Si la date du démarrage officiel de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2025 n’a toujours pas été dévoilée, le Royaume se prépare déjà pour accueillir la plus politique des compétitions internationales. Pour Patrice Motsepe, président de la Confédération africaine de football (CAF), la CAN qui se tiendra en 2025 au Maroc sera «excellente» et connaitra, sans aucun doute, un «immense succès». Et 37 ans après, le Maroc compte bien organiser une Coupe mémorable.

Dimanche dernier, Fouzi Lekjaa, président de la Fédération royale marocaine de football (FRMF) recevait des mains du président ivoirien, Alassane Ouattara, le drapeau de la Confédération africaine de football (CAF), en prévision de la 35ᵉ édition qui sera organisée au Maroc en 2025. La désignation du Royaume à l’unanimité comme pays hôte «est le couronnement d’un travail formidable mené par un Grand Roi», avait, à l’occasion, déclaré à la MAP l’homme fort du football marocain. «C’est aussi la meilleure récompense pour un peuple passionné de football».

allassane ouattara remet le drapeau à Fouzi Lekjaa

Le président de la République ivoirienne, Alassane Ouattara, remet à Fouzi Lekjaa, président de la Fédération Royale Marocaine de Football (FRMF), le drapeau de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN), le dimanche 11 février 2024 au stade olympique Alassane Ouattara d’Ebimpé, à Abidjan. © DR

Et, pour le patron de la FRMF, l’organisation de la CAN 2025 est une première étape qui sera suivie d’autres. Parmi elles, la tenue de la Coupe du monde 2030 conjointement avec l’Espagne et le Portugal. «La prochaine CAN sera d’un niveau très relevé», avait affirmé le président de la Confédération africaine de football (CAF), Patrice Motsepe, à quelques jours de la finale qui a vu la Côte d’Ivoire sacrée pour la troisième fois de son histoire.

L’exercice africain est donc crucial pour le Royaume qui espère mobiliser le continent derrière lui, pour faire du Mondial 2030, «un renouveau de la civilisation méditerranéenne entre le nord et le sud de la Méditerranée», d’autant que cette édition «coïncidera avec le centenaire de cette manifestation planétaire». Lekjaa a promis un tournoi «sûr, paisible, répondant aux normes internationales et dans les meilleures conditions, garantissant une expérience unique à la fois pour les joueurs, les supporters, les visiteurs et pour les téléspectateurs à travers le monde». Sommes-nous fin prêts ?

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La logistique de la CAN 2025, une affaire de moyens

En 2025 et durant un mois, le pays vibrera au rythme de rencontres sportives où chaque sélection convoitera la Coupe. 37 ans avant cette édition, le Maroc, sollicité par la CAF après le retrait de la Zambie, organisait sa première CAN. Cette année-là, seulement deux stades (Mohammed V à Casablanca et Moulay-Abdallah à Rabat) avaient accueilli, entre les 13 et 27 mars 1988, les matchs de la compétition qui se jouaient à seulement 8 équipes. Mais bien des années sont passées. La 35ᵉ édition comptera 24 Nations. Et l’infrastructure footballistique marocaine a, elle, évolué depuis.

L’ensemble des acteurs sont mobilisés pour réunir toutes les conditions afin que l’organisation de cet événement sportif se déroule sous les meilleurs auspices. À cet effet, Fouzi Lekjaa avait fait savoir, en octobre dernier, que les travaux d’aménagement des stades en vue de mettre en place des installations sportives répondant aux normes internationales, avaient déjà démarré. Une convention avait été, alors, signée avec la Caisse de dépôt et de gestion (CDG), sous la présidence du chef de gouvernement, pour assurer le financement de ce programme.

Les six stades retenus (Grand stade d’Agadir, Complexe Mohammed V de Casablanca, Complexe sportif de Fès, Grand stade de Marrakech, Complexe sportif Moulay Abdellah de Rabat et Grand stade de Tanger) seront ainsi mis à niveau pour un budget de 9,5 milliards de DH (MMDH). Il s’agit également de construire un nouveau stade à Benslimane sur la période 2025-2028 pour une enveloppe estimée à 5 MMDH. La Chefferie du gouvernement avait indiqué, par ailleurs, qu’une deuxième mise à niveau sera opérée lors d’une étape suivante, en conformité avec les normes de la FIFA pour un budget allant de 4,5 à 6 MMDH.

Mais si les infrastructures footballistiques sont évidemment au cœur de l’enjeu, d’autres sont cruciales pour la tenue d’une compétition «mémorable» : le transport, l’hôtellerie, les télécoms, sont autant de secteurs auquel s’attelle le pays. De nombreux complexes hôteliers sont déjà en cours de construction dans les villes hôtes des tournois. Pour renforcer la connectivité et faciliter la mobilité, les infrastructures routières et ferroviaires sont en train d’être améliorées, notamment la construction de nouvelles autoroutes et la modernisation des voies ferrées.

Car au-delà des évènements ponctuels, c’est un héritage que le Maroc souhaite créer. En tirant parti de l’organisation de ces tournois sportifs, ces infrastructures resteront des actifs de valeur pour le pays et son développement. Ils contribueront à promouvoir le tourisme, à stimuler l’économie locale, à créer de nouvelles opportunités d’emploi et de croissance économique à long terme.

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L’organisation, une histoire de ressources humaines

La maitrise technique maintes fois démontrée

La technique n’est pas une affaire compliquée pour le pays. Se conformer à un cahier des charges dicté par les spécificités que requiert l’organisation de quelconque événement est une chose aisée pour le Maroc. En témoignent les manifestations internationales qui se sont tenues dans plusieurs villes du Royaume et qui ont fait très bonne impression parmi les participants. L’on peut citer à titre d’exemple, les assemblées annuelles de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI) prévues du 9 au 15 octobre 2023.

Le porte-parole de la Banque mondiale, David Theis, avait d’ailleurs indiqué que le Royaume avait été désigné, vu son expérience réussie en termes d’organisation de plusieurs événements internationaux. «Le Maroc a déjà abrité des événements de haut niveau et a montré sa capacité à bien organiser des manifestations d’ordre international», avait-il précisé lors d’un atelier média pour communiquer sur les préparatifs de l’événement qui a connu la présence de près de 14.000 participants et de plus de 600 journalistes des quatre coins de la planète.

Ces derniers avaient unanimement vanté la qualité et la minutie de la préparation de cette grand-messe de la finance. «Cela fait dix ans que je couvre les Assemblées annuelles de la Banque mondiale et du FMI, mais c’est ma première fois dans un pays africain. Je passe de très bons moments à Marrakech, la vie est bien plus animée qu’à Londres, surtout le soir», avait témoigné au micro de nos confrères du 360, la correspondante du journal britannique The Telegraph.

Une référence en matière de sécurité

En matière de sécurité, le sujet n’est certainement plus à présenter. Le succès de l’expérience sécuritaire pionnière du Maroc dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, a fait du pays le premier allié du Qatar lors du Mondial 2022. Interrogé par Hespress, Abdelouahed Awlad Mouloud, chercheur en sécurité et affaires stratégiques, avait souligné que «l’expérience marocaine en matière de sécurité est mondialement reconnue par les grandes puissances et régionales, que ce soit en termes de ressources humaines ou d’équipements logistiques». Selon l’expert, le Qatar, à l’instar de plusieurs pays, fait confiance aux capacités sécuritaires et diplomatiques du Royaume, notant que «le Maroc est devenu une école de sécurité de premier plan dans la région à la lumière des défis posés».

Abdellatif Hammouchi pour Qatar 2022

Abdellatif Hammouchi, directeur général de la DGSN et de la DGST, en visite au Qatar pour s’enquérir d’une partie des derniers

Prouver sa capacité artistique

Le point qui reste alors en suspens est de savoir si nous avons pensé à l’aspect artistique des cérémonies d’ouverture et de clôture et aux festivités, parallèles aux rencontres sportives, qui concourent à faire de l’organisation d’une CAN, une réussite. Car, plus de dix ans sont passés, mais le souvenir est encore là, «la mascarade de la cérémonie d’ouverture» de la Coupe du monde des clubs organisée en 2013 avait suscité un tollé. Chez les Marocains, comme sur les chaînes internationales. Et, en réponse, le comité d’organisation local avait déclaré : «Les moyens financiers du Maroc sont très limités. Nous avons choisi les artistes de la région d’Agadir pour faire découvrir la culture marocaine».

Mais depuis, les organisateurs se sont rattrapés. L’édition 2023 du Mondialito s’est ouverte, pour la troisième fois au Maroc après celle de 2013 et de 2014, au rythme d’un spectacle époustouflant et haut en couleur, mettant en avant un Royaume diversifié, ancestral, moderne, ouvert, hospitalier et passionné de football. Comme le note si bien notre confrère Larbi Bargach, le sport et la culture ont un socle commun, un lien naturel : «ce qu’on appelle des « invariants culturels », c’est-à-dire qu’ils se forment dans toutes les cultures et puisent dans la même source, l’identité composite du pays. Il n’y a pas une culture sans musique, sans danse, sans expression corporelle, sans compétition sportive».

Et, si l’on est encore loin de pouvoir concurrencer les Américains dans ce domaine, force est de constater que la volonté de briller existe.

L’ombre de la corruption

Cet autre sujet, souvent abordé lors de l’organisation des grandes compétitions, n’est pas à occulter. D’abord, parce que les accusations sont graves. Ensuite, parce que l’image du pays est en jeu. Si le Maroc tente depuis des décennies d’endiguer ce fléau, les résultats ne sont pas toujours au rendez-vous. En témoigne la position occupée cette année par le pays dans le classement 2023 de l’indice de perception de la corruption : 97ᵉ sur 180 pays.

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En décembre dernier, le commentateur sportif algérien de beIN Sports, Hafid Derradji, bien que n’étant pas à sa première accusation contre le Maroc, avait insinué que le président de la FIFA, Gianni Infantino, ainsi que le président de la CAF, Patrice Motsepe, auraient partagé des pots-de-vin à Marrakech, tranchant en faveur du dossier marocain pour l’attribution de la CAN 2025. «Je suis satisfait du retrait des candidatures pour les CAN 2025/2027, même si c’est arrivé un peu tard. Tout le monde savait que le Maroc allait avoir la CAN 2025, pour des raisons et des considérations que l’on connaît tous. Le gâteau a été partagé par Gianni Infantino lors du congrès de Marrakech», avait-il déclaré sur X (anciennement Twitter).

Le scandale des billets du Mondial 2022 n’arrange pas non plus les choses. En pleine épopée des Lions de l’Atlas au Qatar, l’affaire avait fait grand bruit : de nombreux fans, à qui la Fédération marocaine de football avait promis des billets gratuits, et venus encourager leur équipe à Doha, s’étaient retrouvés privés de tickets. Ces derniers avaient été vendus au marché noir pour quatre ou cinq fois leur valeur. Mis en cause : le président de l’Olympique Club de Safi, également député du Rassemblement national des indépendants (RNI), Mohamed Hidaoui, et un journaliste sportif. Le premier a été placé, le 26 juillet dernier, en détention provisoire pour «tentative d’escroquerie», tandis que le second, bien que poursuivi pour les mêmes infractions, a été laissé en liberté. La sentence, plutôt clémente en appel, est tombée quelques mois après.

Et, pour porter un coup de plus, le football national est acculé au désespoir. Le patron et l’ancien patron des deux plus grands clubs marocains sont placés en détention pour corruption. D’abord le patron du Wydad de Casablanca, Saïd Naciri, a été placé en détention en décembre dernier, accusé d’être impliqué dans une affaire de trafic international de drogue. Ensuite, l’ex-président du Raja Casablanca entre 2022 et 2023, Aziz El Badraoui, a été arrêté pour des soupçons d’implication dans une affaire de corruption.

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La CAN, le miroir d’un pays

L’organisation d’événements sportifs est un «must». Et pour le Maroc, la diplomatie sportive fait partie des priorités stratégiques. «Derrière cette diplomatie sportive, qui affirme la puissance du pays sur le plan national, régional et continental, c’est une place de leader plus globale que veut prendre le pays», disait Carole Gomez, chercheuse à l’IRIS, spécialiste de la géopolitique du sport. Si ses propos ciblaient l’Égypte en particulier, le concept peut facilement s’appliquer au Maroc.

Et en matière de politique interne, «récupérer la CAN c’est donner à la population une occasion de se réjouir», explique l’experte. Plus que cela, c’est une des étapes importantes à même de consacrer le sport en tant que «levier fort de développement humain, d’inclusion, de cohésion sociale».

Pour étendre son soft power sportif, le pays a relancé, depuis le discours royal de 2008, le pari sur la qualité de ses infrastructures pour s’imposer comme un acteur incontournable sur le continent. Un marché qui génère plus de 200 milliards de dollars par an. Le Maroc réalise chaque année à lui seul un chiffre d’affaires de plus de 2 milliards de dirhams. «L’ouverture des installations sportives aux clubs africains et européens, demandeurs de stages de concentration à l’occasion de la préparation de la nouvelle saison, la mi-saison ou lors de l’organisation des finales de coupes nationales, sont des opportunités pour renflouer les caisses en devises étrangères. D’ailleurs, la présence d’équipes étrangères au Maroc engendre automatiquement la mobilisation de plusieurs prestataires de services, notamment les agences de voyage pour la billetterie, les hôtels, le transport, la location des terrains, …» avait en ce sens indiqué l’Institut Marocain de l’Information Scientifique et Technique (IMIST)

Une aubaine pour le pays qui s’apprête à accueillir la compétition footballistique la plus convoitée en Afrique. Et si l’organisation d’une CAN «mémorable» est à portée de main, croisons les doigts pour que 2025 soit l’année de «LA CAN» du Maroc !

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