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Changement climatique : «les Somaliens souffrent d’une crise qu’ils n’ont pas créée» (Guterres)

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Ces derniers mois, la Somalie a frôlé la famine en raison d’une sécheresse historique caractérisée par cinq mauvaises saisons des pluies consécutives. © Claudia Rosel / OIM

Pour son deuxième déplacement en Somalie, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a «sonné l’alarme», ce mardi 11 avril, et appelé à une mobilisation internationale «massive» en faveur de ce pays de la Corne de l’Afrique en proie au terrorisme et à une sécheresse historique.

À son arrivée mardi matin dans la capitale Mogadiscio, António Guterres a d’abord tenu à rappeler qu’il s’agissait d’une «visite de solidarité» avec les Somaliens à l’occasion du ramadan et qu’il aurait «l’honneur de partager» une rupture du jeûne avec le chef de l’État et ses invités. Mais, il a expliqué être venu «sonner l’alarme» sur la situation du pays auprès de la communauté internationale.

Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, et le président somalien, Hassan Cheikh Mohamoud, tiennent une conférence de presse conjointe au palais présidentiel de Mogadiscio, le 11 avril 2023. © Feisal Omar / Reuters

Le président somalien Hassan Cheikh Mohamoud a salué cette visite, qui selon lui «témoigne que les Nations unies sont pleinement engagées à soutenir nos plans de construction de l’État et de stabilisation du pays».

Sécheresse et famine historiques

Après une première visite en mars 2017, ce nouveau déplacement en Somalie intervient alors que le pays fait face à une sécheresse désastreuse, la pire depuis au moins quatre décennies. «Après cinq saisons des pluies ratées consécutives, la sécheresse a déplacé 1,4 million de Somaliens, dont 80 % de femmes et d’enfants», a déploré le patron de l’ONU.

Bien que les Somaliens ne contribuent pratiquement pas au changement climatique (…) ils sont parmi les plus grandes victimes.

– António Guterres, secrétaire général de l’ONU

«Quoique les Somaliens ne contribuent que très peu au changement climatique – la Somalie n’est responsable que de 0,003% des émissions qui contribuent au phénomène – ils en sont parmi les principales victimes», a déclaré mercredi le chef de l’ONU António Guterres, alors qu’une famine généralisée menace de suivre une sécheresse qui a tué 43.000 personnes l’année dernière. «La Somalie souffre de l’impact d’une crise climatique qu’elle n’a presque rien fait pour créer», a-t-il déploré.

Près de 5 millions de personnes connaissent des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë. Environ 1,8 million d’enfants souffrent de malnutrition aiguë et 8 millions de personnes n’ont pas accès à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène. «Il est inadmissible que les Somaliens, qui n’ont presque rien fait pour créer la crise climatique, subissent son terrible impact», a déclaré António Guterres. «Le changement climatique provoque le chaos.»

Lire aussi : 386.000 enfants souffrent de malnutrition en Somalie, selon l’Unicef

Et quelque 8,3 millions de personnes, soit près de la moitié de la population somalienne, aura besoin d’aide humanitaire cette année, estime l’ONU. Selon une étude publiée en mars par le ministère somalien de la Santé, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et l’Unicef, entre 18.100 et 34.200 personnes pourraient mourir des conséquences de la sécheresse durant les six premiers mois de cette année.

«Ces derniers mois, la Somalie a frôlé la famine en raison d’une sécheresse historique caractérisée par cinq mauvaises saisons des pluies consécutives», a déclaré à Genève lors d’une réunion avec les donateurs, Adam Abdelmoula, Coordinateur résident et humanitaire pour la Somalie. «Certaines des régions les plus touchées sont toujours confrontées au risque de famine», a ajouté ce Représentant spécial adjoint du Secrétaire général.

Voir aussi : La Somalie au bord de la famine, l’ONU lance son «ultime avertissement»

La classification intégrée des phases de la sécurité alimentaire (IPC), qui établit la norme mondiale pour déterminer la gravité d’une crise alimentaire, a déclaré en décembre dernier que la famine avait été temporairement évitée, mais a averti que la situation empirait.

Dans le même temps, des pluies saisonnières ont provoqué de soudaines inondations fluviales, tuant 21 personnes et en déplaçant plus de 100.000. «C’est ce que fait le changement climatique, qui crée des cycles imprévisibles de sécheresse et d’inondation», a fait valoir le Coordinateur humanitaire de l’ONU, relevant que ce pays, qui a si peu contribué à la crise climatique, en subit véritablement les conséquences.

Guterres appelle à la mobilisation face à la sécheresse …

«Lorsque la famine menace, c’est totalement inacceptable», a déclaré António Guterres aux journalistes à Mogadiscio, après avoir visité un camp à Baidoa. Le chef de l’ONU s’est rendu dans ce camp de déplacés, dans le sud-ouest de la Somalie, qui accueille les victimes de la sécheresse dans cette région parmi les plus durement touchées par la faim et par les combats entre les groupes terroristes et les forces gouvernementales.

Écouter aussi : Corne de l’Afrique, la sécheresse menace 20 millions de personnes de famine

António Guterres a donc «appelé les donateurs» à accroître leur soutien financier pour l’année 2023. Sur les 2,6 milliards de dollars que l’ONU estime nécessaire pour la Somalie, seuls 15%, a-t-il rappelé, ont été réunis à ce jour. «La communauté internationale a été distraite par rapport au drame du peuple somalien», a-t-il déploré.

… et au terrorisme

«La combinaison du terrorisme et de la sécheresse, causée en grande partie par le changement climatique, crée les conditions parfaites (d’une crise) et nécessite un soutien massif de la communauté internationale», a affirmé António Guterres mardi 11 avril dans l’après-midi depuis la ville de Baidoa.

Une importante offensive gouvernementale soutenue par des milices claniques alliées a capturé environ un tiers du territoire d’Al Shabab, a déclaré l’ambassadeur américain en Somalie à Voice of America en mars. Le gouvernement somalien prétend avoir tué 3.000 combattants du groupe terroriste Al-Shabab depuis le lancement de la campagne l’année dernière, mais le groupe militant a montré à plusieurs reprises sa capacité à riposter lors d’attaques meurtrières contre Mogadiscio.

Voir aussi : Un double attentat des Shabab fait 19 morts en Somalie

L’armée et ses alliés claniques devraient entamer une deuxième phase de l’opération, soutenue par la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS), dans les prochaines semaines.

QUI SONT LES TERRORISTES D’AL-SHABAB ?

– Revenu au pouvoir en mai 2022, Hassan Cheikh Mohamoud a déclaré une « guerre totale » aux Al-Shabab.

– Ce groupe terroriste est affilié à Al-Qaïda et mène depuis 2007 une insurrection sanglante contre le gouvernement soutenu par la communauté internationale.

– En septembre 2022, une vaste opération militaire a été lancée par le gouvernement pour lutter contre les Al-Shabab.

Le chef de l’ONU et le président somalien ont également «discuté des efforts précieux du gouvernement pour lutter contre le terrorisme et faire progresser la paix et la sécurité pour tous», a-t-il souligné.

Revenu au pouvoir en mai 2022, Hassan Cheikh Mohamoud avait déclaré une «guerre totale» aux Al-Shabab, groupe affilié à Al-Qaïda qui mène depuis 2007 une insurrection sanglante contre le gouvernement soutenu par la communauté internationale.

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