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Le gaz, instrument de coopération entre Rabat et Alger
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«Le gazoduc Maghreb-Europe est une manière d’améliorer les relations algéro-marocaines[1]», cette déclaration du ministre algérien de l’énergie rapportée en 1993 par la MAP, l’Agence de presse marocaine, illustre le caractère hautement stratégique des discussions des prochaines semaines entre Rabat, Alger et Madrid. En effet, alors que l’accord d’exploitation du Gazoduc Maghreb-Europe arrive à son terme en novembre, difficile de savoir avec certitude si les deux capitales renégocieront ce contrat.
Selon Reuters, l’accord signé en 2011 autour de la construction et de l’exploitation du Gazoduc Maghreb Europe devait permettre l’importation de 640 millions m3 de gaz naturel[2]. Dans le cadre de cet accord, le gaz algérien a, pendant dix ans, transité par les gisements de Hassi R’Mel au Maroc pour atteindre l’Espagne et le Portugal[3]. Désormais appelé Gazoduc Pedro Duran Farell, le Gazoduc Maghreb Europe, a été mis en service en 1995[4], et a justifié plusieurs rencontres bilatérales ou multilatérales impliquant des responsables marocains et algériens. Preuve en est que, malgré les antagonismes, des espaces de coopération subsistent.
Se préparer pour mieux négocier ?
Chaque partie se prépare à la nouvelle donne à sa manière. Le Maroc a décidé d’aller de l’avant à travers notamment un projet de gazoduc avec le Nigeria. Rabat aussi dévoilé son projet de «Gas To Power», porté par l’Office National de l’Electricité et de l’Eau potable (ONEE), qui comprend «un terminal de regazéification du GNL, des cavités souterraines de stockage du gaz, un gazoduc de transport reliant le Terminal GNL au Gazoduc Maghreb Europe existant et des centrales à cycles combinés (CCGT) fonctionnant au gaz naturel, d’une puissance totale d’environ 2 400 MW».[5]
Selon la Banque Africaine de Développement, l’Algérie a vu ses recettes d’exportations de gaz baisser[6] – l’une des raisons tenant notamment à l’augmentation de la consommation intérieure selon le ministère de l’Énergie algérien[7], comme le rapporte La Tribune Afrique. Néanmoins, Alger continue d’être un fournisseur important de gaz pour l’Union Européenne[8], notamment l’Espagne et l’Italie. Et Alger et Madrid mettent en avant le gazoduc Medgaz comme alternative si le Maroc ne valide pas un nouvel accord.
Garder une porte ouverte
En définitive, les déclarations récentes et parfois enflammées des uns et des autres peuvent être vues comme des outils de négociation. L’occasion de se rappeler que même si la frontière terrestre entre le Maroc et l’Algérie est fermée depuis 1994, les relations des deux pays voisins n’ont jamais été totalement rompues. Le dossier du gaz est emblématique de cette porte entrebâillée qui permet une coopération plus ou moins régulière entre Rabat et Alger.
[1] http://maparchives.ma/fr/news/marocalgeriegazoduc-le-gazoduc-maghreb-europe-est-une-maniere-dameliorer-les-relations-algero
[3] http://temis.documentation.developpement-durable.gouv.fr/docs/Temis/0066/Temis-0066873/18706_Annexes.pdf (page 4)
[5] http://www.one.org.ma/fr/doc/GasToPower/Avis%20Appel%20%C3%A0%20Manifestation%20d’Int%C3%A9r%C3%AAt_GTP_fran%C3%A7ais.pdf
[7] https://afrique.latribune.fr/entreprises/la-tribune-afrique-de-l-energie-by-enedis/2019-05-13/une-consommation-d-energie-en-hausse-en-algerie-816710.html
[8] https://www.europarl.europa.eu/news/fr/headlines/economy/20190328STO33742/importations-de-gaz-nouvelles-regles-pour-les-gazoducs-de-pays-tiers