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Les prix du blé ont augmenté de plus de 60% cette année, en raison des effets de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. À eux seuls, ces deux pays représentent près d’un tiers des exportations mondiales de blé. L’Inde, deuxième producteur mondial de blé après la Chine, avait ainsi comblé le vide laissé sur les marchés par la baisse de la production ukrainienne. Pour ce faire, New Delhi a utilisé les exceptionnels sept millions de tonnes de blé que le pays a récolté en 2021.
De plus, le premier ministre indien, Narendra Modi, avait assuré début mai, lors de sa tournée en Europe, que son pays «est déterminé à répondre de manière coordonnée et multilatérale au risque d’aggravation de la crise alimentaire dû au conflit en Ukraine».
Cependant, après que l’inflation en Inde a atteint son niveau le plus élevé depuis huit ans, suite à la hausse des prix alimentaires, le gouvernement a décidé ce dimanche 15 mai d’interdire ses exportations de blé. Il a indiqué qu’il y aura quelques exceptions «afin de gérer la sécurité alimentaire globale du pays et de répondre aux besoins des pays voisins et des autres pays vulnérables».
Moins de 24 heures après l’annonce de cette suspension, la Bourse de Chicago a révélé que le prix du blé de variété SRW a atteint 12,3525 dollars, soit en hausse de 4,90%. Cette crise risque également d’impacter les contrats déjà signés par le l’Inde et qui doivent être respectés. C’est d’ailleurs le cas «d’une livraison de 500.000 tonnes de blé à l’Égypte qui est en cours de négociation», a précisé Damien Vercambre, courtier pour le cabinet Inter-Courtage.
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Aggravation de l’inflation en Inde
Ce changement soudain est intervenu à la suite de deux mois de canicule en Inde, où les températures ont atteint 45°C dans une grande partie de la région dédiée à la culture du blé. Et le soulagement escompté de la mousson annuelle pourrait tarder à venir cette année.
La flambée des prix des denrées alimentaires et du carburant a aussi incité la Banque d’Inde à relever ses taux d’intérêt en ce mois de mai, et ce, pour la première fois en quatre ans.
En outre, l’interdiction d’exportation de blé a été annoncée quelques jours seulement après que le ministère américain de l’Agriculture a prévenu que la production mondiale va baisser, pour la première fois en quatre ans, en 2022-23.
Le Programme alimentaire mondial des Nations Unies a, de son côté, souligné que la guerre en Ukraine a exposé la fragilité des chaines d’approvisionnement mondiales à des chocs soudains, avec de graves conséquences pour la sécurité alimentaire.
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Impact sur l’Afrique et le Maroc
Bien qu’elle ne soit pas l’un des principaux exportateurs de blé au monde, l’interdiction de l’Inde pourrait faire grimper les prix mondiaux, affectant particulièrement les consommateurs vulnérables d’Asie et d’Afrique.
Nabil Adel, enseignant-chercheur en géopolitique, nous a confirmé que «la conséquence immédiate de cette décision serait une augmentation des prix». Mais, poursuit-il, «ce qui est à craindre le plus, c’est une rupture de la chaine d’approvisionnement. Au-delà de l’inflation, cela risque de provoquer une pénurie mondiale de blé».
Malgré ses assurances que certains pays ne seront pas concernés par cette suspension, le gouvernement indien va se baser sur des facteurs et des intérêts géopolitiques pour déterminer qui va profiter de ses exportations. Selon notre interlocuteur, «l’Inde pourrait plus donner de priorité à des pays exportateurs de gaz ou de pétrole en raison de la crise inflationniste dont elle souffre actuellement».
S’agissant du Maroc, Nabil Adel estime que le Royaume compte plusieurs partenaires internationaux dans le secteur, notamment les États-Unis, la France, le Canada, l’Ukraine et la Russie. «Il dispose en plus d’une production de blé locale. De ce fait, sa sécurité alimentaire n’est pas en jeu. Néanmoins, il pourrait faire face à une hausse de prix, dans le cadre de la vague inflationniste mondiale actuelle», conclut-il.
Par ailleurs, le ministère de l’Agriculture a noté que les 32 millions de quintaux de la récolte céréalière prévisionnelle feront figurer la campagne 2021-2022 parmi les plus faibles de l’histoire du Maroc. Cette quantité ne représente même pas la moitié de la moyenne standard de cette production, qui était de 70 millions de quintaux ces dernières années. Toutefois, l’impact de cette baisse sur le Produit intérieur brut agricole (PIBA) ne sera pas très lourd. Et ce, grâce aux cultures printanières et à l’arboriculture notamment, dont les performances ont été excellentes.
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