Accueil / Société

Inondations et intempéries : le Chef de l’exécutif bloque le processus d’indemnisation

Temps de lecture

Pour les habitants de Casablanca, le Conseil de la ville et la Lydec, société délégataire chargée de la gestion de l’eau, de l’électricité et de l’assainissement sont les principaux responsables des inondations qu’a connues la métropole depuis le 5 janvier dernier. Bien que les dégâts matériels soient très importants, le Chef du gouvernement n’a toujours pas reconnu que la capitale économique est une zone sinistrée. Une reconnaissance essentielle pour le lancement du processus d’identification et d’indemnisation des personnes touchées par les récentes inondations. Dans ce cas, comment les « Bidaouis » vont-ils être dédommagés pour les pertes accusées ? Et quelles sont les démarches qu’ils doivent suivre ?

Le Maroc a connu depuis le 5 janvier dernier d’importantes averses qui ont provoqué de graves inondations, Casablanca étant la ville la plus touchée par ces intempéries. En effet, la métropole a fait état de nombreux dégâts matériels et humains, notamment des maisons envahies par les eaux, des pertes de voitures et de bétailsou encore le décès de citoyens après l’effondrement de logements fragiles en raison des fortes averses. La défaillance des infrastructures et l’incapacité des canalisations à évacuer le volume important de pluies ont été imputées au Conseil de la ville et à la Lydec, société délégataire chargée de la gestion de l’eau, de l’électricité et de l’assainissement du Grand Casablanca. Pour le maire de Casablanca, Abdelaziz El Omari, c’est le délégataire qui est responsable des ravages subis par les « Bidaouis » et doit en conséquence indemniser ces derniers. De son côté, la Lydec, dans une tentative improvisée pour calmer les citoyens en colère,a assuré avoir mobilisé plus de 300 agents pour gérer la situation et a annoncé que deux grands projets d’assainissement des eaux pluviales seront opérationnels vers la fin de cette année 2021. Il s’agit de la galerie de stockage des eaux pluviales à Hay Sadri, qui permettrait à terme, le stockage durant les épisodes pluvieux d’un volume d’eau allant jusqu’à 14.000 m³, et le système d’assainissement liquide de la Route nationale n°1 (RN1).

Lire aussi :Casablanca : 1 mort dans l’effondrement du toit d’un four

Le silence pesant du gouvernement

Alors que le Conseil de la ville et la Lydec se rejettent la patate chaude, certains Casablancais exigent de se faire indemniser pour les dommages qu’ils ont subis et dénoncent le silence du Chef du gouvernement Saad Dine El Otmani. En effet, afin que le processus d’indemnisation soit lancé, ce dernier doit reconnaitre que Casablanca est bien une « zone sinistrée »et qu’elle a été le théâtre d’une catastrophe naturelle. Cette qualification doit être soulignée dans un arrêté dans un délai de trois mois maximum, à compter de la date de la survenance de l’événement, puis publiée auBulletin officiel. Cette démarche permettra ainsi aux compagniesd’assuranceet au Fonds de solidarité contre les événements catastrophiques (FSEC) d’entamer la procédure de dédommagement des sinistrés.En attendant, les citoyens doivent monter un dossier pour souligner l’ampleur du sinistre subi. Le dossier en question doit contenir des photos des dégâts constatés par un huissier de justice.

Lire aussi :Casablanca : les infrastructures mises à nu par les averses

Comment se faire indemniser ?

Pour les personnes qui ontsouscrità un contrat d’assurance pour habitation ou une assurance voiture, elles doivent déposer leurs dossiers auprès de leur assureur. Et conformément à la loi n°110-14, qui a institué un régime de couverture des conséquences d’événements catastrophiques, les assurances doivent accepter ces dossiers même si l’événement n’a pas encore été déclaré comme étant une catastrophe naturelle par le gouvernement. En vertu de cette loi, «l’assuré est tenu d’aviser l’assureur de la survenance de tout évènement de nature à entraîner la garantie de ce dernier, dès qu’il en a eu connaissance et au plus tard dans les vingt (20) jours de ladite survenance (article 64-5)».

S’agissant des citoyens non assurés, le FSEC a annoncé dans un communiqué de presse être disposé à remplir pleinement sa mission dès que ces intempéries seraient qualifiées «d’événement catastrophique» par arrêté du Chef du gouvernement. La même source précise que seules les victimes dudit «événement catastrophique seront éligibles aux indemnités accordées par le Fonds de solidarité», notamment les«personnes ayant subi un préjudice corporel occasionné directement par l’événement catastrophique, y compris les personnes prenant part aux actions de secours, de sauvetage et de sécurisation liées à cet événement, ou leurs ayants droit, en cas de décès ou de disparition desdites personnes». Sont également concernés par l’indemnisation du FSEC «les membres d’un ménage dont la résidence principale est rendue inhabitable directement par ledit évènement et les personnes non-membres dudit ménage lorsque leurs conjoints et/ou leurs enfants à charge en sont membres».

Par ailleurs, pour que les non assurés puissent bénéficier des prestations du FSEC,ils doivent s’inscrire au Registre de recensement des victimes des événements catastrophiques auprès du ministère de l’Intérieur. Selon le communiqué du Fonds de solidarité«ces inscriptions seront déclenchées dès publication de l’arrêté précité».

Enfin, l’indemnisation des personnes affectées par les inondations de la semaine dernière repose sur la qualification d’El Otmani de cet événement comme «incident catastrophique». Toutefois, pour le moment le Chef de l’exécutif ne s’est toujours pas prononcé à ce sujet.


Afin de mieux comprendre le processus d’indemnisation lié aux catastrophes naturelles, la rédaction de LeBrief.ma a contacté le spécialiste Hafid Benzit. Ce dernier a répondu ànos questions :

Comment les citoyens vont-ils pouvoir se faire indemniser ?

Nous avons deux catégories de personnes : ceux qui ont la garantie inondation dans le cadre d’un contrat d’assurance classique et ceux qui ne l’ont pas. La 1re catégorie sera indemnisée dans le cadre du contractuel avec la compagnie d’assurance directement et rapidement, comme tout autre sinistre, la déclaration à l’assureur doit se faire dans les cinq jours de la survenance du sinistre, la compagnie désignera un expert qui évaluera le préjudice subi. La 2e catégorie doit attendre une éventuelle promulgation de l’état de catastrophe naturelle par le gouvernement sinon aucune indemnisation ne sera possible. L’État a trois mois pour annoncer l’état de catastrophe naturelle d’après la loi promulguée à ce sujet, la victime doit déclarer les dégâts dans les vingt jours maximums.

Qui vaindemniser les personnes non couvertes ?

Les personnes non couvertes par une assurance privéeseront indemnisés grâce au Fonds de solidarité contre les événements catastrophiques (FSEC). Le FSEC est une caisse alimentée depuis 2020 par une contribution ajoutée sur la grande majorité de contrats d’assurance.

À votre avis, combien de temps le processus d’identification des sinistrés et de l’évaluation des dégâts qu’ils ont subis va-t-il prendre ?

L’indemnisation, dans le cas d’une promulgation de l’état de catastrophe naturelle, risque de prendre du temps. Il faut gérer les déclarations, évaluer les dégâts, etc. En France par exemple, l’indemnisation n’a pas encore commencé pour les sinistrés des inondations du mois d’octobre dans le sud de la France, c’est un processus très long et qui souffrira de la lenteur de l’administration. Ce que je conseille aux victimes c’est de faire constater leurs dégâts par un expert ou un huissier de justice ou au moins par des prises de photos.

Dernier articles
Les articles les plus lu

Migration : un nouvel axe Maroc-UE en construction

Société - Le Maroc et l’Union européenne (UE) s’apprêtent à franchir une nouvelle étape dans leur collaboration stratégique sur le dossier migratoire.

Ilyasse Rhamir - 19 décembre 2024

Violence envers les femmes : bilan de la campagne nationale

Société - La 22e campagne nationale de lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles a été couronnée par la réalisation de 1.557 activités de sensibilisation à travers le Royaume, a annoncé mercredi à Agadir la ministre de la Solidarité, de l’Insertion sociale et de la Famille, Naima Ben Yahia.

Farah Nadifi - 18 décembre 2024

DGSN : numérisation des démarches administratives

Société - La DGSN introduit le portail interactif E-Police. Ce projet centralise une variété de services administratifs dans un espace numérique conçu pour tous les citoyens marocains.

Ilyasse Rhamir - 18 décembre 2024

Nouvelle liaison directe entre Fès et Milan-Bergame

Société - Lancement de sa nouvelle liaison directe entre Fès, capitale spirituelle du Maroc et Milan-Bergame, en Italie.

Rédaction LeBrief - 18 décembre 2024

Santé mentale au Maroc : briser les tabous, réformer le système

Société - Au Maroc, la santé mentale demeure un domaine préoccupant, longtemps négligé dans les politiques publiques.

Ilyasse Rhamir - 18 décembre 2024

Casablanca : accident mortel dans une station de tramway

Société - Casablanca a été le théâtre d’un accident tragique impliquant un poids lourd et une station de tramway.

Ilyasse Rhamir - 18 décembre 2024

RGPH 2024 : vieillissement de la population, urbanisation et défis économiques

Société - Les résultats du dernier RGPH 2024 révèlent des changements profonds dans la structure démographique et socioéconomique du Maroc.

Ilyasse Rhamir - 17 décembre 2024

Les ministres arabes de l’Habitat unis pour un développement urbain durable à Alger

Afrique, Diplomatie, Société - Hicham Airoud, directeur de l’Habitat et de la Promotion immobilière, a dirigé la délégation marocaine à la 41e session du Conseil des ministres arabes de l'Habitat et de l'Urbanisme à Alger.

Mbaye Gueye - 17 décembre 2024
Voir plus

Adoption du projet de loi organique sur la grève par la Commission

Société - La Commission des secteurs sociaux de la Chambre des représentants a adopté à la majorité, mercredi matin, le projet de loi organique n°97.15 encadrant le droit de grève.

Rédaction LeBrief - 4 décembre 2024

Réforme des retraites : vers un départ à 65 ans et le gel de la revalorisation des pensions

Société - La réforme propose de relever l’âge de départ à la retraite à 65 ans pour les secteurs public et privé, d’augmenter les taux de cotisation, et d’introduire un plafond unifié dans le système fondamental, équivalent à deux fois le salaire minimum.

Mbaye Gueye - 2 janvier 2025

Reconstruction d’Al Haouz : Akhannouch préside la 11e réunion de la commission interministérielle

Société - À ce jour, 55.142 autorisations de reconstruction ont été délivrées, et les travaux avancent pour 49.632 logements.

Rédaction LeBrief - 2 septembre 2024

Casablanca : accident mortel dans une station de tramway

Société - Casablanca a été le théâtre d’un accident tragique impliquant un poids lourd et une station de tramway.

Ilyasse Rhamir - 18 décembre 2024

70% des Marocains craignent l’arrivée de l’IA au travail

Société - Une étude réalisée par Ipsos révèle l'approche qu'ont les Marocains vis-à-vis de l'intelligence artificielle et de son impact futur sur le marché du travail.

Mouna Aghlal - 27 décembre 2024

Les richesses des terres volcaniques

Société - Bien que les éruptions volcaniques soient dangereuses pour les humains et les animaux, elles peuvent toutefois favoriser la fertilisation des terres situées sur les pentes des volcans.

Nora Jaafar - 24 juin 2022

Code de la famille : la toile s’enflamme

Société - La réforme du code de la famille marocain, fait l’objet d’un débat houleux entre partisans du changement et défenseurs des principes religieux.

Ilyasse Rhamir - 26 décembre 2024

Rue du Pardon

Société - Rue du Pardon : c’est dans cette petite rue très modeste de Marrakech que grandit la narratrice de ce roman, Hayat («la vie» en arabe). Le quartier est pauvre, seule la méchanceté prospère.

Rédaction LeBrief - 26 décembre 2023

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire