Génocide rwandais : 30 ans après, la plaie reste béante
Le 7 avril 1994 marque début du génocide des Tutsis au Rwanda, une campagne de massacre planifiée par des éléments extrémistes de la population hutu majoritaire qui visait à éliminer la minorité tutsie. Ce massacre a duré environ trois mois jours, jusqu’au 17 juillet 1994, et fit 800.000 morts. Les massacres du printemps 1994 ont été déclenchées au lendemain de l’attentat contre l’avion du président hutu Juvénal Habyarimana, dans une frénésie de haine alimentée par une virulente propagande anti-Tutsi. Le cauchemar des Tutsis prend fin 100 jours après lorsque la rébellion tutsie du Front patriotique rwandais (FPR), s’empare de Kigali le 4 juillet, déclenchant un exode de centaines de milliers de Hutu vers le Zaïre voisin (aujourd’hui République démocratique du Congo).
Ce 7 avril 2024, correspondait au 30ème anniversaire de la commémoration du génocide, cette accession a été saisie par le Président rwandais pour revenir sur les évènements et de l’inaction de la communauté internationale. «C’est la communauté internationale qui nous a tous laissé tomber, que ce soit par mépris ou par lâcheté», a déclaré Paul Kagame. Et d’ajouter lors d’un discours donné devant plusieurs milliers de personnes à la BK Arena, que «personne, pas même l’Union africaine (UA), ne saurait se disculper de son inaction face à la chronique d’un génocide annoncé. Ayons le courage de le reconnaître, et de l’assumer».
Lire aussi : 30 ans après, le Rwanda commémore le génocide des Tutsi
«Le Rwanda a été complètement humilié par l’ampleur de notre perte. Les leçons que nous avons tirées sont gravées dans le sang», a-t-il affirmé. «Nous n’oublierons jamais les horreurs de ces 100 journées, la douleur et la perte subies par le peuple du Rwanda, ni l’humanité partagée qui nous relie tous, et que la haine ne pourra jamais vaincre», a-t-il souligné.
Il faut rappeler qu’à l’époque, le rôle de la France dans le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994 était une source de controverses et de débats. La coopération militaire entre les deux pays remonte à 1975. La France a apporté un soutien militaire, financier et diplomatique au gouvernement hutu de Juvénal Habyarimana contre le Front patriotique rwandais, créé par les exilés Tutsi, pendant la guerre civile rwandaise débutée en 1990. Elle est soupçonnée d’avoir poursuivi ce soutien pendant le génocide des Tutsis au Rwanda. L’ampleur de ce soutien et son impact sur le génocide firent l’objet de vives controverses, en particulier entre les gouvernements français et rwandais et continuent d’influencer les relations diplomatiques entre les deux pays.
La France maintient ses propos
Pour sa part le président français, Emmanuel Macron, a déclaré que la France avait la possibilité de d’arrêter ce massacre mais ne l’avait pas fait. «Quand la phase d’extermination totale contre les Tutsis a commencé, la communauté internationale avait les moyens de savoir et d’agir, par sa connaissance des génocides que nous avaient révélé les survivants des Arméniens et de la Shoah, et que la France, qui aurait pu arrêter le génocide avec ses alliés occidentaux et africains, n’en a pas eu la volonté», a affirmé la présidence.
«Aujourd’hui, nous marquons le 30e anniversaire du génocide contre les Tutsis. Nous rendons hommage aux victimes. Et nous saluons le parcours du Rwanda, passé de l’obscurité à l’espoir, et de la douleur au progrès. C’est un exemple pour le monde», a déclaré dimanche Emmanuel Macron dans une vidéo diffusée à l’occasion du 30e anniversaire du génocide au Rwanda.
Macron soutient que le génocide au Rwanda contre les Tutsis nous l’a clairement rappelé : un génocide n’arrive pas de nulle part, il fait suite à des années d’incitation à la peur, de haine et de déshumanisation, en soulignant que les gouvernements doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour combattre la haine, la discrimination et les autres causes profondes avant qu’il ne soit trop tard.
Lire aussi : Rwanda : Victoire Ingabire ne pourra pas se présenter à la présidentielle
Quand la xénophobie et les discours de haine sont tolérés par les gouvernements, ils peuvent atteindre un tel niveau qu’un génocide peut à nouveau être possible. En réalité, il n’y avait pas de volonté politique de la part de la communauté internationale d’arrêter le génocide. Ils en avaient les moyens, mais aucun intérêt à l’arrêter, a dit Macron.
Selon lui, le génocide au Rwanda reste une tâche sur notre conscience collective et, 30 ans plus tard, le monde doit en tirer des leçons. Les actions – ou leur absence – des dirigeants mondiaux face à des atrocités en cours, a-t-il souligné, avant d’ajouter qu’il ne faut jamais perdre de vue que pour les personnes qui ont vécu un génocide, les signaux d’alerte étaient là.
Il est important de réaffirmer une vérité fondamentale selon laquelle nous sommes tous créés égaux et nous avons certains droits inaliénables, dont le droit à la vie que personne n’a le droit de nous retirer, comme cela a été fait il y a 30 ans, a-t-il conclu.