPP), relevant du MEF.
Cette publication à caractère trimestriel, note la tutelle, s’inscrit dans le cadre de la démarche progressive adoptée par le MEF depuis la première publication effectuée le 31 octobre 2019.

Des délais encore anormalement longs

La société Casablanca Iskane et Équipements, se place en tête des mauvais payeurs, affiche des délais de paiement de 302 jours, la Société d’études et de réalisations audiovisuelles (Soread) avec 278 jours ou encore l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE), qui met en moyenne 132 jours pour s’acquitter de ses factures auprès de ses prestataires.

Lire aussi : Les dirigeants d’entreprises marocains à la recherche d’un délicat équilibre (PwC)

Pour rappel, la loi fixe le délai de paiement à 60 jours à compter de la date de facturation, en l’absence d’un accord spécifique entre les parties. Si un accord est convenu, le délai ne peut pas dépasser 120 jours. Toutefois, pour certains secteurs spécifiques ou saisonniers, un délai maximal de 180 jours peut exceptionnellement être prévu par décret.

Délais de paiement : mauvais payeurs, les sanctions vont bientôt tomber !

Liste des 10 Établissements et Entreprises Publics ayant déclaré les délais les plus longs, à fin juin 2023. © Ministère de l’Économie et des Finances

Côté bons payeurs, on retrouve en tête de liste les Agences urbaines de Rabat-Salé et de Tétouan avec seulement un jour de délai, suivies de celle de Kénitra, et l’Institut Prince Sidi Mohammed des techniciens spécialisés en gestion et commerce agricole comptabilisant deux jours de délai.

Délais de paiement : mauvais payeurs, les sanctions vont bientôt tomber !

Liste des 10 Établissements et Entreprises Publics ayant déclaré les délais les plus courts, à fin juin 2023. © Ministère de l’Économie et des Finances

Dans son rapport annuel présenté au Souverain, Bank Al-Maghrib avait fait état d’une nette amélioration en 2021 après une forte détérioration l’année précédente dans le contexte de la crise pandémique. Les calculs réalisés par Bank Al-Maghrib, sur la base des données d’un échantillon de 69.000 entreprises non financières privées, ont fait ressortir une baisse quasi généralisée, bien que les niveaux demeuraient globalement supérieurs aux délais réglementaires.

Lire aussi : Jouahri remet au Roi le rapport annuel 2022 de Bank Al-Maghrib

Ainsi, 55% des entreprises, au lieu de 51% en 2020, ont été payées dans les délais réglementaires de 60 jours. Les améliorations les plus notables ont été enregistrées dans les activités de transport et entreposage avec des diminutions du délai moyen de 24 jours pour les grandes entreprises (GE) et de 16 jours pour les petites et moyennes entreprises (PME). En revanche, dans le secteur de la construction, les délais se sont allongés de 32 jours pour les GE et de 17 jours pour les très petites entreprises (TPE).

Délais de paiement : mauvais payeurs, les sanctions vont bientôt tomber !

Évolution des délais de paiement clients en 2021 (en jours de chiffre d’affaires). © Bank Al-Maghrib

Le rappel à l’ordre de Nadia Fettah Alaoui

Dans une circulaire, datée du 25 juillet, la ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah Alaoui rappelle aux directeurs généraux et aux gestionnaires d’administrations publiques l’importance de se conformer à la loi sur les délais de paiement et de prendre les mesures nécessaires pour éviter les sanctions, rapporte le quotidien Les Inspirations Éco dans son édition du lundi 31 juillet.

«Des écarts importants persistent entre les différents EEP, comme le montrent les déclarations des dix établissements et entreprises publics ayant les délais de paiement les plus longs. À cette dizaine de mauvais élèves s’ajoute une quarantaine de structures publiques qui ne répondent pas aux réclamations des fournisseurs sur la plateforme Ajal», déplore la tutelle. Sans compter les 26 EEP qui n’ont pas enregistré leurs délais de paiement sur la plateforme Massar.

Délais de paiement : mauvais payeurs, les sanctions vont bientôt tomber !

Liste des Établissements et Entreprises Publics n’ayant pas servi leurs delais de paiement sur la plateforme Massar au 30 juin 2023. © Ministère de l’Économie et des Finances

La circulaire du département de Fettah Alaoui appelle également les établissements publics à mettre en place des systèmes d’information pour suivre les paiements et les échéances de facturation afin d’identifier les factures impayées et les traiter en temps opportun. «Elle les exhorte aussi à fournir les données et les analyses nécessaires pour prendre des décisions en matière d’amélioration des délais de paiement et de gestion de trésorerie», précise le média.

Enfin, elle encourage les entreprises à adopter des pratiques de dématérialisation des factures pour faciliter leur gestion et leur suivi, tout en rappelant que les entreprises qui ne disposent pas de plateformes électroniques peuvent utiliser le site «Ajal» pour déposer leurs factures.

La loi en vigueur depuis le 1ᵉʳ juillet

La loi 69.21, publiée au Bulletin officiel (BO) le 15 juin dernier, est appliquée depuis un mois aux entreprises du secteur privé, opérant dans n’importe quel secteur d’activité, ayant un chiffre d’affaires hors taxe supérieur à 50 millions de dirhams (MDH) ainsi que les entreprises publiques à caractère marchand dès lors qu’il y a transaction commerciale. Les entreprises dont le chiffre d’affaires varie entre 10 et 50 MDH seront concernées dès janvier 2024, tandis que celles dont le chiffre d’affaires est compris entre 2 et 10 MDH, le seront l’année suivante.

Lire aussi : 20 entreprises marocaines génèrent plus d’un milliard de dollars (McKinsey)

Car, en effet, cette loi repose sur le principe de progressivité, en tenant compte de la taille des entreprises. Un principe qui permet «aux petites entreprises de bénéficier des mises à jour des grandes entreprises pour améliorer leur trésorerie», indiquait à Médias 24, Youssef Alaoui, président du comité ad hoc des délais de paiement au sein de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM). Cela permet de prendre en considération les capacités financières des différentes sociétés et d’éviter d’imposer des exigences trop lourdes aux petites entreprises qui auraient du mal à respecter les délais de paiement.

Par ailleurs, soulignait l’intervenant, cette loi a été conçue «de sorte qu’elle soit applicable, contrairement à la précédente réglementation». Depuis le 1ᵉʳ juillet, chaque entreprise concernée par la loi, doit déclarer ses propres délais de paiement, «évitant ainsi la double peine pour les entreprises et les risques associés à la dénonciation de leurs clients en retard», précisait Youssef Alaoui. Cette mesure vise à instaurer une gestion plus efficace des flux financiers entre les entreprises et à lutter contre les retards de paiement qui peuvent avoir un impact néfaste sur l’économie du pays.

Lire aussi : Baromètre des entreprises : regain d’optimisme et préoccupation accrue

En cas de non-respect des délais de paiement, des sanctions financières sont prévues par la loi et se divisent en deux catégories. Une amende, équivalente au taux directeur de la banque centrale, maintenu à 3%, pour le premier mois de retard et une majoration de 0,85% pour chaque mois ou fraction de mois supplémentaire, seront imposées sur le montant impayé dans les délais impartis. Cette amende devra être versée au Trésor et est exigible lors de la déclaration trimestrielle. La seconde catégorie de sanctions vise à assurer la conformité des déclarations fiscales produites par les opérateurs économiques et à sanctionner tout comportement dilatoire.

Mohamed Belkhayat, expert-comptable et commissaire aux comptes, encourage dans les colonnes de Challenge les entreprises à commencer dès maintenant à suivre de près les délais de paiement et à régler les factures arrivées à échéance pour éviter les amendes. Il souligne «l’importance de rester informé de la mise en œuvre de la loi à travers la plateforme SIMPL de la DGI, ainsi que de se familiariser avec son guide d’utilisation». Il mentionne également «l’attente d’une directive de l’administration fiscale concernant la mise en place des amendes, bien que celles-ci ne soient pas prévues explicitement dans le Code général des impôts (CGI) version 2023».

Dernier articles
Les articles les plus lu

Le dirham s’apprécie de 2,3% face au dollar américain au T3-2024 (BAM)

Économie - Bank Al-Maghrib (BAM) a annoncé que le dirham s’est apprécié de 2,3% face au dollar et de 0,31% vis-à-vis de l’euro au troisième trimestre 2024.

Mbaye Gueye - 18 décembre 2024

5G au Maroc : un défi technologique avant le Mondial 2030

Économie - À l’approche du Mondial 2030, le Maroc aspire à intégrer pleinement la 5G dans son paysage technologique.

Ilyasse Rhamir - 18 décembre 2024

L’avenir énergétique du Maroc : un nouveau chapitre d’investissements et d’innovations

Économie - Le Maroc, dans un contexte mondial de transition énergétique, se positionne en acteur majeur grâce à des investissements colossaux dans les énergies renouvelables.

Farah Nadifi - 18 décembre 2024

Hausse de 1,8 million m3 de la capacité de stockage des produits pétroliers à horizon 2030

Économie - Leila Benali a annoncé une augmentation de 1,8 million de m³ des capacités de stockage des produits pétroliers d'ici 2030.

Rédaction LeBrief - 18 décembre 2024

Maroc-Afrique : les volumes d’échanges commerciaux en hausse de 45%

Afrique, Économie, Économie - Le volume des échanges commerciaux entre le Maroc et les autres pays africains est passé de 36 milliards de dirhams (MMDH) en 2013 à 52,7 MMDH en 2023

Mbaye Gueye - 18 décembre 2024

Mobilisation foncière : un moteur pour l’investissement au Maroc

Économie - Nadia Fettah a annoncé que près de 18.000 hectares de foncier public ont été mobilisés en 2024 pour soutenir des projets d’investissement.

Ilyasse Rhamir - 18 décembre 2024

Le Maroc se dote d’un cadre juridique pour les crypto-actifs

Économie - Abdellatif Jouahri, Wali de Bank Al-Maghrib (BAM), a annoncé que le cadre juridique régissant les crypto-actifs au Maroc est en phase d’adoption.

Mbaye Gueye - 18 décembre 2024

Trelleborg renforce sa présence au Maroc avec une nouvelle usine

Économie - La société suédoise Trelleborg, leader mondial des solutions polymères, a lancé la construction de sa nouvelle usine à Midparc.

Mbaye Gueye - 17 décembre 2024
Voir plus

PLF 2025 : impôt sur le revenu, à quels changements s’attendre ?

Économie - Au cœur de cette réforme, l’impôt sur le revenu (IR) fait l’objet d’une révision significative. Selon Mohamed Rahj, professeur à l’Université et consultant expert des questions en fiscalité, l’objectif principal de ce projet est de « rehausser le salaire net des employés sans accroître la charge des employeurs ».

Farah Nadifi - 21 octobre 2024

Coupe du Monde 2030 : la feuille de route

Économie, Sport - Le Maroc, l’Espagne et le Portugal préparent une Coupe du Monde qui marquera l’histoire. Ce projet tripartite dépasse le cadre sportif pour devenir un levier stratégique.

Farah Nadifi - 5 décembre 2024

PLF : voici les principales actions programmées en 2024

Économie - Le projet de loi de Finances (PLF) pour l’année 2024 a été adopté, jeudi 19 octobre, par le Conseil de gouvernement

Manal Ben El Hantati - 23 octobre 2023

Importations de céréales : les chiffres de 2024

Économie - Entre janvier et novembre 2023 et la même période en 2024, les importations totales de produits ont augmenté de 9 %.

Mbaye Gueye - 2 décembre 2024

Port de Tarfaya : une extension de la halle aux poissons pour 5 millions de dirhams

Économie - Le port de Tarfaya a renforcé son infrastructure avec l’extension de la halle aux poissons comprenant un espace de vente.

Rédaction LeBrief - 19 novembre 2024

Dessalement : le Maroc et les USA unissent leurs forces pour l’avenir de l’eau

Économie - Un atelier organisé par l’ONEE en partenariat avec l’Ambassade des États-Unis met en lumière les dernières avancées technologiques dans le domaine du dessalement.

Ilyasse Rhamir - 3 décembre 2024

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire