Barcelone ou mourir
Depuis le début de l’année, pas une semaine ne passe sans que des courageux titres de la presse écrite dakaroise n’annoncent des morts ou le sauvetage d’embarcations échouées en mer, bondées de jeunes Sénégalais tentant de gagner les îles Canaries, porte d’entrée vers le Vieux Continent. Pour les marines marocaine et espagnole qui interceptent chaque jour ces bateaux de fortune, c’est assurément la haute saison. L’expression «Barça wala Barsakh» (ndlr : arriver à Barcelone ou mourir, en wolof) bien connue de la rue sénégalaise, n’a jamais été aussi d’actualité.
Le plus inquiétant dans ces vagues de départs, est la présence massive de pêcheurs parmi ceux qui veulent partir à tout prix. Toutes ces petites gens qui vivaient jadis de la pêche artisanale, n’ont plus aujourd’hui de quoi nourrir leurs familles. Les gros navires de pêche, sans compter le vol du poisson opéré impunément par des armateurs chinois dans les eaux territoriales du pays, ne leur laissent que des miettes. Ceux qui sont au pouvoir à Dakar depuis 12 ans le savent très bien, comme ils sont dans le déni de leur échec.
Les conditions de vie des populations se sont dégradées, et les ménages ont de plus en plus de difficultés à boucler les fins de mois. L’envolée des prix alimentaires écrase les couches populaires tandis que le sentiment de déclassement gagne les classes moyennes. Tout ne peut pas être mis sur le dos de la crise du Covid-19, échappatoire facile de gouvernants africains, ni sur la mondialisation, argument développé sur les campus par des profs dépassés.
En réponse à la crise migratoire actuelle, le gouvernement se contente d’une «Stratégie 2033 de lutte contre la migration», encore un document Powerpoint auquel il est le seul à croire.