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Il y a un an, nous étions perplexes quant à la capacité du gouvernement Akhannouch, au vu de sa composition, de répondre aux attentes des citoyens. Le départ prématuré de Nabila Rmili, qui a préféré quitter le ministère de la Santé et de la Protection sociale pour se consacrer pleinement à la gestion des affaires de la métropole, a amplifié les incertitudes sur les chances de la coalition RNI-PAM-PI de travailler sereinement. Nous étions habités de doutes sur une probable crise politique qui ferait voler en éclats la majorité. Un an plus tard, contre vents et marées, la majorité gouvernementale est toujours à la barre. Ceci ne nous empêche pas de reprendre nos interrogations en les confrontant aux faits (réussites ou échecs) du gouvernement Akhannouch.
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La majorité s’auto-congratule et l’opposition dénigre les réalisations
Dressant le bilan de sa première année au pouvoir, la majorité gouvernementale s’est félicitée de ses réalisations, énumérant plusieurs points dont la poursuite de la mise en œuvre du chantier de la protection sociale, le lancement de programmes destinés à la création d’opportunités d’emplois à l’instar d’Awrach et Forsa, ainsi que la subvention des produits de première nécessité.
La rédaction de LeBrief.ma a aussi retenu les avancées réalisées dans le cadre du dialogue social, les différents accords signés avec les syndicats de la santé et le règlement du problème des enseignants contractuels.
Interrogé sur les réalisations de l’exécutif pendant la première année de son mandat, Ali Lahrichi, doyen de l’Institut des sciences politiques, juridiques et sociales relevant de l’Université Mundiapolis, estime que face à toutes ces circonstances exceptionnelles (Covid-19, guerre en Ukraine, sécheresse), «la majorité, redevable aux électeurs qui l’ont porté à la direction de l’exécutif, et aussi du législatif, a essayé dans une certaine mesure, avec des actions conjoncturelles, d’amortir ce choc à la fois endogène et exogène, et qui touche plusieurs secteurs notamment le transport, l’agriculture, le tourisme et aussi le pouvoir d’achat des citoyens». Le politologue souligne que le gouvernement a opté pour le rallongement du budget de la compensation qui a tout simplement doublé pour garantir la stabilité des prix, notamment du blé, du gaz et du sucre.
De son côté, l’économiste et spécialiste des politiques publications, Abdelghani Youmni, tout en jugeant que l’établissement d’un bilan gouvernemental ne devait pas s’en tenir uniquement à des réalisations chiffrées difficilement évaluables au bout de 12 mois, soutient que les Marocains ne savent pas tous que le gouvernement a alloué des subventions. Il s’agit de «subventions annuelles de 17 milliards de DH (MMDH) pour le gaz butane et 14 MMDH pour l’électricité, 600 millions de DH (MDH) par mois pour subventionner la farine de blé», souligne notre économiste. Sur ce point d’ailleurs, Salaheddine Nabirha, co-fondateur du mouvement Maan, est inébranlable : «le gouvernement sort les chiffres forcément. Il a doublé le budget de la Caisse de compensation, il a débloqué des fonds pour les professionnels du transport, il a accordé certaines subventions. Mais cela reste des subventions, c’est un peu comme le bilan du Plan Maroc vert. Beaucoup d’argent dépensé mais après quel est l’impact derrière ? On le voit pas». L’acteur associatif témoigne d’une érosion du pouvoir d’achat et d’une souffrance générale des citoyens et d’une absence d’effets réels annoncés par le gouvernement dans le quotidien des Marocains.
Lahrichi et Youmni soulignent toutefois que malgré tout, le Maroc n’a connu aucune pénurie. «Les marchés nationaux n’ont souffert d’aucun manque ou perturbation par rapport à l’approvisionnement et le ravitaillement, notamment, le secteur de l’énergie et nonobstant la fermeture d’une manière unilatérale et hostile par l’Algérie du gazoduc qui traversait le territoire marocain», avance Lahrichi. «Au-delà des positions et des points de vue, le Maroc n’a pas connu, depuis le début des crises, ni pénuries, ni ruptures de produits énergétiques, alimentaires ou pharmaceutiques», atteste Youmni. Ceci étant, les deux experts s’inquiètent de la spirale inflationniste. «À l’heure actuelle, les débats se concentrent sur la question de savoir si l’inflation (…) va finir par retourner à l’état spectral auquel on l’avait réduite pendant plus de trente ans. Au Maroc, il faut reconnaître que la hausse des prix et la baisse du pouvoir d’achat sont à l’origine de sentiments de défiance vis-à-vis de l’exécutif. À l’inverse, on imagine bien qu’il est contraint par la rationalisation des dépenses et le renforcement des recettes de l’État», explique Youmni.
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«Cette année a été marquée par une inflation et la crise a été supportée par le consommateur alors que l’État était absent : ni discours ni paroles rassurantes ni mesures. Les sorties médiatiques du porte-parole du gouvernement, Mustapha Baitas, dénotaient d’une incompréhension du sujet. Baitas était sur une autre planète. Il était en train de voir le monde un peu rose alors que tout le monde le voyait noir», déplore Nabirha. Lahrichi abonde dans le même sens : «les citoyennes et les citoyens restent sur leur faim par rapport à la communication gouvernementale. Un élément à améliorer au niveau de l’exécutif pour garder les citoyens au fait de la chose publique et la conduite des grandes politiques du pays».
Sur ce point, l’opposition s’en donne à cœur joie. Pire encore, plusieurs chefs de groupes ont pointé du doigt l’absence d’esprit d’innovation chez le gouvernement, incapable selon eux de trouver les solutions adéquates aux problèmes ayant impacté le pouvoir d’achat des citoyens, dont la hausse des prix des carburants.
«Le gouvernement aurait pu réduire les prix des carburants mais il a refusé le recours aux moyens fiscaux, la reprise des activités de la raffinerie La Samir, la baisse des marges de profit des sociétés opérant dans ce secteur, de même qu’il n’a élaboré aucun plan global et clair pour faire face à cette situation», a lancé Azouz Senhaji, membre du bureau politique du Parti du progrès et du socialisme (PPS).
Ali Lahrichi note aussi que la croissance est «estimée à 4% lors de ce mandat alors qu’il est attendu à ce qu’elle tourne autour de 1% lors de cette première année». «Pour ce qui est de la croissance économique, le gouvernement a tablé en 2022 sur 3,2%, elle sera seulement de 0,8%, ce n’est pas seulement par manque d’efficacité mais la conjoncture internationale, le coût du fret, de l’énergie et des intrants puis surtout la sécheresse ont fait que nous avons perdu 2,4 points», relativise Abdelghani Youmni.
Y a-t-il cohésion entre les partis de la majorité ?
Tandis que la coalition gouvernementale bénéficie d’une majorité confortable à la Chambre des représentants et d’un format resserré qui ne compte que trois partis, la cohésion et la solidarité n’étaient pas vraiment au rendez-vous, selon l’opposition.
«Sur ce volet, le bilan est très mitigé avec des dissensions apparues au sein du gouvernement. Preuve en est, on a déjà commencé à parler de remaniement», note Salaheddine Nabirha. À ses yeux, le manque de cohésion est manifeste entre les ténors des trois partis politiques formant la majorité, avec un grand écart qui se crée notamment entre le président du RNI et le SG du PAM, ce dernier n’étant pas satisfait des portefeuilles ministériels accordés à son parti. «Sincèrement, à mon sens, malgré les faiblesses citées par ci et par là, je pense que la cohésion gouvernementale reste assez solide (…). À ce jour, nous n’avons pas constaté que cette alliance tripartite a été fragile autant sur le plan national ou local. D’ailleurs les déclarations faites par les chefs de ces partis ou encore par les responsables à l’occasion de congrès régionaux, universités d’été ou autres regroupements partisans confortent cette tendance de la cohésion», tempère Ali Lahrichi.
Réformes à venir
Le discours prononcé par le Souverain vendredi à l’ouverture de la session d’automne de la 2e année législative a fixé deux nouvelles priorités : l’eau et l’investissement. «Le gouvernement a du pain sur la planche, il y a le pacte national de développement, la réforme des retraites, la réforme du code de la famille mais surtout le volet économique pour actionner tous les leviers de développement et de croissance», énumère le politologue Ali Lahrichi qui souligne que le Roi a exhorté le gouvernement, en partenariat avec les secteurs privé et bancaire, à traduire leurs engagements respectifs dans un «Pacte National pour l’Investissement ». Ce dispositif vise à mobiliser 550 milliards de dirhams d’investissements et à créer 500 mille emplois, au cours de la période 2022-2026.
La question de l’eau posera un véritable défi et test pour la capacité du gouvernement à poser une politique de gestion pérenne et durable au Maroc, ajoute-t-il. Salaheddine Nabirha insiste pour sa part sur les réformes de l’éducation et de la justice. Le militant associatif mise aussi sur l’industrialisation et incite l’exécutif à accélérer les projets prêts à l’emploi et de créer un embryon d’entrepreneuriat au sein de l’école en allant également vers la régionalisation.
Enfin, l’économiste Abdelghani Youmni certifie que si les réformes structurelles engagées depuis 23 ans ont mis le pays dans la voie de la croissance, le Maroc reste très largement un pays agricole qui cherche à faire émerger un modèle industriel tiré par la locomotive de la demande extérieure. «Le gouvernement a fixé quatre priorités pour le PLF2023 : le renforcement des fondements de l’État social, la relance de l’économie par le soutien de l’investissement, la justice territoriale et la reconstitution des marges budgétaires pour assurer la pérennité des réformes». Ces priorités résument ce qu’on attend du gouvernement en plus des deux dossiers prioritaires fixés par le chef de l’État.
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Depuis qu’il a pris les rênes du pouvoir exécutif, le gouvernement Akhannouch a toujours opté pour la politique de l’autruche. À chaque fois qu’il échoue, c’est la faute à la conjoncture. L’année de rodage est bien révolue. Les Marocains ont laissé du temps aux nouveaux ministres de s’acclimater avec leurs nouvelles fonctions pour ne pas reprendre l’expression « se former » qui avait créé la polémique en début de mandat. Le peuple qualifie ce gouvernement de celui de la hausse des prix. À Aziz Akhannouch et son équipe de trouver les moyens de briser la spirale inflationniste, ça serait déjà de bon augure pour les quatre ans à venir.
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Lire l’interview complète de Ali Lahrichi sur le bilan de la première année du gouvernement :
Lire l’interview complète d’Abdelghani Youmni sur le bilan de la première année du gouvernement :
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