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Le ministère espagnol de l’Intérieur a annoncé, ce jeudi, dans son site officiel, que la réouverture des frontières terrestres avec Sebta et Melilia est fixée pour la nuit du lundi 16 à mardi 17 mai (00h00 le 17 mai).
Cette annonce intervient après la réconciliation entre les deux pays suite au soutien de l’Espagne au plan d’autonomie du Maroc pour le Sahara.
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L’ouverture se ferait de manière «graduelle»
L’ouverture ne sera toutefois pas totale, mais s’effectuera de manière progressive, explique El Pais, qui se réfère à la note diffusée par Fernando Grande-Marlaska.
Ainsi, et à partir du 17 mai, minuit, les postes de Tarajal, à Sebta, et de Beni Ansar, à Melilia, seront accessibles uniquement aux citoyens et résidents de l’Union européenne et aux personnes autorisées à circuler dans l’espace Schengen. Les personnes ayant l’intention d’accéder aux deux villes doivent également répondre à des exigences sanitaires (pass vaccinal anti-Covid et test PCR), précise le ministre espagnol de l’Intérieur.
Dès le 31 mai 2022, les travailleurs transfrontaliers certifiés (et disposant d’une carte émise à ce titre) ou ayant obtenu un visa spécifique pour Sebta et Melilia, pourront eux aussi entrer dans les deux villes.
Le ministère espagnol de l’Intérieur ajoute que les négociations entre les deux pays se poursuivront dans les prochaines semaines pour déterminer de façon plus affinée quelles seront catégories de personnes, de même que les types de biens qui pourront ensuite accéder à Sebta et Melilia
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Migration : consolidation de la coopération maroco-espagnole
Notons que Rabat et Madrid ont tenu vendredi dernier la réunion du Groupe migratoire mixte permanent maroco-espagnol, à Rabat. Elle a été coprésidée par Khalid Zerouali, wali directeur de la migration et de la surveillance des frontières au ministère de l’Intérieur, et de Jesus Perea Cortijo, secrétaire d’État des migrations. Les deux parties se sont félicitées de «la reprise de leurs réunions migratoires qui ont toujours consacré la confiance et la responsabilité partagées», selon un communiqué conjoint.
Pour plus d’éclairage sur ce partenariat en matière de politique migratoire, LeBrief a contacté Abdelkrim Belguendouz, professeur universitaire et chercheur en migration.
LeBrief : Quelles conclusions peut-on tirer des accords liés à la question migratoire actés par les deux pays ?
A.B : Il faut se féliciter grandement de la reprise du dialogue global entre le Maroc et l’Espagne. Les deux pays voisins sont faits pour s’entendre et coopérer à tous les niveaux au bénéfice des peuples marocain et espagnol.
Pour ce qui est du volet migratoire, la dernière réunion à Rabat du Groupe migratoire mixte permanent maroco-espagnol a permis de se retrouver en confiance pour échanger et faire avancer ce dossier humain qui concerne plusieurs composantes. Il s’agit d’une forte présence marocaine en Espagne, qui dépasse le million de personnes si l’on tient compte des binationaux. Il s’agit aussi d’une présence au Maroc de plusieurs milliers d’Espagnols, sans compter la traversée annuelle de l’Espagne dans les deux sens de la communauté marocaine vivant et travaillant essentiellement en Europe. Sans oublier l’émigration vers l’Espagne de manière irrégulière à partir du Maroc qui concerne aussi bien des Marocains que des migrants de diverses nationalités, essentiellement d’Afrique subsaharienne. Tout comme le dialogue migratoire hispano-marocain qui revêt certains aspects liés aux relations migratoires euro-marocaines, du fait de l’appartenance de l’Espagne à l’Union européenne (UE). Ce sont par conséquent toutes ces dimensions importantes qui font partie de ce dialogue migratoire bilatéral.
S’agissant précisément des résultats des travaux de la réunion de vendredi dernier, on regrettera tout d’abord le fait que le communiqué commun n’ait pas été publié dans son intégralité, au lieu d’avoir un résumé ou une «lecture», fut-elle celle de l’officielle MAP.
Partant de ce qui a été communiqué partiellement, on constate que le tour de la question migratoire maroco-espagnole a été pratiquement fait, des principes ont été rappelés, des satisfécits ont été échangés, des choix et options fortement sécuritaires ont été réaffirmés. Mais, pour répondre directement à votre question, on ne peut dire que des accords ont été conclus, si ce n’est la décision de réunir en juin prochain les divers sous-comités mixtes ad hoc concernés relavant du groupe migratoire pour avancer dans la réflexion et aboutir justement à des accords concrets, «afin de valider des plans d’action sectoriels». Mais le positif à souligner, c’est la confiance retrouvée.
LeBrief : Comment évaluez-vous la coopération maroco-espagnole en matière de politique migratoire ?
A.B : Pour la poursuite du dialogue dans le domaine migratoire entre les deux pays, il me parait d’abord essentiel d’associer à ce dialogue les sociétés civiles respectives pour mieux cerner les questions de vie et de travail des Marocains en Espagne et celles des Espagnols au Maroc et tenir compte de leurs véritables attentes.
Pour ce qui est de la migration irrégulière, c’est la démarche de respect des droits des migrants et des demandeurs d’asile qui devrait prévaloir et non pas le renforcement et la sophistication de l’approche sécuritaire en termes de militarisation des points de passages terrestres dans les villes occupées de Sebta et de Melilia, d’intensification des refoulements à chaud par la guardia-civile, du transfert violent et forcé des migrants et des demandeurs d’asile du Nord du Maroc vers des localités au Sud .
L’Espagne devrait cesser d’intervenir dans le cadre de l’UE pour que le Maroc signe un accord communautaire de réadmission incluant également les étrangers irréguliers de passage par le Maroc vers l’Europe pour que le Maroc conclue aussi des accords de travail avec Frontex, en particulier, et d’autres agences sécuritaires relevant de l’UE pour renforcer et bétonner les frontières, intensifier les réadmissions à travers les avions charter, être présent dans les ports, les aéroports, contrôler les documents de voyage, avoir les renseignements sur les flux migratoires …
Les retours devraient être véritablement volontaires et non pas constituer un «instrument de dissuasion essentiel». Dans le même esprit, l’augmentation de la fréquence des liaisons aériennes hebdomadaires entre les Îles Canaries vers le Maroc est à concevoir pour renforcer le partenariat économique, le commerce et non pas pour intensifier les expulsions forcées des migrants.
Ne pas utiliser les «possibilités accrues d’accompagnement financier (pérenne) du Maroc» par l’Espagne ou l’UE, en les détournant vers le renforcement du contrôle frontalier au Maroc ou instrumentaliser le Maroc au niveau des pays africains dans le domaine sécuritaire relatif aux migrations. Ne pas spolier le Maroc de ses compétences par l’Espagne et l’UE à travers le « Partenariat-Talent », destiné à vider les pays tiers de leur matière grise par l’UE.
LeBrief : Où en sont les politiques migratoires du Maroc, en particulier sa nouvelle politique migratoire ?
A.B : précisons d’abord que la « Nouvelle politique migratoire du Maroc » initiée par le Souverain en septembre 2013, constitue un saut qualitatif, une coupure nette avec la démarche ultra sécuritaire et une grande ouverture sur les droits des migrants et des demandeurs d’asile et le respect de leur dignité.
À ce propos, et contrairement à ce qui a été publié ces derniers jours, cette nouvelle politique datant de 2013 ne s’est nullement concrétisée par la création de la Direction de la migration et de la surveillance des frontières. Bien au contraire, c’est en réaction notamment à la démarche purement sécuritaire suivie qu’a été lancée cette nouvelle politique migratoire.
La mise en place de cette direction date de dix années auparavant, au même moment que la création de l’Observatoire national des migrations, qui reste une coquille vide. Alors qu’en application d’une des propositions phares de l’Agenda africain sur la migration, l’Observatoire africain des migrations relevant de l’Union africaine (UA) a été mis en place à Rabat fin décembre 2020.
De même, on ne peut dire que cette nouvelle politique migratoire a été suivie par l’élaboration et l’opérationnalisation de deux stratégies nationales, notamment celle accompagnant les Marocains du monde.
Si le fait est exact pour la Stratégie nationale d’immigration et d’asile (SNIA) en décembre 2014, il n’en est rien pour la Stratégie nationale MRE. Rappelons ici l’interpellation solennelle du gouvernement par le discours du Trône du 30 juillet 2015 qui reste encore, à notre sens, valable en mai 2022 : «Nous réitérons notre appel pour élaborer une stratégie intégrée, fondée sur la synergie entre les institutions nationales ayant compétence en matière de migration, pour rendre ces institutions plus efficientes au service des Marocains du Monde».
Or, les institutions nationales en question, notamment le Conseil de la communauté marocaine a l’étranger (CCME) et la Fondation Hassan II pour les Marocains résidant à l’étranger connaissent encore de multiples dysfonctionnements. L’Observatoire national des migrations, qui devrait concerner également les MRE et inclure aussi les syndicats représentatifs, la société civile, les chercheurs, reste encore non fonctionnel.
Enfin, depuis le dernier gouvernement issu des élections législatives, le dossier « Affaires de la Migration » (c’est-à-dire l’immigration et l’asile) a disparu pratiquement de l’architecture gouvernementale. Cependant, la SNIA devrait être poursuivie et approfondie, avec également la refonte approfondie de la loi 02-03 et l’adoption de la loi sur l’asile.
D’autant plus qu’au niveau de l’UA, le Maroc, à travers le Souverain, est leader dans le domaine migratoire et que la diplomatie migratoire marocaine est active et dynamique au niveau des divers forums et enceintes migratoires internationales . Il y a là un paradoxe qu’il serait hautement souhaitable de lever.
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