Hausse des taux d’intérêt : la triple menace pour les pays en développement
Dix ans après le fameux « whatever it takes » de Mario Draghi, à l’époque président de la BCE, pour sauver l’euro et lutter contre la désinflation, les banques centrales adoptent aujourd’hui presque la même posture. Pour contrer l’inflation, elles sont passées à l’action et avec force, quitte à saper la croissance.
Lire aussi : Politique monétaire : l’équilibre subtil
Des prévisions de croissance à la baisse
Les dernières prévisions laissent entrevoir un ralentissement plus prononcé de l’activité économique mondiale en 2022 et davantage en 2023. L’OCDE et la CNUCED tablent sur une hausse de la production mondiale de 2,2% en 2023. « Il est de tradition qu’un taux de croissance mondiale de 2,5 % soit considéré comme une récession de croissance« , explique Richard Kozul-Wright, directeur, Division de la mondialisation et des stratégies de développement CNUCED. Le ralentissement de l’activité économique mondiale va affecter toutes les régions avec des répercussions plus marquées dans les pays en développement, notamment en Afrique. Au-delà de freiner la croissance, l’accélération des resserrements monétaires fait craindre une nouvelle crise de la dette.
Lire aussi : Inflation : l’été n’apporte guère de répit aux banquiers centraux
Une crise de la dette à venir ?
La multiplication des chocs (pandémie, guerre en Ukraine…) a poussé de nombreux États à emprunter massivement pour soutenir leur économie. Aujourd’hui, beaucoup se retrouvent face à un risque de tension sur leur dette sous l’effet de l’inflation et de la hausse des taux d’intérêt. Le dollar fort alourdit par ailleurs le service de la dette. Dans une récente déclaration, David Malpass, président du groupe de la Banque mondiale se dit inquiet du niveau d’endettement de certains pays. « Nous faisons actuellement face à ce que je pense être une cinquième vague de crise de la dette » a-t-il prévenu, invitant les bailleurs de fonds et les emprunteurs à faire preuve de plus de transparence sur les niveaux d’endettement. Par ailleurs, la remontée des taux d’intérêt accélère les sorties de capitaux des pays en développement. « Les pays en développement ont également besoin de voir plus de capitaux être investis chez eux« , exhorte David Malpass.
Selon la CNUCED, les flux nets de capitaux vers les pays en développement sont devenus négatifs et quelque 90 pays en développement ont vu leur monnaie s’affaiblir par rapport au dollar cette année. Selon les estimations, ces Etats ont déjà dépensé 379 milliards de dollars de réserves pour défendre leur monnaie cette année.
Lire aussi : «Nous avons une stratégie africaine solide» : Hervé Hélias, PDG du groupe Mazars