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Anatomie d’une attaque, 50 ans et un jour après Youm Kippour

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«Tank In The Desert» : Une scène de la guerre du Yom Kippour de 1973 photographiée par Nathan Fendrich. © Image de la Bibliothèque nationale d'Israël

La date n’aura pas échappé aux membres du Hamas : le 6 octobre 1973 à 14h, l’Égypte et la Syrie lançaient une offensive conjointe contre Israël. La récente attaque rappelle la sidération et la stupeur israéliennes au premier jour de l’offensive de 1973 qui aura duré 18 jours. Personne ne l’a vu venir ? Même pas le Shin Bet, le service de renseignement intérieur israélien, le Mossad, son agence d’espionnage extérieure, Aman, son service de renseignement militaire, encore moins toutes les forces de défense israéliennes.

L’État hébreu a été la cible d’une opération sur fronts multiples : un déluge de roquettes tirées depuis la bande de Gaza tandis que des dizaines de combattants ont ouvert des brèches dans les barbelés qui séparent Gaza d’Israël. À bord de véhicules, de bateaux et même de parapentes motorisés, les combattants se sont infiltrés dans des zones urbaines d’Israël comme Ashkelon, Sderot et Ofakim, situé à environ 22 kilomètres de la frontière avec l’enclave côtière.

«Les militaires sont absolument sidérés de ce qui vient de se passer. Aucun d’entre eux ne s’attendaient à ça», explique Sylvain Cypel, journaliste, spécialiste d’Israël, auteur du livre « L’État d’Israël contre les Juifs (2020) ». «Cela avait été un petit peu vrai en 2021, avec le Hamas qui avait pour la première fois utilisé des missiles qui étaient tombés sur Tel Aviv et Jérusalem. Il y a eu un jour ou deux d’effarement de la part de l’armée israélienne qui ne s’y attendait pas du tout. Aujourd’hui, la surprise est surmultipliée», continue le journaliste.

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Ce 7 octobre, l’armée israélienne ne réagira pas avant des heures. La riposte qui s’ensuit, dénommée «Épées de Fer», d’abord jugée «légitime» par les alliés d’Israël, dépasse aujourd’hui l’entendement : comment demander à un peuple de quitter son territoire ? Ne se souviennent-ils pas de leur propre histoire ?

Anatomie d’une attaque, 50 ans et un jour après Youm Kippour

Frappes israéliennes confirmées à Gaza au 10 octobre 2023. © Financial Times d’après les données de l’armée israélienne

Depuis 2007, lorsqu’ avec l’Égypte, Israël a bloqué la bande de Gaza «expliquant que c’est pour sa sécurité», l’État hébreu a cru à la solution militaro-technologique de l’enfermement et à la «stratégie de la tondeuse». Cette formule glaciale des services de sécurité israéliens fait référence à l’idée que la menace terroriste – Hamas étant désigné organisation terroriste par les Américains comme les Européens – ne pouvait pas être éliminée, mais pouvait être réduite à un niveau tolérable. D’où régulièrement «tondre la pelouse», c’est-à-dire décapiter les groupes armés et détruire leurs infrastructures.

Tsahal (Tsva Haganah Le Israel – Forces de défense israéliennes (FDI))

Anatomie d’une attaque, 50 ans et un jour après Youm Kippour

Maj-général. Yigal Allon, lieutenant-colonel. Shimon Avidan, major-général. Yigael Yadin, David Ben Gourion et le lieutenant-général. Yaakov Dori passant en revue la brigade Givati en 1948. © Fred Chesnick / archives de Tsahal

Lorsque les Forces de défense israéliennes (FDI) furent créées en mai 1948 à l’initiative de David Ben-Gourion, premier Premier ministre israélien à l’époque qui estimait que «la nation tout entière est l’armée», elles étaient petites, mal équipées et déjà en guerre. Faute d’armes suffisantes ou d’une base industrielle nationale capable de les produire, l’armée naissante a dû se contenter de tout ce qui lui tombait sous la main.

Cet esprit d’improvisation a permis aux FDI de remporter une victoire décisive lors de la première guerre israélo-arabe. Aujourd’hui, ce même esprit a fait des FDI l’armée la plus puissante du Moyen-Orient et l’une des plus performantes au monde.

Les autorités israéliennes ont compté sur les murs, les caméras et les dispositifs automatiques pour éviter une incursion depuis la bande de Gaza, la majorité de ses bataillons positionnés du côté de la Cisjordanie et dans le nord d’Israël. Sur le terrain, le long de la clôture frontalière tendue entre Gaza et Israël, il y a des caméras, des capteurs de mouvement au sol et des patrouilles régulières de l’armée. La clôture surmontée de fils barbelés est censée être une «barrière intelligente» destinée à empêcher exactement le type d’infiltration qui a eu lieu lors de cette attaque.

Les événements du 7 octobre 2023 ont montré que ces hypothèses étaient gravement erronées. L’échec est épouvantable et Netanyahou en est responsable. Comment expliquer la surprise créée par le Hamas ?

«Ils nous ont eu»

Reuters rapporte que l’organisation palestinienne avait entrepris depuis deux ans une «campagne minutieuse de contre-espionnage pour tromper les renseignements israéliens et les convaincre qu’elle ne souhaitait pas l’affrontement». Cette opération lui aurait même permis de reproduire une colonie israélienne à Gaza, à des fins d’entraînement. Des manœuvres dont Israël a sûrement eu connaissance, «mais ils étaient convaincus que le Hamas n’était pas désireux de s’engager dans une confrontation», a ainsi déclaré une source proche de l’organisation à l’agence de presse.

Lire aussi : Déluge d’Al-Aqsa : la guerre sera longue

Et, dans le cadre de son subterfuge, le Hamas se serait abstenu de mener des opérations militaires contre Israël, alors même qu’un autre groupe armé basé à Gaza, connu sous le nom de Jihad islamique, a lancé une série de ses propres assauts ou tirs de roquettes. «C’est notre 11 septembre», a déclaré le major Nir Dinar, porte-parole des Forces de défense israéliennes. «Ils nous ont eu.»

Mais dix jours avant le «Déluge d’Al-Aqsa», le ministère de renseignement égyptien, qui entretient des relations étroites avec son homologue israélien depuis les accords de paix signés en 1979, aurait prévenu Israël que «quelque chose d’inhabituel, une opération terrible» se préparait en provenance de Gaza. L’une de ces mises en garde aurait été adressée personnellement à Benyamin Netanyahou par le ministre égyptien du renseignement, le général Abbas Kamel. L’information aurait toutefois été négligée par les autorités israéliennes, qui ont préféré se concentrer sur la situation sécuritaire en Cisjordanie.

Le bureau du Premier ministre israélien a publié lundi un communiqué affirmant que ces informations étaient «absolument fausses». «Aucun message préalable n’est arrivé d’Égypte et le Premier ministre n’a ni parlé, ni rencontré le chef des renseignements égyptiens depuis la formation du gouvernement (en novembre 2022, NDLR), ni directement, ni indirectement. Il s’agit totalement d’une fake news», est-il indiqué. Le porte-parole de l’armée israélienne, Daniel Hagari, a reconnu que l’armée devait une explication au public, mais a déclaré que «ce n’est pas le moment de le faire, ils vont d’abord se battre et ensuite, ils enquêteront».

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