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En cette période de Ramadan, même ceux qui n’étaient pas habitués à boire une tasse de café le soir, le font. Après le ftour, c’est presque un rituel chez les Marocains que de se rendre sur une terrasse de café pour refaire le monde et décompresser après une longue journée.
Pourtant ce breuvage, doux-amer en bouche, qui réveille les papilles et débloque les fusibles internes, pourrait cacher de mauvaises surprises. La sonnette d’alarme a été lancée, il y a quelques mois, par la circulation incessante de rumeurs. Plusieurs cafés auraient recours à des pratiques, pour le peu, douteuses, afin de contrer la hausse des prix du café.
Cette controverse a été initialement déclenchée en décembre 2023 par une députée du Rassemblement national des indépendants (RNI), qui a publiquement accusé les cafetiers de recourir à des méthodes illégales. Elle a affirmé que ces établissements servaient du café mélangé à des substances chimiques, des résidus, sans se soucier de la santé des consommateurs.
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Face à ces allégations, la Fédération nationale des propriétaires des cafés et restaurants au Maroc a réagi, un mois plus tard. Dans son communiqué, elle a fermement nié ces accusations. Malgré cette réponse, de nouvelles accusations ont continué à émerger, faisant état de l’ajout de produits chimiques dans le café de certains établissements.
Un problème de formation
En janvier 2024, le journal Madar21 a interrogé une source professionnelle. Celle-ci a confirmé que des employés de plusieurs cafés, situés dans différentes villes du pays, ont témoigné de l’ajout de produits chimiques dans le café.
Si la Fédération réfute toute accusation, elle ne peut cependant pas vérifier les gestes de chaque serveur, au moment de préparer et servir son café. Idem pour les cafés ambulants et informels, qui échappent souvent à tout contrôle officiel.
Les cafetiers ont donc, par ce communiqué, et leurs interventions dans la presse, rejeté toute faute sur l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA). Or, l’ONSSA ne peut intervenir que sur la marchandise, et les services d’hygiène que sur la propreté. Ils ne peuvent s’immiscer entre un barman et sa machine à café.
Pour tenter d’y voir plus clair, nous avons contacté Mohamed Elyounssi, propriétaire et manager d’une entreprise de distribution de café à Casablanca.
Selon lui, les problèmes sont récurrents et ne résident pas seulement dans l’utilisation de résidus impropres à la consommation. A commencer par le problème de formation des ‘’baristas’’ si on peut les nommer ainsi. Ils n’en sont pas en réalité. Car ils se contentent de moudre le café (s’ils le font) et de le servir. Or, les étapes de réalisation d’un bon café sont bien plus complexes. «Avant de le moudre, le barista doit savoir observer son café, s’il est froid, c’est qu’il est mal conservé, cela ne sert à rien de le servir, il sera mauvais», explique Elyounssi à Lebrief.
Une journée type dans la vie d’un barista
«Le serveur arrive le matin, et moud un maximum de café pour gagner du temps durant la journée. Alors que les grains d’un bon café doivent être broyés dans la minute avant d’être servis. Si le serveur utilise un moulin manuel, une quantité de café tombe à côte, celui-ci est mis de côté et est, malheureusement, réutilisé dans la journée, et parfois même le lendemain», explique l’expert en formations de baristas.
Même si le client entend la machine moudre son café, il ne peut savoir si le barista n’a pas mis des résidus avant d’ajouter les grains frais. Vient ensuite le problème d’entretien des machines. Elles sont mises en place le premier jour, puis le barista, n’y touche plus du tout. Alors que c’est son rôle de la nettoyer régulièrement. C’est donc de l’eau sale qui accompagne généralement notre café.
«Quand il s’agit d’une machine à capsules, il faut aussi surveiller l’extraction et non pas se dire que la machine fera le job», déclare Elyounssi. En effet, le barista doit observer ce que l’expert appelle « une queue de souris », à savoir un filet de café, et non un jet d’eau. Il y a d’abord un filet marron qui descend, puis un doré. Dès que le blanc apparaît, il faut stopper le processus pour ne pas gâcher le café.
«Une extraction idéale dure entre 20 et 30 secondes, mais la plupart des barmans, pour faire vite, le font en 10 secondes et cela donne un café sans goût».
Le problème du lait… ou quand la crema ne monte pas
Même l’utilisation du lait a ses propres règles. Il doit être chauffé entre 65 et 70 degrés. Au-delà, il brûle et les protéines sont tout bonnement détruites !
Outre le souci des résidus dont tout le monde parle, il y a un point sur lequel personne ne met l’accent. Notre expert tient à préciser qu’il faut faire attention lorsque l’on commande une boisson sucrée : milk-shake, chocolat au lait… Car le lait n’est pas toujours bon. «J’ai assisté à des pratiques malsaines, qui consistaient à réutiliser du lait, déjà cuit, le lendemain», développe Mohamed Elyounssi.
Pour ne rien gâcher de leurs stocks, certains cafetiers gardent le surplus de lait au réfrigérateur. Ils le réutilisent dans une boisson sucrée qui couvrira le mauvais goût. D’où certains malaises digestifs ressentis par des clients après l’absorption de ce type de boisson.
Ce genre de pratiques ne peut malheureusement pas être constamment surveillé par l’ONSSA. Lors d’une descente de services d’hygiène, ces derniers vérifient les réfrigérateurs, la conservation… Mais l’on connaît tous les méthodes pour cacher la réalité. La première consiste à donner un pourboire au gardien, afin qu’il prévienne le restaurateur d’une descente inattendue !
Une fraude qu’on ne couvrira pas avec du sucre…
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