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Change : un été fructueux pour les cambistes

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La période estivale est souvent synonyme d’un regain d’activité chez les cambistes. Cette année, le secteur connaît une dynamique très positive avec l’afflux massif de touristes étrangers et des membres de la diaspora. Les voyages des Marocains à l’étranger constituent également une bonne part du volume des transactions réalisées par les bureaux de change. Ces derniers contribuent à la collecte de près de 70% du volume des devises. Éclairage.

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«C’est la haute saison pour nous et cet été 2023 est tout simplement exceptionnel», atteste d’emblée Souhail Brija, employé d’un bureau de change à Tanger. Notre interlocuteur ajoute que l’activité connaît un regain sans précédent avec une hausse des transactions financières. Cette reprise est de bon augure pour un secteur qui avait connu un grave repli durant la crise de Covid-19, obligeant plusieurs cambistes à mettre la clé sous le paillasson avec une perte estimée à 200 millions de DH (MDH).

Touristes et MRE avant les nationaux

Les touristes et les Marocains résidant à l’étranger (MRE) sont les principaux clients des bureaux de change. Vient ensuite la clientèle locale qui a besoin de convertir sa dotation touristique pour voyager à l’étranger. Pour Brija, il est plus simple de traiter avec un client qui vient céder ses billets étrangers qu’avec un Marocain qui désire se procurer des devises. «Quand un touriste ou un MRE vient nous voir, il est facile d’accomplir la transaction sur simple présentation du passeport. Généralement, le tableau électronique affiche le cours du jour et le client ne discute même pas. Avec un Marocain, c’est toute une histoire. Il faut d’abord qu’il présente son passeport ou sa carte d’identité. Il faut s’assurer qu’il n’a pas épuisé sa dotation touristique pour l’année en cours. Parfois, il est très difficile de faire comprendre au client la différence entre l’achat et la vente de devises. Certains essaient même de négocier un taux plus intéressant», ajoute-t-il.

Les devises avec lesquelles les bureaux de change travaillent le plus sont l’euro et le dollar. Dans une moindre mesure, le riyal saoudien, la livre sterling et le dollar canadien sont aussi utilisés. Le cours est communiqué quotidiennement par Bank Al-Maghrib. Les cambistes s’alignent sur ce cours ou affichent des valeurs différentes. C’est un segment qui est devenu très concurrentiel surtout que de plus en plus de touristes voyagent avec des cartes bancaires et abandonnent de plus en plus le cash. Il y a quelques jours, les bureaux de change du Maroc ont décidé de cesser la conversion de la couronne utilisée par les pays scandinaves. Les cambistes ont justifié leur décision par le fait que ces pays se dirigent progressivement vers les monnaies numériques. «La décision n’aura pas un grand impact parce qu’à la base nous réalisons très peu de transactions avec les pays nordiques», commente notre interlocuteur.

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Un investissement gagnant ?

L’activité des bureaux de change est réglementée par l’instruction de change manuel actualisée par l’Office des changes au mois de juillet 2018. Les personnes souhaitant obtenir une autorisation en tant que bureau de change doivent envoyer leur demande à l’Office avec toutes les informations sur le promoteur et ses éventuels associés. La validation de l’emplacement est cruciale pour éviter que les promoteurs ne dépensent pour des locaux inadéquats. Les locaux doivent répondre à plusieurs critères, notamment une superficie minimale de 12 m², une distance minimale de 100 m par rapport à d’autres points de change agréés, une situation dans une zone commerçante ou près de sites touristiques, et une accessibilité publique au rez-de-chaussée. Une fois tous ces critères remplis, un accord de principe est accordé au demandeur.

Après l’accord de principe, le promoteur dispose de 90 jours pour équiper les locaux et préparer le dossier juridique de l’entreprise. Ce dossier comprend les statuts de la société, des documents liés aux actionnaires, des attestations bancaires et d’immatriculation, une liste des gestionnaires, des fiches anthropométriques, des contrats de bail, et des preuves d’installation d’équipements, entre autres.

Un bureau de change doit être équipé de divers éléments, tels qu’un coffre-fort, un détecteur de faux billets, des moyens de communication, une machine à compter les billets, un logiciel approuvé par l’Office des changes (OC), et des dispositifs de sécurité.

L’agrément pour le change manuel est octroyé après un examen approfondi du dossier juridique, de l’installation des équipements et de la participation des gestionnaires à une formation dispensée par l’OC.

Concernant le personnel, les préposés aux guichets doivent avoir au moins le niveau baccalauréat, tandis que les gérants doivent avoir trois années d’études supérieures ou un baccalauréat assorti de cinq années d’expérience dans des domaines financiers. À savoir que les gérants peuvent également exercer la fonction de préposé au guichet.

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La commission fait la différence

Dans le monde des investissements, la profession de cambiste présente une particularité notable : elle repose sur une unique source de revenu, à savoir la marge d’intermédiation – également appelée commission – issue des transactions d’achat et de vente de devises. Contrairement aux banques et aux sous-délégataires pour qui le change constitue une activité accessoire, les bureaux de change tirent leur avantage de leur capacité à proposer des tarifs compétitifs, souvent plus attractifs que ceux des institutions bancaires. La valeur ajoutée des bureaux de change réside dans leur capacité à offrir des conditions tarifaires plus alléchantes, se situant entre le taux minimum d’achat et le taux maximum de vente pour chaque devise, tel que défini par la banque centrale. Certains osent réduire leur marge bénéficiaire pour générer plus de volume. D’autres vont afficher un cours plus intéressant que leurs concurrents à quelques centimes près. Chacun sa stratégie…

Lorsqu’on se promène à côté du port de Tanger-Ville, on pourrait être tenté de penser que tous les bureaux de change proposent les mêmes taux de conversion. Cependant, la réalité est bien différente. Chaque bureau de change a sa propre manière de se rémunérer, en appliquant une commission spécifique sur les transactions de change. En d’autres termes, ils ajustent légèrement le taux de change par rapport à celui du marché, ce qui se traduit par une marge bénéficiaire pour eux. LeBrief a tenté l’expérience. Pour changer 10.000 DH en euros, nous avons consulté trois bureaux de change différents. Le premier nous a proposé 931 euros, le second 924 euros et le troisième 949 euros. Cela veut dire que le taux de conversion du troisième cambiste est plus favorable que les deux autres. Ainsi, malgré une apparence de similarité, les bureaux de change se différencient par les marges qu’ils appliquent, ce qui peut avoir un impact significatif sur la somme obtenue lors d’une conversion de devises.

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De grandes difficultés

Le secteur reste tout de même confronté à de grandes difficultés. Les 750 toutes petites, petites et moyennes entreprises (TPME) opérant dans ce secteur doivent tout d’abord faire face à la grande concurrence qu’ils subissent de la part des banques. Ces dernières n’hésitent pas à attirer la clientèle à travers des taux de conversion préférentiel ou en incluant le service de change dans des packages. La possibilité d’utiliser la dotation touristique via une carte bancaire internationale a aussi limité le recours des Marocains à l’achat de billets de banque étrangers. Aussi, les bureaux de change ne peuvent garder que 500.000 DH de devises, sous peine de sanctions. Ils sont obligés de reverser l’excédent à des banques en moins de 24 heures. Dans certains cas, les cambistes sont contraints de vendre leurs devises aux institutions bancaires, parfois à des prix inappropriés, entraînant ainsi des pertes financières.

Dirhams et euros

Photo d’illustration © DR

Quant aux risques encourus, Souhail Brija nous confie que de plus en plus de bureaux de change doivent s’offrir les services d’une société de sécurité privée, que ce soit pour sécuriser le local ou pour le transport de fonds. «On entend fréquemment parler de bureaux de change volés, avec parfois des agressions physiques des préposés aux guichets», raconte Brija qui dit que l’une des solutions consiste en l’équipement des bureaux de change en terminaux de paiement électronique (TPE) pour limiter l’utilisation du cash. «Nous sommes obligés d’archiver les bordereaux des transactions, de sauvegarder les vidéos de surveillance du local, de signaler toute opération suspecte… Il est aberrant d’exiger tout cela d’un bureau de change qui n’est pas outillé pour accomplir toutes ces tâches», conclut notre interlocuteur.

Il convient de rappeler que l’Office des Changes a émis plusieurs circulaires concernant la réglementation de ce secteur, dont la Circulaire n° 1/2021 adressée aux entreprises autorisées à exercer l’activité de change manuel. Cette circulaire appelle ces entreprises à se conformer à plusieurs dispositions et obligations pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Les entreprises sont tenues de documenter les clients et bénéficiaires des opérations de change en conservant des documents liés aux transactions financières qu’elles réalisent. De plus, elles sont tenues de désigner un responsable qualifié pour traiter les opérations de change suspectes et les signaler.

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Le Maroc a vu juste en augmentant les dotations voyages et en autorisant l’ouverture des bureaux de change dans les différentes régions. Il est loin le temps où Bank Al-Maghrib et les établissements bancaires étaient en concurrence directe avec le marché noir des devises qui était le recours naturel de tous les citoyens en quête de monnaie étrangère. Aujourd’hui, les bureaux de change ont pignon sur rue dans les principales villes du Royaume. Que ce soit pour la vente ou l’achat de devises, le citoyen a l’embarras du choix. Mais attention à certaines affiches mensongères attestant d’un taux avantageux ou de l’absence de commission. Ce n’est pas toujours vrai…

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