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Dans la guerre entre le Hamas et Israël, le Maroc médiateur ?

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Depuis deux semaines, le monde a les yeux rivés sur la bande de Gaza, la Cisjordanie et Israël, sans qu’âme qui vive ne puisse faire grand-chose pour régler ce conflit. Même les « grands Hommes » se retrouvent impuissants. À coups de résolutions et de dialogue, on essaye de ramener les parties à la raison. Dans cette guerre, le Royaume pourra-t-il user de ses cartes pour rétablir la sécurité dans la région ?

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Cela fait quinze jours que le conflit dure entre Hamas et Israël. Dans la bande de Gaza, la population vit au rythme persistant des bombardements, alors que l’aide humanitaire, à l’heure où nous écrivons ces lignes, tarde encore à arriver. Les attaques israéliennes sur ce bout de territoire palestinien ont conduit la Cisjordanie, sous l’Autorité palestinienne, à s’embraser aussi.

Si les forces de défense israéliennes (FDI) affirment qu’environ 1.500 combattants dans les rangs du Hamas ont été tués dans la contre-offensive ayant permis à Israël de reprendre le contrôle des zones attaquées, le nombre de civils est lui terrible. Dans son dernier bilan, le ministère palestinien de la Santé fait état de 4.137 morts, dont 1.524 enfants et plus de 13.162 blessés.

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Alors que Tsahal laisse planer l’ombre d’une intervention terrestre, qui conduirait de fait à une catastrophe dans la bande de Gaza sous blocus sévère depuis seize ans déjà, le besoin en médiateurs crédibles se fait de plus en plus pressant.

L’État hébreu affirme vouloir tout faire pour ramener vivants les otages enlevés par le Hamas. «Sur les quelque 200 otages qui se trouvent actuellement dans la bande de Gaza, plus de vingt d’entre eux sont des mineurs, entre 10 et 20 d’entre eux ont plus de 60 ans», a précisé l’armée israélienne. Mais, la priorité numéro une de Tsahal est d’anéantir le Hamas «même si cela dure un an».

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Durant une commission portant sur la défense et les affaires étrangères, Yoav Gallant a exposé les plans de Tsahal : «éliminer le Hamas et détruire ses capacités militaires et gouvernementales [puis le retrait complet] de la responsabilité d’Israël à Gaza et créer un nouveau “régime de sécurité” dans la bande de Gaza», rapporte Emmanuel Fabian, correspondant militaire au Times of Israël.

Le Maroc, un médiateur naturel

Les Américains semblent prendre les devants dans la médiation de ce conflit. Une position naturelle, vu le rôle central qu’ont joué, depuis la création de l’État hébreu en 1948, les États-Unis dans les différentes étapes du «processus de paix» entre Israël et la Palestine. Les multiples tentatives au fil des ans auront jusqu’ici toujours échoué. Depuis son élection, le président américain, Joe Biden, a soutenu une solution à deux États, et condamné, plus fermement que son prédécesseur, les colonies en Cisjordanie.

Plus tôt dans la semaine, le secrétaire d’État, Antony Blinken, avait annoncé l’élaboration d’un plan d’acheminement de l’aide humanitaire au profit des populations civiles à Gaza. Cette même assistance qui tarde à arriver en raison des travaux à effectuer sur les routes, détruites par les bombardements israéliens. Dans la foulée, l’un des porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères a indiqué qu’Israël «était prêt à permettre au Maroc d’envoyer des aides humanitaires et médicales à la population de Gaza et au peuple palestinien».

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Par ailleurs, lors d’un entretien téléphonique avec son homologue marocain, Nasser Bourita, Blinken a formulé la demande d’aide du Maroc pour libérer les otages israéliens et étrangers capturés par le Hamas. Mais, si Rabat n’a pas officiellement proposé son offre de médiation, dans les coulisses, le département de Bourita, sous la conduite royale, est en action. Dès lors, la question se pose : quel rôle le Royaume peut-il jouer dans cette guerre entre le Hamas et Israël, qui pour certains observateurs, risque de marquer la résurgence du conflit arabo-israélien, au moment où certains pays ont normalisé leurs relations avec Tel-Aviv dans la continuité du processus de paix ? 

Depuis le déclenchement de ce nouveau conflit, le Maroc, par le biais de sa diplomatie, affiche une neutralité sans failles. Très tôt, il condamnera «les attaques contre les civils d’où qu’ils soient» et appellera à «un arrêt immédiat de tous les actes de violence». Et, très vite, sur instructions royales, il convoquera, le 11 octobre, une réunion d’urgence des ministres des Affaires étrangères du Conseil de la ligue arabe afin de trouver des solutions pour mettre un terme à cette escalade dangereuse.

Lundi, le Parlement marocain mettait en lumière «les efforts diplomatiques déployés par le Maroc sous l’égide du roi, dans le but de mettre fin aux hostilités». Les deux Chambres ont, à leur tour, exigé la fin de l’«agression israélienne» et «la levée du blocus sur la bande de Gaza».

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La déclaration parlementaire s’accompagnait de rapports concordants indiquant que le ministre des Affaires étrangères était en tournée en Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis, et dans d’autres pays de la région. Cela, dans le cadre de réunions de haut niveau pour discuter des moyens de parvenir à un accord de cessez-le-feu et d’ouvrir des passages humanitaires pour alléger la situation des civils palestiniens.

Car, au vu de ses liens étroits avec les parties au différend, le Maroc peut jouer un rôle constructif. «L’ouverture du point de passage de Rafah l’année dernière était une preuve de l’efficacité de la diplomatie marocaine dans la médiation entre Palestiniens et Israéliens», a déclaré Lahcen Aqartit, expert en relations internationales, sur les colonnes d’Hespress Fr.

De plus, la médiation directe du Maroc avait, en juillet dernier, abouti à l’ouverture, sans interruption, du poste-frontière Allenby-Roi Hussein, reliant la Cisjordanie et la Jordanie. «Le rôle du Maroc, sous l’égide de SM le Roi Mohammed VI, dans les négociations visant l’accès des Palestiniens au poste-frontière Allenby/Roi Hussein est un autre exemple de l’engagement du Royaume en faveur de la paix dans la région ainsi que de son importance en tant que partenaire et allié des États-Unis», avait alors témoigné l’expert américain, Calvin Dark, dans une déclaration à la MAP.

Pour le Royaume, le règlement du conflit passe obligatoirement par la solution à deux États, telle que prévue en 1967 par l’ONU. Et, la position de la monarchie alaouite et du peuple marocain a toujours été connue : «Soutien inconditionnel à la cause palestinienne». Car avec le caractère stratégique de ses relations avec Israël, la Palestine est érigée en cause nationale, au même titre que la question du Sahara, telle qu’énoncée depuis toujours.

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Sous le règne de feu le roi Hassan II

L’attachement du pays au dialogue pacifique n’empêchera pas pourtant l’envoi des troupes, en 1967 et lors de la guerre de 1973, pour combattre aux côtés de l’Égypte et de la Syrie. La guerre d’Octobre avait connu, alors, la participation de 6.000 soldats des Forces armées royales (FAR) ayant combattu aux côtés des contingents syriens.

Tout en participant effectivement sur le terrain, feu le roi Hassan II avait mené plusieurs tentatives de médiations entre les pays arabes et Israël. Le défunt Souverain accordait une importance capitale à ce rôle, et son implication consistait principalement à faciliter la communication entre acteurs rivaux et à fournir un lieu de rencontre idéal pour les premières étapes des négociations.

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Depuis son accession au trône en 1961, feu le roi Hassan II n’a eu de cesse de jouer les équilibristes entre ses acolytes arabes et les Israéliens, se posant en interlocuteur incontournable dans le processus de paix au Proche-Orient.

Il convient de préciser que le Maroc n’a jamais été et ne sera pas le principal moteur ou catalyseur du processus de paix israélo-palestinien, ni un médiateur clé. D’autres acteurs internationaux, dotés de ressources plus importantes et d’une influence plus efficace, peuvent jouer un rôle plus important dans certaines circonstances en favorisant ou en accompagnant le processus de paix. Cependant, la politique, la géographie et l’identité marocaines offrent au Royaume l’opportunité d’apporter son aide et son soutien sur une grande variété de questions essentielles à la promotion de la paix.

Aucun chef d’État arabe n’honorerait ses obligations s’il concluait une paix séparée avec Israël en oubliant le sort des réfugiés palestiniens.
— Feu le roi Hassan II

À cet égard, le sommet de Fès de septembre 1982 était un événement rare, le Maroc et l’Arabie Saoudite présentant le «Plan de Fès» pour un arrangement diplomatique au Proche-Orient. Pour la première fois dans l’histoire du conflit arabo-israélien, le monde arabe adopte collectivement et publiquement un projet de paix qui prend en considération les réalités et les aspirations essentielles dans cette région du monde. Israël l’a finalement rejeté. On peut citer encore la Conférence de Casablanca, tenue en octobre 1994, qui a déclaré la fin du boycott arabe d’Israël.

Ce modèle marocain de «médiation habilitante», offrant un cadre optimal pour les rencontres et les dialogues, a de tout temps laissé aux parties le soin de formuler des accords entre elles et a été reproduite à d’autres moments.

Sous le règne du roi Mohammed VI

Cependant, depuis le déclenchement de la Deuxième Intifada, en octobre 2000, et l’accession au trône un an plus tôt du roi Mohammed VI, l’implication du Maroc dans le conflit israélo-palestinien a considérablement diminué. La politique étrangère marocaine s’efforce d’adopter une posture de neutralité tout en contribuant à la stabilité régionale. Elle se caractérise encore aujourd’hui par la neutralité.

Hormis les réactions du Maroc au lendemain des agressions répétitives contre les Palestiniens, le Souverain s’est démarqué de son défunt père par un soutien matériel et moral à la cause palestinienne. Le Roi a annoncé, à maintes reprises, des dons d’urgence destinés à la population en première ligne du conflit entre Israël et le mouvement Hamas.

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L’année dernière, le Souverain a donné son accord pour se charger du coût de l’ameublement d’un établissement d’enseignement supérieur à Gaza, estimé à 1,3 million de dollars. À cela s’ajoute la mise en place, par le Maroc, dès l’année 2012, d’un hôpital marocain médico-chirurgical de campagne à Gaza pour assurer les soins des victimes.

La présidence du Comité Al-Qods n’est ni une faveur, ni un privilège. Il s’agit plutôt d’une charge considérable et d’une grande responsabilité devant Dieu et devant l’Histoire
— Roi Mohammed VI, lors de la 20e session du Comité Al-Qods en 2014

Le Maroc, qui préside le Comité Al-Qods et son agence installée à Rabat depuis 1997, Bayt Mal Al-Qods Asharif, reste l’un des rares pays reconnus pour le fait d’honorer leurs engagements vis-à-vis de ce pays frère, relatent nos confrères de Yabilabi. En mai dernier, le chef de la diplomatie palestinienne, Riyad al-Malki, qui s’exprimait en marge de la Conférence internationale de Dakar sur Al-Qods Al-Charif, avait affirmé : «Bien des parties nous ont promis des aides et du soutien, mais seul le Comité Al-Qods, à travers l’Agence Bayt Mal Al-Qods Asharif, honore ses engagements pour le soutien financier de ville sainte (…) l’argent dépensé dans le cadre de projets de soutien à Al-Qods provient uniquement de Bayt Mal Al-Qods Asharif, et parfois des fonds propres du roi Mohammed VI qui accorde une attention particulière à ce sujet».

Dans la guerre entre le Hamas et Israël, le Maroc médiateur ?

Le roi Mohammed VI lors de la 20e session du Comité A-Qods, à Marrakech les 17 et 18 janvier 2014. © MAP

Plus que cela, grâce à la vision perspicace du Souverain, président du Comité Al Qods, le Maroc fait partie des rares pays qui ont toujours adopté une approche politique «claire et équilibrée» vis-à-vis de la cause palestinienne et du processus de paix au Proche-Orient. Il y a quelques semaines encore, le secrétaire général du Comité exécutif de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), Hussein Al-Cheikh, saluait «la position marocaine concernant l’instauration d’un État palestinien indépendant avec Al Qods-Est comme capitale».

Le fléau de la guerre

De notre point de vue de citoyens, les choses semblent bien simples : il faut arrêter de tuer les civils et se remettre à la table des négociations. Car «La guerre, c’est toujours un ultime recours, c’est toujours un constat d’échec, c’est toujours la pire des solutions, parce qu’elle amène la mort et la misère», disait l’ancien président français Jacques Chirac. Les choses sont pourtant plus complexes.

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En témoigne d’ailleurs l’échec des deux projets de résolutions présentés au Conseil de sécurité des Nations unies. Le premier, datant du 16 octobre à l’initiative de la Russie, et le second deux jours plus tard sous la conduite du Brésil, ambitionnaient une «pause humanitaire» dans la bande de Gaza. Créées pour préserver le monde «du fléau de la guerre», les Nations Unies ont peut-être contribué à éviter une catastrophe nucléaire, elles ont pourtant échoué à faire exister un monde en paix.

Si le Maroc avait à assumer son rôle de facilitateur dans le conflit entre le Hamas et Israël, des questions plus urgentes doivent être d’abord réglées : en priorité l’accès de l’assistance humanitaire aux 2,2 millions d’habitants de Gaza et la libération des otages. Une situation à laquelle le Royaume ne peut répondre seul.

Quels que soient les tenants et aboutissants du conflit, «le Maroc, sous la conduite du Roi, sera toujours un acteur agissant dans tous les efforts visant à parvenir à une solution pacifique, équitable et globale garantissant les droits légitimes du peuple palestinien, sur la base d’un consensus, conformément aux référentiels internationaux et arabes», soulignait il y a deux semaines Nasser Bourita qui s’exprimait lors d’un point de presse conjoint avec le secrétaire général du Comité exécutif de l’OLP, Hussein Al-Sheikh.

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