Photo prise après l’attentat visant l’Hôtel Farah, le 16 mai 2003 à Casablanca © AFP
C’est en 2003 que le Maroc a découvert l’horreur du terrorisme avec des attentats meurtriers au cœur de Casablanca. Dans la nuit du vendredi 16 au samedi 17 mai, la métropole a été le théâtre d’une série d’attentats-suicides. Depuis, le Royaume a déclaré une guerre antiterroriste multidimensionnelle.
Ce mardi marque ainsi le triste anniversaire des 20 ans de ces attentats et viendra, une nouvelle fois, raviver des souvenirs douloureux. Et comme chaque année, l’Association marocaine des victimes du terrorisme (AMVT) organise un rassemblement commémoratif. Il se déroulera sur la Place Mohammed V de Casablanca à partir de18h30.
Un rassemblement sous le thème de la poésie
«La poésie pour ne pas oublier», c’est bien le thème choisi cette année pour le 20e anniversaire des attentats du 16 mai. Ce moment de commémoration est destiné à l’entourage proche des victimes, mais aussi à toutes les personnes souhaitant honorer la mémoire de nos concitoyens décédés ce jour-là.
Interrogé sur le choix de la thématique cette année, la présidente de l’AMVT, Soad El Khammal, explique que celui-ci illustre parfaitement l’état d’esprit de toutes les familles qui ont perdu des proches lors de ces attentats. «La poésie, la littérature et l’art en général représente une source intarissable d’inspiration qui permet de célébrer la vie et l’espoir d’un avenir meilleur», a-t-elle indiqué.
Selon Soad El Khammal, ce rassemblement représente également un moment solennel d’expression de la solidarité à l’égard de toutes les victimes d’attentats dans le monde. Il vise surtout à promouvoir « le bien vivre ensemble ». Pour cela et pour la première fois, des représentants des trois religions monothéistes seront présents, à savoir un imam, un père et un rabbin. Chacun d’entre eux récitera un verset de son livre sacré.
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20 ans après, qu’est ce qui a changé ?
C’est sûr que ces attaques ont été tellement traumatisantes. Pour les familles des victimes, c’est une plaie qui ne se referme pas et se rouvre à chaque commémoration. C’est d’ailleurs ce que nous confirme Soad El Khammal, elle qui a perdu son mari et son fils de 17 ans lors de ces attentats. «20 ans se sont écoulés et on en a tous la moindre seconde gravée en nous. Imaginez ce que ça peut laisser comme séquelles. La douleur est toujours aussi vive», dit-t-elle.
Et quand vient la délicate question du pardon, la présidente de l’AMVT affirme que cela paraît impossible. «Je ne peux pas pardonner. Certes, j’ai fait mon deuil et je suis passée à autre chose. J’ai appris à vivre avec ce mal, mais pardonner à des gens qui ont arraché la vie à des êtres chers, pas question», s’emporte-t-elle, précisant qu’il s’agit là d’un acte où on a atteint l’horreur absolue avec le massacre d’innocents, les souffrances et les douleurs endurées.
Au moment des attentats, Soad El Khammal était à Paris avec sa fille. Âgée à l’époque de 14 ans, elle est devenue aujourd’hui une jeune femme de 34 ans. Avocate de profession, elle s’est installée à Casablanca et elle vit toujours le drame à sa façon, dit sa mère. «Elle était très jeune à l’époque, mais elle se rappelle de tout. C’est une tragédie qui a marqué sa vie, mais elle n’est pas du genre à en parler. Elle vit ce drame à sa façon. On ne parle quasiment jamais de cet événement», raconte El Khammal, elle qui s’est dit fière de sa fille et de son parcours professionnel.
«Ma fille n’est pas la seule qui a réussi sa vie professionnelle après ces attentats. De nombreuses familles des victimes ont vu leurs enfants briller dans différents domaines et nous (les membres de l’Association, ndlr) en sommes tous fiers d’eux parce que c’était le grand défi», poursuit notre interlocutrice.
De lourdes condamnations ont été, rappelons-le, infligées à l’encontre de tous ceux qui étaient impliqués, à divers degrés, dans ces attentats. Certains d’entre eux sont déjà sortis et ont réintégré la société. Interrogé pour savoir si elle a pu les rencontrer ou leur parler, Soad El Khammal refuse catégoriquement d’avoir de leurs nouvelles. «Je ne cherche pas à les voir et le ne veux rien savoir sur eux. Penser à ces gens va me déprimer et me tirer vers le bas», conclut-elle.
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