La reconnaissance de l’Organisation des Nations unies (ONU) des bienfaits du cannabis a attisé les débats sur sa légalisation au Maroc. Le Royaume étant, selon les données 2019 de l’Office des Nations unies contre les drogues et le crime (ONUDC), le premier producteur mondial de cannabis avec une quantité annuelle de 35.000 tonnes, 50.000 hectares de culture et un savoir-faire ancestral indéniable. Ainsi, depuis que la Commission des stupéfiants des Nations Unies (CND) a reconnu le 3 décembre 2020 les vertus de cette plante, sur recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le débat sur la légalisation deson utilisationà des fins thérapeutiques a refait surface au Maroc. Notons que ce derniera voté « oui »à la résolution de l’ONU, qui a retiré le cannabis de la liste des stupéfiants à risques.
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Le cannabis, «une médaille à double revers»
Intervenant le 24 décembre dernier dans l’émission « On n’est pas obligés d’être d’accord : quels arguments autour de la légalisation du cannabis ? »sur 2M, le professeur Jalal Taoufik, psychiatre, addictologue et membre de l’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS), a souligné que «l’usage du cannabis est une médaille à double revers». Il a expliqué que cette plante contient à la fois «du Tétrahydrocannabinol (THC), composant nocif et non exploitablemédicinalement», et «du Cannabidiol (CBD), qui est le composant thérapeutique majeur du cannabis aux nombreux bienfaits». Selon le professeur, avant d’entamer les discussions sur la légalisation du kif, il faut d’abord «en dissocier les usages». Dans ce sens, il a indiqué que «le cannabis commercialisé dans des pays où la consommation est dépénalisée, et le cannabis du Maroc sont très différents», du fait que la concentration duTHC est beaucoup plus faible dans le premier. Par contre, «le type de cannabis cultivé au Maroc est plus dangereux, en termes de consommation récréative». Jalal Taoufik estime que pour pouvoir exploiter le cannabis à des fins médicinales au Maroc, il est nécessaire de redéfinir en premier ses critères scientifiques. Et d’ajouter : «La plante utilisée doit contenir très peu de THC, moins de 0,3%, et beaucoup de CBD, pour qu’elle soit exploitable et rentable».
L’importance de cette culture en termes d’emploi
Pour Azday Benaceur, co-fondateur du collectif marocain pour l’usage thérapeutique et industriel du cannabis, «le cannabis marocain peut servir à de nombreux usages, tant thérapeutiques que récréatifs, cosmétiques ou industriels».En outre, poursuit-il, la légalisation de cette plante peut générer plusieurs opportunités d’emploi, surtoutdans la région du massif du Rif, et ce en raison des innombrables étapes de production du kif. D’après les données de 2019 de l’institut d’études Prohibition Partners, cette culture fait à ce jour vivre entre 90.000 et 140.000 familles, et emploie près de 800.000 personnes au Maroc. Se basant sur ces chiffres,Azday Benaceur juge que l’impact socio-économique irrévocable de cette culture nécessite effectivementune réglementation et une légalisation immédiate de ce secteur.
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Un business très prometteur
L’industrie du cannabisest aujourd’hui en plein essor dans le monde, surtout que le nombre de pays, qui ont légalisé cette plante pour une raison ou une autre, ne cesse de croitre. Abordant ce même sujet, TelQuel cite en exemple Israël, où«l’exploitation du cannabis rapporte 1 milliard de shekels (plus de 2,7 milliards de DH) par an». À ce jour, 60.000 Israéliens bénéficient de traitements à base de cannabis et quelque 150 entreprises opèrent dans ce secteur. Si le Maroc venait à légaliser aussi cette plante, les bénéfices seraient conséquents. En effet, selon Prohibition Partners, le Royaume pourrait enregistrer des recettes annuelles de l’ordre de 100 MMDH, tout en gardant sa dynamique de distribution actuelle, quoiqu’illégale, à savoir l’export de 80% de la production de cannabis marocain et la consommation locale des autres 20%.
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Kenzi-Riboulet Zemmouli, chercheur indépendant et activiste auprès de la Commission des stupéfiants des Nations unies, a pour sa part confié à l’hebdomadaire qu’après l’autorisation de ce secteur, le Maroc devrait se concentrer davantage sur le développement et la commercialisation des traitements à base de cannabis.«Le profit viendrait d’une mise en place d’abord nationale des médicaments à base de cannabis. Le Maroc profite déjà de l’économie du cannabis, mais à travers des circuits parallèles. Son usage médical serait un plus pour l’économie du pays et pas seulement un déplacement du marché noir vers un marché régulé ; il s’agirait de rentrées économiques supplémentaires, en particulier alors que s’ouvrent des marchés partout dans le monde – encore plus depuis la sortie du cannabis du tableau 4 (tableau des drogues à risque, NDLR)».
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Enfin, il est sûr que la légalisation du cannabis n’est pas prévue pour demain. N’empêche, les avantages de l’autorisation de cette industrie sont non négligeables. Reste maintenant à voir ce que les politiques vont décider, et s’ils sauront établir un cadre sécurisé et bien défini pour le lancement de ce secteur.
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