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C’est une affaire qui défraye la chronique. L’affaire Al Khaïr révèle l’une des plus grandes escroqueries financières de l’histoire du pays. Il s’agit d’une fraude pyramidale, orchestrée par un groupe de femmes à Tanger. Celle-ci a impliqué des milliers de personnes dans un système d’investissement qui promettait des gains faramineux en peu de temps. Mais finalement, rien ne leur est revenu.
Comment tout a commencé ?
L’histoire de cette arnaque débute en 2021 lorsque trois femmes mettent sur pied une structure financière informelle sous le nom de Groupe Al Khaïr. La méthode employée, bien que camouflée sous une apparence de tontine (système traditionnel de financement collectif), repose sur un modèle de vente pyramidale. Le principe est simple : chaque participant investit une somme modeste, en général 1.000 DH, avec la promesse de récupérer cinq fois cette somme en très peu de temps.
Le succès du groupe repose sur la capacité à recruter de nouveaux membres, car ce sont les investissements des nouveaux entrants qui permettent de rémunérer les anciens participants. Plus le système se développe, plus il attire de nouveaux investisseurs, convaincus par des témoignages de «bénéficiaires» ayant effectivement reçu leurs gains. À ce stade, rien ne laisse présager l’ampleur de la fraude à venir.
En effet, le groupe Al Khaïr n’a pas agi dans l’ombre. Il a plutôt utilisé des moyens de communication modernes pour accroître son emprise sur ses victimes. Des groupes WhatsApp, des vidéos virales, et même des œuvres caritatives financées par les bénéfices du système étaient régulièrement diffusés pour crédibiliser la structure. De plus, une figure de proue du groupe, une certaine Yousra B., jouait de son image publique et de sa réputation de femme pieuse et bienveillante pour rassurer les investisseurs.
Le recrutement s’étend alors bien au-delà de Tanger, touchant des milliers de personnes à travers tout le Maroc, mais aussi parmi la diaspora marocaine. Des investisseurs de plus en plus nombreux placent leur argent dans l’espoir d’obtenir des rendements rapides, certains allant même jusqu’à hypothéquer leurs biens pour augmenter leur participation. Les sommes en jeu deviennent colossales, et au total, l’escroquerie atteindra plus de 720 millions de DH (MDH).
Comme toutes les escroqueries pyramidales, le modèle du Groupe Al Khaïr n’était pas viable à long terme. Fin 2022, les premières fissures apparaissent lorsque le flux de nouveaux adhérents ralentit, rendant difficile le paiement des rendements promis aux anciens investisseurs. Les tensions internes au sein de la direction du groupe et les retards dans les paiements provoquent les premières suspicions parmi les membres.
En septembre 2023, les versements cessent brusquement, déclenchant une avalanche de plaintes et d’accusations. Ainsi, les victimes prennent conscience qu’elles ont été dupées et se retrouvent, pour beaucoup, totalement ruinées. Les pertes ne se limitent pas seulement à l’argent investi, puisque certains ont perdu leur logement, leurs biens, et même des liens familiaux en raison de cette arnaque.
Conséquence : des suicides sont même signalés parmi les superviseurs régionaux du groupe, dont une femme qui se serait jetée du haut d’un immeuble à cause des pressions subies après avoir recruté d’autres participants. L’affaire prend alors une tournure dramatique, et les autorités sont contraintes d’intervenir.
L’affaire entre les mains de la justice
Face à l’ampleur du scandale, les autorités lancent une enquête approfondie. Plusieurs dirigeants du groupe, dont Yousra B., sont arrêtés et inculpés pour fraude et escroquerie. L’enquête révèle que les fonds collectés n’ont jamais été investis dans des activités économiques réelles, mais simplement redistribués pour maintenir l’illusion d’un système florissant. L’argent des derniers entrants servait uniquement à rémunérer les premiers investisseurs, sans aucune réelle plus-value.
L’instruction judiciaire se concentre sur la traçabilité des fonds et les responsabilités individuelles. Les autorités cherchent également à déterminer l’étendue des complicités, tant au niveau des recruteurs que des superviseurs régionaux qui auraient activement participé à l’extension du réseau.
Malgré les arrestations et la saisie de certains biens des principaux inculpés, une grande partie des sommes détournées reste introuvable, compliquant encore plus la restitution des fonds aux victimes. La plupart des personnes ayant investi dans le groupe savent qu’elles ne récupéreront probablement jamais leur argent.
C’est donc une affaire qui devait inciter les autorités à renforcer les sanctions contre les escroqueries de grande ampleur et à mieux encadrer l’utilisation des réseaux sociaux dans la promotion de ces systèmes frauduleux.
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