Le Maroc écarté du dossier libyen, ce qu’en pensent les éditorialistes marocains
Ce vendredi 24 janvier, les journaux hebdomadaires marocains ont décidé de se pencher de nouveau sur l’évincement du Maroc de la conférence de Berlin sur la Libye. La situation dupays nord-africain est pour le moins qu’on puisse dire désastreuse. Selon Ahmed Charaï, éditorialiste de l’Observateur du Maroc et d’Afrique, la reconstruction de la Libye est impossible pour diverses raisons. Il explique que depuis la chute en 2011 de Mouammar Kadhafi et de sa dictaturele principal défi auquel est confronté la Libye est«une opposition fractionnée, tribale, sans perspective et sans réel projet alternatif». De plus en 2019, le pays a connu une nouvelle crise politique-militaire et est devenu encore plus polarisé lorsque l’armée nationale Lybienne autoproclamée (ANL) dirigée par le maréchal Khalifa Haftar a décidé de s’emparer de la capitale, Tripoli. Cette dernière, conformément à l’accord signé à Skhiratpar les différentes factions libyennes sous la supervision du Maroc et des Nations Unies, était depuis 2015 sous la tutelle du chef du Gouvernement d’entente national (GEN), Fayez El Sarraj. D’autant plus que le GEN a été, et l’est toujours, reconnu par la communauté internationale, dont la Turquie. Haftar, quant à lui, jouit du soutiende la Russie, de l’Égypte, des Émirats Arabes Unis et de la France, bien qu’elle ne l’assume pas, affirme Maroc Hebdo par la voix de son éditorialiste, Mustapha Sehimi.
L’escalade de tensions en Libye et l’échec de l’accord de Skhirat à rétablir la paix entre les deux protagonistes, ont poussél’Allemagne à intervenir. Sous l’égide des Nations Unies, la Chancelière allemande a organisé une Conférence urgente sur la Libye le dimanche 19 janvier. Étaient conviés à cette rencontre, les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité (États-Unis, Russie, France, Chine et Grande-Bretagne) ainsi que six autres nations, à savoir la Turquie, l’Italie, l’Égypte, les Émirats Arabes Unis, la Tunisie et l’Algérie. Après une demi-journée de négociations et de pourparlers, cette réunion n’a abouti que sur un léger communiqué commun. La missive appelait les belligérants à respecter un accord fragile portant sur un cessez-le-feu et invitait toutes les parties étrangères impliquées dans ce dossier à faire preuve de retenue et de mettre fin à leur ingérence dans les affaires internes libyennes. Selon Sehimi, l’Allemagne ainsi que tous les pays qui ont pris part à ce sommet, se présentant comme des «juges» impartiaux à Berlin, sont intervenus en faveur de la Libye pour de «multiples raisons». Il cite «des intérêts gaziers et pétroliers ainsi que des rivalités géostratégiques françaises et européennes ainsi que le condominium turco-russe dans la région, dans le prolongement de leur influence en Syrie». L’éditorialiste revient par la suite sur la grande question qui plane encore sur cette rencontre au sommet :
Pourquoi le Maroc n’a-t-il pas été invité ?
Dans son édition du jour, l’hebdomadaire de Telquel rappelle le «profond étonnement» du royaume quand il a su qu’il n’a pas été sollicité pour prendre part à la réunion de Berlin. Le journal développe en évoquant le communiqué publié par le ministère marocain des Affaires étrangères à la veille de cette rencontre : «Le royaume ne comprend ni les critères ni les motivations qui ont présidé aux choix des pays participants à cette réunion». Une charge, poursuit Telquel, imputée au pays hôte, l’Allemagne, désigné comme «loin de la région et des complexités de la crise libyenne» et qui ne saurait «la transformer en instrument de promotion de ses intérêts nationaux». Nasser Bourita avait pour sa part affirmé que «le Maroc a toujours été à l’avant-garde des efforts internationaux pour la résolution de la crise libyenne… Il a joué un rôle décisif dans la conclusion des accords de Skhirat, qui sont à ce jour, le seul cadre politique -appuyé par le Conseil de Sécurité et accepté par tous les protagonistes libyens – en vue de la résolution de la crise dans ce pays maghrébin frère». Et d’ajouter que «Le Royaume du Maroc, quant à lui, poursuivra son engagement aux côtés des frères libyens et des pays sincèrement intéressés et concernés, afin de contribuer à une solution à la crise libyenne».
Par ailleurs, la presse internationale nous apprend ce vendredi que l’exclusion du Maroc du dossier libyen se poursuit. Réunis ce jeudi 23 janvier à Alger, les pays voisins de la Libye ont demandé aux Nations Unies d’imposer un embargo sur les armes dans le pays. Au cours de ce meeting, les participants ont souligné que la solution au conflit devait être politique et négociée par et pour les Libyens. La réunion, où l’invitation du Maroc a de nouveau été oubliée,a rassemblé les ministres des Affaires étrangères de l’Égypte, du Soudan, du Tchad, du Niger, de l’Algérie, de la Tunisie et du Mali. Tous ces pays, à l’exception du Mali, ont une frontière commune avec la Libye et tous ont subi les conséquences des combats entre l’ANL et le GEN. Le ministre algérien des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, a déclaré par la suite : «Les participants ont convenu de la nécessité de respecter la souveraineté de la Libye en tant qu’État et d’accepter la légitimité des autorités qui sont acceptées par le peuple libyen». Une déclaration qui assoit la position marocaine, énoncée au début de ce mois par Bourita : «Iln’existe pas de solution militaire au conflit en Libye. La résolution de ce conflit ne peut être que politique et consiste en un consensus entre les différentes factions libyennes dans le cadre de l’intérêt suprême de la Libye et du peuple libyen».
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