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Ramadan : halte au gaspillage !

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Alors que la moitié du mois sacré s’est déjà écoulée, la surconsommation observée durant les premiers jours de Ramadan n’a pas diminué. Malgré la hausse des prix, la frénésie des achats des produits alimentaires continue et entraîne un gaspillage énorme. Une conduite irresponsable dans un contexte marqué par le spectre d’une crise alimentaire qui se profile à l’horizon.

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Ramadan, mois de l’abstinence et de la modération, devient celui de la surconsommation et du gaspillage. Il suffit de faire un tour dans les souks ou les grandes surfaces pour s’apercevoir que les Marocains achètent plus qu’il ne leur faut. Poissonneries, boucheries, boulangeries et autres commerces de produits alimentaires de toutes sortes sont pris d’assaut par les consommateurs qui forment des queues interminables pour acheter sans compter. Cet excès dans les achats conduit à un gaspillage alimentaire incomparable à celui des autres mois. Une grande partie des aliments finit malheureusement à la poubelle. En Afrique du Nord, les Marocains sont les champions du gaspillage en jetant dans les poubelles 3,3 millions de tonnes de produits alimentaires.

Des chiffres révélateurs

«Le gaspillage alimentaire connait un pic important pendant le Ramadan, pouvant atteindre les 84,8%», selon une étude menée par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et rendue publique en 2015. L’organisation onusienne note que ce comportement irresponsable est lié aux habitudes d’achat des ménages, souvent beaucoup plus importants que leurs besoins. «Beaucoup de plats sont préparés et finissent à la poubelle sans même avoir été consommés en partie», fait remarquer la FAO qui précise que 45,1% des familles marocaines jettent l’équivalent de 60 à 500 DH sur un mois.

Affligeant quand on connait les difficultés des ménages liées à un pouvoir d’achat miné par la hausse des prix. Dans le détail, presque 20% des ménages marocains considèrent qu’ils gaspillent plus ou beaucoup plus qu’il ne faut, et 25,4% estiment que la quantité d’aliments qui finissent à la poubelle est « raisonnable ». Seuls 3,3% disent ne presque rien jeter. En termes de pertes financières, près de 10,7% des familles jettent l’équivalent de 210 à 500 DH, et 42% se débarrassent de l’équivalent de 60 à 200 DH de nourriture mensuellement. Seul 0,8% des ménages gaspillent plus de 510 DH de produits alimentaires. Le pain et les autres produits à base de farine, comme les gâteaux et les biscuits secs arrivent en tête des aliments les plus gaspillés, suivis par les fruits, les légumes, les viandes et les produits laitiers.

Les aliments jetés à la poubelle signifient également un gaspillage des énergies et des ressources naturelles. LeBrief a sondé quelques citoyens au marché du Maârif à Casablanca. La majorité des personnes interrogées se disent conscientes du gaspillage des denrées alimentaires pendant le mois sacré. «La nourriture non consommée atterrit malheureusement à la poubelle. Nous sommes une famille de 12 personnes et les adultes comme les enfants ne veulent pas consommer les restes de la veille», affirme Salima, mère au foyer. Kamal, cadre quadra dans les assurances assure qu’il essaie de consommer modérément, mais qu’il ne peut éviter le gaspillage pendant Ramadan parce que quasiment tous les jours il reçoit des invités. Soufiane, jeune étudiant en médecine, est poursa part plus tranchant: «Comment les Marocains peuvent prétendre se rapprocher de Dieu pendant ce mois sacré et gaspiller autant de nourriture alors que les plus nécessiteux ne mangent pas à leur faim?». Soufiane préconise l’organisation par le ministère des Habous et des Affaires islamiques d’une campagne de sensibilisation dans les mosquées, appelant à une consommation modérée pendant le mois de Ramadan.

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Quant à Farida, jeune mariée, assistante dans un cabinet d’avocat, elle reconnait qu’elle a les yeux plusgros que le ventre. «C’est moi qui suis chargée des courses. Mon mari me reproche toujours d’acheter des quantités trop grandes alors que nous ne sommes que deux à la maison. J’achète toujours l’équivalent des besoins d’une famille de six personnes et je ne cuisine même pas la moitié de ce que j’achète», regrette Farida. Dernier témoignage, celui de Karim, jeune entrepreneur qui a fait ses études au Canada. «À Montréal, je résidais au quartier Hochelaga-Maisonneuve. Dans l’une des rues, la communauté avait installé un réfrigérateur en pleine rue. Les riverains étaient invités à y stocker la nourriture au lieu de la jeter. Tous ceux qui en avaient besoin pouvaient se servir. Pourquoi ne pas penser à des initiatives citoyennes pareilles au Maroc?», s’interroge Karim.

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Lutte contre le gaspillage

À Casablanca, le Conseil de la ville a lancé cette semaine une campagne pour lutter contre le gaspillage et pour limiter les déchets ménagers. Cette campagne pilotée par la société de développement local Casablanca Baia intervient alors qu’un pic de production de déchets est constaté chaque année durant Ramadan. C’est la conséquence directe de l’augmentation de consommation des produits alimentaires.

Àl’échelle nationale, pour limiter les dégâts du gaspillage alimentaire, le Royaume avait lancé en partenariat avec la FAO, un plan d’action de réduction des pertes et du gaspillage alimentaires visant à le réduire de moitié d’ici 2024. Il y a toujours une manière de lutter contre le gaspillage alimentaire. Les associations tentent également de contribuer à cettelutte, à travers la collecte de restes alimentaires des hôtels ou des invendus des commerces pour les redistribuer aux nécessiteux. La Fédération marocaine des droits du consommateur (FMDC) tente de propager une culture de consommation rationnelle pendant le mois sacré.

Le gaspillage alimentaire va à l’encontre des principes de la gestion rationnelle des denrées et nuit à l’économie nationale, soutient la FMDC. De plus, le gaspillage se répercute sur le pouvoir d’achat des ménages puisqu’une forte demande entraîne automatiquement une hausse des prix. Pour Bouazza Kherrati, président de la FMDC, cette situation est due en premier lieu à la méconnaissance des grandes finalités de la religion musulmane, à savoir jeûner pour pouvoir ressentir les besoins qu’éprouvent les plus démunis. Sur ce registre, il a appelé à redoubler d’efforts en matière de sensibilisation des consommateurs marocains au sujet du gaspillage dans une logique de promotion de la souveraineté alimentaire du pays. Mais selon les experts onusiens, la réduction du gaspillage alimentaire passe par une meilleure gestion aussi bien au niveau du commerce de détail, des services de restauration qu’auprès des ménages. Cette mesure pourrait, à elle seule, apporter de multiples avantages, tant pour les personnes que pour la planète.

Les bons gestes pour éviter le gaspillage

Plusieurs applications mobiles téléchargeables proposent des solutions pour lutter simplement contre les excédents alimentaires. Elles vont du recensement des prix cassés (de 30 à 70%) sur les produits proches de leur date limite de consommationaux recettes faciles pour «recycler» la nourriture. Ce qui revient souvent, c’est que la meilleure façon de lutter contre le gaspillage alimentaire consiste à adopter de nouvelles habitudes de consommation. Voici quelques conseils pour limiter le gaspillage de nourriture:

  • Commencez par planifier vos achats de denrées alimentaires et n’achetez que ce dont vous avez besoin.
  • Évitez de faire vos courses lorsque vous avez faim ou que vous êtes pressé, car la possibilité d’être amené à acheter des produits inutiles augmente.
  • Réutilisez les épluchures de légumes et autres parures de poisson ou de viande pour des bouillons ou des soupes. Congelez les surplus d’aliments cuisinés en portions individuelles ou partagez-les avec votre famille. Ainsi, vous économiserez de l’argent et éviterez le gaspillage.
  • Réutilisez le pain de la veille pour les toasts ou le petit-déjeuner.
  • Organisez votre garde-manger et votre réfrigérateur en fonction de la date de péremption des produits et donnez la priorité à la consommation d’aliments qui seront bientôt périmés.

Le phénomène du gaspillage alimentaire constitue un problème à la fois alarmant et coûteux aux niveaux environnemental, social et économique. Pendant les années 1990, feu Hassan II a profité de l’un de ses discours à la nation pour sensibiliser les Marocains au recyclage de la nourriture. Il avait raconté comment à Dar El-Makhzen, ils utilisaient le reste du pain sec pour préparer un plat (hlattou) similaire au couscous.

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Mais les consommateurs ne sont pas les seuls responsables de cette situation. Certains produits sont impropres à la consommation à cause de la non-maitrise de la chaîne du froid, notamment les viandes, poissons et produits laitiers. Le ministère de l’Agriculture et de la Pêche maritime et celui du Commerce et de l’Industrie doivent travailler de concert pour limiter la quantité de produits qui sont jetés avant même leur arrivée chez les consommateurs.

Qu’est-ce le gaspillage alimentaire? Le gaspillage alimentaire désigne la diminution de la quantité ou de la qualité des aliments résultant des décisions et des mesures prises par les commerçants, les fournisseurs de services de restauration et les consommateurs. Le gaspillage alimentaire concerne les aliments éliminés dans le commerce de détail ou jetés par les consommateurs. On estime que le gaspillage alimentaire est notamment le fruit d’une méconnaissance de la signification des dates inscrites sur le produit par le consommateur, de la non-adéquation des produits à des normes de qualité ou d’apparence strictes et de mauvaises pratiques d’achat et de conservation par les consommateurs. Les principaux leviers identifiés pour réduire le gaspillage reposent en grande partie sur la sensibilisation des consommateurs à des pratiques d’achat mieux maîtrisées, la valorisation complète des aliments ou une meilleure communication des impacts environnementaux et économiques liés au gaspillage alimentaire.

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