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À quand le réveil africain ?

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L’année 2024 a été marquée par une intense activité politique en Afrique, avec 19 élections organisées sur le continent, des bouleversements majeurs pour les partis au pouvoir et des initiatives historiques dans le domaine de la coopération régionale notamment avec l’Alliance des États du Sahel composée par le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Ces derniers ont définitivement tourné le dos à la CEDEAO. Retour sur les événements qui ont redéfini le paysage politique et économique du continent africain.

Le 24 mars, le Sénégal a connu une élection présidentielle marquante. Bassirou Diomaye Faye, un candidat inattendu, a remporté le scrutin. Sa campagne, menée dans des conditions difficiles, notamment son incarcération, a captivé les électeurs. Sa vision panafricaniste a rassemblé une grande partie de la population, provoquant un changement historique dans la politique du pays.

Sénégal : Bassirou Diomaye Faye prend officiellement ses fonctions

Toujours en Afrique de l’Ouest, le Ghana a également tenu des élections importantes. Après huit ans sous le même parti et en pleine crise économique, le pays a vu le retour du National Democratic Congress (NDC) au pouvoir. Bien que ce retour marque une continuité politique, les responsabilités du NDC et du New Patriotic Party (NPP) dans les crises passées et présentes restent au centre des débats.

En Afrique du Sud, les élections du 29 mai ont donné lieu à une coalition politique sans précédent. L’ANC, parti de gauche, s’est allié à l’Alliance démocratique, parti de centre droit, ainsi qu’à sept autres formations. Bien que cette alliance soit née d’un paysage politique très fragmenté, elle suscite des espoirs et des interrogations. Malgré des tensions internes, la coalition semble fonctionner pour l’instant, reflétant une volonté d’adaptation à une situation politique complexe.

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Dans la région de l’Afrique de l’Est, le Rwanda a réélu Paul Kagame avec plus de 99% des voix. Ce résultat dépasse même son score précédent de 2017, qui était de 98,3%. Cette victoire confirme son autorité sur le pays. Cependant, elle soulève des critiques sur l’état de la démocratie rwandaise, souvent remise en question par les observateurs internationaux.

En Afrique du Nord, l’Algérie a également vu une réélection. Le président Abdelmadjid Tebboune a été reconduit avec une large majorité. Ce résultat prolonge la domination du Front de Libération Nationale (FLN) et de l’armée. Cette continuité politique garantit une certaine stabilité, mais elle limite les perspectives de changement, selon les experts.

De son côté, la Tunisie a également maintenu son président en fonction. Kaïs Saïed a remporté les élections avec 91% des suffrages. Cependant, sa campagne a été marquée par une répression importante contre ses opposants, dont plusieurs ont été emprisonnés ou exclus du processus électoral. Avec ce nouveau mandat, il promet de poursuivre sa lutte contre la corruption. Pourtant, ses méthodes inquiètent quant à l’avenir des libertés politiques dans le pays.

Tunisie : Kaïs Saïed réélu avec un score soviétique

Des transitions politiques entre continuité et ruptures démocratiques

En Afrique centrale, le Tchad a reconduit Mahamat Idriss Déby au pouvoir lors des élections de mai. Fils de l’ancien président, il continue ainsi la domination de sa famille sur le pays. Bien que ces élections aient été perçues comme symboliques par certains, elles illustrent l’influence durable de l’armée dans la politique tchadienne et, plus largement, dans la région du Sahel.

Après son coup d’Etat du 30 août 2023, le président de la transition gabonais, Brice Oligui Nguema, avait organisé un referendum pour modifier la constitution afin de pouvoir se présenter aux prochaines élections présidentielles prévue en août 2025.

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En Afrique australe, le Botswana a vécu un bouleversement politique majeur. Le Parti démocratique du Botswana (BDP), au pouvoir depuis l’indépendance, a subi une défaite historique. Réduit à seulement trois sièges, il a été remplacé par une opposition menée par Douma Boko. Ce changement met fin à des décennies de domination du BDP, tout en maintenant la réputation du pays en tant qu’exemple de stabilité démocratique.

Au Mozambique, l’élection du 8 octobre a confirmé le Front de libération du Mozambique (FRELIMO) au pouvoir. Cependant, des accusations de fraude ont rapidement émergé, déclenchant des manifestations qui ont fait plus d’une centaine de morts en trois jours d’émeutes. Ces dernières ont été violemment réprimées par les forces de sécurité, provoquant des pertes humaines et marquant durablement la scène politique.

Enfin, en Namibie, les élections ont été remarquables par leur durée inhabituelle. Le processus de vote, jugé trop long, a suscité des critiques. Malgré ces défis, le pays a réaffirmé son engagement envers la démocratie, préservant sa stabilité politique.

Le divorce acté entre la CEDEAO et l’AES

Après plusieurs tensions qui animent les États membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et trois pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) à savoir le Mali, le Burkina Faso et le Niger dans le cadre du retrait de ces trois États.

Après l’annonce du Mali, du Burkina Faso et du Niger de se retirer de la CEDEAO, les chefs d’État et de gouvernement membres de la CEDEAO, lors d’un sommet le 15 décembre 2024, ont ratifié le retrait de ces trois pays du bloc économique, en indiquant qu’ils respectaient la décision des trois pays de quitter la communauté, mais qu’ils leur donnaient encore une période de transition de six mois entre le 29 janvier et le 29 juillet 2025, le temps que la mission de médiation du président sénégalais Bassirou Diomaye et le président togolais Faure Gnassingbé mettent tout en œuvre pour leur retour au sein de l’organisation et aussi pour négocier des modalités de leur départ.

AES – Cedeao : la rupture actée

Mais contre toute attente, les trois pays de l’AES ont rejeté la décision de la CEDEAO de prolonger leur retrait, à travers un communiqué lu par le ministre des Affaires étrangères malien, Abdoulaye Diop à la télévison nationale. Pour les membres de l’ASE cette mesure est perçue comme une tentative pour freiner leur démarche souverainiste tout en permettant la poursuite de plans déstabilisateurs à leur encontre.

Dans une déclaration signée par le président malien, le général Assimi Goïta, président en exercice de l’AES, les chefs d’État dénoncent des actions de déstabilisation attribuées à des puissances étrangères, notamment la France, et soutenues par certains acteurs de la sous-région. Ces accusations ont été réfutées par la commission de la CEDEAO jeudi 26 décembre 2024, dans un communiqué.

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«La commission de la communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest exprime sa profonde préoccupation face aux allégations portées contre le Nigeria et d’autres États membres de la CEDEAO. L’Organisation soutient fermement le Nigeria et les autres États membres contre les allégations selon lesquelles ils parraineraient le terrorisme», peut-on lire dans le communiqué.

Au-delà de cette scission sous régionale, 2024, aura été une année de rupture avec la France.  Après le retrait des bases militaires au Mali, au Burkina Faso et au Niger, les autorités du Tchad et du Sénégal ont embouché la même trompette, en novembre 2024, en demandant le retrait des troupes françaises de leur territoire.

Inflation : les stratégies des pays africains face à la crise

En 2024, l’Afrique a fait face à plusieurs défis économiques importants. Parmi eux, l’inflation, la dette publique et le chômage ont marqué les discussions et les politiques économiques.

L’inflation a été un problème dans de nombreux pays. Elle a été causée par la hausse des prix des denrées alimentaires, l’instabilité des prix de l’énergie et la dépréciation des monnaies locales face aux devises étrangères. Au Nigeria, par exemple, la Banque centrale a augmenté les taux d’intérêt pour contrôler l’inflation. Cependant, cette mesure a freiné la consommation et les investissements, affectant la croissance économique. De leur côté, des pays comme le Sénégal et l’Égypte ont mis en place des subventions alimentaires et encouragé la production locale pour réduire leur dépendance aux importations.

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En ce qui concerne la dette publique, elle est une autre préoccupation importante. Dans certains pays, le niveau d’endettement est alarmant. Comme le cas de la Zambie, elle a continué en 2024 à négocier avec ses créanciers, dont la Chine, pour restructurer sa dette. Le pays a également initié des réformes économiques pour améliorer la situation. Au Kenya, le gouvernement a réduit les emprunts étrangers et favorisé les emprunts domestiques. Il a aussi amélioré la transparence dans l’utilisation des fonds publics pour restaurer la confiance des citoyens.

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