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Dé-jeûneurs de Casablanca : entre liberté et respect de la loi

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Arrêtés hier dans un café à Casablanca pendant le Ramadan, les jeunes dé-jeûneurs ont été relâchés. Toutefois, les filles ont été examinées, une par une, pour vérifier la légitimité de leurs paroles, notamment si elles ont un motif valable qui explique la rupture du jeûne. Ce qui a fait polémique et a suscité l’indignation sur les réseaux sociaux. La loi au Maroc interdit ce genre de pratique, et prévoit même des pénalités. S’agit-il d’une liberté de culte ou d’une atteinte à la liberté de l’autre ? Cet article de loi s’applique-t-il dans tous les endroits et de la même manière pour tous les Marocains ?

Le jeûne du Ramadan est caractérisé par une série de rites, notamment l’abstinence soustoutes ses formes. Entre le lever et le coucher dusoleil, il ne faut ni boire, ni manger, ni fumer, ni avoir derapports sexuels. Au Maroc, la réalité est qu’une majorité semble d’accord pour jeûner et consacrer ce mois sacré à la prière et à l’abstinence.L’autre partie choisit, par conviction ou par obligation, de ne pas suivre le même rite.

Hier, le 27 avril 2022, la police a interpellé plusieurs personnes soupçonnées de non-respect du jeûne du Ramadan. Les clients et les employés d’un café à Casablanca ont ainsi été arrêtés au milieu d’un grand rassemblement public de citoyens. De fait, il a été rapporté que les forces de sécurité ont arrêté uniquement les « dé-jeûneurs ». Les personnes qui utilisaient l’espace pour travailler, ainsi que les étrangers, n’ont pas été interpellés par la police. En outre, ce café offrait ses services aux clients depuis plusieurs années durant le mois de Ramadan.

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Ce que dit la loi concernant la rupture du jeûne pendant Ramadan

Concernant les espaces publics, l’article 222 du Code pénal stipule qu’il est interdit de manger, boire ou fumer en public, en plein jour, pendant le mois sacré. Introduite à l’époque coloniale, cette mention légale vise à préserver l’ordre public. Considéré comme un « scandale »par certains sur les réseaux sociaux, ce n’est pas la première fois que ce genre d’indignations, relatives à l’application de cette loi, fait rage. En 2010, l’action de quelques jeunes activistes marocains, du Mouvement alternatif pour les libertés individuelles (MALI), pour contester l’article 222, attire une attention démesurée de la part des autorités marocaines et des médias nationaux et internationaux.

En outre, l’article 222 du Code pénal met en place des punitions pour les « dé-jeûneurs »pendant le mois de Ramadan, et qui n’ont pas de motifs valables. Selon la loi, «celui qui, notoirement connu pour son appartenance à la religion musulmane, rompt ostensiblement le jeûne dans un lieu public pendant le temps du Ramadan, sans motif admis par cette religion, est puni de l’emprisonnement d’un à six mois et d’une amende de 200 à 500 DH».

Pour Youssef Chehbi, avocat et militant associatif, ce que les jeunes arrêtés à Casablanca ont subiest inadmissible aujourd’hui au Maroc. «Tout le monde connait l’article 222 du Code pénal qui interdit de rompre le jeûne dans les endroits publics pendant le Ramadan. Sur le plan juridique, ce qui a été interdit par la loi est clair, mais sur le plan humain et moral, c’est inadmissible», a-t-il exprimé.

En revanche, l’application de cette loine respecte pas le principe de l’équité dans tous les endroits publics du Royaume. L’intervenant souligne que «le problème aussi c’est l’existence d’un texte de loi, comme celui-là, appliqué de manière punitive, et pas équitable». En ajoutant: «Chaque jour, dans certains restaurants connus, comme McDonald et Starbucks, la nourriture est servie tout au long du mois de Ramadan, ce qui explique aussi que les gens mangent ouvertement».

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Il est à noter également que l’indignation des internautes ne concerne pas uniquement l’arrestation de ces jeunes et l’application de cette loi. En effet, les femmes qui étaient présentes lors de l’interpellation devaient montrer, à une policière, si elles étaient réellement en période de menstruation. Celles qui avaient, justement, ce motif pour rompre leur jeûne ont été relâchées. MeChehbi dénonce ce qui est arrivé à ces femmes en affirmant que «le fait que des filles soient examinées par la policière, pour vérifier si elles ont leurs règles ou pas, est un scandale. C’est inadmissible. C’est l’intimité des gens dont on parle ici». Il a comparé même ces pratiques à ce qu’on faisait subir aux femmes en Égypte pendant la révolution de 2011. «C’est inadmissible ce qui est arrivé à ces filles. Leur dire d’enlever leurs habits pour « vérification », c’est honteux. La dernière fois où l’on a assisté à ce genre de drame dans un pays arabe, c’est en 2011, lors de la révolution en Égypte. On disait aux filles de se mettre à nu pour vérifier leur virginité», a-t-il avancé.

Aujourd’hui, les réseaux sociaux sont devenus un moyen pour dénoncer certaines pratiques qui vont à l’encontre des droits humains et ouvrir, ainsi, le débat pour les abolir. Divisant la société en deux clans, ceux qui soutiennent la loi et appellent au respect de « la foi collective », etceux qui appellent au changement et à l’élimination des lois qui portent atteinte à la dignité humaine et aux libertés individuelles.

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